Jay McInerney

Trente ans et des poussières

J'ai complètement adhéré à ce livre ! Je me suis laissée prendre tranquillement par la main, au début, mine de rien Corrine et Russel m'invitent chez eux. Soirées-fêtes entre gens biens : auteurs, éditeurs, mannequins, et bourgeois de la haute (culture), mais qui ne sont pas trop péteux. Pas au point d'être agaçants, rabaissants ou chiants. On boit des verres tranquilles, on ne sait pas bien où ça va, mais on suit.

Évidemment, d'emblée j'ai eu l'impression de lire une version moderne de Gatsby le Magnifique (peut-être parce que je l'ai lu juste avant ?), mais la comparaison est évidente.

Ensuite McInerney déshabille ses personnages et délie son intrigue, tranquillement, couche par couche.

Russel, le chouette bobo qui se fait bouffer par son ambition.
Corrine, qui laisse tout couler parce que tout lui échappe.
Jeff, leur pote auteur, qui se renferme sur lui, prend de la drogue.

L'angoisse de la vieillesse, de la parentalité, de la réussite sociale, de la reconnaissance...


Et tout le bordel qui va suivre la lente et inexorable destruction de ce petit monde parfait.

McInerney m'a épaté par la justesse dans ses descriptions de cet univers qui s'appuie sur ses apparences pour ne pas sombrer. Il parvient en très peu de lignes, et grâce à un processus lent et minutieux au final, à retransmettre tous les questionnements que l'on peut se poser quand on a 30 ans, qu'on est bien dans sa vie, mais qu'il y manque quelque chose. Quand on fait des erreurs, qu'on apprend à vivre avec.

C'est franchement fataliste.
C'est comme si il prenait la gentille photo du couple parfait et par pléthore d'indices il en faisait apparaître tous les défauts.
C'est la fin d'un rêve, les deux pieds qui s'enfoncent dans une réalité crasse.

Ils vont s'engueuler, se juger, se tromper, se mentir, rester dans les non-dits, attendre que l'orage passe tout seul (comme si c'était possible), se perdre, tenter de se retrouver.

Un livre vraiment sur l'humain. Ses mesquineries et ses beautés. J'étais attachée à tous les personnages, même si j'ai eu souvent envie de leur crier dessus, de leur foutre une torgnolle, et de leur dire STOP MAINTENANT.

Et la fin est parfaite !
Parce que McInerney n'a pas pris la facilité de faire tout couler au fond des eaux profondes. Y'a de l'espoir, tout rafistoler, avec des cicatrices et quelques aspérités où s'engouffrent les courants d'air, mais de l'espoir quand même !

J'en reveux !

Queenie a écrit:

J'en reveux !

Alors, tu pourrais jeter un coup d’œil aux Privilèges de Jonathan Dee

Le genre d'autopsie que j'aime bien. Merci pour le commentaire!
Et direct Pal...

Merci de rappeler Jay McInerney à mon bon souvenir. Incroyable que j'ai dû lire Brightness Falls (Trente ans et des poussières) il y a bientôt 20 ans A l'époque je chopé tous les livres de Jay McInerney parus auparavant et je les ai lus et relus, mais depuis rien, à part une ou deux nouvelles. A reprendre dès que possible, il doit y avoir l'un ou l'autre texte de Jay McInerney dans ma PAL.

topocl a écrit:

Queenie a écrit:

J'en reveux !

Alors, tu pourrais jeter un coup d’œil aux Privilèges de Jonathan Dee

Fait !

Igor a écrit:

Le genre d'autopsie que j'aime bien. Merci pour le commentaire!
Et direct Pal...

Kül !

Maline a écrit:

Merci de rappeler Jay McInerney à mon bon souvenir. Incroyable que j'ai dû lire Brightness Falls (Trente ans et des poussières) il y a bientôt 20 ans A l'époque je chopé tous les livres de Jay McInerney parus auparavant et je les ai lus et relus, mais depuis rien, à part une ou deux nouvelles. A reprendre dès que possible, il doit y avoir l'un ou l'autre texte de Jay McInerney dans ma PAL.

Wa... Y'a 20 ans... !!!
ça pourrait être intéressant de les relire après tout ce temps.

En tout cas, il reste vraiment d'actualité, même si on reconnaît vraiment la touche fin 80 début 90.

J'ai Bright lights, big city dans ma PAL. ca pourrait bien lui faire franchir un ou deux échelons!

Oh ben ça alors, c'est providentiel ! Queenie remonte le fil pile au moment où je découvre l'existence de cet auteur par le biais de Lunar Park de Bret Easton Ellis. Au vu de ce hasard et du commentaire positif de la Queen, je vais être contrainte et forcée d'ajouter cet auteur à ma LAL, comme c'est dommage

Kannskia a écrit:

Oh ben ça alors, c'est providentiel ! Queenie remonte le fil pile au moment où je découvre l'existence de cet auteur par le biais de Lunar Park de Bret Easton Ellis. Au vu de ce hasard et du commentaire positif de la Queen, je vais être contrainte et forcée d'ajouter cet auteur à ma LAL, comme c'est dommage

C'est terrible !

Bright Lights, Big City (anciennement Journal d’un oiseau de nuit) de Jay McInerney

   
 
 
 Je crois bien qu'on ne sait pas comment s'appelle le héros. L'auteur s'adresse à lui tout au long du livre grâce à un « tu » complice. Pas le "tu" qu’on pourrait trouver dans un Nouveau Roman. Non, le tu empathico-moqueur qu’on adresse à un type sympa.
 
Il s'agit d'un jeune provincial débarqué à New York sûr que tout va lui réussir, une épouse jeune et gagnant (et dépensant) l’argent facilement, un boulot dans un journal en vue qui lui permettra de réaliser ses rêves et de devenir écrivain. Mais la Big City et sa vie noctambule n'est pas celle qu'il croyait, il se noie d'alcool et de drogue, de sensations intenses et brèves, et perd au passage sa femme, son boulot, tous ses rêves… dans un univers où cela n'intéresse pas grand monde.
 

 
Cette première partie est extrêmement brillante. Mêlant dans un savant équilibre cynisme et tendresse vis-à-vis du personnage, McInerney use d'un humour décapant pour le décrire dans tous ses déboires. C’est drôle au possible.
 
Ensuite, quand le jeune homme, peu à peu reprend goût la vie, voit des mains qui se tendent, trouve le chemin de la rédemption, c'est, sans être totalement classique, sans doute un peu plus banal : tout en gardant un oeil acerbe, McInerney a un propos qu'on a l'impression d'avoir déjà vu un certain nombre de fois (bien que totalement fasciné par les excès des paradis artificiels, happé par une superficialité protectrice, le jeune homme a finalement bon fond).
 
Quoi qu'il en soit, ça se lit extrêmement bien, la plume est alerte, on rigole beaucoup, et si cela n'a pas le caractère abouti de Trente ans et des poussières, c'est un bon moment de passé.
 



 

topocl a écrit:

 
Ensuite, quand le jeune homme, peu à peu reprend goût la vie, voit des mains qui se tendent, trouve le chemin de la rédemption, c'est, sans être totalement classique, sans doute un peu plus banal : tout en gardant un oeil acerbe, McInerney a un propos qu'on a l'impression d'avoir déjà vu un certain nombre de fois (bien que totalement fasciné par les excès des paradis artificiels, happé par une superficialité protectrice, le jeune homme a finalement bon fond).
 

Oui, tout à fait, on a là une morale plutôt classique et un happy end de film américain.

A l'époque de ma lecture, âge aidant, j'avoue que le "Tu" m'évoquait plus les livres dont vous êtes le héros que le Nouveau Roman. Il faudra que je le relise un jour...