LE GORET(Frank Pig Says Hello)de
Patrick McCabeEcrivain irlandais contemporain,
Patrick McCabe écrit surtout des romans et nouvelles qu’il adapte souvent lui-même pour le cinéma.
Son roman le plus célèbre :
The Butcher Boy fut récompensé en 1992 par la plus haute distinction littéraire irlandaise.
C’est ce roman qu’il a adapté pour la scène qu’a traduit en français
Séverine Magois.
Le texte de la pièce est paru, sous le titre
Le Goret, en octobre 2012 aux éditions Espaces 34. La traduction a été réalisée avec le soutien de la Maison Antoine Vitez – Imaginaire Irlandais.
« McCabe sait nous raconter cette terrible et sinistre histoire sans jamais tomber dans le mélodrame. Par la forme dramaturgique qu’il a choisie et le rythme de la pièce, il ne nous laisse pas le temps de nous appesantir sur des jugements et des sentiments. On est pris dans un vertige d’émotions brutes, entraînés dans le même funeste tourbillon que le personnage.
Et surtout, l’auteur ne tombe jamais dans l’écueil d’un manichéisme facile. La pièce oscille toujours entre la pitié et la terreur, entre la compassion et l’effroi… et nous sommes pris en permanence dans cette dialectique de la fascination et de la répulsion. Car Frank est à la fois un monstre, un assassin, et un être infiniment fragile et attachant, un enfant en mal d’amour et à l’innocence bafouée dont les appels au secours déchirants et torturés ne seront entendus de personne. » Séverine MagoisLa pièce a été créée en 1992 au Festival de Dublin et a fait l’objet de plusieurs mises en scène.
Le Goret est présenté en France pour la première fois dans une
mise en scène de Johanny Bert (production
Le Fracas, Centre dramatique national de Montluçon – Région Auvergne).
« Le Goret, de Patrick McCabe, n’a jamais été monté en France. J’ai été séduit et bouleversé par cette histoire d’un adulte, Franck, qui raconte, rétrospectivement, sa mutation depuis l’adolescence. Totalement perdu, sans repères, dans un contexte familial compliqué, entre une mère dépressive et un père alcoolique, il n’arrive pas à construire ce qu’il doit être comme adulte. Le texte est écrit en séquences très courtes, la langue est vive : on a l’impression d’une dérive permanente dans le flot de la pensée. A travers le prisme de son regard, on découvre l’histoire de Franck et la folie qui le gagne peu à peu. »Johanny BertAvec une énergie folle, un débit de parole ininterrompue, Franck,
Le Goret, un jeune boucher enfermé dans ce qui pourrait être un asile, dresse le récit morcelé de son histoire, celle d’un « pʼtit cochon » de malheur, dans un monde cruel où « il n’a pas sa place», et ce n’est pas faute d’avoir essayé.
Dans son village d’Irlande du Nord, au début des années 60, Frank était un enfant moqué, méprisé, isolé, surnommé P’tit Goret, à cause d’une malformation.
Sa mère dépressive ne cesse de se pendre ou d’aller «
se faire réparer au garage »…
Son père, musicien raté, est alcoolique.
En mal d’amour et d’attention, le garçon est en demande pressante d’amitié, mais ne connaît que le rejet ou la trahison.
Alors P’tit Goret est en colère, et l’enfant attachant peut devenir féroce face à un entourage aussi hostile.
C’est comme s’il se blindait…comme si peu à peu plus rien ne pouvait l’atteindre…Un petit animal...Il prend les claques du destin et fonce toujours, va de l’avant toujours, mais tellement seul et tellement en colère qu’ il sort du bon chemin…
La seule note de lumière et de couleur dans son récit reste le souvenir merveilleux d’un ciel couleur d’orange un jour aperçu au-dessus de la flaque d’eau glacée
« Le ciel était de la couleur des oranges. Quelqu'un avait peint le ciel en orange. Jusqu'au fin fond de l'horizon. Orange. »Dans la pièce de Patrick McCabe, Franck dialogue avec les figures de son passé, tous ceux qui l’ont blessé, volontairement ou non, et l’ont mené à sa perte.
Le metteur en scène Johanny Bert a pris un autre parti :
« Assez vite, est venue l’idée de faire jouer tous les personnages par un seul acteur : semblent ainsi jaillir de Franck tous ceux qui ont miné son enfance. L’acteur, Julien Bonnet, fait exister les objets par la précision de son jeu et sa maîtrise des techniques de manipulation. Trois techniciens manipulateurs apportent autour de lui des éléments supplémentaires, qui permettent à l’écriture scénique de se créer au plateau. »Johanny BertIl faut rendre hommage, non seulement au metteur en scène mais aussi au « seul acteur » :
Julien Bonnet !Quelle énergie ! Quelle palette d’émotions ! Quelle(s) voix ! Quelle performance !
Avec lui, quatre régisseurs-manipulateurs, dont un musicien en direct, sont ses « servants de scène ».
Photograhies Jean-Louis Fernandez « Comme une rencontre intime avec la folie, l’écriture de McCabe m’a parlé immédiatement de façon brute de la schizophrénie. Franck se cogne à la vie avec une inébranlable gaieté de vivre, jusqu’à ce que les entailles, trop nombreuses, creusent un abîme irrécupérable. C’est son histoire et sa folie qui me fascinent et c’est bien à traversson corps qu’il me semble juste de retranscrire un amoncellement d’autres personnages. Un acteur, seul en apparence, interprète tous les personnages qui le dévorent : formes marionnettiques, prothèses, bouts de viande, objets. Quatre manipulateurs autour de lui dont un musicien électro l’accompagnent. Ombres discrètes ou apparitions fugaces. » Johanny BertJohanny Bert crée ses spectacles à partir de formes marionnettiques sorties de son imaginaire fabuleux, et de comédiens qu’il dirige avec beaucoup de talent. Un théâtre d’acteur et d’objets donc.
Le jeune metteur en scène (30 ans) vient d’être nommé à la direction du CDN de Montluçon.
A suivre….
J’ai trouvé ce spectacle éprouvant mais fort mais magnifique.
Eprouvant par sa noirceur.
Magnifique par sa mise en scène et l’interprétation de Julien Bonnet.
Le récit et la mise en scène sont parfois teintés d’humour mais moi je ne percevais que le fond tragique.
Je crois que
Le Goret va marquer mon esprit pour longtemps.
Johanny Bert parle de son spectacle Le GoretLa tournée passe par :création au Fracas, CDN de
Montluçondu 12 au 18 octobre
vendredi 12, samedi 13, mardi 16, jeudi 18 octobre à 20h30
mercredi 17 octobre à 19h30
Yzeure Espace
mardi 23 octobre
Théâtre de
Cournon d’Auvergnesamedi 27 octobre
Théâtre des Célestins à Lyondu mardi 20 novembre au samedi 1er décembre
Centre Dramatique National de Besançon Franche-Comté
mercredi 5, jeudi 6 et vendredi 7 décembre
La Comédie de Valencedu lundi 18 au jeudi 21 février
Scène Nationale de Dieppele mardi 9 avril
Biennale internationale des Arts de la Marionnette 2013 à Paris en mai (date à préciser)
Le Goret. Le site du Fracas