Caroline Strubbe

Caroline Strubbe

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Caroline Strubbe (née en 19651) est une réalisatrice belge. Elle est l’auteure de documentaires tels Une mouche dans la salade, Shocking Manjira and the Cardboard Box et Un 
portrait de la Belgique.
Son premier court métrage de fiction, Melomen, remporte plusieurs prix.
Son moyen métrage Taxi Dancer remporte la mention spéciale du jury à Sundance.
En 2009, elle reçoit le Reflet d’or (Prix compétition internationale) du festival Cinéma Tous Ecrans de Genève pour son premier long métrage, Lost Persons Area sui est également présenté à Cannes dans La semaine de la critique.
Elle est diplômée de l'école cinématographique de Barcelone.

Je profite de la sortie en Belgique du 2e volet de cette trilogie de Caroline Strubbe, I'm the same I'm an other, pour lui créer un fil et recopier le commentaire que j'avais posté à l'époque sur Lost Persons Area.

Lost Persons Area

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Bettina et Marcus vivent un amour passionné et charnel dans une baraque de chantier au milieu d'une plaine traversée d'immenses pylônes haute tension. Tandis que Bettina aspire à une vie plus conventionnelle, loin des fourneaux de la cantine des ouvriers, leur fillette de 9 ans, Tessa, solitaire, s'occupe en ramassant des objets inattendus, petits bouts de rien qu'elle collecte à l'école buissonnière. Un jour, afin de compléter son équipe de techniciens, Marcus engage un ingénieur hongrois, Szabolcs. Contre toute attente, sa venue providentielle amène un nouvel équilibre à leur existence. Mais un tragique accident vient bouleverser les rêves de bonheur de cette famille en quête d'idéal.

Merci au cinéma Le Mélies de Villeneuve d'Ascq de programmer des films rares et plus ou moins passés inaperçus. Ce premier long métrage de la réalisatrice belge flamande Caroline Strubbe, pésenté à Cannes en 2009 à la semaine de la critique, impressionne par la force de son univers et l'originalité avec laquelle elle aborde une histoire en elle-même a priori plus ou moins convenue. Convenue parce qu'on pourrait être quelque part entre Breaking The Waves de Lars Von Trier et les films d'Andrea Arnold avec un canevas scénaristique qui semble emprunter des terrains balisés et plus ou moins prévisibles mais dont le final nous prend pourtant à revers, étonne et dérange en même temps.



L'atmosphère est très réussie. Dans un superbe cinémascope, caméra à l'épaule et avec une certaine fébrilité qui se suspend par moment dans des séquences plus contemplatives et silencieuses, la réalisatrice filme un no man's land de pylônes électriques en plein désert. Des gens dans la galère, des hongrois pour la plupart, viennent chercher un boulot et un peu d'argent à gagner. C'est dans ce cadre aride que se joue ce drame pudique entre un couple fou d'amour et de désir, un jeune ingénieur hongrois réservé et attentif, et une petite fille à la voix rauque qu'elle dissimule, fascinante et touchante, qui observe et ressent chaque tension entre les adultes, qui fait l'école buissonnière et collectionne toutes sortes d'objets (crayons, boutons, savons, ossements, plumes, vêtements...) qu'elle assemble de façon énigmatique comme une future Annette Messager ou une Anu Tuominen (qui est créditée au générique comme influence de ces "installations"). Assemblages qui sont autant de mises en scène de ses angoisses, de tentatives de compréhension des rituels des adultes, de cadeaux à offrir (bouleversante séquence avec l'arbre en boites d'allumettes), de mausolées abstraits surtout.



Caroline Strubbe évite les conventions du mélodrame par une certaine distance avec les moments les plus durs, une justesse émotionnelle entre les trois adultes, et surtout en créant une étrangeté poétique à travers la présence organique de ces objets accumulés par la petite fille qui semblent réorganiser le monde et le sortir du chaos. La musique d'Albert Markos est belle, discrète et très travaillée, offrant notamment des adaptations d'une sonate de Debussy ou un air de Telemann. Peut-être y a-t-il quelques longueurs et le film gagnerait à être légèrement resserré mais en l'état il est superbe et laisse augurer un nouveau talent à suivre.

 


Oeuvres de la finlandaise Anu Tuominen:




 
Interview de la réalisatrice:

I'm the same I'm an other

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L'oeuvre relate le cheminement intérieur d'un jeune homme et d'une jeune fille, interprétés par Kimke Desart et Zoltán Miklós Hajdu, qui s'enfuient ensemble et s'installent en secret dans un petit appartement sur la côte anglaise. Ils se révèlent leur passé, teinté de pertes, et vivent, au jour le jour, unis dans le deuil. Le film forme la deuxième partie d'un triptyque entamé en 2009 avec "Lost Persons Area", avec les mêmes acteurs.

I'm the same I'm another est la suite directe du précédent film qui se terminait dans le drame perçu à travers le regard de Tess, cette petite fille étonnante à la fois créative et un peu autiste, quasi mutique. Nous la retrouvons sur les routes avec Szabolcs, ce trentenaire hongrois qui avait séduit la mère de Tess et voulait les protéger de la violence ambiante avant que celle-ci ne les rattrape. Ils sont donc en fugue et embarquent à bord d'un ferry vers la côte anglaise où ils trouvent refuge dans un appartement d'une station balnéaire désertée. Les même personnages dans leur évolution? A moins qu'ils ne soient autres avec une autonomie qui dispense d'avoir vu la première partie pour l'apprécier.



Pendant 2 heures où les dialogues se réduisent à quelques phrases laconiques disséminées discrètement, nous assistons à la création d'un lien fragile et progressif entre ces deux êtres confrontés au deuil et à la solitude. Le no man's land industriel du premier film a laissé place à ce nouvel espace fantomatique de bord de mer où le format scope, la photographie cafardeuse aux couleurs désaturées dans des tonalités de plomb et la bande son expérimentale créent une atmosphère très singulière et puissante, parfois un peu radicale dans son aspect de cinéma d'avant-garde.



L'action est très ténue et anecdotique mais l'intensité de la mise en scène donne à voir le monde intérieur de cette petite fille avec une poésie et une mélancolie marquantes. On y croise des insectes, un oiseau puis un chaton égaré qui tentent de faire intrusion dans cet appartement fermé sur lui-même comme une prison intérieure.



Pendant que  Szabolcs tente de combler sa solitude et son désir auprès d'une rencontre de hasard, Tess réorganise le monde à travers d'étranges créations comme elle l'avait fait précédemment. Avec tout ce qu'elle trouve autour d'elle, elle met en scène sa douleur et ses espoirs.



Ces deux personnages taiseux laissent la douceur et la joie trouver une petite place entre eux à travers des détails pudiques et merveilleux malgré l'ambiguité que pourrait laisser imaginer cette proximité presque érotisée. Ce corps d'homme très physique et ce petit bout de femme en herbe. Puis survient le final que je ne révèlerai pas...



Il faut prévenir que ce film peut favoriser l'assoupissement par sa lenteur et son caractère mystérieux et intériorisé, expérimental. Certains le trouveront trop artificiel et esthétisant. Mais pour peu qu'on se laisse envoûter par la beauté frappante de ces images et la subtilité du regard porté sur ces personnages, l'expérience pourra se révéler magique. J'ai hâte de voir le 3e volet de la trilogie.

Une campagne de publicité originale pour la sortie de I'm the same I'm an other avec ces jumelles qui distribuaient des invitations un peu partout à Bruxelles et à Gand:

Les photos du film sont incroyables !

Queenie a écrit:

Les photos du film sont incroyables !

Esthétiquement c'est très beau mais ça ronflait sec autour de moi. Probablement un peu trop long (2h) mais je me suis laissé porter par ce rythme étrange et le regard de cette gamine étonnante. Caroline Strubbe a clairement un univers original mais elle devrait se radicaliser un peu moins pour toucher un public moins confidentiel.

J'ai l'impression que la sortie en France n'est même pas annoncée ?!  

Queenie a écrit:

J'ai l'impression que la sortie en France n'est même pas annoncée ?!  

Il vient à peine de sortir en Belgique. Pas gagné pour être distribué en France. Mais j'avais quand même réussi à voir le précédent dans un des ciné-clubs du coin. Il était passé sur Arte aussi. Les distributeurs prennent des risques avec ce genre de films que peu de gens iront voir. Lost Persons area avait été montré à Cannes ce qui était presque une garantie de distribution même confidentielle. Mais il n'est toujours pas disponible en DVD à ma connaissance. A suivre...

Dommage s'il ne sort pas en France, vous m'avez donné envie de le voir.

unmotbleu a écrit:

Dommage s'il ne sort pas en France, vous m'avez donné envie de le voir.

Il faudra guetter une diffusion sur Arte. Los persons area est passé le 13 février 2013 à la télé et je l'avais vu au cinéma en octobre 2010...Dure la vie du cinéma indépendant !