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 [BD] Ptiluc

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MessageSujet: [BD] Ptiluc   [BD] Ptiluc EmptyDim 4 Mai 2008 - 0:46

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Ptiluc

Ptiluc, de son vrai nom Luc Lefèbvre, est né le 29 décembre 1956 à Mons (Belgique).
Spécialiste de la BD animalière humoristique et philosophique, il se fait connaître en 1980 avec la série des Pacush Blues (pacush = dépotoir, décharge) qui attire notamment l'attention de Franquin.
Claude Serres, autre dessinateur de talent, dira à propos de la série : "C'est beau. C'est simple, on dirait du Proust ! Mais en mieux dessiné".
Au-delà de la boutade, il est vrai que Ptiluc à réussi a créer, avec ses rats au comportement tellement humain, une véritable comédie humaine où le sens de l'observation, la lucidité, le talent pour les formules bien frappées, font effectivement penser à certains auteurs classiques de la littérature, même si le langage choisi - plus proche du sabir des jeunes de banlieue - n'a rien de très classique.

Le monde de Pacush Blues est noir (dans l'esprit) et gris (sur la planche). C'est le règne cruel de la survie, les plus forts écrasants les plus faibles, dans un quotidien sans issue de secours, si ce n'est une petite évasion pépère mais éphémère offerte par un joint de hasard - et encore à condition de ne pas se faire refiler de la carpette en la présentant comme du pur persan ! Là, ça craint trop.
Entre deux joints, il reste toujours du temps pour philosopher un brin, non pas à la manière de Schopenauer ou Kant mais plutôt avec une sorte pragmatisme cynique et de désabusion assumée.
Comment rendre tout cela un peu respirable ? Grâce à un humour rentre-dedans et une énergie, une fantaisie qui en rend la lecture plus jouissive, même si un fond de mélancolie demeure toujours.

Quelques albums remarquables :

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Jefferson ou le mal de vivre ****
L'album le plus nettement philosophique - et mélancolique - de la série. Un rat anonyme traîne sa solitude et son angoisse existencielle au travers d'une série de saynètes qui fonctionnent comme autant de métaphores. Rencontres provisoires d'individus qui se sont créés chacun un mode d'existence ou des principes sois-disants chargés de signification mais toujours très relatifs : la croyance au bonheur, l'apprivoisement de la mort, la recherche de l'âme-soeur, etc...
Quant au Jefferson du titre, il a une parenté certaine avec le Godot de Beckett.


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Destin farceur (2 tomes) ****
Cette histoire est d'abord celle d'une prise de conscience, suivie d'une rébellion : celle de la rate Ovidie qui ne supporte plus de se faire engrosser par des mâles brutals sans aucun respect pour autrui et dont l'occupation favorite est de "se faire des pédés" (à coups de couteau de préférence). A quoi bon enfanter de pareils monstres dans un monde comme celui-là, se dit Ovidie. Ecoeurée et impitoyable (elle tue ses nouveau-nés, assassine quelques mâles facho au passage), elle voit dans sa rencontre, puis son association avec un hamster érudit et un vieux rat homosexuel, l'occasion de se venger.
Les trois acolytes vont en effet fonder une sorte de secte, axée sur un culte dont Ovidie devient la grande prêtresse. A eux désormais, jadis méprisés, de tirer parti de leur influence sur toute cette bande de jobards devenus fanatiques et soumis. Mais cette revanche sociale aura un goût de plus en plus amer et Ovidie sombrera dans la solitude et la démence.
Une des meilleures BD de Ptiluc, une histoire poignante (on finit par oublier qu'il s'agit de rats tant l'anthropomorphisme est poussé loin et avec lui l'empathie du lecteur) et qui laisse, comme souvent dans cette série, une tenace sensation d'amertume.


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Le mal de mer ***
Changement de décor pour cet album. On quitte le pacush familier pour le bord de mer, où une poignée de rats tentent de survivre à différents prédateurs naturels : les mouettes, les effrayants crabes et la marée montante qui, régulièrement, se charge de tout détruire. Si le pacush pouvait sembler violent et déprimant, ce n'est rien comparé à cet environnenement terriblement hostile où chaque jour est un combat pour la survie. Au principe du chacun-pour-soi des autres albums, les rats préfèrent ici s'organiser en bande, quitte à créer une société guerrière totalitaire et phallocratique.
Aussi, quand une souris aussi intelligente qu'indépendante échoue sur ces peu accueillants rivages avec son ami le hamster, elle se heurte d'emblée au système mis en place autant qu'aux dangers que constituent l'environnement naturel.
Le tome le plus violent de la série, le plus gore aussi (les crabes et les mouettes sont de véritables machines à tuer), qui laisse peu de place à la philosophie. Comme le dit un des rats : "faut d'abord penser à survivre avant de penser à penser !". Un album qui prend aux tripes.


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La logique du pire **
Cet album commence de manière "classiquement pacush" : après une tempête hivernale, qui à l'échelle des rats est un vrai cataclysme, une fin du monde de science-fiction, quelques survivants s'organisent en groupe. Plutôt paumés dans cette grande étendue blanche où tous les repères ont disparus, ils tentent de jeter les bases d'une nouvelle société, meilleure que la précédente si possible. Mais ils se perdent en palabres philo, en conflits stériles et trouver de quoi se nourrir n'est pas la plus petite de leur préoccupations.
Coupez ! Nouveau décor : on réalise alors que toute cette histoire est en train d'être racontée par un rat à un public d'autres rats captivés. Ce qui n'est pas pour déplaire à un crapaud manipulateur qui pousse notre rat conteur (ah ah !) à tirer parti de la situation en monneyant dorénavant son art.
Vous l'aurez compris, Ptiluc nous parle dans cet album de lui et de son travail à travers ses personnages selon l'équation évidente : rat conteur = moi, vilain crapaud = éditeur. Considérations artistiques (l'auteur et l'intégrité de son art) contre esprit mercantile. Et de rappeler au passage que l'artiste n'est pas une vache à lait que l'on trait jusqu'à plus soif et même au-delà. A bon entendeur !
Un album original, parfois un peu déconcertant dans ses ruptures narratives et son aspect "réglement de comptes", mais qui sort des sentiers battus de la BD.


Et en dehors du Pacush ?

Car les rats ne sont pas toute la vie de Ptiluc. Au moins deux autres bandes dessinées valent la peine d'en parler ici :


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Gilles de Chin et le dragon de Mons (2 tomes) ****
Abandonnant provisoirement ses rats, Ptiluc nous convie à suivre les aventures d'un chevalier en plein Moyen-Age, le sieur Gilles de Chin, obsédé à l'idée de trucider un dragon qui ne veut de mal à personne.
En fait, par un retournement amusant des valeurs, le dragon se révèle un être très civilisé et érudit, alors que le chevalier n'est qu'une brute sanguinaire et un fanatique religieux, suivant trop aveuglément le dogme discutable d'une Eglise toute puissante. Mais la quête de Gilles aura une conclusion innatendue et amer (encore !).
Brocardant tous les fanatismes religieux (mais surtout chrétien), montrant à quel point les apparences peuvent être trompeuses et ce qui peut arriver à un homme qui fait passer ses grands principes avant ses sentiments, Gilles de Chin et le dragon de Mons est une oeuvre riche sur le fond autant qu'elle peut paraître triviale en surface.
Bref, c'est du Ptiluc et un grand cru.


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Ni Dieu ni bête (3 tomes) ***
Après les rats...les singes (et autres habitants de la savane africaine). Changement de contexte aussi : à la grisaille du Pacush, on passe aux paysages colorés de l'Afrique. Mais la cruauté est bien entendu toujours là.
Un vieux singe - à la réputation plutôt surfaite de "sage" - converse avec un jeune chimpanzé en tentant de lui inculquer quelques notions philosophiques élémentaires et en prenant comme modèle celui que le vieux singe considère comme le nec plus ultra des espèces : L'Homme.
Pour lui, aucun doute : l'homme représente bien le modèle indépassable, que les singes feraient bien d'imiter. L'homme, c'est le progrès, l'invention de la tomobile (sic !), du Paris-Dakar, des congés payés, de la grande consommation. Bref, il est la Civilisation. Et notre vieux maître, tel un Pangloss version simiesque, ne cache pas son admiration.
Son élève, pour sa part, reste sceptique. Pourquoi vouloir se casser la tête à imiter cet énergumène qui pollue tout ce qu'il touche alors qu'il suffit de profiter tranquillement de ce que la nature vous offre, dans une totale harmonie avec elle.
Evidemment, aux cours de leurs aventures et de leurs rencontres avec les hommes, le vieux singe ira de déceptions en déceptions. Rien de tel que la réalité des faits pour démolir les plus belles théories.
Plus léger et plus drôle que la série des Pacush, voir carrément frappadingue, moins déprimant, privilégiant davantage le fun mais tout en restant d'une acuité philosophique imparable, Ni Dieu ni bête permet de rire de la bêtise, qu'elle soit humaine ou non. On pense parfois aux oeuvres dialectiques du XVIIIè siècle, comme celles de Diderot (mais un Diderot qui aurait collaboré avec un La Fontaine sous ectasy !).
Les discussions entre les deux singes sont particulièrement juteuses et les situations totalement burlesques. Dommage que la série s'essoufle un peu avec le troisième tome, qui n'est pas franchement indispensable - on sent que l'auteur tourne un peu en rond - d'autant qu'elle ne propose aucune conclusion. Mais les deux premiers sont excellents et franchement hilarants.

Pour en savoir plus, le site de Ptiluc :
http://www.ptiluc.com/
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