Parfum de livres… parfum d’ailleurs
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 Maylis de Kerangal

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shanidar
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MessageSujet: Re: Maylis de Kerangal   Maylis de Kerangal - Page 7 EmptyMer 23 Avr 2014 - 20:35

topocl a écrit:
Et bien, par exemple un tableau que je vois seul et que je n'aime pas trop, si je le vois dans une expo de l'auteur, les tableaux se répondent les uns aux autres, se bonifient l'un l'autre en quelque sorte. Là, c'est pareil.

Tu as peut-être remarqué une légère tendance chez moi à lire un auteur à fond. Cette façon d'entrer dans l'univers de quelqu'un fait que les livres se répondent, on remarque des choses qui n'auraient pas attiré l'attention autrement. J'ai l'impression d'être en terrain connu, une certaine complicité avec l'auteur.

Et puis, j'avais lu Naissance d'un pont au moment où tout le monde le découvrait et le louait. Dans ces cas-là, j'ai tendance à lire sur le mode critique, que je n'aurais plus maintenant, au contraire.

oui j'avais remarqué ton côté exhaustif et boulimique et je comprends parfaitement tout ce que tu veux dire, surtout la sensation de connaître de mieux en mieux l'univers d'un auteur et du coup d'avoir l'impression de partager une certaine complicité ou des rendez-vous avec lui qui échappent à une lecture unique.

(j'ai vu qu'ils avaient tout plein de livres de Kerangal à la médiathèque, tous empruntés, c'est chouette !)
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MessageSujet: Re: Maylis de Kerangal   Maylis de Kerangal - Page 7 EmptyMer 23 Avr 2014 - 20:57

Chez moi Kerangal n'est pas si bien cotée: il faudra que je les achète peu à peu.
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MessageSujet: Re: Maylis de Kerangal   Maylis de Kerangal - Page 7 EmptyJeu 24 Avr 2014 - 17:50

En discutant de Réparer les vivants, j'entends pour la première fois le nom de Thomas Rémige, l'infirmier qui accouche ce cœur : qui va le chercher au sein du malheur des parents, pour le mener à la vie dans le corps de Claire. C'est la première fois que je l'entends, et non pas que je lis dans ma tête : et je réalise que rémige, ce sont ces plumes essentielles pour qu'un oiseau puisse voler.(C'est lui qui achète le chardonneret, d'ailleurs)
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MessageSujet: Re: Maylis de Kerangal   Maylis de Kerangal - Page 7 EmptyJeu 24 Avr 2014 - 22:21

Dans l'interview au Matricule, Maylis de Kerangal explique qu'elle n'invente jamais aucun nom même Summer Diamantis, nom tellement improbable, est un mix entre une actrice (Summer Phoenix, vue dans un film de Desplechin - Esther Kahn -) et Diamantis, le propriétaire du cinéma rue saint-André-des-Arts qui est le premier a avoir projeté certains films importants.

Je n'ai pas encore lu le livre auquel tu fais référence mais ce que tu dis là, topocl, donne une bonne idée du travail en amont de Kerangal et de l'idée que rien n'est dit au hasard dans cette oeuvre construite par la réflexion et l'empathie.
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MessageSujet: Re: Maylis de Kerangal   Maylis de Kerangal - Page 7 EmptyVen 25 Avr 2014 - 18:04

simla a écrit:

En tout cas j'ai appris que si tu ne veux pas donner tes organes tu dois t'inscrire au registre officiel pour le préciser sinon ils peuvent te les prélever contre ton gré (enfin, une fois mort  rire    du moins, espérons !).....

Le sens que j'y vois, c'est que le geste "normal" est de donner. Mais qu'on a aussi le droit de décider.
L'association des deux est tout à fait réconfortante, je trouve.
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MessageSujet: Re: Maylis de Kerangal   Maylis de Kerangal - Page 7 EmptySam 26 Avr 2014 - 11:09

Pierre feuille ciseaux
avec des photographies de Benoit Grimbert


Ce livre me plait.

D'abord, ce projet des Rencontre chorégraphiques internationales de Seine-Saint-Denis qui organisent avec le chorégraphe  Thierry Thieû Niang  le projet « Mon corps, mon lieu » basé sur des interventions auprès de lycéens, de seniors, d'écoliers de maternelle. Avec lui, Maylis de Kerangal, et le photographe Benoit Grimbert  (son site). Mon corps, c’est la danse, mon lieu, ce sont ces zones urbaines dont nous entendons beaucoup parler, mais que nous ne connaissons pas. Pour les habitants, c'est une rencontre, c’est l’occasion de se dire et se danser.

Maylis de Kerangal - Page 7 Photo211  Maylis de Kerangal - Page 7 Photo311


Comme le nouveau bâtiment des Archives nationales est en train de se construire juste à côté, c'est l'occasion de parler de vie, de mémoire et de racines.

Maylis de Kerangal - Page 7 Img0111

Ensuite la collection Collatéral des éditions( Le bec en l’air ) qui

Citation :
croise littérature et photographie contemporaines en partant du constat que le texte comme l’image est  texte. Ce qui compte, c'est le rapport entre ces deux écritures, le point de tension que la mise en page va révéler.


Enfin il y a Maylis de Kerangal.

Elle nous offre trois histoires pour trois cités… une couturière qui, à la retraite, revient vivre dans la Cité-Jardin de son enfance, et ne la reconnaît plus, y croise des inconnus, des étrangers, en est amère… un couple d'adolescents, au Clos Saint Lazarre, lui tout  fermé d’horizon sous sa capuche, elle l'envie de fuir à Paris, et des baisers entre eux, quoi d’autre ?… une petite fille de La Prêtresse, née en Turquie, qui inventorie en silence ses trésors à la lumière d'une lampe de poche.

Trois histoires qui s'ignorent et se vivent côte à côte, trois histoires où une part de soi est enfermée dans une boîte précieuse. Des existences ordinaires, où, en quelques scènes savamment montées, aux détails judicieusement assemblés et  décortiqués, avec le souffle majestueux de son style ample, Maylis de Kerangal fait surgir des étincelles de vie et de passion.

Le territoire, c’est un lieu clos, où ces  quelques personnages se sentent eux-mêmes. Et qu’ils aient envie d’y revenir, d’y rester ou de le quitter, il est un élément de leur essence-même

Tout cela donne à partir d'une belle aventure, un beau livre, un beau texte, de belles photos, un bel objet, pour une belle émotion.

Maylis de Kerangal - Page 7 30_pfc10  Maylis de Kerangal - Page 7 30_pfc11  Maylis de Kerangal - Page 7 30_pfc12  Maylis de Kerangal - Page 7 30_pfc13  Maylis de Kerangal - Page 7 30_sta10  Maylis de Kerangal - Page 7 30_sta11
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MessageSujet: Re: Maylis de Kerangal   Maylis de Kerangal - Page 7 EmptyJeu 15 Mai 2014 - 21:49

J'avais parlé de Réparer les vivants à une patiente qui aime lire. Juste comme ça, sans trop de détails ni de prosélytisme. Elle a acheté le livre, l'a lu et adoré et depuis me parle des sujets abordés dedans. C'est mon kif du jour. Very Happy 
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MessageSujet: Re: Maylis de Kerangal   Maylis de Kerangal - Page 7 EmptyVen 16 Mai 2014 - 9:16

Dans les rapides

Maylis de Kerangal - Page 7 Talac110

Citation :
A l'automne 1978, nous pénétrons la terre rock via le canyon Blondie avec la fébrilité naïve d'un orpailleur tamisant les rapides.
Quinze ans, ai-je dit, bientôt seize, il est temps.
.

Trois filles, la musique, les fringues, les garçons. Les parents, à condition qu'ils vous fichent la paix.
Comme toutes les autres filles, mais uniques.  
Le temps d'une année, leur amitié scellée autour de Blondie, cette fille qui en veut.
Maylis de Kerangal - Page 7 Talac108

Et une faille qui s'introduit par la faute de Kate Bush.
Maylis de Kerangal - Page 7 Talac109


Une année d'amitié dont on ne sait si ce "schisme" va la consolider ou l'anéantir.

Ca a une petite odeur de nostalgie qui ne s'autorise aucune mièvrerie. C'est comme les joues rebondies et rieuses d'une ado qui aborde la vie d'un pas décidé. C'est brut de décoffrage, abrupt, direct. Une urgence à vivre et une urgence à écrire, comme dans les rapides. Fulgurant et léger comme l'adolescence.
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MessageSujet: Re: Maylis de Kerangal   Maylis de Kerangal - Page 7 EmptyVen 16 Mai 2014 - 10:21

sympa ce commentaire... le livre est à la médiathèque et j'ai failli l'emprunter et puis j'avais envie de savourer encore l'impression de Naissance d'un pont et j'avoue que cette histoire de filles me semblait bien légère... mais léger ne veut pas dire écervelé !
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MessageSujet: Re: Maylis de Kerangal   Maylis de Kerangal - Page 7 EmptyVen 16 Mai 2014 - 11:46

Chez nous, il est à la section ados de la médiathèque; parce que ça parle d'ados, mais c'est très lisible par n'importe qui. Et si tu crains le côté chick litt, ça n'est pas du tout ça.
Ca parle beaucoup du rapport des jeunes à la musique (on voit passer un disque de Neil Young, avis aux amateurs, mais pas de FZ, désolée). Et de ces amitiés inconditionnelles mais éphémères. De la force que ça donne quand on est jeune d'avoir des copines. et de pas mal de choses comme ça.
Et l'héroïne a juste trois ans de moins que moi, ça m'a fait retrouver des sensations, même si j'étais moins audacieuse.
On retrouve cette densité qui semble être une caractéristique de Maylis de Kerangal, cette proximité avec ses personnage, totalement ancrés dans le réel, qu'elle rend aussi captivants que le moindre humain ordinaire.
Et son style tellement incroyable.
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MessageSujet: Re: Maylis de Kerangal   Maylis de Kerangal - Page 7 EmptySam 24 Mai 2014 - 9:25

En ce moment et jusqu'à 10 h sur France Culture, Maylis de Kérangal et "Réparer les vivants".
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MessageSujet: Re: Maylis de Kerangal   Maylis de Kerangal - Page 7 EmptyLun 9 Juin 2014 - 14:56

Réparer les vivants
Un petit chef d’œuvre!
Suivant de bon conseils, je l'avais offert à ma "compagne" qui l'a dévoré et me conseillait de le lire ou du moins ne cessait de m'en dire du bien. Petite appréhension de ma part, mais à le voir là posé sur un meuble, j'ai fini par l'attraper et m'y plonger.

D'abord, les personnages qui en quelques mots prennent vie et place, palpables tant dans l'intime que le professionnalisme. C'est bien là que j'ai ressenti la force de ce livre qui s'attache au traitement d'un matériaux unique. Le respect de son origine et du milieu d'où il est extrait. Tout a été dit de l'écriture de ce récit avec lequel je suis en tout point en accord. Précision, absence de pathos, l'évocation des "si" des possibles, organisation des transferts et profond respect du corps et de l'intime.

Cependant, nous sommes dans le cas extrême du don et sans en attendre ce point fatidique, il est simple aujourd'hui de se déclarer, d'une simple prise de sang, de faire déterminer son typage HLA (avant 50 ans) et peut être un jour de pouvoir offrir un peu de moelle osseuse à une personne en attente de réparer son vivant...
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MessageSujet: Re: Maylis de Kerangal   Maylis de Kerangal - Page 7 EmptyMar 10 Juin 2014 - 12:44

La réflexion par rapport à soi-même que permet ce livre (qui n'est pour autant pas du tout militant) n'est pas la moindre de ses qualités .
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MessageSujet: Re: Maylis de Kerangal   Maylis de Kerangal - Page 7 EmptyMer 11 Juin 2014 - 22:48


Réparer les vivants


Abandonner pour offrir....
 
 Accepter l'idée de l'irréversibilité, de l'impossible retour en arrière.... Il y aura un avant et un après. Le temps a suspendu sa course et il est reparti ... sans lui.... ou avec lui autrement ...
 
 C'est un livre qui palpite entre les mains, où, comme pour un cœur, parfois le rythme s'emballe, d'autres fois explose, ou traîne...
 
L'auteur a cette force d'adapter la cadence de ses mots à ce qu'elle veut nous faire vivre...
 
Son style est indéfinissable, ses phrases longues, très longues, contiennent autant de ramifications que le réseau veineux dans notre corps.... Ça s'étire, se tortille, se resserre, s'allonge à nouveau... Nos yeux restent accrochés aux points, aux virgules....notre  souffle est suspendu....
 
 Et puis quatre ou cinq fois, une réplique, fuse, claque dans toute sa brutalité car là, le style redevient direct.
 
A la ligne, un tiret:
 
- Et pan
 
C'est court, sec, clair, précis, comme un couperet, c'est la réalité, la cruelle réalité, celle que l'on veut réfuter, repousser loin, très loin. C'est Marianne, la mère qui la reçoit la première en pleine face, puis Sean, le père, lui qui a transmis à leur fils l'amour du surf....et qui se sent coupable.
 
Car c'est au retour d'une série de vagues merveilleuses (dont la description est un régal de poésie ) que l'accident a eu lieu... Comment ne pas s'en vouloir de lui avoir donné le goût de ce sport? Comment ne pas en vouloir à la terre entière, à la vie, à la mort? Mais c'est ainsi,  il faut accepter le fait que Simon, le fils,  ne soit plus, bien qu'il respire... Alors va se poser le choix du don d'organes alors que le jeune n'a rien exprimé de son souhait de  donner ou pas de son vivant...
 
C'est là que Thomas, à la tessiture qui sort de l'ordinaire, amoureux du chardonneret de Baïnem, au  nom de famille prédestiné puisqu'il s'appelle Rémige, va entrer dans la vie de cette famille. Un homme humain, simple, qui fait le lien entre les familles de donneurs potentiels et les équipes qui s'occupent des futurs greffés. Il parle peu, occupe l'espace avec délicatesse pour que les parents cheminent, accompagnés jusqu'au bout de leur choix, quel que soit ce que sera la résolution .... Il faut prendre une décision et vite car le temps presse....
 
 C'est avec un vocabulaire ciblé, recherché, documenté sans aucun doute pour la partie médicale que Maylis de Kerangal va au fond des actes liés à la mort clinique pouvant entraîner un don d'organes, fouillant les âmes, plongeant au fond des cœurs aussi.... Tout est dévasté autour de cette famille, Simon les rassemble mais de quelle façon.... Dans la douleur, le chagrin, l'horreur de la situation....
 
 Certains esprits chagrins trouveront que l'auteur a trop décrit, qu'elle en a trop fait sur la partie "hôpital" et que tous les détails n'ont pas lieu d'être, pas plus que ceux donnés sur le quotidien des uns ou des autres qui croiseront la route de Simon ou de ses parents durant ces vingt-quatre heures. Je crois, au contraire, qu'il le fallait pour montrer l'opposition entre la vie qui continue, qui avance, et celle qui s'est figée....
 
 Ce roman sera pour moi un coup de cœur. D'abord pour l'écriture si singulière mais qui m'a parlé au coeur, ensuite pour la façon dont ce douloureux sujet est abordé, sans voyeurisme, sans pathos, et enfin pour l'humanité dont fait preuve l'auteur, posant les phrases, les gestes, comme une délicate évolution vers l'espoir, fil ténu reliant les vivants et les morts, maintenant la vie comme seule réponse à tous les conflits intérieurs face aux questions incessantes qui hantent ceux qui restent....
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MessageSujet: Re: Maylis de Kerangal   Maylis de Kerangal - Page 7 EmptyMar 17 Juin 2014 - 9:46

Réparer les vivants



Simon est un jeune havrais de 19 ans. Passionné de surf, il n’hésite pas à se lever bien avant l’aube en ce matin de janvier pour aller rejoindre, avec deux amis, le littoral du Pays de Caux. Au menu : d’excellentes conditions de vagues !

Au retour, alors qu’on frissonne encore de ce bain de mer glacial, c’est l’accident. Si les deux amis, de part et d’autre de la banquette étaient attachés, Simon, assis au milieu, n’avait pas de ceinture de sécurité. Transféré à l’hôpital du Havre dans un état critique, le jeune homme est bientôt déclaré en état de mort cérébrale.

Et c’est le sujet du livre de Maylis : depuis 1959, la définition de la mort ayant été modifiée, c’est la mort du cerveau – et non plus celle du cœur – qui signe la fin de vie de l’individu. Et la nuance est de taille car elle permet le prélèvement d’organes encore irrigués en vue de transplantations. Bricoler du neuf à partir de matériaux d’occasion, reconstituer un corps viable à partir de morceaux disparates dont la difficulté consistera à les faire cohabiter sans phénomène de rejet.

Les parents de Simon sont dévastés comme on l’imagine. Pourtant, avant même d’avoir pris conscience de la disparition de leur rejeton, on leur demande si la chair de leur chair avait émis – à cet emploi du plus-que-parfait si difficile à admettre – une opinion quant au don d’organes. Avait-il abordé le sujet de sa mort et du devenir de ses viscères ? (A 19 ans ? s’étonne son père… Il n’y a pas d’âge, réplique le médecin). Etait-il généreux de nature ?

Alors que Juliette (la petite amie) attend un coup de téléphone de son chéri avec lequel elle s’est prise le bec la veille au soir et avec lequel elle a hâte de se rabibocher, les parents entament la discussion la plus difficile de leur vie : qu’aurait souhaité leur fils ? Donner ou refuser ? Et eux ? Vont-ils permettre qu’on ouvre leur fils, qu’on le tue une seconde fois ?

On prie tous les Dieux de son Olympe personnel pour ne jamais vivre un tel cauchemar. A lire, cet épisode est déchirant. Et même si l’on n’est pas spécialement superstitieux, on refuse catégoriquement d’imaginer être à leur place. Pas d’empathie démesurée : on veille froidement à rester spectateur ! Et c’est également ce que fait l’auteur. Par une narration lyrique faite de phrases très longues, elle demeure en dehors de l’action. En retrait. Elle est narratrice et souhaite le rester. Avec elle, le lecteur se contente d’observer : il n’a ni la possibilité et encore moins l’envie de s’impliquer dans la douleur de ces gens.

Je regrette toutefois que ces phrases longues aient nui au rythme de l’ensemble. Car si je les ai trouvés dans le ton lors de la séance de surf, elles ne convenaient plus – à mon sens – à l’urgence médicale. Fréquemment, j’ai souhaité accélérer et lu de nombreux passages en diagonale.

Un roman intéressant et instructif. Après avoir évoqué la fragilité de la vie, Maylis de Kerangal décrit les événements qui se succèdent rapidement : les médecins urgentistes, ceux de la réa, la base de données Cristal, les chirurgiens traversant la France à la vitesse de l’éclair, les patients dans l’attente d’une greffe et qui ne pourront être sauvés que par la mort violente d’un inconnu. Cet anonymat du don qui préserve le secret médical. Qui leur permet de se réjouir de l’offre au lieu de culpabiliser vis-à-vis de la famille de la victime. Et de garder la raison.

Beau, instructif, mais dur !
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