Parfum de livres… parfum d’ailleurs
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 Philippe Claudel

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Steven
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MessageSujet: Re: Philippe Claudel   philippe claudel - Philippe Claudel - Page 13 EmptyMar 23 Juin 2009 - 23:45

Le rapport Brodeck

Un lecteur utilise quels sens pour lire un livre ? Les yeux tout d'abord, puis une certaine forme d'intelligence... Tous les livres ne nécessitent pas la mobilisation de toutes les parties du corps, ni du cerveau.
Mais celui-là, on peut dire qu'il m'a pris, physiquement, psychiquement, intellectuellement et que j'ai passé du temps à vivre avec lui, à dormir avec lui, à manger en pensant sans cesse à Brodeck, à son village perdu au bout des montagnes, à l'Anderer et à Emelia. C'est une fiction, certes, mais quand je la mets en relation avec des écrits documentaires sur cette période de l'histoire, les atrocités m'xplosent à la figure, deviennent terriblement réelles et donnent une piètre image de l'humanité. Alors, bien sûr, Brodeck cristalise sur sa personne un nombre anormalement élevé d'atrocités, mais c'est tellement réel, tellement en phaes avec ce qu'on peut imaginer chez des gens qui ont peur de mourir et chez qui ne subsistent que l'instinct de survivre, prets à tout pour s'en sortir.
Ce n'est ni les yeux, ni le cerveau qu'il me smeble avoir utilisé pour aborder ce texte. Cette lecture, je l'ai charriée en ayant l'impression de suer, de pleure, de hurler contre les instincts bestiaux de l'être humain.
Un compte-rendu ? Peut-être, mais comme Claudel le fait dire à Brodeck :

Citation :
Il faut avouer que je suis bien désemparé. On m'a chargé d'une mission qui dépasse de très loin mon intelligence. Je ne suis pas avocat. Je ne suis pas policier. Je ne suis pas conteur. Ce récit, si jamais il est lu, le prouve assez, où je ne cesse d'aller vers l'avant, de revenir, de sauter le fil du temps comme une haie, de me perdre sur les côtés, de taire peut-être, sans le faire exprès, l'essentiel.
Quand je relis les pages précédentes de mon récit, je me rends bien compte que je vais dans les mots comme un gibier traqué, qui file vite, zigzague, essaie de dérouter les chiens et les chasseurs lancés à sa poursuite. Il y a tout ce fatras. J'y vide ma vie. Ecrire soulage mon coeur et mon ventre.

Et en lecteur, ce que Brodeck delaisse en écrivant, j'ai l'impression de l'avoir reçu en plein figure. Philippe Claudel a du talent, ça affleure au détour de la moindre virgule et son récit est bien plus construit que ne le laisse paraitre le style qu'il fait adopter à Brodeck.

Au commencement des torments qu'y a-t-il ? La déportation ? Les camps de la mort ? Le sort d'Emélia ? de l'Anderer ? La trahison de Diodème ?

Non, au début il y a la funeste cinquième nuit dans le convoi de la mort qui marquera brodeck et en fera un être résigné, qui subit et accepte tout ce qui lui tombe dessus. Pourtant dans ce train, il a survécut :

Citation :
Nous nous sommes ainsi nourris et abreuvés de mots dans le noir et dans la chaleur puante du wagon, pendant trois jours. La nuit, parfois nous parvenions à dormir un peu mais dès que nous le pouvions, nous reprenions nos conversations. [..]

Comme pour beaucoup de parfumés, ce sera sûrement une lecture inoubliable de mon année 2009...
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Steven
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MessageSujet: Re: Philippe Claudel   philippe claudel - Philippe Claudel - Page 13 EmptyMar 1 Déc 2009 - 12:44

J'abandonne

Petit roman publié en 2000. Petit roman que je ne conseillerai pas aux personnes n'ayant pas le moral, tellement le propos est noir, noir, noir.
Le roman tourne autour de la mort, la mort de l'être cher mais aussi la mort de l'être inconnu, anonyme, voisin ou au bout du monde, accidenté ou génocidé...
Et le narrteur n'en peut plus de ce déferlement de morts, de tristesse qui le submerge à chaque instant, dans sa vie, dans son métier.
Il est une "hyène", chargé d'annoncer la mort de proches à des parents perdus et d'essayer de récupérer un accord pour prélever des organes afin de sauver des vies. Sauf qu'il est à bout, lui même affecté par un décès. Il n'en peut plus de permettre, par son travail, au salaud de continuer à faire le mal, au bon de continuer à faire le bien.
Il n'en peut plus de son collègue, caricature du collègue déplaisant, limite facho, aux idées arrêtées sur tout... Il veut sortir de sa vie.
C'est noir, mais perce une lueur au fond, une petite lueur : une extraordinaire relation père/fille qui l'unit à son petit bout de 21 mois, qui le relie encore à sa vie finalement. Et qui peut-être lui redonnera la force de vivre pour que sa fille puisse un jour pleurer sa mort, lorsqu'il sera très vieux, dans très longtemps.

J'ouvre les yeux
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MessageSujet: Re: Philippe Claudel   philippe claudel - Philippe Claudel - Page 13 EmptyMer 17 Mar 2010 - 11:13

J'ai également découvert Claudel avec La petite-fille de Mr Linh, que j'ai trouvé superbe.

Les âmes grises est dans ma PAL.
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MessageSujet: Re: Philippe Claudel   philippe claudel - Philippe Claudel - Page 13 EmptyLun 31 Mai 2010 - 21:12

Le paquet

Une petite note au début du livre, indique ceci :

Citation :
La pièce a été créée en janvier 2010 au Petit Théâtre de Paris, dans une mise en scène de l'auteur. Le personnage de l'homme était interprété par Gérard Jugnot.

En lisant, je voyais donc Gérard Jugnot en scène !

C'est le monologue d'un homme, un 'peu' mythomane, qui nous raconte des morceaux de sa vie. Il traîne un grand paquet. Il s'assoit sur un banc et se raconte.
Il est persuadé d'attirer les autres. Il se pense irrésistible.
Citation :
J'arrive dans un endroit , et aussitôt, je suis entouré, les gens veulent me voir, parler avec moi, dans le métro c'est pareil. Il me suffit d'entrer dans une rame absolument vide, pour qu'elle se remplisse. C'est incroyable. Une véritable réaction chimique. Je dois être bourré à craquer de phéromones. Je ne vois pas d'autre explication. Même chose au cinéma. J'aime être un peu en avance pour constater le phénomène. Je prends mon ticket, tranquillement, j'entre dans la salle qui est encore déserte, je choisis ma place, et je vous jure qu'une demi-heure plus tard, il n'y a plus un seul siège de libre !
J'ai bien vu, par exemple, que vous tous, vous êtes entrés parce que vous m'avez aperçu.

Il admire l'inventeur du caddie, les supermarchés ...
J'adore son point de vue sur les imbéciles.
Citation :
C'est agréable les imbéciles. Il n'y a pas de quoi rire. Ils sont toujours heureux. Ce sont des leçons de bonheur. Ils nous apaisent. En leur compagnie, on n'est pas obligé de penser, ni de réfléchir. ce sont de grands trous noirs dans lesquels pendant quelques heures on peut plonger et flotter avec délice. On devrait toujours avoir un imbécile avec soi. Et il devrait être remboursé par la Sécurité sociale. Je suis persuadé que si le nombre d'imbéciles au mètre carré était multiplié, ne serait-ce que par deux, les taux de suicide et de dépression diminueraient d'autant. L'imbécile donne de l'espoir. C'est sa mission sur terre. C'est d'ailleurs pour cela que dans bien des pays progressistes et démocrates, nous en élisons un à la tête de l'Etat.

Très vite, on ne peut croire ce qu'il raconte. On s'imagine le pire concernant le contenu de son paquet. Et puis on s'attache. Il fait pitié cet homme seul avec ses mensonges. Plus il en raconte, plus il est pathétique. Il s'enfonce dans ses histoires et il craque ....
On se rend alors compte que, comme lui, nous avons tous un paquet à traîner.

Un livre très court et très plaisant.
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MessageSujet: Re: Philippe Claudel   philippe claudel - Philippe Claudel - Page 13 EmptySam 25 Sep 2010 - 0:45

philippe claudel - Philippe Claudel - Page 13 Arton19260-2c1b4

L'Enquête

Citation :
Comment l’Enquêteur du nouveau roman de Philippe Claudel aurait-il pu s’en douter ? Comment aurait-il imaginé que cette enquête de routine serait la dernière de sa vie ? Chargé d’élucider les causes d’une vague de suicides dans l’entreprise d’une ville qui ressemble hélas à toutes les nôtres, l’Enquêteur est investi d’une mission qu’il doit mener à terme comme il l’a toujours fait.

Tant de romanciers (ré)écrivent toujours le même livre ! Phillippe Claudel, n'est pas de ceux-là et L'Enquête ne ressemble en rien à ce qu'il a publié jusqu'alors. En revanche, et c'est là où le bât blesse, son dernier récit rappelle furieusement un tas d'auteurs spécialistes du fantastique cauchemardesque, à commencer par Kafka ou Huxley.

On croit partir sur un roman évoquant le management déshumanisé des entreprises d'aujourd'hui, et on se retrouve dans un conte plus que noir, délibérément sinistre, parabole à peine retouchée des pires aspects de notre société. Une fable que l'on suit d'abord avec intérêt, Claudel est un maître ès-style, et qui finit par lasser tant il devient répétitif dans le syndrome du héros qui tombe de Charybde en Scylla, ne comprenant plus rien à rien, si ce n'est que ce monde est devenu fou à lier et qu'il n'y a plus que des rues sans issue.

D'oppressant, le livre devient caricatural, avec des personnages désincarnés qui n'ont pas de nom, rien qu'une fonction : L'Enquêteur, Le Policier, Le Psychologue etc. Et le cauchemar infernal se poursuit, sans l'ombre d'une chance d'espérer s'en évader. Ce livre est un rouleau compresseur qui annihile toute tentative de sortie.

Une lecture harassante. Et une démonstration par l'absurde qui finit par tourner à vide, sans âme, elle aussi. Je n'ai pas aimé du tout ce Claudel-là.
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MessageSujet: Re: Philippe Claudel   philippe claudel - Philippe Claudel - Page 13 EmptyLun 27 Sep 2010 - 13:45

traversay a écrit:
philippe claudel - Philippe Claudel - Page 13 Arton19260-2c1b4

L'Enquête

[D'oppressant, le livre devient caricatural, avec des personnages désincarnés qui n'ont pas de nom, rien qu'une fonction : L'Enquêteur, Le Policier, Le Psychologue etc. Et le cauchemar infernal se poursuit, sans l'ombre d'une chance d'espérer s'en évader. Ce livre est un rouleau compresseur qui annihile toute tentative de sortie.

Une lecture harassante. Et une démonstration par l'absurde qui finit par tourner à vide, sans âme, elle aussi. Je n'ai pas aimé du tout ce Claudel-là.

Oui...bof bof...Ce n'est pas très encourageant ...Déjà que son (un de ses?)dernier(s) ouvrage(s) et le film qu'il avait réalisé à partir de cet ouvrage (quel titre?...oublié...)m'avaient profondément déçue... Rolling Eyes
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MessageSujet: Re: Philippe Claudel   philippe claudel - Philippe Claudel - Page 13 EmptyLun 27 Sep 2010 - 14:33

coline a écrit:
Oui...bof bof...Ce n'est pas très encourageant ...Déjà que son (un de ses?)dernier(s) ouvrage(s) et le film qu'il avait réalisé à partir de cet ouvrage (quel titre?...oublié...)m'avaient profondément déçue... Rolling Eyes

Il y a longtemps que je t'aime avec Kristin Scott Thomas. J'avais plutôt bien aimé. C'est surtout Les âmes grises qui était très bon (le roman). Je suis déçu pour ce dernier (L'enquête) qui me faisait envie.
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MessageSujet: Re: Philippe Claudel   philippe claudel - Philippe Claudel - Page 13 EmptyDim 17 Oct 2010 - 17:51

Pour ma part j'ai plutot apprécié l'Enquête, soncôté fantastique, l'absurdité des scènes... Mais la fin... là j'ai pas compris. Ca m'a un peu gâché la lecture.
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MessageSujet: Re: Philippe Claudel   philippe claudel - Philippe Claudel - Page 13 EmptyDim 17 Oct 2010 - 19:29

Marko a écrit:
coline a écrit:
Oui...bof bof...Ce n'est pas très encourageant ...Déjà que son (un de ses?)dernier(s) ouvrage(s) et le film qu'il avait réalisé à partir de cet ouvrage (quel titre?...oublié...)m'avaient profondément déçue... Rolling Eyes

Il y a longtemps que je t'aime avec Kristin Scott Thomas. J'avais plutôt bien aimé. C'est surtout Les âmes grises qui était très bon (le roman). Je suis déçu pour ce dernier (L'enquête) qui me faisait envie.

J'ai vu les deux films et j'ai lu trois ou quatre livre de Ph. Claudel - cela m'a toujours plu et je suis surprise que son dernier ne soit pas prometeur.
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MessageSujet: Re: Philippe Claudel   philippe claudel - Philippe Claudel - Page 13 EmptyLun 18 Oct 2010 - 17:47

Philippe Claudel – L’enquête

Contenu:
Un Enquêteur arrive avec l’ordre d’enquêter sur une série de suicides dans l’Entreprise d’une ville. Mais dès son arrivée tout semble comploter contre lui : même les lieux, les temps échappent au contrôle, se dilatent, fuient. Dans les rencontres avec les gens de la ville, tous seulement désigné par leur fonctions, pas avec un nom, c’est l’arbitraire qui règne, aussi bien dans le mauvais accueil que dans le bon. L’inquiètude, l’incertitude naissent. Comment avancer dans l’enquête ? Où est-ce que le protagoniste principal est en train de découvrir des choses sur soi-même ? Sur quoi s’appuyer ? Peu à peu il devient lui-même une proie dans une machinerie anonyme.

Remarques :
Des personnes et des lieux ne sont pas nommés ; ils restent anonymes, seulement désignés par leurs fonctions, sans donner une vraie identité. Ainsi, dans ce roman surréaliste avec des forts liens avec des réalités sociales, économiques et aussi l’état de l’homme dans cette société, l’homme devient un chiffre, une fonction.
Philippe Claudel ne change pas tellement dans le sens d’une description d’une réalité intolérable (il l’a fait dans les romans de la trilogie et aussi le suicide était déjà apparu dans le roman « J’abandonne »), mais plutôt dans le style, le genre choisi. Il commence avec un récit classique, plutôt réaliste, pour vite changer vers un coté absurde, fantastique. Moi je dirais, qu’il y a un fort coté kafkaesque dans ce récit. Mais on pourrait aussi sans problème retrouver des moyens, des sujets utilisés par des gens comme Orwell (1984), Ishiguro (Les inconsolables) ou Fritz Lang (Metropolis) voir Chaplin (Les temps modernes) etc… Dans ces parallèles ne sont pas tellement les faiblesses du récit, mais je les vois dans une telle volonté didactique que l’auteur semble vouloir expliciter à chaque page l’atmosphère qu’il aurait pu décrire par touches. Il a apparemment besoin d’explication plus lisible que justement un Kafka. Ainsi je me sentais tout le temps pris à la main où ce n’était pas nécessaire.

La personne de l’Enquêteur est vite peint de façon à faire pitié. Bien sûr il est vrai que face aux mécanismes anonymes, les rouages de la société et des entreprises, l’homme se sent démuni, oui, même comme un enfant. On est au bord du gouffre. Pourtant – il y en a une allusion dans le récit – comment ne pas déresponsabiliser cet homme ? Est-ce qu’il est seulement victime ou aussi, dans un certain sens, participant, c’est à dire responsable ? J’y vois une autre faiblesse du récit…

C’est une image amer de notre société, parfois grotesque, voir burlesque. Claudel montre une réalité, il ne donne pas de solution. Mais ceci n’est pas la tâche de l’écrivain, comme il disait lors d’une conférence à laquelle j’ai pu assisté. Occasion de dire qu'il est fort sympathique, ce Philippe Claudel, et que derrière l'apparent pessimisme, ou disons le coté sombre de certains livres, se cache une vraie recherche de sens. Ceci il le fait souvent, selon mon sentiment, par voie d'opposition: il élucide les chemins qui mènent nul part...

Je comprends le point de vue de Traversay. Mais je pense que pour certains lecteurs contemporains un tel roman peut-être plus lisible qu’un Kafka dans l’original. Il est louable que Claudel s’est essayé à autre chose, à un autre approche d’écriture, me semble-t-il. A chacun de juger…

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Steven
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MessageSujet: Re: Philippe Claudel   philippe claudel - Philippe Claudel - Page 13 EmptyVen 22 Oct 2010 - 22:07

Les âmes grises

Dans ce roman, Philippe Claudel nous plonge dans le quotidien de P. petit village à 17 kilomètres de V. - mais 17 km en 1914, c'est quelque chose. A P., nous allons croiser toute une population, nous trouver au coeur de L'affaire, celle qui va défrayer la chronique, celle qui a retourné tout le village : l'assassinat de "belle de jour", fillette du patron du "Bourrache" restaurant réputé de V.
Le narrateur reste longtemps anonyme dans le roman ; au fil des pages tout juste découvre-t-on qu'il est policier, sans doute policier municipal. Au fil des pages que le narrateur écrit fiévreusement, comme pour se décharger du fardeau de toute une vie, sur des carnets qu'il délaisse une fois rempli. L'acte d'écrire est plus important que le devoir de mémoire : il n'écrit pas pour la postérité ; il en est au quatrième carnet, mais ne sait pas où sont les carnets deux et trois.
Avec lui, on avance dans l'affaire, vers sa résolution. Cette avancée est l'occasion de multiples digressions à la rencontre de personnages, protagonistes de premiers plans de l'affaire ou regards passagers qui ont éclairé singulièrement un moment de cette vie qu'essaye de laisser filer ce narrateur. Ces digressions, ces personnages, ces portraits que seul le narrateur semble relier entre eux ont fait mon bonheur. Des personnages avec leur vie, leur poids, leur passé qui les exhorte toujours à avancer, à ne pas se retourner. La guerre, le front qui se trouve à quelques hectomètres de là semblent faire resurgir des penchants inavoués et inavouables chez tous les habitants de P.
On avance, on s'arrète, on semble trouver de la légèreté dans la petite institutrice, si vive et si gaie. Las, la mort vient la cueillir, atroce. Le colonel chargé de l'affaire est un ancien grand homme : dreyfusard convaincu, il a joué sa carrière pour défendre le capitaine. Las, les années ont passées, il ne reste plus qu'un pourri de premier plan qui a oublié qu'il pouvait être bon.
Ces personnages, ce sont eux les âmes grises qui jalonnent le parcours du policier vers la résolution de l'affaire, résolution qu'on sent anecdotique. Car le narrateur, en fin de vie, est entouré des fantômes de cette époque. Les âmes grises tournent sans cesse autour de lui et éclairent son morne présent : car le narrateur a son fardeau à lui, noir, bien plus noir que celui de tous ces personnages. Ce fardeau qu'il nous délivre au fil de ces mots, qui rappellent pourquoi il s'est attaché à cette affaire, se laissant emporter plutôt que de se poser et de regarder sa vie.

Comme souvent Claudel nous amène aux portes de la folie. La mort, le suicide, le désespoir sont bien présents, pesants et pourtant éclairent d'une lumière singulière la vie que déroule devant nous les mots du narrateur.

Citation :
Cette nuit, la neige est tombée pendant des heures. Je l'entendais tandis que je cherchais dans mon lit le sommeil. Ou en tout cas j'entendais son silence, et je devinais derrière les volets mal clos sa blancheur envahissante, qui gagnait en force d'heure en heure.
Tout cela, silence et tapis blanc, me retranche un peu plus encore du monde. Comme si j'en avais besoin ! Clémence l'aimait cette neige. Elle me disait même : « Si elle vient, ce sera le plus bel habit pour notre petit ... » Elle ne pensait pas si bien dire. Le bel habit fut aussi le sien.
À sept heures, j'ai poussé la porte. Le paysage sortait d'une pâtisserie: crème et nuage de sucre partout. l'ai cligné les yeux comme devant un miracle. Le ciel bas roulait ses bosses lourdes sur la crête du coteau et l'Usine, d'ordinaire pétant de rage comme un monstre borgnard,
donnait dans la mélodie gentillette du ronronnement. Un nouveau monde. Ou le premier matin d'un nouveau monde. Comme d'être le premier homme. Avant les souillures, la trace des pas et celle des méfaits. Je ne sais pas trop bien dire. C'est difficile les mots. De mon vivant je ne parlais guère. l'écris de mon vivant comme si désormais j'étais mort. Au fond, c'est vrai. C'est la vraie vérité vraie. Depuis si longtemps je me sens mort. Je fais semblant de vivre encore un peu. l'ai le sursis, c'est tout. Mes pas sont des traîtres pleins de rhumatismes mais qui savent encore très bien ce qu'ils veulent. Me faire tourner en rond. Comme une bourrique attachée à sa meule et qui broie le grain perdu. Me ramener au cœur. Je me suis retrouvé par leur faute au bord du petit canal qui dessinait dans la blancheur un filet vert orné d'étoiles fondantes. l'enfonçais dans la neige et je pensais à la Bérézina. C'est cela qu'il m'aurait fallu peut-être, une épopée, pour me persuader dans le fond que la vie a un sens, que je me perds dans la bonne direction, que là où je vais, c'est droit dans les livres d'histoire, et pour des siècles, que j'ai eu bien raison d'avoir ajourné mon départ, tant de fois, en enlevant au dernier moment le canon de la carabine de Gachentard que je glissais dans ma gorge, les matins où je me sentais vide comme un puits à sec. Le goût du fusil... C’est d’un drôle ! La langue s’y colle. Picotements. Parfums de vin, roches claires.
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MessageSujet: Le rapport de Brodeck    philippe claudel - Philippe Claudel - Page 13 EmptyMer 27 Oct 2010 - 9:01

Le rapport de Brodeck

Pour moi, il m'a fallu une centaine de page pour rentrer dans ce livre. L'ambiance plutôt sombre ainsi que le discours très décousu ne m'ont pas attiré au début de l'histoire. En revanche je me suis attachée, au cours de ma lecture, à ce livre qui est original dans son style, selon moi. Son approche de l'après-guerre est très prenante. Bref, c'est un livre intéressant à lire jusqu'au bout même si parfois le courage vous manque en cours de lecture.
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MessageSujet: Re: Philippe Claudel   philippe claudel - Philippe Claudel - Page 13 EmptyMar 25 Jan 2011 - 22:42

Quelques -uns des cent regrets

Il y a comme une nostalgie apaisante dans ce court roman, d’une pudeur et d’une délicatesse visibles à chaque page. Cela fait tant de bien que de lire des mots aussi doux qu’une caresse……
Par un jour de crue, le narrateur arrive dans une ville du nord, dont on ne connaît rien, pour enterrer sa mère qu’il n’a pas vue depuis 16 ans. Le narrateur ne dit rien de précis sur ce lieu, mais un ou deux indices ne laisseront pas indifférents : la pâtisserie du « merle blanc » si connu des gourmands Nancéens (toute ma jeunesse que ce merle blanc) où le petit garçon mangeait du St Epvre…..douceur bien connue à Nancy. Quelle part d’autobiographie comporte de roman ? Philippe Claudel est Nancéen……
Comme un peintre, notre narrateur, du bout de son pinceau, se laisse aller à ses souvenirs, à ses regrets. De cette mère qu’il a peu connu, qu’il a quittée seize ans auparavant, il va se souvenir avec une infinie tendresse, alors qu’il s’apprête à faire avec elle son dernier voyage. Il était arrivé chargé d’un mystère, qu’il choisira, finalement de ne pas lever, sans regrets.

Un ode à la mère, à toutes les mères ; celles qui sont encore là que l’on chérie, et celles qui ne le sont plus, mais dont on garde à jamais au fond de soi mille et un souvenirs, quelques regrets, un visage qui avec le temps s’estompe, mais ne s’efface jamais.

Merci Monsieur Claudel de cet oasis de douceur teintée de mélancolie mais sans la tristesse .

« Des poux, on en a plein, une mère, on en a qu’une ! »

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MessageSujet: Re: Philippe Claudel   philippe claudel - Philippe Claudel - Page 13 EmptySam 12 Mar 2011 - 9:09

Fan de l'auteur, j'ai abordé récemment ses oeuvres théâtrales. J'avais été relativement déçu par Le Paquet( même pas envie d'en parler) mais quelle joie de "le " retrouver dans "Parle-moi d'amour".Une dispute classique dans un couple, qui va crescendo dans les reproches , frisant parfois l'insulte. Ceux-ci se renouvellent avec une verve fantastique et une puissance d'imagination infinie : on se tord de rire tant cela témoigne également d'un sens aigü de l'observation des mentalités féminines et masculines, portée ici à la caricature.
Un très bon moment, une lecture rapide.
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MessageSujet: Re: Philippe Claudel   philippe claudel - Philippe Claudel - Page 13 EmptyJeu 14 Avr 2011 - 21:50

Je vais ajouter ma petite pierre à ce bel édifice.
Je viens de terminer
"Quelques uns des cent regrets"
16 ans sans revenir sur les lieux de son enfance et de son adolescence. 16 ans qu’il a chassé sa mère de sa vie. Maintenant, 16 ans après, il va assister à son enterrement. Tout lui revient, surtout le secret de sa naissance « je suis né dans un très jeune ventre de seize ans … j’ai fait sombrer une enfant dans le monde des mères. Ma venue l’a fait glisser dans la nuit. La nuit de l’abandon et de l’étroite amertume.

La note de couleur est apportée par la robe aux cerises : « Elle était vêtue d’une robe que je connaissais bien, petite robe d’été aux motifs bouquets de cerises dont elle était jadis si fière », comme ce tableau, dont j’ai tout oublié, sauf cette trouée de lumière sous l’orage. Et bien, cette robe c’est cela : une trouée de bonheur dans la grisaille.

Philippe Claudel, tout en retenue et mélancolique nous parle des liens filiaux, de toutes nos lâchetés, le tout sans pathos. Sa description des personnages secondaires, de ces paumés, l’hôtelier, le curé de la paroisse, nous les rend aimable. Par leur intermédiaire, il nous interpelle. Dure question que pose le curé : « Demandez-vous pourquoi votre mère est morte ! Cette question n’a cessé de me tarauder, une fois les draps tirés sur mes épaules et ma journée d’errance » Et Jos, l’hôtelier ruiné et alcoolique de lui sortir cette belle parabole : Et bien nous autres les hommes, quand on se blesse, ou qu’on blesse quelqu’un, nos perles à nous ce sont les regrets, on se fabrique de beaux regrets, et dans une vie, qu’on soit prince, cordonnier ou sénateur, nos regrets sont écrits sur un grand livre, un superbe livre avec beaucoup d’or et d’enluminures, Le livre des dettes qu’il s’appelle, ils sont écrits et comptés, et chaque fois qu’un regret est écrit, on pleure, on souffre en pensant à lui, mais ça nous donne la force d’aller vers le suivant, et ainsi se passe la vie, de regret en regret, comme un saute-mouton, la vie dans laquelle nous avons cent regrets, pas un de plus, pas un de moins, on peut faire des pieds et des mains, on n’aura jamais droit à plus de cent regrets. »

Le narrateur revient dans son village alors que l’inondation gagne du terrain et enserre le petit village. Est-ce une image, une métaphore, mais la crue enfle et inonde une grande partie du village jusqu’à l’enterrement de sa mère et, lorsqu’il accepte de ne pas ouvrir l’enveloppe, où elle a écrit : « Voilà ce que tu voulais tans savoir » la décrue arrive.

Une ode à l’amour maternel, un livre tout en délicatesse que j’ai beaucoup aimé lire et qui aura une place de choix dans ma bibliothèque, comme tous les autres livres de Philippe Claudel

"le bruit des trousseaux"
11 années durant, Philippe Claudel est allé donner des cours de français en prison et nous livre petits paragraphes par petits paragraphes, comme autant de coups de poings son « faux témoignage » : « voilà, je crois que j’ai tout dit. Tout dit de ce que je savais, de ce que j’ai retenu. Ce peut être un témoignage ou, plus exactement, un faux témoignage, car il me manque quelque chose d’essentiel pour parler de la prison, c’est d’y avoir passé une nuit… » Par ces petits paragraphes Philippe Claudel nous montrerqu’en prison, le facteur temps, l’espace ne sont plus les mêmes, « Le mot cellule : la plus petite unité du vivant. L’espace de l’enfermement. »

Il ne porte aucun jugement dans ces scènes quotidiennes et ordinaires de l’univers carcéral vu des 2 côtés des barreaux. Tout ce livre est emprunt

J’ai lu ce petit livre d’une seule traite et je l’ai beaucoup apprécié. J’y ai trouvé l’humain, comme dans tous les livres de Philippe Claudel.
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