Le cri d'AntigoneAdaptation, conception :
Géraldine Bénichou d’après
Antigone, le roman de
Henry Bauchau.
Avec la comédienne
Magali BonatEt le chanteur
Salah GaouaJe reprends des éléments de ce que je disais sur ce texte de Bauchau :
Un magnifique texte épique et poétique.
Après la mort de son père qu’elle a accompagné sur la route jusqu’à Colone, Antigone reprend le chemin vers Thèbes. Elle berce l’espoir de pouvoir empêcher la guerre entre ses deux frères tant aimés, Polynice et Etéocle.
[…] Dès l’enfance, ils se sont affrontés malgré leur amour et leur admiration réciproques. […]
Parvenus à l’âge adulte, les deux frères se livrent à une rivalité violente et incessante dont le but est pour chacun de régner sur Thèbes.
Antigone ne peut empêcher cette guerre fratricide qui ruine le peuple et Antigone se met à son service. Pour l’aider à survivre, elle va par les rues refaire ce qu’elle a appris lors du voyage avec Œdipe. Mendier. Mendier pour acheter des médicaments, obtenir de la nourriture. Elle sait le faire.
"
Je veux devenir ce que je suis vraiment: une mendiante". Elle mendie et son cri bouleverse tous ceux qui l’entendent. Pour secourir les malades et les blessés de Thèbes, elle obtient beaucoup…
« Finalement, au fil des années, nous avons beaucoup reçu et c’est ce don pauvre mais perpétuel qui a rattaché Œdipe à la vie. Demander, recevoir parce qu’on a eu la confiance de demander, on s’aperçoit alors qu’on ne mendie pas seulement pour survivre, on mendie pour n’être plus seul. »Le cri d’Antigone, nous ne l’entendrons pas…C’est le corps de la comédienne
Magali Bonat qui toujours dessine le cri tandis que s’élève une voix empreinte de douceur. Celle de
Salah Gaoua qui chante des textes sacrés en Arabe et en kabyle.
Lorsque Créon, l’oncle devenu roi de Thèbes, décide que seul Etéocle recevra une sépulture, Antigone se jette dans un dernier combat pour rendre justice à Polynice. Ce combat la mènera à sa propre mort.
« Quand il annonce que le corps de Polynice doit pourrir sans sépulture, je ne puis plus contenir mon cri. L’indignation, la colère s’échappent de mon corps et vont frapper de front le mufle de la ville avec l’énorme fardeau de douleur, de bêtise et d’iniquité qu’elle fait peser sur moi et sur toutes les femmes. Oui, moi Antigone, la mendiante du roi aveugle, je me découvre rebelle à ma patrie, définitivement rebelle à Thèbes, à sa loi virile, à ses guerres imbéciles et à son culte orgueilleux de la mort » Une petite salle, une mise en scène épurée, chaque image, chaque objet a un sens (il y en a peu) et contribue à créer symboliquement et justement un univers d’une grande beauté.
Le jeu de la comédienne est puissant et sensible, sa voix aussi qui nous envoûte. Chacun de ses gestes participe de cette chorégraphie du cri.
On sort du spectacle ému et séduit, ébloui.