Black coal [Diao Yi'nan]

Black Coal

Un divorce ? Un cadavre en morceau, un policier qui devient alcoolique avant de revenir on ne sait pas trop comment, d'autres cadavres en morceaux.... ambiance hivernale et Chine qui a l'air hors du temps entre grisaille, désolation et néons qui flashent.

Des moments très réussis, à base de machines à laver ou de bruits de patins sur la glace comme fond sonore, une image très homogène. Un rythme d'ensemble homogène lui aussi, et qui colle bien au personnage mutique et obstiné du policier (aïe mais pas aussi emballant qu'un Lau Ching Wan des années 90-2000).

Donc ça se voit sans déplaisir, avec un zeste de curiosité mais sans franchement plus. Rien de bien neuf sous l'absence de soleil si ce n'est le décor de Chine continentale. La fin qui tire une ficelle décalée un poil hype renforce l'impression un peu mitigée (pour cet Ours d'Or).

Tou ça ne donne pas vraiment envie d'aller au cinéma....  

animal a écrit:

Black Coal

Un divorce ? Un cadavre en morceau, un policier qui devient alcoolique avant de revenir on ne sait pas trop comment, d'autres cadavres en morceaux.... ambiance hivernale et Chine qui a l'air hors du temps entre grisaille, désolation et néons qui flashent.

Des moments très réussis, à base de machines à laver ou de bruits de patins sur la glace comme fond sonore, une image très homogène. Un rythme d'ensemble homogène lui aussi, et qui colle bien au personnage mutique et obstiné du policier (aïe mais pas aussi emballant qu'un Lau Ching Wan des années 90-2000).

Donc ça se voit sans déplaisir, avec un zeste de curiosité mais sans franchement plus. Rien de bien neuf sous l'absence de soleil si ce n'est le décor de Chine continentale. La fin qui tire une ficelle décalée un poil hype renforce l'impression un peu mitigée (pour cet Ours d'Or).

Les ambiances avec néons sont très bien fichues, la photo est très belle. Yinan Diao fait un film noir tendance Le Faucon Maltais : on ne comprend pas tout, et d'autant moins tout que le réalisateur se fait une spécialité des ellipses (c'est aussi lui qui a écrit le scénario, il fait donc ce qu'il veut).
On comprend à peu près quand même. Côté réalisation, il montre qu'il sait tout faire : caméra subjective très correcte (elle ne donne pas envie de vomir et met du rythme quand il le faut), même si à un moment c'est un peu frime (le début de la deuxième partie, la scène de la moto), mais ça passe ; il sait aussi faire des plans du genre : "ma caméra ne va pas bouger, mais vous allez voir...", et effectivement, la violence pète brusquement, sans qu'on s'y attende, ça fait bam de façon bien forte, bien réaliste, scotchante, c'est pas croyable, on se croirait dans Game of Thrones, ils meurent tous, ou quoi ? Il montre aussi qu'il peut faire de la violence hors champ, violence qu'on voit venir (d'où suspense), et on a envie de prévenir le type qui va se faire buter, ou peut-être buter... Il continue son récital en montrant qu'il sait aussi faire des plans-séquences (la scène de danse), sans ostentation, juste efficace (parce que on perd de vue le méchant, et puis il revient dans le champ, on le remarque à un détail, ça fait Hitchockien, en fait). Il montre aussi qu'il peut filmer une scène en restant sur un gros plan qui suffit.
Il fait un peu tout, et tout bien. Il sait varier.

Donc : scénario inspiré des films noirs compliqués, scènes qui se veulent réalistes mais qui, si on réfléchit deux secondes, sont oniriques (dans la Grande Roue), suspens bien mené, très belle photo, très bonne ambiance, réalisation nickel... tout semble bien, mais le problème est peut-être dans la durée : un livre, on sait s'il reste dix pages ou cent pages. Au cinéma, je ne regarde pas ma montre. Vers la fin du film, j'ai commencé à me dire : "eh bien... ça va finir, il a tout dit, là, non ?" et puis ça continue. Une scène. Et encore une autre. Et une autre... Jusqu'à la dernière, vraiment belle (mais qui signifie quoi, exactement ?). Le film finit par perdre de sa force.

Comme il était dit dans Le Masque et la Plume, le titre, Black Coal, est assez naze. La bonne traduction donne, paraît-il, "Feux d'artifice en plein jour", et ça c'est un bon titre.
C'est vrai aussi que l'acteur principal est bien (on ne sait jamais ce qu'il va faire ; c'est Fan Liao, Prix d'interprétation à Berlin). La fille mystérieuse aussi. Enfin, il y a plein de bonnes choses dans le film.

Il y a quand même un autre truc qui m'a gêné (ou bien est-ce une critique du régime ? peut-être)
Spoiler :

Spoiler:

je ne sais pas. le personnage du flic est tordu. scène sur le quai de la gare au début et autres ensuite. il ne motive pas forcément une sympathie extrême et à un côté manipulateur. sur la vision de la police plus largement il y a le point de départ de tout ça : une façon d'échapper à l'injustice qui implique ensuite une vie en marge. Et puis la progressive sensation d'enrichissement au cours du film : à chaque policier qui part : "héros" au début, son pote/collègue ensuite on a l'impression d'une montée en gamme, renforcée par le magouilleur businessman de la fin ?

animal a écrit:

je ne sais pas. le personnage du flic est tordu. scène sur le quai de la gare au début et autres ensuite. il ne motive pas forcément une sympathie extrême et à un côté manipulateur. sur la vision de la police plus largement il y a le point de départ de tout ça : une façon d'échapper à l'injustice qui implique ensuite une vie en marge. Et puis la progressive sensation d'enrichissement au cours du film : à chaque policier qui part : "héros" au début, son pote/collègue ensuite on a l'impression d'une montée en gamme, renforcée par le magouilleur businessman de la fin ?

Oui, dans le Masque aussi, ils faisaient remarquer que les flics paraissaient "bien" au début mais, à y regarder de plus près, ils n'étaient pas tout à fait des modèles...
C'est sûr que le personnage du flic est particulièrement opaque... Et les ellipses en rajoutent une couche.

Black Coal, Thin ice



Je partage en grande partie votre intérêt et vos réserves sur ce film qui me semble susciter un engouement excessif de la part des critiques malgré des qualités manifestes.

Il y a un excellent climat inspiré des films noirs américains, une photographie soignée, des acteurs principaux impeccables et surprenants par leur ambiguité  (le regard et le visage de cette femme!), des séquences magiques (le final notamment), une intrigue opaque, une belle ellipse temporelle (le tunnel). Mais il y a aussi des longueurs, des seconds rôles qui jouent mal, un labyrinthe scénaristique presque trop obscur, un côté poseur languissant qui m'a poussé à l'assoupissement par moments. L'impression de voir un fragment du magnifique Touch of Sin de Jia Zhang-Ke mais trop dilaté et sans en avoir la richesse et la complexité de fond.

Je n'ai pas vu Train de nuit son précédent film mais je le verrai et je suivrai ce réalisateur même si je n'ai pas été autant transporté que je l'aurais souhaité. Il a quand même un univers intéressant.