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| Blaise Cendrars [Suisse] | |
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animal Tête de Peluche
Messages : 31548 Inscription le : 12/05/2007 Age : 43 Localisation : Tours
| Sujet: Re: Blaise Cendrars [Suisse] Ven 9 Aoû 2013 - 11:33 | |
| Un peu de cinéma avec cette extrait du journal de Mireille. "mon grand" c'est Dan Yack/Cendrars. M. Lefauché ça serait Abel Gance et Mireille sa femme mourante qui a été accompagnée par Cendrars. - Citation :
Je sais bien que l'interprétation de tout rôle comporte une grosse part d'exagération, surtout dans l'expression des sentiments auxquels le vulgaire est le plus sensible. Devant les foules immenses que l'écran attire à soi, les metteurs en scène se croient obligés de faire grandiose à tout prix pour attirer l'attention. aujourd'hui, un film est une compétition d'argent, de dépenses, de recettes, de publicité et une débauche de voltage, d'accessoires somptueux, de figuration nombreuse, de vedettes à sensation, de scènes à grand spectacle. Cette conception arbitraire et fictivement commerciale du cinéma crée chez les metteurs en scène une déformation professionnelle qui s'exprime, aussi bien dans l'ensemble que dans les plus infimes détails de leurs œuvres, par toute une série de coq-à-l'âne, des monstruosités, des sublimités, des incongruités, des fausses situations, des invraisemblances, des prodiges tellement abracadabrants et absurdes que la raison humaine en semble bannie à jamais. Un film est un pot-pourri où le meilleur voisine par hasard avec le pire. Ces critiques sont de mon grand, qui avait l'habitude d'ajouter que M. Lefauché, malgré tous ses mérites, n'était pas dépourvu de cette mégalomanie qui semble être l'apanage, le travers d'esprit des gens de sa corporation. J'ai déjà dit que mon grand n'aimait pas beaucoup M. Lefauché. Il lui reprochait une certaine boursouflure, une certaine grandiloquence, beaucoup de lourdeur, trop de lenteur, une absence complète du sens de la réalité. Il me disait : "Toute sa symbolique cache une pauvreté d'idées. tout ce qu'il te fait faire est faux." Toujours est-il qu'à recopier et relire cet extrait, si on pense notamment à la première partie du livre, on peut trouver plus que des ressemblances (tout en n'oubliant pas que des anecdotes sont piochées dans des relations d'aventures bien réelles comme les expéditions de Charcot). Et forcément on retrouve tout le lien entre l'imaginaire et le vécu (et le récit). C'est aussi un rapport conflictuel avec le moment. On sent bien un truc quand on lit mais à le relire c'est encore plus opaque, nuancé et trouble, à multiples tranchants, et pour l'auteur tant cela préfigure ou peut préfigurer d'une partie de la suite... et il faut aussi reconnaitre le fond de douceur de ces considérations. | |
| | | animal Tête de Peluche
Messages : 31548 Inscription le : 12/05/2007 Age : 43 Localisation : Tours
| Sujet: Re: Blaise Cendrars [Suisse] Mer 14 Aoû 2013 - 21:11 | |
| Un petit dernier ? - Citation :
Il fait nuit. Il pleut. Il pleut depuis huit jours. Depuis huit jours je ne fais rien. Je reste debout devant ma fenêtre et je regarde dehors. Dehors, il pleut. Le vent rabat par rafales la fumée dans ma chambre. Alors j'ouvre ma porte, je fais une dizaine de pas dehors, sous la pluie, et je rentre, et je referme ma porte, et je retourne me planter devant ma fenêtre. Je regarde dehors. Dehors, il pleut. Je m'étends deux, trois fois dans la journée. Je suis très las. Je m'endors immédiatement. J'entends des oiseaux dans mon sommeil. Je me réveille immédiatement. Je retourne me planter devant ma fenêtre. Je regarde dehors. Dehors, il pleut. Puis, c'est la nuit. La nuit noire. Je n'allume pas ma lampe. Je reste debout dans le noir à regarder dehors. Il pleut toujours. Je l'entends. J'entends le vent. La nuit est noire, noire comme les nuits du front, quand je restais planté dans la boue à regarder par mon créneau. La nuit était noire, la nuit était longue, j'entendais le vent, la pluie finissait par me dégouliner dans le cou et, quand je sommeillais, j'entendais également des oiseaux. Je me réveillais en sursaut. J'étais là, planté dans la boue. Je regardais par le créneau. On ne voyait rien. Il faisait noir. J'entendais le vent. La pluie cinglait. | |
| | | GrandGousierGuerin Sage de la littérature
Messages : 2669 Inscription le : 02/03/2013
| Sujet: Re: Blaise Cendrars [Suisse] Sam 31 Mai 2014 - 22:31 | |
| Moravagine Moravagine, pensionnaire d’un asile pour nantis aliénés, séduit le médecin fraîchement diplômé qui est chargé d’en prendre soin. Sous couvert d’une étude clinique, le médecin libère son patient qui va pouvoir commettre ses méfaits et scelle ainsi le destin des deux protagonistes qui laissent derrière eux crimes, souffrance et révolution. Mais sont-ils vraiment si différents ? Est-ce-que Moravagine ne serait pas le double du narrateur ? Ou encore de Cendrars lui-même ? En effet, la postface nous laisse entrevoir les difficultés éprouvées par Cendrars pour enfin mettre un point final au livre Moravagine. Sous l’apparence d’un récit proche des péripéties d’un baron de Münchhausen avec une part d’ombre à la Jack l’éventreur, j’ai découvert plusieurs niveaux de lecture qui pourraient être d’ordre autobiographique (à vérifier), une critique voilée d’une société en déliquescence ou encore, de manière diffuse, certaines pratiques médicales dans le monde psychiatrique. Moravagine nécessite donc une relecture qui sera sûrement ludique à la recherche des indices laissés par Cendrars. | |
| | | Bédoulène Abeille bibliophile
Messages : 17270 Inscription le : 06/07/2007 Age : 79 Localisation : Provence
| Sujet: Re: Blaise Cendrars [Suisse] Sam 31 Mai 2014 - 22:36 | |
| J'avais prévu de lire Moravagine ; ton commentaire m'intrigue, ce sera une lecture pour le trimestre . | |
| | | GrandGousierGuerin Sage de la littérature
Messages : 2669 Inscription le : 02/03/2013
| Sujet: Re: Blaise Cendrars [Suisse] Sam 31 Mai 2014 - 22:45 | |
| - Bédoulène a écrit:
- J'avais prévu de lire Moravagine ; ton commentaire m'intrigue, ce sera une lecture pour le trimestre .
Curieux de lire ton avis ... | |
| | | animal Tête de Peluche
Messages : 31548 Inscription le : 12/05/2007 Age : 43 Localisation : Tours
| Sujet: Re: Blaise Cendrars [Suisse] Sam 31 Mai 2014 - 22:57 | |
| Pour Jack l'éventreur ? un autre extrait de l'entretien avec Maurice Chappaz posté hier sur le fil de l'auteur, question à propos de Blaise Cendrars donc : - Citation :
- Vous le lisiez déjà à l'époque ?
Ah oui, on le lisait. Le livre de Cendrars qui m'avait passionné, c'était un tout petit livre que j'avais trouvé d'ailleurs dans ma ville, à Martigny : Éloge de la vie dangereuse. Je me rappelle que ça m'avait passionné. Je me souviens encore – vous voyez, j'ai plus ouvert ce livre, je ne saurais pas dire dans quelle partie des œuvres complètes il se trouve – je crois que c'est le premier récit ou le récit entier qui se termine sur quelque chose comme "J'ai tué mon premier homme à treize ans". Ça m'était resté. | |
| | | GrandGousierGuerin Sage de la littérature
Messages : 2669 Inscription le : 02/03/2013
| Sujet: Re: Blaise Cendrars [Suisse] Sam 31 Mai 2014 - 23:07 | |
| - animal a écrit:
- Pour Jack l'éventreur ? un autre extrait de l'entretien avec Maurice Chappaz posté hier sur le fil de l'auteur, question à propos de Blaise Cendrars donc :
- Citation :
- Vous le lisiez déjà à l'époque ?
Ah oui, on le lisait. Le livre de Cendrars qui m'avait passionné, c'était un tout petit livre que j'avais trouvé d'ailleurs dans ma ville, à Martigny : Éloge de la vie dangereuse. Je me rappelle que ça m'avait passionné. Je me souviens encore – vous voyez, j'ai plus ouvert ce livre, je ne saurais pas dire dans quelle partie des œuvres complètes il se trouve – je crois que c'est le premier récit ou le récit entier qui se termine sur quelque chose comme "J'ai tué mon premier homme à treize ans". Ça m'était resté. Dans les livres qui restent, je me rappelle encore bien de l'Or de Cendrars. Mais Moravagine ouvre beaucoup plus de champs et d'espace : je pense que son empreinte sera avec le temps bien plus pregnante. Qui lira saura | |
| | | Bédoulène Abeille bibliophile
Messages : 17270 Inscription le : 06/07/2007 Age : 79 Localisation : Provence
| Sujet: Re: Blaise Cendrars [Suisse] Dim 1 Juin 2014 - 0:16 | |
| déjà lu " L'or, l'Ebauge et la fin du monde"
donc à bientôt | |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Blaise Cendrars [Suisse] Dim 11 Jan 2015 - 0:42 | |
| J'avais été éblouie par la beauté de son poème La prose de la petite Jehanne de France et du Transsibérien... On y retrouve tellement ce que peut vivre une personne lorsqu'elle quitte son domicile pour partir dans un autre pays, l'écoute de chaque détail du train, on s'y croirait ! |
| | | Bédoulène Abeille bibliophile
Messages : 17270 Inscription le : 06/07/2007 Age : 79 Localisation : Provence
| Sujet: Re: Blaise Cendrars [Suisse] Dim 11 Jan 2015 - 8:27 | |
| j'ai l'intention de lire encore de ses livres, notamment le transsibérien, merci Marie J | |
| | | Bédoulène Abeille bibliophile
Messages : 17270 Inscription le : 06/07/2007 Age : 79 Localisation : Provence
| Sujet: Re: Blaise Cendrars [Suisse] Lun 12 Jan 2015 - 10:59 | |
| J’ai tué : Un prélude à la Main coupée, une très brève nouvelle, une écriture lapidaire comme le geste final.
La Main coupée L’auteur relate la vie de son escouade sur le front, engagé volontaire dans l'armée Française il est versé dans la Légion étrangère au début de la Grande Guerre. Le récit est composé de plusieurs chapitres anachroniques, sur les « sorties » de la section franche de l’escouade qui s’exercent la nuit en infiltrant les lignes ennemies. C’est comme l’appelle Blaise Cendrars, la « petite guerre » dans la grande guerre. C’est la vie dans les tranchées.
Certains chapitres évoquent quelques uns de ses compagnons, dont la spécialité, l’attitude ou la mentalité est significative de leur aptitude à être le ferment de l’escouade dont bien que non gradé il est cependant le responsable. Aimé de ses hommes, mais détesté, harcelé par les sergents, les sous-off, le colonel pour son attitude jugé « anarchiste », sa franchise, son irrévérence, lui qui confond et critique les gradés, et tout particulièrement les sergents qui ne font au front qu’un passage obligé et abandonnent rapidement les hommes et les lieux pour se réfugier dans d’autres plus sécures. Un seul, le capitaine Jacottet trouve grâce à ses yeux.
Cendrars perd le bras droit à la Ferme de Navarin. il est donc réformé.
La « petite guerre » et la vie dans les tranchées sont relatées par l’auteur, patiemment, les réussites sans vantardise, souvent avec humour comme un pied de nez à la guerre, parce que la guerre est ignoble.
Pourquoi, s’est-il engagé ? (cf l’appel aux Etrangers vivant en France dont il est l’un des signataires) pourquoi les autres se sont-ils engagés ? Pour certains par rachat, pour d’autres c’est une fuite, pour des raisons plus ou moins avouables, mais quand ils sont là-bas dans l’escouade Blaise est leur compagnon plus que leur « chef » parce qu’ ils se révèleront (presque tous) de confiance. On peut voir dans cet engagement, quelles qu'en soient les raisons une manière de rechercher un sens à leur vie.
C’est une escouade internationale que forme ces étrangers engagés volontaires , une représentation de ce que pourrait être l’amitié entre les peuples malgré leurs différences. C'est la Légion avec ce qu'elle représente, la mauvaise réputation mais aussi la bravoure.
Ce récit est aussi une critique de l’administration, de l’incompétence de certains responsables, de l’absurdité des décisions qui coutèrent la vie de millions de soldats. Il apparait dans ce récit que les corps des soldats tombés sont abandonnés , les descriptions sont terrifiantes.
Cendrars soulève aussi le fait bien connu que les soldats Allemands étaient bien mieux équipés que les soldats Français.
Les notes sont précieuses et utiles à la compréhension des faits et personnages nommés.
Quant à l’écriture elle éclate en poésie par moments, s’ écoule franche, agrémentée de mots d’argot et des chants qui paraissent indispensables aux soldats.
Extraits Plus de 20 ans plus tard « Les tumulus étaient nivelés, mais les croix des Légionnaires étaient rangées le long des murs et si les inscriptions étaient pour la plupart effacées, je retrouvai celle de Rossi dans les bras de son poirier, au mitant, et j’étais aussi fier de la croix de bois de Rossi, que, tout à l’heure, la comtesse en nous montrant la chambre où louis XIV avait couché »
« L’aube décousait le ciel dont les nuages bas étalés comme des pannes d’habits mal faufilés sur la table d’un tailleur laissaient voir l’endroit et l’envers, le drap, la doublure, la ouatine et le crin des rembourrages. Je contemplais avec consternation cette aube livide et sa défroque dans la boue. Rien n’était solide dans ce paysage dégoulinant, misérable, ravagé, loqueteux et moi-même j’étais là comme un mendiant au seuil du monde, trempé, glaireux et enduit de merde de la tête aux pieds, cyniquement heureux d’être là et de voir tout cela de mes yeux. »)
« Il y avait des tranchées qui n’avaient pas plus d’un mètre de profondeur et en bordure du bois il y en avait une qui n’était faite que de macchabées entassés. C’est là que prise dans les barbelés pendouillait une momie, un pauvre type tellement desséché et racorni que les rats qui avaient élus domicile dans son ventre le faisaient sonner et résonner comme un tambour de basque. »
« Dieu est absent des champs de bataille et les morts du début de la guerre, ces pauvres petits pioupious en pantalons rouge garance oubliés dans l’herbe, faisaient des taches aussi nombreuses mais pas plus importantes que des bouses de vache dans un pré. C’était pitoyable à voir.
A plusieurs reprises Biribi est cité dans le récit. Biribi c’est le bagne militaire en Afrique et c’est aussi une chanson d’Aristide Bruant
je reviendrais avec les autres récits | |
| | | Bédoulène Abeille bibliophile
Messages : 17270 Inscription le : 06/07/2007 Age : 79 Localisation : Provence
| Sujet: Re: Blaise Cendrars [Suisse] Mar 13 Jan 2015 - 15:24 | |
| L’égoutier de Londres
B.Cendrars revient sur l’une des figures de la Main coupée, l’un de ceux qui faisait partie de la « section franche », l’Anglais Griffith. Lequel est arrivé avec les « vieux » légionnaires d’Afrique, ceux de Siddi-Bel-Abbès, destinés à renforcer ou encadrer le « 3ème déménageur » surnom de la section dû à sa mobilité.
C’est une histoire de secrets, celui de Griffith, l’égoutier de Londres qui ne le révéla jamais, c’est l’honneur de cet homme d’avoir tenue sa parole. C’est le secret de la prison de Siddi-bel-Abbès que ni les murs ni les hommes ne révélèrent.
Il faut aussi souligner que B. Cendrars parlait plusieurs langues, ce qui facilitait les rapports avec les Légionnaires ; il était d’ailleurs appelé par les gradés pour traduire les paroles des prisonniers Allemands. (B.Cendrars explique que le régiment des « parisiens » était le plus intellectuel)
Dans le silence de la nuit
L’écriture ressuscitée de Blaise Cendrars, par l’évocation d’une nuit par un ami, alors qu’il n’avait plus écrit depuis Juin 40, avec la main qu’il dit « amie », celle qui lui reste, la main gauche qu’il lui a fallu apprivoiser.
Par temps calme dans cette partie du front, une pause, les vieux légionnaires et les anciens de l’escouade de Blaise C. allaient se « ravitailler » en vins à l’arrière et se saoulaient copieusement. A la suite d’une rixe opposant 2 sergents, celui qui était devenu « tenancier » d’une cave improvisée et un sergent « client », la cave fut transformée en poste défensif.
Mais à nouveau le danger est là avec sa cohorte d’horreurs
« En effet, comme nous partions à l’assaut , il fut emporté par un obus et j’ai vu, j’ai vu de mes yeux qui le suivaient , j’ai vu ce beau légionnaire être violé, fripé, sucé et j’ai vu son pantalon ensanglanté retomber vide sur le sol, alors que l’épouvantable cri de douleur que poussait cet homme assassiné en l’air par une goule invisible dans sa nuée jaune retentissait plus formidable que l’explosion même de l’obus et j’ai entendu ce cri qui durait encore, alors que le corps volatilisé depuis un moment n’existait déjà plus. »
L’attente, celle dans l’affût, celle dans la pause est déprime, l’escouade s’étiole : tués, déserteurs, blessés, mutés….
Les souvenirs affluent de nuits sur le front ; nuit muette, nuit de saoulerie, nuit de mascarade, nuit d’affût , de poésie et de peur.
« Un soldat qui n’a jamais eu peur au front n’est pas un homme »
A la faveur de la confidence d’ un drogué B. Cendrars s’interroge sur les raisons personnelles des patrouilles en solitaire qu’il s’autorise. Quel sens leur donner ?
J’ai saigné
C’est le seul texte où Blaise Cendrars parle de son amputation
« …ne pouvant faire un mouvement, gêné que j’étais comme une accouchée par son nouveau-né, par l’énorme pansement, gros comme un poupon, qui se serrait contre mon flanc… »
Avec la métaphore que représente cette naissance c’est surtout l’emploi du verbe qui montre une volonté , vivre.
Et il sera question dans ce récit de beaucoup de volonté, de dévouement.
Ces différents récits sur la guerre, plus spécialement « la petite guerre » sont aussi des réflexions sur la nature humaine.
Blaise Cendrars dit son écoeurement, sa déception sur certains, sa reconnaissance, son respect pour d’autres, il fait preuve d’empathie allant parfois jusqu’à intervenir dans la vie personnelle de ses hommes, à leur demande, c’est dire combien ils l’appréciaient.
Blaise Cendrars a avoué n’avoir pas écrit un ligne pendant la guerre, mais par contre il lit dès qu’il en a la possibilité, il exprime d’ailleurs son sentiment de lecteur.
C’était une très bonne lecture et j’ai trouvé intéressant que certains chapitres soient consacrés à des personnages de l’escouade.
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| | | shanidar Abeille bibliophile
Messages : 10518 Inscription le : 31/03/2010
| Sujet: Re: Blaise Cendrars [Suisse] Jeu 15 Jan 2015 - 11:13 | |
| Rhum (j'adore cette couverture mais impossible de trouver le nom de celui qui l'a réalisée, si quelqu'un peut m'aider...)Je ne sais toujours pas pourquoi mais il fallait que je commence par Rhum pour découvrir Cendrars. Depuis le temps que cet auteur se présente à moi sous diverses formes (animal, signature de Bédou, Enard…), il fallait bien que je succombe… Je m'attendais à un récit de voyage(s), si possible sur des terres de cannes à sucre, d'esclaves et de jungle. C'est en partie le cas mais pas complètement (d'où une légère déception, en tout cas je ne suis pas aussi séduite que l'a été animal...). Car Rhum est en réalité un reportage, écrit par Cendrars sur un homme dont plus personne ne se souvient : Jean Galmot, aventurier, député de Guyane, entrepreneur et taulard mais surtout personnage honnête. L'homme a connu la gloire et la perte de ses richesses, l'exil en Guyane d'où il revient plus riche encore mais il entre en politique, désire rendre sa liberté au peuple guyanais et ouvrir sa firme à tous les marchés du monde. Opportuniste ? Libertaire ? Commerçant ? Sans doute un peu les trois, mais en tout cas, il commet la lourde erreur de devenir député. Alors les hommes politiques français et les financiers feront tout pour l'abattre et y parviendront. Je reste étonnée par deux éléments (que je ne peux m'empêcher de mettre en relation avec notre contemporanéité) : d'abord le marchand Galmot est un homme honnête (on ne sait pas trop aujourd'hui où cette engeance a disparu ??), il se bat pour lui-même et pour les Guyanais, pour ce pays de jungle qu'il a fait sien et qui l'a adopté. Le scandale des rhums (que je ne cherche même pas à m'expliquer clairement) qui l'éclabousse le jettera en prison et le ruinera, alors qu'il continue à plaider son innocence. A l'heure où la plupart des fraudeurs-politiques ne passent même plus par la case prison et empochent tout de même le gain de la case départ, on s'afflige pour ce Don Quichotte de la finance, écrivain à ses heures*, fatigué par les fièvres. Deuxième élément : la collusion (ici évidente) entre le monde des affaires (et des banques en particulier) avec celui des politiques n'a rien à envier (en 1920) avec le nôtre. Non, non, rien n'a changé… Et c'est peut-être là le plus triste… Quant à Cendrars, ce reportage montre sa gouaille, son allant, sa vindicte (très correcte à l'égard des vils persécuteurs) et son profond attrait/respect pour l'étranger (dans toutes les acceptions du terme). Il se tire même très bien de l'exercice journalistique en n'hésitant pas à rappeler les grands engagements de Galmot (y compris lors de l'affaire Dreyfus) ou l'attachement magique (le vaudou n'est guère loin) entre un peuple noir et son député blanc. En somme, ce texte apéritif donne bien envie d'aller plus loin. (*) Deux romans sont publiés au Serpent à plumes... | |
| | | animal Tête de Peluche
Messages : 31548 Inscription le : 12/05/2007 Age : 43 Localisation : Tours
| Sujet: Re: Blaise Cendrars [Suisse] Jeu 15 Jan 2015 - 12:58 | |
| pour le rhum un résumé sur ce blog : Jean Galmot : son histoire ?
j'ai hâte d'y retourner à Cendrars. | |
| | | Bédoulène Abeille bibliophile
Messages : 17270 Inscription le : 06/07/2007 Age : 79 Localisation : Provence
| Sujet: Re: Blaise Cendrars [Suisse] Lun 26 Jan 2015 - 10:48 | |
| Moravagine !
Déjà le titre m’interpelle : mor , ravage Moravagine ! Malaise dès le début de la lecture. Qui et pourquoi accompagner pendant des années un homme dans sa folie ? Qu’est-ce qui attire le narrateur chez Moravagine ? qu’est-ce qui le séduit ? Des raisons à découvrir dans sa propre âme. Il voit et reconnait peut-être sa part d’ombre dans Moravagine, dans sa folie qui pourrait être la sienne. Le cerveau humain est un inconnu, même pour son propriétaire. Tout au long de cette aventure morbide le narrateur (Raymond) s’interrogera sur certains aspects et réactions de Moravagine mais aussi sur les siens. Il assumera ses idées sur la société, le masochisme de la religion juive, la révolution, la médecine et plus particulièrement la psychiatrie.
Comme l’assure B. Cendrars c’est l’Autre Je qui écrit. Si les explications de l’auteur permettent de comprendre ce qui l’ a longtemps lié à Moravagine, son état d’esprit à certaine période, l’écriture périodique, la difficulté à poursuivre, la lettre du Dr Ferral elle est claire : B. Cendrars a tué son double au point final.
Les longues énumérations dans les descriptions accentuent l’ambiance lourde de même les paysages souvent inamicaux ; les nombreuses fuites, les poursuites qui suggèrent l’urgence .
L’intervention de B. Cendrars dans la fin de l’aventure m’a rappelé celle d’ Hitchcock dans ses films.
Ce fut encore une lecture intéressante mais qui coûte, il faut aussi que le lecteur parvienne en s’en détacher.
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