Pierre Loti

coline a écrit:

Marko a écrit:

J'avais manqué tes posts sur ces romans. J'ai lu Aziyadé il y a un moment et j'avais apprécié cet orientalisme un peu surrané mais séduisant.

As-tu vu ses dessins?...

Je les découvre grâce à ton fil. J'aimerais trouver une édition de "Roman d'un enfant" ou d'"Aziyade" avec ses illustrations.

Marko a écrit:

coline a écrit:

Marko a écrit:

J'avais manqué tes posts sur ces romans. J'ai lu Aziyadé il y a un moment et j'avais apprécié cet orientalisme un peu surrané mais séduisant.

As-tu vu ses dessins?...

Je les découvre grâce à ton fil. J'aimerais trouver une édition de "Roman d'un enfant" ou d'"Aziyade" avec ses illustrations.

Pour les dessins tu as cet ouvrage qui vient de paraître:
Pierre Loti dessinateur
...Et puis l'exposition...soit tu viens la voir à Moulins...soit tu attends qu'elle arrive à La Piscine (vers chez toi...où?).
On y retrouve par exemple les dessins de son théâtre de Peau d'Âne qui le passionnait dans l'enfance (et l'adolescence!)...on y retrouve aussi toutes ces images des quartiers et des scènes de la vie de Stambul...

coline a écrit:

...Et puis l'exposition...soit tu viens la voir à Moulins...soit tu attends qu'elle arrive à La Piscine (vers chez toi...où?).

A Roubaix

Marko a écrit:

coline a écrit:

...Et puis l'exposition...soit tu viens la voir à Moulins...soit tu attends qu'elle arrive à La Piscine (vers chez toi...où?).

A Roubaix

Ah...Voilà...J'allais dire Douai...

Une commande qui m'a été faite de trois lectures, dans le cadre de l’exposition de ses dessins, m’a amenée à me plonger dans une œuvre que j’aurais probablement continué à négliger.
Je me souvenais vaguement avoir lu il y a très longtemps Pêcheurs d’Islande.
Eh bien j’ai pris plaisir à cette "plongée", à le lire, il écrivait fort bien (il entra à l’Académie française en 1891).
Ses textes sur l’Orient notamment m’ont bien envoûtée…Je trouve dommage qu’il soit aussi oublié (au purgatoire ?).

Son œuvre littéraire est importante. Elle a pour cadre tous les voyages qu’il fit (Constantinople, Maroc, Japon, Jérusalem, Ile de Pâques, Tahiti, Singapour, Inde, Galilée, Rangoon, Ispahan, Pékin, Egypte,…)

Dans ses romans on ne cherchera pas la vérité, tout y est partiellement sublimé. Et beaucoup d’éléments aussi ont dû être tus, déguisés, censurés pour l’édition…

Personnage de contrastes, tiraillé entre le réel et ses fantasmes, entre sa mélancolie et son aptitude à jouir de tous les plaisirs possibles, entre le goût des lointains voyages et l’attachement à son Rochefort natal et à son austère mais tendre famille, entre son amour pour les femmes et les hommes tout autant dit-on , entre la vie mondaine et la vie la plus populaire, entre son bel esprit et sa futilité…

Il a été admiré, mais aussi critiqué et moqué…Il était totalement extravagant et contradictoire. On lui a reproché aussi, et ce n’est pas rien, d’être arménophobe, antisémite et de commettre d’autres dérapages racistes (anti-japonais).

Homme controversé mais auteur à la belle écriture classique, je vous inviterais bien à (re)découvrir Pierre Loti…

SUPRÊMES VISIONS D’ORIENT
(Fragments de journal intime)

«Je regarde finir l'été, finir l'Orient, finir ma vie ; c'est le déclin de tout...»

Pierre Loti a vécu près de trente-quatre mois sur le sol turc, essentiellement sur les rives du Bosphore et de la mer de Marmara.

Suprêmes visions d’Orient, son dernier livre, est nourri de ses ultimes voyages en Orient en 1910 et 1913 (Constantinople et Andrinople).
Ensuite il ne reviendra plus sur la tombe de sa chère Aziyadé, la «petite Circassienne» qui lui inspira l'écriture de son premier roman... Aziyadé...
Il ne reviendra plus à Stamboul…
Une dernière fois il retrouve Stamboul et sa «véritable futaie de minarets blancs», ses «humbles cafés d'autrefois, refuges d’une vie contemplative et débonnaire »

Dans ces Suprêmes visions d’Orient, se mêlent le bonheur du retour et la nostalgie du passé , la joie de retrouver ce qu’il connaît et la déception devant les changements, le sentiment du temps qui « fuit toujours plus vite» .

Extraits :

« A mesure qu'il chemine, le paquebot qui me
ramène, sur les eaux tièdes et tranquilles de la
Marmara, mes souvenirs de ce pays s'avivent
d'heure en heure, comme si les effluves éma-
nés de la terre qui s'approche réveillaient
dans ma tête tous mes passés turcs. En d'autres
pays, du reste, souvent j'ai remarqué cela : il
suffit d'arriver aux abords pour que tous les
séjours antérieurs se précisent à nouveau dans
la mémoire... »

« Avec cette belle lune au ciel, le trajet est déjà
un enchantement pour mes yeux, qui s'étaient
presque déshabitués des visions turques.
Le long du Bosphore, la série des villages
riverains ne s'interrompt jamais, et c'est comme
une même rue qui, de la Marmara, s'en irait à
la mer Noire, une rue infiniment diverse où de
vieux quartiers rustiques alternent avec de
grands jardins murés, des fontaines, des palais
tout près du bord, des mosquées presque dans
l'eau. Ce soir, comme il fait un adorable beau
temps, la flânerie orientale en plein air se pro-
longera tard, devant les petits cafés et sur les
portes »

« Pays qui fut adorable, pays de la contempla-
tion, du rêve, de la prière, j'aurai donc assez
vécu, hélas ! pour le voir lancé, lui aussi, dans
cette course au déséquilibrement et à la souf-
france que les naïfs, et surtout les exploiteurs,
appellent le progrès!... »

« Et le glissement commence, au rythme
des avirons, sur la grande nappe unie où notre
passage laisse comme des plissures de soie. Il
fait plus froid, et la buée habituelle des nuits
du Bosphore augmente la pâleur des choses.
Il est minuit, dans un rayonnement blême,
quand nous abordons à la rive d'Asie. »

« Dans des familles que je connaissais à Cons-
tantinople, tant de drames se sont passés depuis
mon départ, surtout aux derniers jours du pré-
cédent règne, et il est visible que personne ne
se soucie d'en reparler. Trop mystérieux en
vérité, ce pays où disparaissent des êtres dont
on semble ne plus se souvenir, et sur le nom
desquels il se fait comme des conjurations de
silence. Pour la première fois, je me sens étran-
ger ici, avec une sorte d'épouvante, et presque
le regret d'être venu... »

« Dès que je suis assis,
parmi de naïfs rêveurs, devant un humble petit
café qui regarde la mer, je sens peu à peu
descendre sur moi la paix sans nom des soirs
d'Asie. Ce ne sont pas seulement mes yeux qui
prennent plaisir et se reposent; non, le repos
est surtout pour mon âme d'Oriental, presque
toujours exilée et qui se retrouve ici chez elle. »


« D'abord et avant tout j'irai au cimetière —
à l'un des grands cimetières qui sont là-bas en
dehors des murailles — car c'est elle, qui est
cependant cachée depuis si longtemps sous la
terre des morts, elle l'humble petite fille des
montagnes de Gircassie, pour qui j'avais
inventé ce nom d'Aziyadé dans un livre, «lîe
toujours ici qui reste la magicienne du mélan-
colique sortilège. »

La passion de Loti pour Stamboul a une origine sentimentale mais la ville a aussi pour lui des attraits esthétiques et culturels, et sa fascination lui fera prendre des positions politiques contestables et contestées.

FANTÔME D’ORIENT

C’est une suite d' Aziyadé.
A la fin d’ Aziyadé, Loti, appelé par ses fonctions d’officier de marine, était obligé de quitter malgré lui la belle circassienne, lui ayant promis de revenir. L’ayant promis aussi à ses deux chers amis Achmet et Samuel.

« Cette fois pourtant, je ne pars que pour un mois et je ne vais pas plus loin que Constantinople, mais le voyage sera sombre...

Il faut bien qu'il se soit joué là-bas un acte inoubliable de cette féerie noire qui a été ma vie, pour que je m'inquiète ainsi de la pensée d'y retourner; pour que tout ce qui en vient, un mot tartare qui me repasse en tête, une arme d'Orient, une étoffe turque, un parfum, aussitôt me plonge dans une rêverie d'exilé où réapparaît Stamboul! Et ce n'est pas par simple fantaisie d'art non plus, qu'ici mon appartement est pareil à celui de quelque émir d'autrefois, ressemble à une demeure orientale qui, par sortilège, se serait incrustée au milieu de ma chère maison héréditaire, avec ses arceaux dentelés, ses broderies d'ors archaïques et ses chaux blanches. Un charme dont je ne me déprendrai jamais m'a été jeté par l'Islam, au temps où j'habitais la rive du Bosphore, et je subis de mille manières ce charme-là, même dans les choses, dans les dessins, dans les couleurs, jusque dans ces vieilles fleurs de rêve qui sont ici naïvement peintes sur les faïences de mes murs. Et surtout il m'attire, ce charme triste, il m'attire vers là-bas où je serai demain.
C'est donc vrai que je vais revoir Stamboul... C'est bien réel et prochain, ce pèlerinage auquel, depuis dix ans, je rêve...

Depuis dix ans que les hasards de mon métier de mer me promènent à tous les bouts du monde, jamais je n'ai pu revenir là, jamais; on dirait qu'un sort, un châtiment sans merci m'en ait constamment éloigné. Jamais je n'ai pu tenir le solennel serment de retour qu'en partant j'avais fait à une petite fille circassienne, abîmée dans le suprême désespoir. »

Lorsqu’il revient à Constantinople donc (ce que raconte Fantômes d’Orient), il part à la recherche d’Aziyadé, Achmet et Samuel et découvre le drame qui s’est joué pendant ses dix ans d’absence.

« Si tout n'est pas fini dans la sombre poussière, je le saurai bientôt peut-être. Je vais tenter de mourir pour le savoir... »

Un roman basé sur le Journal que Loti n’a jamais cessé de tenir tout au long de sa vie.
Un charme oriental, désuet quelquefois, mais qui opère encore. Et une langue très facile aux qualités littéraires indéniables (Loti fut élu à l’Académie française).

Aziyadé et Fantôme d'Orient sont relié en Folio dans le même ouvrage:


Complémentaire:


Quatrième de couverture:
UN ESSAI. Étude approfondie d'un grand texte classique ou contemporain par un spécialiste de l'oeuvre : approche critique originale des multiples facettes du texte dans une présentation claire et rigoureuse.
UN DOSSIER. Bibliographie, chronologie, variantes, témoignages, extraits de presse. Eclaircissements historiques et contextuels, commentaires critiques récents.

Bruno Vercier et Alain- Quella Villéger sont les grands spécialistes de Loti. J'aurai la chance d'aller les écouter en conférence prochainement.
Je ne me suis pas découvert une passion soudaine pour Loti mais j'ai l'opportunité d'approfondir mes connaissances de l'oeuvre de cet auteur, je m'en nourris et m'en réjouis.

Coline tes interventions sur Loti permettent de cerner mieux un auteur qu'on a finalement peu lu(enfin c'est mon cas).Je trouve très bien de peaufiner ainsi et de prendre le temps de la profondeur.

Je suis une lente besogneuse...Genre cent fois sur le métier......
J'ai besoin d'aprofondir, ce qui me prend du temps et me limite forcément dans l'ouverture de mes horizons ...Et cela doit me donner l'air ici d'une vieille radoteuse...

Coline
vieille radoteuse...

Alors continue de radoter

Bellonzo a écrit:

Coline tes interventions sur Loti permettent de cerner mieux un auteur qu'on a finalement peu lu(enfin c'est mon cas).Je trouve très bien de peaufiner ainsi et de prendre le temps de la profondeur.

Qu'importe tes interventions, elles sont toutes réussies.
Tu as le verbe, pour nous amener à aimer l'auteur.

coline a écrit:

Je suis une lente besogneuse...Genre cent fois sur le métier......
J'ai besoin d'aprofondir, ce qui me prend du temps et me limite forcément dans l'ouverture de mes horizons ...Et cela doit me donner l'air ici d'une vieille radoteuse...

Mais non

Bellonzo a écrit:

Coline
vieille radoteuse...

Alors continue de radoter

Coline, si tu n'existais pas, il faudrait t'inventer.
ton travail est très bien façonné.

Coline, faut que tu apprennes à accepter les compliments!
C'est vrai que tu as ce don, tu es une passionnée qui cherche avant tout à faire partager tes découvertes.

Et qui se décourage sur le coup si tu n'es pas suivie, mais ne renonce jamais.

Une vraie battante moi je dis



mince,on a un peu trop floodé là non?..