Jacques Sternberg [Belgique]

Jacques Sternberg (1923-2006) est un auteur, journaliste et réalisateur belge qui mêle dans son travail le fantastique et l'humour.

C'est auteur qui mérite d'être lu et connu. Je ne le connaissais pas avant de découvrir son livre L'employé dans une bouquinerie. Et je suis ravie.

Voici la présentation du livre sur la quatrième de couverture : « Ce roman fait exploser la réalité quotidienne. En mêlant ce qui existe péniblement au jour le jour et ce qui est impossible, il met à mal tous les principes. En allongeant, puis en rétrécissant le temps, en élargissant puis en compressant l’espace, il provoque un vertige qui trouble même les chiffres et les mots ; en perturbant les repères et les normes, il impose une (in)certitude nouvelle et provisoire : « je change donc je suis ». Mais qui est-il donc, cet employé ? Il n’arrête pas de se le demander, pendant l’énorme minute qui sépare dix heures cinq de dix heures six. »

Dans ce livre, il s’agit bien d’un employé qui cherche sa place et un sens à ce qu’il fait, à ce que tous les hommes font et qui montre toute l’absurdité et la monotonie répétitive de nos vies.

Ce livre est explosif… Dès le début, Sternberg emporte le lecteur dans cet univers totalement surréaliste et fantasmagorique où le quotidien est tourné en ridicule, est redéfini, est fantastique. Il utilise tous les sens des mots et les détourne. Ce livre est d’une richesse syntaxique et verbale incroyable. Il joue avec le temps, avec l’espace, avec la réalité. C’est fabuleux.


Je ne suis pas du tout habituée à lire ce genre de textes et je pense que ce style de narration est typiquement belge. Ce que propose Sternberg est terrible. On n’en sort pas, on suffoque, on rit, on a peur et toutes ces émotions ce sont les phrases qui nous les donnent, l’agencement de celles-ci et leur rythme.

Site intéressant consacré à l'auteur : http://jacques.sternberg.free.fr/

LaurenceV a écrit:

je pense que ce style de narration est typiquement belge.

Héhé...Qu'est-ce qu'une narration typiquement belge?...

En fait, c'est juste une constatation faite par rapport à tous les auteurs belges que j'ai lus... Enfin, ceux de cette époque. Ils sont différents mais il y a toujours cette ressemblance, cette sensation d'être chez soi dans l'écriture... C'est la tournure des phrases et le ton de la narration que je retrouve chez d'autres auteurs...

Ce n'est que du ressenti Coline...

LaurenceV a écrit:

cette sensation d'être chez soi dans l'écriture... ...

Très jolie formule Laurence...

Merci Coline... C'est un sentiment agréable aussi...

Merci pour cette belle présentation Laurence.
Tes phrases interpellent

LaurenceV a écrit:

Ce livre est explosif… Dès le début, Sternberg emporte le lecteur dans cet univers totalement surréaliste et fantasmagorique où le quotidien est tourné en ridicule, est redéfini, est fantastique. Il utilise tous les sens des mots et les détourne. Ce livre est d’une richesse syntaxique et verbale incroyable. Il joue avec le temps, avec l’espace, avec la réalité. C’est fabuleux

Je regarderai à l'occasion cet écrivain. J'aime beaucoup le cinéma belge mais des auteurs, Bauchau est sans doute celui qui me touche le plus...

Je retrouve un peu ce que tu décris, cette façon de détourner le quotidien, de le rendre ridicule ou fantastique, typiquement belge je pense, dans les films de Van Doermel ou ceux des frères Dardenne
Des émotions contraires qui déroutent et captivent tout autant.

Merci Aériale...

Je n'ai jamais lu Bauchau. (Honte sur moi !) Sternberg est un auteur à découvrir à tête reposée... Parfois, on a du mal à suivre mais c'est génial.

Tu as tout à fait raison en ce qui concerne le cinéma belge. On peut aussi ajouter Benoît Mariage qui a réalisé Les convoyeurs attendent ou Bouli Lanners.

Nous avons d'excellents réalisateurs qui offrent un cinéma différent du cinéma français et américain.

Laurence

Une partie de ce que tu décris m'attire dans ce bouquin, et l'autre me fait un peu trainer des pieds pour le découvrir...

J'ai peur que l'univers du roman soit trop tarabiscoté pour moi, et que ce que tu décris comme une mise en exergue de l'absurdité de notre quotidien ne soit un peu noyé par ce coté farfelu. C'est le cas ? Tu penses que le bouquin peut aussi s'adresser à des lecteurs hermétiques à la littérature fantastique dans mon genre ?

Je ne lis pas non plus de littérature fantastique (ou très rarement). Mais ici, le quotidien est totalement démonté grâce à l'écriture et aux images proposées... Il n'est pas toujours facile à suivre et parfois un lecteur peu réceptif à un imaginaire totalement surréel aura du mal à poursuivre sa lecture.

Donc, ce n'est pas un livre que je conseille à tout le monde. (Tout dépend de leurs goûts).

Je suis ramené grâce au forum du coté de ma bibliothèque où sont rangés mes quelques bouquins de Sternberg. Parmi eux trois exemplaires de "la revue qui n'a strictement rien à vendre , ou à louer": MEPRIS.
Je feuillette le n° 1 et voici un petit texte qui tombe à pic en ce jour où commencent à tomber les prix littéraires annuels:
PRIX
Chaque année, la littérature se concocte son petit suspense parallèle au tiercé: quels humbles tricoteurs de romans décrocheronts le Goncourt, le Renaudot et le Fémina. Comme chaque année, les critiques découvrent au gré des jours cinquante véritables révélations, trente éblouissantes réussites, vingt chefs-d'œuvre et une bonne centaine d'œuvres d'un intérêt tout particulier; ces mêmes critiques qui beugleront, un mois plus tard, que le roman se meurt de phtisie en France et que plus rien n'émerge du désert depuis trente ans. Mais au fait, comment font les membres des jurys pour départager tous ces concurrents romanesques qui, à une virgule près, se valent tous dans la médiocrité et qui, à quelques adjectifs près, ont tous écrit le même roman ? On les tire au sort dans un chapeau ? On le juge au poids sur une balance de charcutier ? On les couronne au cours d'une séance de colin-maillard ? Comment ferait-on exactement pour désigner un champion olympique parmi deux cents partants qui feraient tous les 100 mètres en 25 secondes ?
MEPRIS N°1 - Octobre/Novembre 1973