Parfum de livres… parfum d’ailleurs
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 Etgar Keret [Israël]

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2 participants
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Igor
Zen littéraire
Igor


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MessageSujet: Etgar Keret [Israël]    Etgar Keret [Israël]  EmptyVen 28 Oct 2011 - 10:15

Etgar Keret [Israël]  Etgar_10

Israélien né le 20 août 1967 à Tel-Aviv.
Considéré comme le chef de file de la jeune littérature israélienne, scénariste de BD (Pizzeria Kamikaze) et cinéaste, il est aussi l’auteur de recueils de nouvelles :
-La Colo de Kneller, récit, Actes Sud, 2001 (adapté au cinéma dans Wristcutters: A Love Story).
-Crise d'asthme, nouvelles, Actes Sud, 2002.
-Un homme sans tête et autres nouvelles, nouvelles, Actes Sud, 2005.
-Fou de cirque, littérature de jeunesse (illustrations de Rutu Modan), Albin Michel, 2005.
-Pipelines, nouvelles, Actes Sud, 2008.
-Au pays des mensonges, nouvelles, Actes Sud, 2011

Avec son premier recueil de nouvelles en 1997, Pipelines, on découvre l’esthétique tragi-comique qui fera le succès de la Colo de Kneller et de Crise d’asthme, bouleversant les codes de la littérature israélienne contemporaine. Dans des récits très courts, où Kafka n’est jamais très loin, Keret en dit plus sur la société israélienne que de longs discours politiques. On retrouve également son univers baroque et irrésistible dans sa bande dessinée Pizzeria Kamikaze. (CNL)

Avec son épouse : Shira Geffen, ils réalisent « Meduzot (les Méduses) », film qui a obtenu la Caméra d’Or au festival de Cannes 2007.
Il a coécrit le scénario du film d'animation Le Sens de la vie pour 9.99$, inspiré de ses nouvelles.

Souces : Wikipédia - Centre National du Livre

Son site officiel : http://www.etgarkeret.com/
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Igor
Zen littéraire
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MessageSujet: Re: Etgar Keret [Israël]    Etgar Keret [Israël]  EmptyVen 28 Oct 2011 - 14:39

Etgar Keret [Israël]  Crise_10
Crise d’asthme
Avant tout, j’avoue ne lire que très rarement des nouvelles. Mais suite à une intéressante émission radio où j’ai découvert cet auteur et la présence en médiathèque de quelques un de ses recueils, je me suis plongé dans « Crise d’asthme » que j’ai littéralement dévoré.
L’ouvrage regroupe quarante-huit nouvelles assez courtes (3 à 4 pages). Dès la première, le ton est donné et nous plonge immédiatement dans un univers très réaliste quasi cinématographique mais qui frôle souvent un abime fantastique parfois loufoque. Toujours dans l’urgence, on a peine à reprendre son souffle entre deux histoires et les pages défilent. La caractéristique principale étant la façon très précise avec laquelle nous est conté chaque scène, parfois violente, souvent tendre mais toujours d’une redoutable efficacité. Les protagonistes sont souvent des enfants et je retiens particulièrement « Casser le cochonnet ».
Et plutôt que du baratin mal maitrisé, la voici afin que vous puissiez juger par vous-même :
(administrateur et modérateurs pourront la supprimer si jamais sa reproduction ici posait le moindre problème au niveau des droits…)

Casser le cochonnet
Mon père n’a pas voulu m’acheter une poupée Bart Simpson. Ma mère voulait bien, mais mon père n’était pas d’accord, il a dit que j’étais un enfant gâté.
« Pourquoi on lui en achèterait, hein ? Pourquoi ? Il suffit qu’il ouvre le bec et tu es déjà au garde-à-vous », a-t-il dit à ma mère.
Il a dit que je n’avais aucun respect pour l’argent, que c’était le moment ou jamais de l’apprendre, compris ? Les enfants à qui on achète immédiatement les poupées Bart Simpson deviennent ensuite des voyous qui volent aux étalages, parce qu’ils s’habituent à avoir tout, tout de suite.
Alors, à la place de la poupée Bart Simpson, il m’a acheté un vilain cochonnet en porcelaine avec une fente plate dans le dos, et à partir de maintenant j’aurais une bonne éducation, et je ne deviendrais pas un voyou.

Maintenant, il faut que j’avale une tasse de chocolat tous les matins même si je déteste ça. Un chocolat avec la crème du lait ça vaut un shekel, sans la crème c’est un demi shekel, et si je vomis après l’avoir bu on ne me donne rien. Les pièces, je les glisse dans le dos du cochonnet, et quand on le secoue, il tinte. Le jour où il sera si plein de pièces qu’il ne fera plus de bruit, j’aurai une poupée Bart sur une planche à roulette. Comme ça c’est éducatif, c’est ce que dit mon père.

Le cochonnet est sympa, il a un nez froid au toucher, il sourit quand on lui glisse un shekel dans le dos, et même un demi-shekel, mais le plus sympa est qu’il sourit même quand on lui glisse rien. Je lui ai même trouvé un nom, je l’appelle Hasenfuss, d’après le nom de quelqu’un qui habitait dans notre boîte aux lettres, mon père n’est arrivé à décoller son étiquette.
Hasenfuss n’est pas comme les autres jouets, il est beaucoup plus calme, il n’a pas tous ces clignotants, ressorts et piles qui coulent à l’intérieur. Il faut seulement le surveiller pour qu’il ne saute pas de la table. « Hasenfuss, fais gaffe ! T’es en porcelaine ! » je lui dis quand je le surprends en train de se pencher un peu pour regarder par terre, il me sourit et attend patiemment que je le descende à la main.
J’adore le voir sourire, c’est pour lui que je bois tous les matins le chocolat avec la crème du lait, pour pouvoir lui glisser le shekel dans le dos et voir son sourire immuable. « Hasenfuss, je t’aime, je lui dis après ça. Je t’assure, je t’aime plus que papa et maman. Et je t’aimerai toujours, même si tu voles dans les kiosques, ça ne fait rien. Mais non d’un chien, ne saute pas de la table ! ».

Hier, mon père est arrivé, il a soulevé Hasenfuss et a commencé à le secouer comme un fou. « Attention, papa, je lui ai dit, tu lui fais mal au ventre. » Mais il a continué. « Il ne fait plus de bruit, tu sais ce que ça veut dire, Yoavi ? Que, demain, tu auras un Bart Simpson sur une planche à roulettes. » « Génial, papa, j’ai dit. Bart Simpson sur une planche à roulettes, génial. Mais arrête de secouer Hasenfuss, il se sent mal. Mon père a remis Hasenfuss à sa place et est allé appeler ma mère.
Il est revenu une minute plus tard, en tenant ma mère d’une main et un marteau de l’autre. « Tu vois comme j’avais raison, il dit à ma mère, il apprend la valeur des choses, n’est-ce pas, Yoavi ? » « Bien sûr, j’ai dit, bien sûr, mais pourquoi ce marteau ? » « C’est pour toi, a dit mon père en mettant le marteau entre mes mains. Mais fais attention. » J’ai dit : « Bien sûr que je ferai attention », mais au bout de quelques minutes, mon père en a eu assez et il a dit : « Alors, qu’est ce que tu attends pour casser le cochonnet ? » « Quoi ? Casser Hasenfuss ? » j’ai demandé. « Oui, oui, Hasenfuss, a dit mon père. Vas-y, casse-le. Tu mérites un Bart Simpson, tu as travaillé assez dur pour l’avoir. »
Hasenfuss m’a adressé un sourire triste de cochonnet en porcelaine qui sait que sa dernière heure a sonné. Au diable Bart Simpson, donner un coup de marteau sur la tête de mon copain ? « Je ne veux pas de Simpson. » J’ai rendu le marteau à mon père : « Hasenfuss me suffit » « Tu ne comprends pas, a dit mon père. C’est bien, c’est éducatif, donne, je vais le casser pour toi. » Mon père a levé le marteau, j’ai regardé le regard brisé de ma mère, le sourire fatigué de Hasenfuss et j’ai compris que j’avais tout sur le dos, que si je ne faisais rien il serait mort.
« Papa », je l’ai attrapé par la jambe. « Quoi, Yoavi ? » a dit mon père, le bras avec le marteau encore en l’air. « S’il te plaît, je veux encore un shekel, je l’ai supplié. Donne-moi encore un shekel à lui glisser dans le dos après mon chocolat de demain. On le cassera demain, c’est promis . » « Encore un shekel ? a souri mon père en posant le marteau sur la table. Tu vois ? J’ai développé la conscience du petit. « Oui. La conscience, j’ai dit. Demain. » J’avais des larmes dans la gorge.

Ils sont sortis de la pièce, j’ai serré très fort Hasenfuss et j’ai laissé couler mes larmes. Il n’a rien dit, mais il tremblait en silence entre mes mains. « T’en fais pas, je lui ai murmuré à l’oreille, je vais te sauver. »
Le soir, j’ai attendu que mon père finisse de regarder la télévision et aille se coucher. Alors, je me suis échappé par le balcon avec Hasenfuss.
Nous avons marché longtemps ensemble en silence jusqu’au moment où nous sommes arrivés dans un champ couvert de ronces. « Les cochonnets meurent dans les champs, j’ai dit à Hasenfuss en le posant par terre dans le champ. Surtout dans des champs avec des ronces. Tu seras bien ici. »
J’ai attendu une réponse mais Hasenfuss n’a rien dit et, quand je lui ai touché le nez en guise d’adieu, il m’a lancé un regard triste. Il savait qu’il ne me reverrait plus jamais.



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MessageSujet: Re: Etgar Keret [Israël]    Etgar Keret [Israël]  EmptyMar 10 Avr 2012 - 15:46

-Crise d'asthme-

Des courtes nouvelles que j'ai picorées par petits bouts et c'est sans doute dommage, elles auraient gagné c'est vrai à se lire d'une traite pour bien en saisir l'effet d'urgence dont parle Igor. C'est en tout cas un ton très particulier, on passe du fantasque au morbide, du tendre au plus trash, en peu de temps et surtout peu de mots.

(Exemple: des gouttes pour ne pas se sentir seul, des rêves qui se vendent en boite et qui font un flop, des huissiers marris qui voient les meubles disparaître, des singes cobayes qui s'amourachent de leur assistante, etc...)

Le lecteur un peu abasourdi est pris à contre pied et forcément ça accroche. Merci Igor pour avoir attiré l'attention sur ce jeune auteur qui manie l'humour et le plus grave, nous faisant toucher du doigt la précarité des choses et par là même l'absurdité de la vie.
A découvrir! (certaines sont bien meilleures que d'autres, comme dans tous les recueils)
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