Raphaël Jacoulot

Vu ce soir, réactivité immédiate !

Donc polar bien français avec une intrigue qui se tient, des personnages bien figés et murés dans leur silence, un décor qui ne donne pas franchement pas envie d'aller passer des vacances dans les Pyrénées malgré l'hôtel 4 étoiles qui sert principalement de décor à ce film.

Bon j'avoue que sans Jean-Pierre Bacri et Sylvie Testud (extra en fliquette improbable aux vestes polaires couleur tapis de bain, mais très pro et perspicace façon Columbo : je reviens toujours à l'attaque l'air de pas y toucher), je n'aurais pas été spécialement enthousiaste.

L'ambiance est plombante, les trajets de voiture sur routes à lacets enneigées interminables, les pauses cigarette sont tellement nombreuses qu'elle en feraient presque tousser et la musique !!! attention, il se passe quelque chose, c'est sûr, on ne peut se tromper.

mais bon j'étais en famille avec Jean-Pierre et Sylvie, ça m'a suffi.

Avant l'aube

Un film qui a le mérite d'installer une ambiance...Bacri est efficace, Testud aussi grâce à un jeu volontairement décalé, qui désamorce une tension.
Par contre, je n'ai pas du tout été convaincu par le personnage joué par Vincent Rottiers : sa psychologie (la conscience de classe, l'héritage d'un passé) est constamment survolée, et l'acteur ne semble jamais pouvoir s'emparer de son rôle. Il reste dans une colère retenue assez vide, d'où une légitime déception lors de l'épilogue alors qu'il concentre l'essentiel des enjeux.
Quant à la mise en scène de Raphaël Jacoulot, elle abuse en effet largement des plans de voiture (intérieur ou aériens), symbole d'une monotonie et d'un manque d'inspiration.

Avant l'aube

darkanny a écrit:

L'ambiance est plombante, les trajets de voiture sur routes à lacets enneigées interminables, les pauses cigarette sont tellement nombreuses qu'elle en feraient presque tousser et la musique !!! attention, il se passe quelque chose, c'est sûr, on ne peut se tromper.

mais bon j'étais en famille avec Jean-Pierre et Sylvie, ça m'a suffi.

Avadoro a écrit:

Un film qui a le mérite d'installer une ambiance...Bacri est efficace, Testud aussi grâce à un jeu volontairement décalé, qui désamorce une tension.
Par contre, je n'ai pas du tout été convaincu par le personnage joué par Vincent Rottiers : sa psychologie (la conscience de classe, l'héritage d'un passé) est constamment survolée, et l'acteur ne semble jamais pouvoir s'emparer de son rôle. Il reste dans une colère retenue assez vide, d'où une légitime déception lors de l'épilogue alors qu'il concentre l'essentiel des enjeux.
Quant à la mise en scène de Raphaël Jacoulot, elle abuse en effet largement des plans de voiture (intérieur ou aériens), symbole d'une monotonie et d'un manque d'inspiration.

C'est un fil très classique sur une trame qui m'a rappelé (de loin) certains Chabrol. La mise en scène n'a pas son brio mais j'ai passé un bon moment et, à l'inverse, j'ai trouvé Vincent Rottiers pas si mal que ça. Il arrive à émouvoir et à garder une certaine ambiguïté. Il connait la vérité mais veut croire à l'attachement de Bacri, aveuglé par son attrait pour un milieu social qui l'attire. Je ne sais pas s'il est nécessaire que sa psychologie soit davantage élaborée. On en dans l'émotionnel et dans l'instinct, une part de naïveté aussi certainement. Ce qui rend d'autant plus le comportement de Bacri abject. Les plans "à la Shining" ne m'ont pas trop ennuyé par contre... J'ai plutôt aimé.

-Avant l'aube-

Suis tout à fait d'accord avec Marko, la différence est que moi j'ai vraiment aimé. Je retiens plus l'aspect intimiste que son côté polar. L'intrigue est bien amenée, l'ambiance pesante à souhait (elle sert parfaitement le scénario) et les acteurs tous très intériorisés (A part Testud trop marrante en fliquette un peu déjantée et très opiniâtre) mais j'ai bien plus été sensibilisée par ce rapport ambigü, admiration d'un côté, manipulation de l'autre, entre Rottiers/ Bacri, pour être génée par la monotonie ou les lenteurs dont vous parlez. Au contraire tout ceci m'a permis de rentrer complètement dans l'intrigue.

J'ai trouvé Vincent Rottiers vraiment excellent. Comme dit Marko, on est dans l'émotionnel et ce jeune garçon tout droit sorti de prison et qui ne dispose que de son instinct pour détecter les choses, parvient à nous communiquer tout un panel d'émotions avec trois fois rien. Un regard, un sourire, des silences, on est complètement dans son mental. Face à lui Bacri est subtilement retors, on ne saura d'ailleurs pas vraiment s'il élabore son plan pour protéger son fils ou pour éviter un scandale (Je penche quand même pour la 1ère option!) Aucun personnage n'est évident, tous ont un passé lourd, des manques affectifs, et chacun mène un jeu double, entre sentiments et pur intérêt.
(Le fils paraît odieux, mais il a des excuses. Le père est manipulateur mais il est un père avant tout, et le jeune est victime mais il a toujours le choix de se taire ou de parler...)

Bref, un thriller psychologique subtil et puissant qui nous laisse dans l'incertitude et dont en fait la chute importe peu (qui sera finalement condamné?) L'essentiel étant dans cette confrontation entre ces trois hommes et leurs espoirs, leurs secrets et leurs désillusions. Profondément cruel au final...Un petit coup de coeur encore!

Rattrapage DVD :

Sous des allures de thriller, une analyse assez fine des clivages sociaux dans la relation entre un jeune employé d'en bas et un hôtelier d'en haut. Des rapports qui auraient pu d'ailleurs être développés, avec plus de trouble et d'intensité. Il reste une atmosphère naturelle fascinante, les neiges pyrénéennes, et l'excellence du jeu du duo Bacri/Rottiers avec de seconds rôles bien typés. Sympathique.

Coup de chaud

Raphaël Jacoulot confirme une filiation avec Chabrol à travers ce film construit comme une étude de moeurs. Une commune rurale isolée, confrontée à la sécheresse, se crispe face aux agissements de Josef, un jeune homme fragile au handicap mental léger. Une défiance s'impose alors peu à peu, jusqu'au drame.

Un glissement progressif, d'une gêne presque anecdotique vers un malaise angoissant, est décrit avec beaucoup d'efficacité. La prestation de Karim Leklou est aussi un atout car son personnage provoque à chaque scène des émotions mêlées, entre affection et agacement. La crainte d'une violence est toujours en toile de fond mais l'équilibre du village dérape lorsque une suspicion généralisée à l'encontre de Josef s'impose au détriment d'une remise en question collective.

Une enquête policière se greffe au récit mais le film est moins pertinent dans ce registre. Il parvient surtout à révéler une atmosphère, des non-dits et à saisir l'instabilité d'une vie sociale dès lors qu'une altérité n'est plus acceptée.

Même ressenti qu'Avadoro. J'ai passé un bon moment avec les qualités et défauts évoqués. Un film qui met bien à jour toute la mécanique implacable de la désignation d'un bouc émissaire qui est alimentée par une peur viscérale et irrationnelle de ce qui est différent. Et il faut reconnaître qu'il évite une bonne part de manichéisme en donnant à ce personnage une ambiguïté dérangeante (ça semble d'ailleurs le leitmotiv de ses films). Ce jeune acteur est impressionnant. Carole Franck est très bonne également dans un registre d'hystérie puis de culpabilité. La plupart des seconds rôles ont une vrai présence. Et ce patelin a une certaine photogénie qui contribue à l'atmosphère pesante.

Coup de chaud

À mon tour d'avoir bien aimé cette histoire à la Chabrol, Avadoro l'a dit,  chez des paysans acculés au désespoir par la sécheresse.

J'ai été particulièrement touché par l'absence totale de manichéisme de ce film, qui oblige à s'interroger profondément sur soi-même. En effet je n'ai pas trouvé comme Marko que la peur était irrationnelle, cela aurait été trop simple. On commence en effet dans la situation bien typée de ce Josef, fils des ferrailleurs, au handicap mental léger et au comportement discrètement asocial. Et puis, virage est pris quand il agresse une vieille dame, même si les dégâts sont limités… Et alors, même Darroussin,  dans son éternel numéro d'homme simple, sage et profondément humain, commence à se poser des questions.

Et moi aussi : n'aurais-je pas peur moi aussi,  ne pourrais-je pas, moi aussi, un jour, mal réagir ?
Outre une intrigue bien menée, pleine des fausses pistes nécessaires à ce genre de jeu, outre une caméra dont le calme contredit (ou enterrine?) la violence des sentiments ressentis, outre une interprétation remarquable pour des personnages  bien campés mais tout en nuances, ce film nous interroge sur nous-mêmes.

-Coup de chaud-

Vu il y a un moment et oublié d'en parler. Comme vous, j'ai aimé..

Citation :

Mes personnages sont pris dans un engrenage, une nasse qui va se refermer sur eux. Et j’ai le souci de placer le spectateur dans cette tension

Tout est dit dans cette phrase du réalisateur qui s'est inspiré d'un fait divers survenu dans sa région natale. Le comportement d'une foule confrontée à des évènements qui la dépasse et devant lesquels elle se sent impuissante. ici la moiteur responsable de la sécheresse attise les rancoeurs et fait perdre toute humanité.

C'est bien amené, peu à peu la tension se focalise sur Josef, pauvre bougre à la fois touchant et inquiétant, superbement joué par le jeune Karim Leklou. Rien de manichéen dans l'approche, comme vous le soulignez, où les plus compréhensifs finissent par baisser les bras. La lâcheté, la bêtise, la peur collective ...tous les ingrédients vecteurs d' intolérance sont rassemblés dans ce microcosme rural, et le drame peut éclater comme un abcès trop mûr.

J'avais déjà beaucoup aimé Avant l'aube, même atmosphère pesante, même subtilité pour nous amener à nous interroger sur nos propres ressentis, et nos agissements face à ce qui dérange. Un film tout en nuances, à voir!



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