Beautiful Ruins
Nous sommes en 1962 et le jeune Pasquale est propriétaire d'un petit hôtel "The Adequate View" à Porto Vergogna, un minuscule village que son père aurait bien aimé voir rattaché aux Cinq Terres, parce qu'il n'y a pas de raison et qu'en plus, Sei Terre, c’est quand même beaucoup plus facile à prononcer pour les touristes étrangers que Cinque Terre…
Alors il travaille dur à construire une petite plage, et aussi un court de tennis, en taillant dans la falaise, rien de moins. Il a tout prévu (ou presque) parce que les touristes américains, ce qu’ils veulent, c’est pouvoir lézarder au soleil face à la mer et jouer au tennis, c'est la moindre des choses. Et, comme son père avant lui, il a bien l'intention de les faire venir ces américains !
Alors qu'il est les pieds dans l'eau à déblayer sa plage, un petit bateau accoste, et à son bord se trouve justement une américaine. C'est un moment magique pour Pasquale, et il n'en croit pas ses oreilles lorsqu'il apprend que cette belle jeune femme, Dee, actrice dans le film Cleopatra en tournage à Rome, va séjourner chez lui, dans son hôtel. Malheureusement, elle se croit atteinte d’un cancer et espère la visite d’un homme.
On fait ensuite un saut dans le temps pour se retrouver à notre époque, à Hollywood où Claire, petite amie d'un accro au porno et assistante du producteur vieillissant Michael Deane, celui-là même qui a envoyé Dee à Porto Vergogna en 62, espère encore trouver LE script qui lui redonnera confiance dans le 7e art et la convaincra de rester dans le business.
On ne s’arrête pas là, on fait des allers et retours dans le temps, et la connaissance de plusieurs personnages, comme Alvis Bender, un américain qui n’arrive pas à écrire plus loin que le premier chapitre de son livre sur son expérience à la guerre, ou bien Shane Wheeler, écrivain raté qui veut se reconvertir en scénariste. Il espère présenter à Deane son pitch sur l’histoire tragique de ces pionniers du 19e siècle bloqués par la neige et ayant dû recourir au cannibalisme pour survivre (histoire vraie, connue sous le nom de The Donner Party). Il y a aussi Pat, le musicien un peu naïf qui essaie encore de se faire un nom malgré ses déboires et même Richard Burton, personnage à part entière qui nous offre quelques moments savoureux.
C’est un livre très riche en intrigues et personnages. La construction n’est pas linéaire, on visite plusieurs époques (sur une cinquantaine d’années et plus) et lieux (de l’Italie à l’Idaho, en passant par Hollywood d’hier et d’aujourd’hui, l’Angleterre, l’Ecosse, Seattle), on suit des histoires différentes presque à chaque chapitre. On y trouve aussi une pièce de théâtre, un début de roman, des extraits de scripts ou une courte nouvelle. C’est absolument délicieux, très drôle, surprenant, caustique, tendre, touchant et superbement écrit, ce qui ne gâche rien.
Cette lecture a été captivante du début à la fin et m’a donné envie de découvrir un peu plus cet auteur.