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| Josée Yvon | |
| | Auteur | Message |
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jack-hubert bukowski Zen littéraire
Messages : 5257 Inscription le : 24/02/2008 Age : 43
| Sujet: Josée Yvon Lun 4 Avr 2016 - 9:17 | |
| Josée Yvon (1950-1994) est entrée en littérature par l'entremise d'une photo de son clitoris dans un recueil de poésie de son compagnon de vie Denis Vanier. Cette introduction de son corps dans la construction du personnage littéraire et féministe qu'elle revendique pleinement était mûr pour une contestation des plus radicales. De plus en plus, son oeuvre se détache de celle de son compagnon pour conquérir un espace autonome, notamment dans la littérature des jeunes poétesses du Québec. Ce que je viens d'étayer ne révèle que des barbarismes de sa démarche qui va au fond des choses. Oeuvre (tiré de Wikipedia) : Filles-commandos bandées, Les Herbes rouges, coll. "Les Herbes rouges", 1976. La Chienne de l'hôtel Tropicana, Cul Q, coll. "Exit", 1977. Travesties-kamikaze, Les Herbes rouges, coll. "Lectures en vélocipède", 1980. Koréphilie, avec Denis Vanier, Écrits des forges, coll. "Radar", 1981. Danseuse-mamelouk - récit, VLB éditeur, 1976. Gogo-boy, avec une composition originale de Marie Vigneault, Éditions d'Orphée et Éditions des Ateliers Guillaume, 1983 L'âme/défigurée, avec Denis Vanier, Plaisirs solitaires no 10, Le Castor astral et l'Atelier de l'Agneau, 1984. Maîtresses-Cherokees - récit, VLB éditeur, 1986. , Filles-missiles, Écrits des forges, coll. "Les rouges-gorges", 1986. Travaux pratiques - œuvres critiques complètes, avec Denis Vanier, Éditions Rémi Ferland, 1987. Les Laides otages - récit, VLB éditeur, 1990. La Cobaye - récit, VLB éditeur, 1993. Lettres, Atelier de l'Agneau, 1994. | |
| | | jack-hubert bukowski Zen littéraire
Messages : 5257 Inscription le : 24/02/2008 Age : 43
| Sujet: Re: Josée Yvon Lun 4 Avr 2016 - 10:02 | |
| Filles-missiles (Tiré de Pages intimes de ma peau) : À mon sens, Filles-missiles est le recueil de poésie de Josée Yvon qui se rapproche le plus d'une facture conventuelle de poésie. Il faut voir sa poésie sous le signe d'un manifeste. Sa vie fut une succession de mésaventures et d'excès. Elle défend plusieurs identités marginales et les revendique comme ayant droit de cité. J'ai peu de mots pour décrire ce qui définit la terreur de la poésie de Josée Yvon. Il nous faut tout au plus l'expliquer, l'accompagner. - Josée Yvon, Filles-missiles dans Pages intimes de ma peau, 2015, Trois-Rivières : Écrits des Forges, p. 81. a écrit:
- «Drogue de butch»
Le frigidaire ne garde plus que tes poppers la moutarde la mayonnaise une vieille sandwich piquée au sauna du café instant de la bière en canettes sublimes avec une description méticuleuse du char
Un pénis saignant ne durera jamais comme les Quaaludes
La paranoïa nous guette le rock-ring essentiel et le sang bloque le «shaft»
il n'y a qu'une waitress une old fairy qui a servi dans tous les puits de pétrole
elle se souvient de ton petit nom et tu es ravie mais elle ne sert que de la vinaigrette au roquefort Une telle poésie peut être qualifiée de «coup de poing». Regardons maintenant un autre extrait : - Ibid., p. 94. a écrit:
- «Le complexe de Peter Pan»
à l'aube déchirée de cris de frédériques celles qui tortillent réveillent le coeur quand les vagues lèchent les fenêtres et les orchidées s'absentent sous la première sueur du soleil sous les pages les plus intimes de ma peau
pour celle qui vomit chaque matin l'addiction je la connais trop bien et cette tache mauve crève les longues langues Les images que Josée Yvon utilise sont d'une telle efficacité. - Ibid., p. 99. a écrit:
- «Vagabonde-efficace»
et cette envie du vide étourdit suce comme un aimant
ce grand carré d'espace invite et tremble dans les chèvrefeuilles et les passeroses comme le cléome sans le charme de descendre le pergola. Ne commande plus le doute. Depuis Lucien Francoeur, je n'avais pas ressenti l'emblème de la contre-culture québécoise comme ici : - Ibid., p. 107. a écrit:
- et que vaut ce spasme
une cambrure du dos strate ratatinée une si petite inféodation dans des bras mêlés auront-ils voulu que les brûlures des saillies ne soient qu'au premier degré un si petit meurtre un si petit pays la saga pré-pubère naïve ressuscitée est-elle encore de race ma fille exsangue Je vous livre maintenant des poèmes de la série poétique «La belle nuit des âmes» : - Ibid., p. 121. a écrit:
- «Berserk»
Elle sentait la chèvre ne mangeait que des galettes azyme fille de montagne godasses jupes empilées d'où ne sort que le mollet poilu folle de crinière aussi ramée que les mêlées d'un vieux chêne fille d'un autre siècle elle s'étend dans l'herbe sur le sentier des roches les fleurs s'ouvrent et se ferment lui signalant l'heure
et elle retourne au troupeau je garde encore sa tache de baiser sur le sein Ici, nous reconnaissons les thèmes qui sont communs à sa démarche et à celle de Denis Vanier : - Ibid., p. 126. a écrit:
- «Aveugles-délurées»
petite elle parle à la tarentule à la tourterelle au poisson rouge je l'envie : elle ne comprend pas qui est distance Manon (elle disait) porte des bottes mi-cuisse noires d'où les chaussons mauves dépassent dit «Quinze ans...»
du provolone elle articule mal sous les arcades d'un mauvais mauresque
solitude et école : quand sa petite amie a été écrasée le chauffard a ri Dans le registre de la poésie désabusée, terminons avec cet extrait : - Ibid., p. 129. a écrit:
- brune un chef-d'oeuvre
me comprend sablonneuse
coulent les rizières de sang rye and ginger adorables elles se couchent sur la main comme une caresse mon matou castré prix d'ami râle une demi-odeur de perroquet qu'à prix d'une armée
les héritières ne trouveront jamais Josée Yvon revendique pleinement le contexte d'une vie telle qu'elle se traverse dans les affres de la contre-culture, l'univers des rues et des bars sordides. Nous pouvons ainsi mieux comprendre l'attrait qu'elle exerce chez les jeunes poétesses qui revendiquent une vie plus libre. Sa poésie peut être qualifiée de trash. À ce trait, le sentier qu'elle a ouvert et disséminé peut être qualifié d'une démarche de pionnière dans le domaine d'une littérature féministe résistante. | |
| | | jack-hubert bukowski Zen littéraire
Messages : 5257 Inscription le : 24/02/2008 Age : 43
| Sujet: Re: Josée Yvon Sam 9 Avr 2016 - 5:02 | |
| La chienne de l'hôtel Tropicana (dans l'anthologie de Pages intimes de ma peau) Je continue ma mini-tournée de l'oeuvre de Josée Yvon. Comme toujours, je trouve que sa poésie est brute et très forte dans ses qualités formelles si nous suivons le courant dans lequel elle s'inscrit. Elle a écrit au cours d'une certaine époque et ça n'empêche pas sa plume de rester actuelle même avec un charme légèrement suranné. La poésie est hardcore, on le sait bien... J'aime pratiquer l'intertexte poétique. Chez Josée Yvon, je trouve de la matière sur laquelle puiser... Dans le recueil dont il est question, la poésie est plutôt ample, mais j'ai retenu des extraits qui peuvent être plus compacts et resserrés pour les besoins de l'exercice. Je me coupe rien des pages que je cite, sauf si je le mentionne... - Josée Yvon, La chienne de l'hôtel Tropicana dans Pages intimes de ma peau, 2015, Trois-Rivières : Écrits des Forges, p. 21. a écrit:
- une damnée freak d'étoiles
continue à la frontière du mal de coeur fresque des jeans vite dézippés se munit d'un fix euphorique pour les mères des putains de Laprairie. on ne fait pas la cour bien longtemps à celle qui n'est pas un ange, les spores prêtes à se donner, dans une régie d'alcools pour chats errants.
elle danse démesurément, «Soul Sister» toujours le même disque, comme des huées de football son clitoris lourd pesant sur les mâchoires de la mort. Comme vous pouvez voir, Josée Yvon assume bien le sens de sa quête assez radicale, du moins aux années où elle l'écrivait et dans le contexte du Québec par exemple... - Ibid., p. 35. a écrit:
- ici se pétrifie la fièvre jaune des peaux blanches
les chattes étaient toutes enceintes en avril, comme un goût de peau douce dans les bras de sa blonde Diane, Ginette vient fort, raide et chaud. Ginette pleure quand une fille la crosse : c'est une belle image de cinéma. friction et kérosène, la sueur goûte bon une cow-girl embrasse la hors-la-loi et lui donne refuge. elle enseigne à ses enfants gay de mourir en flamme plutôt qu'infirme. et cruche le cunnilingus bombe folle comme des biscuits Lido Petit Beurre. Josée Yvon était actuelle et très contemporaine dans sa façon de voir les choses. Bien sûr, il y a toujours eu des gays et des lesbiennes un peu à toutes les époques, mais le coming-out a fini par émerger autour de cette période. Ça restait quand même assez tabou... - Ibid., p. 42. a écrit:
- son inévitable smirnoff dans son verre de magicienne
les veines prêtes à déborder comme saillante au printemps très longtemps depuis un repas familial avec la dinde et le trimming l'ozone d'un poing américain se greffe sur l'est assassiné. pour arracher la plogue d'avec le réel elle lèche les miroirs. Elle n'y va pas avec le dos de la cuiller, même si elle en a abusé un peu - au niveau de la consommation de substances... | |
| | | jack-hubert bukowski Zen littéraire
Messages : 5257 Inscription le : 24/02/2008 Age : 43
| Sujet: Re: Josée Yvon Sam 9 Avr 2016 - 5:20 | |
| Je remercie Emmanuel Deraps pour nous avoir guidés dans une introduction à l'univers des blogues littéraires québécois. Il a parlé notamment de la page Les épuisés qui revient sur les classiques littéraires et poétiques épuisés au Québec. Il donne une large part aux Denis Vanier et Josée Yvon... Dans L'Âme défigurée, Josée Yvon a écrit «Défigurée» que voici : - Citation :
- DEFIGUREE
ses ongles de fiber-glass ratourent l’oeil-araignée souffrant frissonnée de plâtre et de jute pour incarner l’horloge qui s’arrête sur l’asphalte de cour d’école déserte elle peint les stratégies-fantasmes de la princesse
on ne fait que se débattre dans des abris, si petite stratosphère accélérée sur une banquise en faux-teck de plantes grasses mauvais design sa fourrure suicidaire brûle un ineffable hameçon trop près de peau elle darde première et neurotise l’ego percé quand morte de ruelle de bar elle épile le sourcil déhanché et silence ses souliers plastic qui heurtent le fond marin
mi-sphinx, mi-motel
dure, tes cils alignés ne reconnaissent qu’un sofa-lit les auriculaires cassés, coup de débouche plein l’épaule si ma colonne pouvait, ça ne serait que dans tes bras
adolescente à tiroir des lunettes teintées l’aile du nez brûlée et la rétine tachée à jamais
ses bas de réchauffement ensorcèlent le pansement gibaud et s’ennuient des fausses amitiés de ce remugle saoul de connotations pendant qu’on asperge les jeunes filles pour qu’elles ne fanent jusqu’à l’an prochain, d’eau de cologne comme un côlon couleuvre pour Gotha, déesse de lumière
le trousseau de la jeune mariée en meubles miniatures la serrure ridicule qui se mimétise encore plus fou que le rire parvenu cette quête-enfant en mal d’estomac où dans certaines noirceurs
sa sensibilité non-parfaite bijou presque dur d’un étrange compromis obscène-obscur bouge encore.
si nuée on dirait pauvre d’allure mais si belle de ses taches nouées qui de peur rebondissent de ses plaies je l’écris en LETTRES CARREES et police je l’arrêterais de suite
mais je place mes gales au cendrier l’oeil me coule d’un drano défunt
j’en ai déjà vu des vraies et toute la campagne s’inquiète se taille le nombril mandala transfigurent les jambes collées pas même riches
effrontée à n’importe quel prix elle a vendu son âme.
Source : https://lesepuises.wordpress.com/2014/02/09/lame-defiguree/ | |
| | | jack-hubert bukowski Zen littéraire
Messages : 5257 Inscription le : 24/02/2008 Age : 43
| Sujet: Re: Josée Yvon Mer 20 Avr 2016 - 7:49 | |
| Dans Koréphile, Josée Yvon est égale à elle-même. Elle admet volontiers pratiquer une forme de provocation dans son idée de luttes entre les sexes. Il y a un poème qui revient tel un mantra pour moi : - Josée Yvon, Koréphile dans Pages intimes de ma peau, 2015, Trois-Rivières : Écrits des Forges, p. 59. a écrit:
- «Pélagie-La-Charrette vengée
par le Klu-Klux-Klan»
«Les étoiles avivées du froid» Alphonse Daudet
je n'écris pas, je soupçonne; ton matelas comme pupitre ÇA SENT LA CHAIR HUMAINE! une hydratation qui fait que je m'habitue à l'anormal contradiction comme une autre. comme s'invective ma vieille sorcière préférée de l'est bonheur excentrique des objets et une si petite révolution Je vous invite à lire «Un 8 1/2 pouces de la rue Ontario» si jamais vous en avez la chance... Je vous laisse sur cette conclusion : - Ibid., p. 69. a écrit:
- déjà nous étions seuls
comme de vulgaires siamois dans toute cette obscène modernité reptiles dans un pot d'épices obscur. je porte mal mon adolescence quand je saute à tes hanches des sutures pour la psychose sous le pont tracassé le miracle ne s'est pas produit; le pâté chinois goûtait le poivre blanc d'amérique et je m'arrache les ongles aimer sans réplique sismographe si bête qu'elle s'essuie la langue. viens prendre ton mascara et la beauté peut bien se ressaisir d'un «lily dancing» pour ne pas les abuser. La poésie demeure très contemporaine dans sa façon de voir les choses. Josée Yvon est très militante de par la manière qu'elle revendique son sexe et c'est pas peu dire... | |
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