Jean-Marie Gustave Le Clézio

Le lien pour voir l´emission "La grande librairie" du 9 Oct 08, avec Echenoz et Le Clezio.
Video intégrale encore disponible en archives ( 1 heure d´écoute).
http://www.france5.fr/la-grande-librairie/index.php?page=article&numsite=1403&id_rubrique=1406&id_article=4598

swallow a écrit:

Le lien pour voir l´emission "La grande librairie" du 9 Oct 08, avec Echenoz et Le Clezio.
Video intégrale encore disponible en archives ( 1 heure d´écoute).
http://www.france5.fr/la-grande-librairie/index.php?page=article&numsite=1403&id_rubrique=1406&id_article=4598

Merci!

Extrait de L'inconnu sur la terre


Écrire seulement sur les choses qu’on aime. Écrire pour lier ensemble, pour rassembler les morceaux de la beauté et ensuite recomposer, reconstruire cette beauté. Alors les arbres qui sont dans les mots, les rochers, l’eau, les étincelles de lumière qui sont dans les mots, ils s’allument, ils brillent à nouveau ils sont purs, ils s’élancent, ils dansent ! On part du feu, et on arrive dans le feu. Partout autour, partout à l’intérieur, brûlent des flammes, de drôles de flammes, légères, odorantes, qui remplissent l0espace de chaleur et de blancheur. Comment être loin de la vie ? Comment accepter d’être étranger, exilé ? Tout ce que l’on sait, tout ce que l’on reconnaît, et les chimères de la conscience, tout cela cède devant un seul instant de vie. Un moucheron qui traverse l’air, un brin d’herbe que fait vibrer le vent, une goutte d’eau, une lumière, et d’un seul cout, il n’y plus de mots : il y a l’étendue muette de la réalité, où le langage est déposé, où la conscience est minéralisée.

J'avais vu l'émission en directe.
Ne la ratez pas. Le Clezio est toujours aussi impressionant de sobriété et de mystère. Et puis j'ai surtout découvert Jean Echenoz...Un auteur attachant, même si son écriture me parait un peu clinique

Steven a écrit:

C'est ce que m'en a dit Yves Simon dans La manufacture des rêves :

Citation :

J'avais à peine dix-neuf ans lorsque l'homme aux énigmatiques initiales fit son apparition au zénith du cosmos littéraire. Beau comme une rock star, J.M.G. Le Clézio venait d'obtenir le prix Renaudot pour son premier roman, Le Procès-Verbal. Identification, admiration, moi qui dormait auprès d'un corps de guitare et envisageais de réaliser des films, il va être celui qui rendra possible ma tout aussi intense ambition d'écrire.
Avec lui s'installa le sentimment, nouveau pour moi, que l'on pouvait marier écriture te jeunesse, que l'écrivan n'était pas nécessairement un vieillard ou un mort, qu'au contraire, scribe de son époque il en était le décrypteur à consigner les minutes de ses rêves. Qu'il peut jouer un rôle de médium entre le lecteur et des univers qui nous frôlent, raconter le foisonnement d'un monde dans lequel chacun se sent immergé et, avec la dextérité et la grâce d'une écriture, être en mesure de le célébrer. D'instinct, j'avais attribué ce rôles, cette mission, aux chanteurs et aux cinéastes qui savaient si bien raconter les évènements et amours de mon actualité. Le Clézio me fit découvrir que le roman était aussi une partition de mon réel et du possible.....

Je me prends à penser que j'aimerai avoir 19 ans etvoir surgir un auteur qui me fasse pointer du doigt ce possible...

Je me permets aussi de reciter Steven car j'ai oublié hier et je trouve ce passage très beau.
En tout cas il me donne envie de découvrir...Yves Simon l'écrivain-
Merci Steven

Jean-Marie Gustave Le Clézio, prix Nobel de littérature 2008,
vient d'accepter un autre prix suédois récompensant son travail.

Citation :

Selon l'agence de presse suédoise TT, Le Clézio a accepté samedi le prix Stig Dagerman, doté de 50.000 couronnes (8100 $) lors d'une cérémonie organisée à Alvkarleby, un petit village situé à 150 kilomètres au nord de Stockholm.Le Clézio s'est fait attribuer le prix pour sa capacité «à remplir les pages blanches du livre avec les combinaisons de mots les plus merveilleuses», a affirmé le jury Dagerman.

Stig Dagerman, qui a donné son nom à ce prix, est un auteur suédois décédé en 1954. Le prix, créé en 1996, rend hommage aux efforts engagés pour promouvoir la liberté d'expression.

Le Clézio retournera en Suède pour recevoir le prix Nobel de littérature le 10 décembre.

Je vous indique ce commentaire de J.M. Le Clezio, qui le situe bien par rapport au colonialisme, avant de vous laisser mon résumé du "Rêve mexicain" ( ou la pensée interrompue).

"Moi aussi, je suis trouble, biface. J’appartiens à l’Occident colonisateur, ça ne fait aucun doute. Ma famille a colonisé l’île Maurice à la fin du XVIIIe siècle – il s’agit de la colonisation anglaise, mais c’était la même chose –, je compte certainement des esclavagistes parmi mes aïeux. Ma génération n’a certes pas fait la colonisation, mais elle a été témoin de ses derniers instants, au Maroc, en Algérie, en Afrique occidentale, partout dans le monde. De ce sentiment que j’ai d’appartenir au groupe humain qui a commis ces exactions est née mon obsession de ce chapitre de l’histoire. Conrad a très bien exprimé ce que je ressens, à travers le personnage de Marlow, dans Au cœur des ténèbres. Marlow est un personnage trouble, issu de la colonisation britannique, animé par un esprit autocritique, fasciné et attiré par le caractère instinctif des peuples d’Afrique, mais incapable d’y adhérer totalement. Je suis comme ça, occidental indéniablement, mais méfiant vis-à-vis de tout ce qui est trop intellectuel, trop rationnel, attiré par la magie, le surnaturel, les endroits où le présent et le passé cohabitent mystérieusement et naturellement – c’est le cas au Vanuatu." J.M. Le Clezio.

Le Magazine Littéraire n'offre pas beaucoup d'articles en ligne - ce que je peux comprendre - mais cette interview vous intéresse peut être - ICI

Pour info, le Magazine Lire de ce mois de novembre consacre 24 pages à l'écrivain nobélisé. Ainsi, vous saurez tout sur sa vie, son oeuvre, vous redécouvrirez des entretiens historiques et aussi un portfolio très enrichissant.

Je vais me laisser tenter par Gens des nuages en deuxième lecture du mois de Novembre. Et si je peux trouver Désert, ce serait parfait.

Citation :

Le Sahara occidental, dont Jémia, sa femme depuis 1975, est originaire, lui inspire Désert, roman qui reçoit le prix Paul Morand de l'Académie française en 1980, et la publication d'un journal de voyage, Gens des nuages qui relate effectivement les étapes de ce périple à la rencontre des personnages légendaires, ancêtres de sa femme.

Malorie a écrit:

Pour info, le Magazine Lire de ce mois de novembre consacre 24 pages à l'écrivain nobélisé. Ainsi, vous saurez tout sur sa vie, son oeuvre, vous redécouvrirez des entretiens historiques et aussi un portfolio très enrichissant.

Meri de l'info Malorie.

Je viens de relire au bout de plusieurs années "étoile errante" avec délectation. Quelle belle écriture sensuelle : je sentais le soleil sur ma peau, le goût de l'eau de mer sur mes lèvres ; j'entendais le rugissement des torrents qui dévalaient les montagnes.
Et ce choix de deux jeunes filles, de deux inconnues pour parler de ce douloureux problème d'Israël. Cette jeune Esther aux côtés de qui nous cheminons dans son errance qui va la conduire au paradis perdu d'où est chassée Nejma la jeune palestinienne. Douloureux dilemme d'un conflit politique qui nous échappe et errance de ces hommes, femmes et enfants qui trouvent dans le groupe la chaleur d'une humanité qui semble si souvent perdue.
Bref, un enchantement.
Dans la foulée j'attaque "Ourania".

majeanne a écrit:

Je viens de relire au bout de plusieurs années "étoile errante" avec délectation. Quelle belle écriture sensuelle : je sentais le soleil sur ma peau, le goût de l'eau de mer sur mes lèvres ; j'entendais le rugissement des torrents qui dévalaient les montagnes. Et ce choix de deux jeunes filles, de deux inconnues pour parler de ce douloureux problème d'Israël. Cette jeune Esther aux côtés de qui nous cheminons dans son errance qui va la conduire au paradis perdu d'où est chassée Nejma la jeune palestinienne. Douloureux dilemme d'un conflit politique qui nous échappe et errance de ces hommes, femmes et enfants qui trouvent dans le groupe la chaleur d'une humanité qui semble si souvent perdue.Bref, un enchantement.
Dans la foulée j'attaque "Ourania".

Étoile errante tu dit, semble très intéressant.

Ourania
J.M.G. Le Clézio
Folio - 349 pages

Un roman magique, difficile à résumer mais je vais tenter le coup !

Daniel Sillitoe est un géologue français qui part en mission pour le Mexique pour faire des relevés, en chemin dans un autocar il rencontre Raphaël, un jeune homme qui l’intrigue et dont il a envie de connaître l’histoire. Raphaël ne se laisse pas approcher si facilement mais finit par lui lâcher son histoire par bribes. Tout d’abord, il raconte qu’il vient d’un endroit appelé le Campos, une sorte de refuge pur les enfants perdus, malheureux, un refuge de rêve, une sorte d’Abbaye de Thélème dans un coin reculé du Mexique, un endroit où l’on répare les âmes et les corps. Puis Raphël disparaît, et notre géologue poursuit sa route vers sa destination finale l’Emporio, un autre lieu d’exception, celui-là destiné à des chercheurs et à des universitaires. L’Emporio a été fondé par un anthropologue charismatique, c’est un rêve, une sorte de république humaniste et c’est là que Daniel s’installe pur quelque temps, avant de partir explorer et faire des relevés sur une région proche. Il s’aperçoit alors que ce lieu de rêve est en sursis, et qu’il est petit à petit rattrapé par le monde et son avidité, les savants qui composent la communauté ne sont d’ailleurs pas étrangers à ces changements. Parallèlement, Daniel reçoit des nouvelles de Raphaël qui continue a raconter l’histoire du Campos, cette autre communauté utopique qui est terriblement menacée par le monde extérieur. C’est de la faillite de ces deux mondes très particulièrs que Le Clézio nous rend compte, deux oasis rattrapées par le pouvoir et l’argent. Mais si la trame du livre est bien noire, ne vous y fiez pas, le style ne l’est pas, car l’histoire de ces 2 mondes, Le Clézio nous la raconte à travers le portrait des gens remarquables qui y vivent : à l’Emporio il y a Dahlia révolutionnaire et mère féroce, et aussi Lily la prostituée qui s’enfuit loin de son souteneur. A campos, il y a Hoatu, une magnifique métisse qui apprend l’amour à Raphaël, et bien d’autres encore….

Un beau récit, une écriture fluide, élégante, qui sait conjurer des images, des ambiances, des odeurs, des lumières et qui sert une construction subtile et équilibrée, qui paraît couler de source. Le Clézio garde toujours un regard très humain sur les hommes, il est plein de tendresse et d’émerveillement quand il se pose sur les enfants et sur les femmes, mais il n’oublie pas les côtés noirs de l’âme humaine, la cupidité et l’exploitation qui génèrent misère et malheur chez les peuples du sud. J’avais oublié combien il était agréable de lire ce grand auteur.

N’hésitez pas à le découvrir ou à le redécouvrir, sa ‘nobélisation’ en est l’occasion et vous passerez un excellent moment de lecture.

Merci Domreader, je vais poursuivre avec encore plus de plaisir.

Merci Majeanne et Domreader pour vos impressions de lecture..
comme le dit Domreader, le Nobel est une belle occasion de le découvrir/se remettre à lire ses livres...