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 Antoni Casas Ros

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Chatperlipopette
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MessageSujet: Antoni Casas Ros   Antoni Casas Ros EmptySam 13 Déc 2008 - 8:17

(Pas de photo de l'auteur)

Antoni Casas Ros est né en Catalogne française de mère italienne et de père catalan.
A la suite d'un accident, il interrompt ses études de mathématiques. Il vit alors une longue traversée du désert qui se concrétise par la rédaction de son premier roman Le théorème d'Almodovar.
Antérieurement à ce premier roman, il s'est consacré à l'écriture de courtes nouvelles groupées sous le titre Microcosmos.
Antoni Casas Ros a temporairement résidé à Perpignan, avant de s'installer à Rome où il travaille à l'écriture de son prochain roman : Chroniques de la dernière révolution.
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MessageSujet: Re: Antoni Casas Ros   Antoni Casas Ros EmptySam 13 Déc 2008 - 8:27

"Le théorème d'Almodóvar"

« Le théorème d'Almodóvar », premier roman d'Antoni Casas Ros, relève du genre littéraire connu sous l'appellation d' « autofiction » puisque le narrateur et personnage central du récit y est en effet Antoni Casas Ros lui-même.
Évoluant donc dans ce domaine de l'autofiction, le lecteur fait ici la connaissance d'un Antoni Casas Ros, jeune mathématicien défiguré suite à un accident de la route qui a coûté la vie à sa petite amie.
Depuis lors, Casas Ros vit sa solitude au coeur des grandes villes méditerranéennes : Barcelone, Nice, Naples...villes où il s'installe quelques temps avant de reprendre son errance.

Quand débute son récit, Casas Ros vit à Gênes, il donne par internet des cours particuliers à des élèves qui ne verront jamais le visage « cubiste » de leur professeur. Seul, il vit au milieu de ses livres et projette d'écrire le récit de sa vie.

« Depuis quinze ans, personne ne m'a vu. Pour avoir une vie, il faut un visage. Un accident a détruit le mien et tout s'est arrêté une nuit, à vingt ans. Ma première rencontre avec Newton. Depuis, j'ai lu avec passion, je n'avais pas grand-chose d'autre à faire. De la Vita Nova aux Détectives sauvages, aucun écrit autobiographique ne m'a échappé. Ils représentent une part importante de ma bibliothèque envahie par le roman latino-américain, espagnol, catalan. Je n'ai rien contre les poètes. Je voue à Juarroz une dévotion totale. J'ai beaucoup rêvé d'écrire depuis quelques années, comme si je voulais m'intercaler entre deux livres de ma bibliothèque, Casanova et Celan, mais une superstition m'en a empêché. Un homme sans visage est un pronom indéfini.
Une autobiographie semble être le récit d'une vie bien remplie. Une succession d'actes. Les déplacements d'un corps dans l'espace-temps. Aventures, méfaits, joies, souffrances et fin. Ma vraie vie commence par une fin. Vingt ans ne comptent pas lorsqu'on ignore que tout va s'arrêter là. Pourtant je n'ai pas l'intention d'écrire un premier roman pour faire le récit de mes amours, de mes angoisses inconsistantes, de mon agitation, de mes nuits d'ivresse. Autant lire la vie de Jackson Pollock ou celle de Newton. J'écris uniquement pour comprendre comment une autre fête peut se trouver au centre de l'espace vide. »


Alors Casas Ros va revenir sur les étapes de sa vie, celle d'avant l'accident d'abord, ses années de lycée mais aussi le tiraillement subi entre une mère italienne gauchiste, et un père catalan au passé franquiste.
Puis ce sera sa rencontre fantasmée, après l'accident, avec le cinéaste Pedro Almodóvar avec qui il projettera l'écriture d'un scénario en vue de réaliser un long-métrage relatant l'expérience de sa vie.
Ce sera aussi la rencontre avec Lisa, un jeune transsexuel grâce à qui Casas Ros va retrouver un visage et une identité, redevenir un être palpable et non plus ce fantôme désincarné qui erre la nuit en dissimulant son visage ravagé.

« Il est deux heures du matin, les rues appartiennent à ceux qui hantent les lieux de plaisir et de solitude. C'est l'heure d'un théâtre qui se renouvelle chaque jour et qui voit chaque ombre devenir une composante de cette tragédie futile. Je sens la puissance du désir des hommes, leur crainte, leur violence. Je sens ces regards avides. Le besoin de destruction. C'est sans doute l'élan fondamental de l'homme. Annihiler la beauté. Ensuite peut-être se détendre pour créer quelque chose. On voit cela dans les guerres d'aujourd'hui dont le profond cynisme se révèle par le fait qu'elles sont devenues des sortes d'opération commerciale. On rase, on assassine les populations, puis volte-face, le destructeur devient un aimable philanthrope qui, contrats en main, propose de reconstruire le pays. Il y avait un temps où l'on voulait simplement tuer l'ennemi, lui prendre son bétail, ses citadelles, ses femmes, ses terres fertiles ou une reine à la beauté ensorcelante. Cela semble hautement moral si l'on compare la situation à celle d'aujourd'hui. C'est comme violer un enfant pour le plaisir de lui rendre sa virginité.
Lorsque je déambule, la nuit, mes idées sont noires. Je scrute mon temps avec des yeux de lynx. Je ne vois pas comment sortir de ce moralisme scandaleux qui rend l'action même de tuer massivement presque semblable à un banquet de charité. Plus rien ne nous choque. Nous sommes dans le coma politique, dans l'asthénie du coeur. Le pire, lorsque ces sentiments m'assaillent, c'est que je me vois faisant partie de la meute blafarde. Après tout, je ne fais que me cacher, frôler des segments de vie qui se tordent dans le ciel comme des tuyaux de cuivre chauffés à bleu.
Je suis déséspéré par la contemplation du monde. J'en arrive à regretter ce qu'on appelle la sauvagerie. Il me paraîtrait plus naturel de revenir au cannibalisme, à l'arc, à l'épée, plutôt que de cautionner par mon silence la guerre d'aujourd'hui qui se veut propre. La guerre n'est pas un bilan positif sur un compte en banque.
Ma révolte est inépuisable. Parfois je me dis qu'il m'aurait suffi d'avoir un visage comme tout le monde pour jouir du monde avec insouciance. Après tout, de quoi me plaindre ? Je vois des millions de lits d'hôpitaux avec des fragments de corps à l'agonie, d'enfants mutilés, de corps torturés.
Il y a quelques mois, pris d'un brusque élan, j'ai sorti mon téléviseur sur la terrasse et je l'ai laissé sous la pluie, las non pas des images de mort mais des images mortes. C'est là que cela se passe. Il y a une transfusion d'images mortes à une conscience moribonde et, après ce cocktail de sang, l'apéritif journalier, on passe à table. Dans les pays latins en tout cas. Les Germaniques, Nordiques, Américains dînent avant les informations et deviennent obèses. La graisse des images. Ils sont en fin de digestion à l'heure de l'horreur.

[...]
Il y a quelque chose à comprendre, à faire. Pourquoi sommes-nous révoltés à dix-huit ans, modérés à trente, recyclés à quarante ? J'imagine le contraire ; la révolte devrait grandir au cours de la vie, se développer sans cesse jusqu'à devenir la plus puissante composante du vieillard. Mais que font les vieillards ? Ils ne geignent pas sur le sort du monde, mais sur leur arthrose et leurs petits maux. »

Entre fantasme et réalité, émaillé de réflexions sur la condition humaine et traversé d'images oniriques (on y verra même un cerf égaré en pleine ville – celui qui été cause de l'accident qui a défiguré Casas Ros – s'installer sur le canapé du narrateur et se gaver de marrons glacés) « Le théorème d'Almodóvar » n'est pas un roman d'un abord facile. Ce récit déconcertant m'a laissé quelque peu partagé, entre attraction et répulsion.
Attraction tout d'abord pour l'écriture très poétique d'Antoni Casas Ros, les nombreuses références scientifiques, cinématographiques et littéraires qui parsèment le récit.
Répulsion ensuite (le mot est un peu fort!) pour cet aspect un peu « branchouille » du récit : Almodóvar, les transsexuels, quelques scènes un peu crues pour faire monter la température du roman, ainsi que cette propension à partir dans tous les sens, à proposer de nombreuses pistes sans les développer et à n'offrir finalement qu'un vaste fourre-tout qui ne manque certes pas de charme et d'intérêt mais qui laisse quand même en fin de lecture une vague impression de lassitude et, dans mon cas, une certaine perplexité.

Pour conclure, ce « Théorème d'Almodóvar » ne laissera personne indifférent. Il séduira certains, en agacera d'autres mais ce qui est sûr, c'est que Antoni Casas Ros nous offre ici un roman très personnel et original, une autofiction décalée et riche en images surréalistes où le lecteur choisira (ou non) d'adhérer et de se laisser emporter par le courant narratif d'un auteur à l'univers atypique.
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MessageSujet: Re: Antoni Casas Ros   Antoni Casas Ros EmptySam 13 Déc 2008 - 9:02

Le théorème d'Almodovar


Antoni est défiguré depuis son accident de voiture, après avoir fêté sa maîtrise de maths, qui a coûté la vie à sa petite amie Sandra. Un cerf a traversé la route, la 4L s'est encastrée dans un arbre, une vie en lambeaux, un corps déchiqueté. Depuis, il vit cloîtré dans son appartement, donnant des cours de maths par internet, faisant de petits boulots de comptabilité parci parlà. Antoni, se cache, ne se regarde plus dans une glace et vit sa solitude malgré lui, malgré les autres.
Un jour, il rencontre Almodovar qui est fasciné par son visage de guinguois, rafistolé et couturé: l'attirance du cinéaste pour les monstres, c'est à dire pour ce qui sort de la norme, est transcrite par l'envie de faire un film sur la vie d'Antoni. Ce dernier, par la même occasion, rencontre Lisa, transsexuel et prostituée, un univers almodovaresque à elle toute seule. Une attirance mutuelle se noue entre Antoni et Lisa, le défiguré et la prostituée au pénis, deux "monstres" aux yeux des autres. Peu à peu Lisa va réapprendre à Antoni la tendresse, l'amour et le regard sur soi-même, sans recul, sans douleur, sans répulsion. Elle lui réapprend la liberté d'être tout simplement.
"Le théorème d'Almodovar" est un roman très bien construit, très bien écrit, qui sait mêler l'onirisme au surréalisme dans des scènes extravagantes, dignes d'Almodovar, où un cerf, vingt ans plus tard, entre dans la vie d'Antoni. Rêve, fiction ou superbe symbole d'une nature diverse et peu regardante sur ce qui l'a fabrique. Le cerf est un vieux sage qui regarde Antoni et Lisa s'aimer avec la majesté d'un roi de la forêt. Le cerf, l'alpha et oméga du visage déstructuré d'Antoni, visage qui n'aura plus besoin de masque pour aller dans la rue parmi les autres.
Cependant, malgré la beauté de la quête amoureuse, de l'initiation, de l'acceptation de soi et de la différence, l'histoire ne m'a pas vraiment touchée. Il faut dire que certaines scènes sont belles mais crues et du coup dérangeantes. En soi, il est intéressant et salvateur d'être bousculé par des images ou des mots mais parfois la "branchitude" prend trop de place au lieu de suggérer.


Un passage que j'ai beaucoup aimé:

"Dans cet autoportrait, j'essaie autre chose. Je tente de regarder le monde jusqu'à ce qu'il révèle sa beauté même si l'opération est étrangement utopique. J'établis le théorème d'Almodovar: il suffit de regarder assez longtemps pour transformer l'horreur en beauté.
La caméra doit tourner depuis deux heures au moins dans le silence resplendissant de mon visage. Il n'y a même pas de place pour une chanson mélancolique, pour le rire de Lisa. Nous sommes au niveau initial de la blancheur de la toile du peintre, de la toile du cinéma, ce qui prouve bien que les cinéastes sont des peintres qui ne s'ignorent pas.
Que reste-t-il de nos amours? Ces traces de visages décomposées en moments extatiques ou douloureux. Des fragments, des collages. Alors peut-on aimer un être dont le visage est déjà un collage? Peut-on le regarder assez longtemps pour que l'amour gicle comme un fleuve qui sort d'un rocher? Non, c'est la conséquence tragique du théorème d'Almodovar: nous avons besoin de géométrie et d'harmonie car il n'y a aucun plaisir à détruire ce qui a déjà subi l'outrage de l'abstraction."
(p 77 et 78 )
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MessageSujet: Re: Antoni Casas Ros   Antoni Casas Ros EmptySam 13 Déc 2008 - 15:05

Merci Biblio pour ce fil.

J'ai trouvé une vidéo ou il y a une jeune femme qui lit une nouvelle de lui - mais avant de la lire elle parle du personnage de l'auteur et pourquoi on ne trouve pas de photo de lui.. même pas son éditeur ne l'a vu apparemment

ICI
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MessageSujet: Re: Antoni Casas Ros   Antoni Casas Ros EmptySam 13 Déc 2008 - 15:17

Et bien vous m'avez donné sacrément envie de le lire en tout cas! A suivre...
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MessageSujet: Re: Antoni Casas Ros   Antoni Casas Ros EmptySam 13 Déc 2008 - 17:23

Je vais tenter l'expérience... content
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Marie
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MessageSujet: Re: Antoni Casas Ros   Antoni Casas Ros EmptySam 3 Jan 2009 - 1:50

Citation :
J'établis le théorème d'Almodovar: il suffit de regarder assez longtemps pour transformer l'horreur en beauté.

Mais le théorème d’Almodovar,écrit Antoni Casas Ros c’est peut être aussi la puissance du monde divisée par mon incapacité à le rencontrer..
Le théorème d'Almodovar ne s'énonce pas d'une seule façon..

Un roman dédié à sa mère, avec en exergue cette phrase du poète argentin Roberto Juarroz: Au centre du vide, il y a une autre fête.

Un texte qui parle de l' apparence,du regard, de ce qu’on voit, croit voir, veut voir.

C’est la pure définition de la joie, de la créativité venue de l’œil, du regard. C’est -ce que j’aime chez les voyous. Ils savent regarder vite et bien. Leur vie en dépend. Il y a trop de nonchalances chez les êtres qui ne sont pas en danger. Leurs sens moisissent. Le vert-de-gris envahit leur vie. Il y a dans les mondes que j’aime fréquenter, les mondes interlopes, une acuité du regard, une brillance, un éclat. Je pense à cette phrase de Balzac citée dans le Petit Robert: «  Le monde interlope des femmes équivoques. » Il y a là une merveille sonore et allusive, et c’est-ce monde qu’Almodovar explore sans jamais se lasser. Son regard sur moi, c’est le regard de quelque un qui sait que le blanc et le noir ne doivent jamais faire du gris, mais vibrer en flirtant outrageusement l’un avec l’autre, ébahis par la soie d’un coup de langue qui toujours abolit le hasard.

J’ai eu un peu de mal à rentrer dans ce livre . Peut être parce que je le trouvais un peu sentencieux au début. Un peu trop. Et puis, je me suis laissée emporter dans cette histoire de renaissance grâce à l'écriture, dont je remets un extrait, vie, mort, et cinéma:



C’est en sortant du cinéma que nous avons vu le cerf. Une petite salle de mon quartier. Il y en a encore. Les fauteuils un peu défoncés. L’odeur antique de tous les rêves, de toutes les peurs, de tous les espoirs de rencontrer l’amour que viennent de vivre les héros. Le désir que notre vie soit enfin grandiose. Que se profile une grande passion même si elle doit nous détruire. Tout grand film nous fait tituber, nous laisse un moment ou une éternité dans cette sensation planctonienne un peu molle, flottant entre deux eaux. Ce sentiment vague que nous pouvons enfin vivre comme un héros, que nous pouvons traverser la vie plutôt que la fuir. Dans ces moments de grâce, nous sentons notre fragilité, nous palpons notre chair indécise, nous permettons au rêve intense de la beauté de surgir et de nous emporter. Puis la peur se profile. La nécessité de garder un cadre, des formes, un fonctionnement social. Je suis ce que tout grand film éclaire en nous, cette possibilité d’agir avec liberté. Qui n’a pas rêvé, en sortant d’une projection, de disparaître? Ne plus voir sa famille, ses amis, de ne plus aller travailler, le lendemain, de ne plus être celui que tout le monde connaît.
Au moment de la mort, nous sommes probablement dans ce même état. Nous imaginons que notre vie aurait pu se libérer du poids des habitudes, de la conformité sociale, de la répétition incessante des mêmes mécanismes de défense. Alors nous touchons au plus absurde. Défendre quoi? J’imagine qu’il faut être sur son lit de mort pour oser répondre. Il n’y a rien à défendre. Nous avons abandonné tous nos rêves. Nous avons vécu en conformité. Nous n’avons cherché que le confort, et, dans cette quête acide, la joie nous a échappé. Toute œuvre d’art réveille en nous ce que l’être a de plus vivant, de plus subversif , de plus libre. La souffrance est intense. On voudrait réécrire le scénario de sa vie. Dans toute existence il semble manquer le drame absurde qui nous engagerait à vivre comme si nous devions mourir demain. Nous allons mourir demain. Personne ne s’en rend compte. C’est cette conscience que le cinéma fait émerger. Nous n’avons pas encore eu le temps d’être un héros. Trop de monde à contenter. Mais vient un instant où nous ne pouvons même plus nous contenter nous -mêmes, et c’est là que la mort devient tragique.
Le destin m’a fait le cadeau de me tuer très tôt pour que je commence à vivre.

Rien que du classique, du dit et redit, bien sûr, mais j’ai trouvé que ce mystérieux Antoni Casas Ros avait souvent une jolie façon de redire.
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MessageSujet: Re: Antoni Casas Ros   Antoni Casas Ros EmptySam 3 Jan 2009 - 13:51

Marie a écrit:
Rien que du classique, du dit et redit, bien sûr, mais j’ai trouvé que ce mystérieux Antoni Casas Ros avait souvent une jolie façon de redire.

Très jolie façon même! Certains voient encore le cinéma comme un art mineur comparé à la littérature, la musique ou la peinture, et il est bon de rappeler qu'il est finalement un autre moyen d'expression et de création capable de la même magie à partir du moment où l'inspiration est aux commandes. Mais il précise bien les "grands" films. J'en profite pour rappeler la citation d'Elie Faure (dont parle Bix sur d'autres fils): "Le cinéma est la synthèse des arts qui les dépasse tous".

Bon allez il faut que je le lise ce "théorème"!
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MessageSujet: Re: Antoni Casas Ros   Antoni Casas Ros EmptySam 3 Jan 2009 - 16:52

kenavo a écrit:
Merci Biblio pour ce fil.

J'ai trouvé une vidéo ou il y a une jeune femme qui lit une nouvelle de lui - mais avant de la lire elle parle du personnage de l'auteur et pourquoi on ne trouve pas de photo de lui.. même pas son éditeur ne l'a vu apparemment

ICI

Je viens de la visionner: son écriture me parle plus que dans "Le théorème d'Almodovar". Serai-je passée à côté de ce livre?
Quoiqu'il en soit, l'extrait de cette nouvelle est d'une sombre beauté poignante.
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MessageSujet: Re: Antoni Casas Ros   Antoni Casas Ros EmptySam 7 Fév 2009 - 17:21

Il me faut maintenant découvrir cette nouvelle car je viens de terminer le très beau (à mes yeux) Théorème d'Almodovar...

LE THEOREME D’ALMODOVAR

« Au centre du vide, il y a une autre fête » : cette phrase énigmatique du poète argentin Roberto Juarroz est au coeur du premier roman d' Antoni Casas Ros qui dit : « J’écris uniquement pour comprendre comment une autre fête peut se trouver au centre du vide ». Et c’est à cette fête que le roman nous invite, disant que le pire même peut être surmonté.

On commence très vite sur des phrases chocs comme celle-ci:

"Pour avoir une vie, il faut un visage. Un accident a détruit le mien et tout s'est arrêté, à vingt ans"

Le narrateur porte le même nom que l’auteur, Antoni Casas Ros, et ce que l’on sait (croit savoir) du jeune auteur donne à penser que ce roman pourrait être largement autobiographique.
L’auteur :
Moitié espagnol par son père moitié italien par sa mère, Antoni Casas Ros vit à Rome. Il est né en 1972 en Catalogne. . «Le Théorème d'Almodóvar» est son premier roman.
Il paraît qu’âgé de 35 ans, il vit toujours reclus, et personne ne l'a jamais rencontré. Son éditeur ne l'a jamais vu. A 20 ans un accident de voiture l'a défiguré. Il explique que l'écriture est devenue pour lui «un baume».
Il fait dire à Antoni dans le roman :
"Depuis 15 ans, personne ne m'a vu. Pour avoir une vie, il faut un visage. Un accident a détruit le mien et tout s'est arrêté une nuit à vingt ans. ma première rencontre avec Newton... J'ai beaucoup rêvé d'écrire depuis quelques années, comme si je voulais m'intercaler entre deux livres de ma bibliothèque, Casanova et Celan, mais une superstition m'en a empêché. Un homme sans visage est un pronom indéfini."

Mais aussi :
"Le destin m'a fait le cadeau de me tuer très tôt pour que je commence à vivre".

Roman ou autofiction ?...Peu importe…De toutes façons, il y a dans cette histoire tout autant de fantasmes que de réalité…Et c’est ce qui fait la merveille ... portée par une écriture mêlant avec brio la science à la poésie.

Nouvel écrivain ou mystification à la Romain Gary? On a avancé les noms de Richard Millet, d’Almodovar lui-même, ou encore d’ Eduardo Mendoza, Thomas Pynchon, Enrique Vila-Matas…Oublions pour ne garder que le plaisir d’apprécier cette œuvre baroque, singulière et puissante!

Antoni Casas Ros a 35 ans. Mathématicien de formation, il passe ses journées sur la terrasse de son appartement à Gênes, fuyant le regard des autres, depuis qu'un accident de voiture, à 20 ans, l'a défiguré. Choc de sa 4L, une nuit, contre un grand cerf qui traversait la route. Sa fiancée en est morte.
Il vit en donnant des cours de maths sur internet et ne sort que la nuit, promenant son «nez désastreux» et son «visage cubiste» dans les ruelles un peu louches de Gênes.

« …J’ai besoin d’un alcool fort pour descendre mes sept étages et me retrouver dans la rue. C’est toujours une épreuve…Un peu comme si je marchais dans un autre monde. Un univers parallèle avec d’autres lois, une autre physique, c’est peut-être ça le théorème d’Almodovar : la puissance du monde divisée par mon incapacité à le rencontrer. Il me faut l’apprivoiser progressivement. Je dois l’effleurer, me glisser à sa surface, le palper comme s’il s’agissait d’un poisson abyssal et monstrueux…Au début, je rase les murs, je marche vite, je ne donne à personne le loisir de s’attarder sur moi. J’évite les zones trop lumineuses. Les ruelles étroites du port me conviennent. C’est le domaine des chats qui filent vite, des adolescents à la recherche d’un mauvais coup, des prostituées, des transsexuels. J’aime la manière dont ces clandestins de la nuit ne s’appesantissent pas. Il y a une légèreté du désespoir qui me touche… »

On pense évidemment à «l'Homme qui rit», à "Elephant Man" ou à Quasimodo.

Que fait Antoni de toute cette solitude ?
- Il lit.
- Il médite !...Sur la forme et l'informe, sur la beauté et la laideur, le normal et le monstrueux, le corps et l'esprit, les théories de newton sur la gravitation et l'attraction des corps …
- Et il rêve !…
Il rêve d’une rencontre avec Almodovar qui réaliserait un film sur sa vie dont il serait à la fois le scénariste et l’acteur.
- Alors il écrit!

Dans ce film d’Almodovar, Antoni vivrait une histoire d’amour avec Lisa, un transsexuel non opéré ("une femme qui a une bite belle comme un Brancusi"), une prostituée qui le réconcilierait avec son image, son désir ("J'ai pénétré dans la douce souplesse de son cul Il y avait une solennité joyeuse. Un étonnement. Une innocence.") et le sentiment amoureux qui le « transfigure » : "Si tu me regardes assez longtemps, tous les jours, je crois que mon visage va se transformer".

L’univers est bien celui d’Almododovar : accident, douleur, érotisme, androgynie..et même surréalisme lorsqu’on verra ressurgir le fameux cerf de l’accident!
Ce dernier arrive un jour tout naturellement dans la ville, suit le couple à la sortie du cinéma, et « gravit les sept étages sans peine» pour venir vivre tranquillement auprès des amoureux…

Sous le regard de Lisa rivée à ses yeux qui furent "épargnés dans leur forme et capacité de voir", sous ses gestes aimants, Antoni définit le théorème d’Almodovar : «Il suffit de regarder assez longtemps pour transformer l’horreur en beauté.». Et découvre aussi le sens de la phrase de Roberto Juarroz : « Au centre du vide, il y a une autre fête ».
Il revient à la vie en même temps qu’il écrit.

Ce premier roman, sidérant, est d’une grande poésie et un régal pour qui aime s’abandonner doucement à l’imaginaire. Il pourrait frôler le voyeurisme ou l’obscène mais il n’en est rien. C’est splendide !
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MessageSujet: Re: Antoni Casas Ros   Antoni Casas Ros EmptyVen 27 Mar 2009 - 12:27

Pour ceux qui veulent continuer avec cet auteur.. ou le découvrir en nouvelles... Wink

Antoni Casas Ros Ae127
Mort au romantisme

Citation :
Présentation de l'éditeur
Une observation précise des oreilles conduit le narrateur à méditer jusqu'à l'hallucination sur le silence; du sucre répandu sur une table évoque un monde secret; l'immobilité d'une jeune fille pendant des heures à une terrasse de café; les rites funèbres d'un club érotique barcelonais; un dictateur se décompose physiquement pendant l'audition de la symphonie de franck ; pourquoi les japonaises ont la peau blanche ; une nuit dans la maison de frida kahlo; l'art d'un faiseur de bulles; une nageuse unijambiste, et bien d'autres anecdotes, choses vues ou entendues, rêves, réflexions, redéfinition du réel, etc.
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