Budd Schulberg

Budd Schulberg vient de mourir à 95 ans,je crois.S'il fut l'un des grands auteurs à Hollywood Schulberg n'a pas attendu le cinéma pour savoir écrire romans et nouvelles dont les cinéphiles ont retenu notamment Un homme dans la foule,Plus dure sera la chute,Sur les quais.Fils d'un ponte de Paramount,élevé dans le sérail il a écrit sur ce sujet Qu'est-ce qui fait courir Sammy? et Le désenchanté.

Le désenchanté fut publié en 1950.S'il est inspiré de la chute de Scott Fitzgerald Budd Schulberg nous donne là une oeuvre follement romanesque dans le bon sens,peignant dans un même maelstrom les débuts de la folie de Zelda(ici nommée Jere) et la débandade boursièrede la fin des Roaring Twenties.Dans romanesque il y a roman et quel roman,quelle histoire fabuleuse de champagne et de gueules de bois,de parties dignes de Gatsby et de déchéances tôt venues.
Manley Halliday qui fut il y a presque vingt ans un écrivain adulé se voit contraint à faire le tacheron pour les producteurs d'Hollywood(attention,pas tous incultes).Cornaqué par un jeune espoir du scénario,fauché comme c'est pas permis,retrouvera-t-il le génie,ou simplement le talent,ou encore plus simplement la recette du retour en grâce?
Schulberg traite admirablement d'un univers qu'il connaît bien.De Manhattan à Paris,de Berlin aux Alpes enneigées,zébré de retours au passé parfaitement inclus dans la progresssion qui va vers l'ultime,Le désenchanté est un très grand livre pas seulement sur l'usine à rêves,mais plus sûrement sur la brûlure d'un talent phénix qui n'en finit pas de ne pas renaître.

Uhn homme dans la foule et Visages d' Hollywood -Rivages Poche-
deux excellents recueils de nouvelles, écrites entre 1938 et 1953...

Des portraits des milieux hollywoodiens et de la boxe que Schulberg connaissait bien.

Un homme dans la foule a été adapté par Kazan et Schulberg était également le scénariste de Sur les quais.

Je ne pensais pas que Le désenchanté avait autant de force.La fin notamment est hallucinante avec l'alcool en meilleur second rôle.Je me répète,un très grand bouquin.Pour Kazan,excellent Kazan,une Amérique du chaos de Florence Colombani,déjà cité peut-être.

Un homme dans la foule, c' est l' histoire de l' ascension irrésistible
d' un chanteur de folk song, sorti d' un bled pourri du Nebraska.
Grace à la complaisance d' une animatrice de radio locale, et aussi
à son bagout et à sa roublardise, il commence à attirer l' attention.
Entre deux couplets, il parle de sa famille et de leurs propos de table.

Derrière ses propos, s' affiche tout ce qu' il y a de pire, la démagogie, le racisme, le nationalisme, le machisme.
Son succès est quasi immédiat et il finit pas se propulser à New York, s' entoure de publicistes et vend sa parole aux plus célèbres
médias de l' époque : la radio.
Il vit dans le luxe et devient de plus en plus mégalo et cynique.

Mais il a deux faiblesses graves : il ne croit ni en lui meme ni dans les propos qu' il tient. Seule la femme qui l' a aidé lui donne la confiance dont il a besoin.
L' autre faiblesse, c' est l' alcool.
Deux faiblesses de trop. Il mourra bourré et désespéré dans l' escalier de son hotel.
Mais il aura droit à des obsèques nationales organisées par ses 'associés".
Le spectacle continue !

Budd Schulberg est un excellent nouvelliste, au plus près de la réalité qu' il décrit sobrement.
Et cette fable est une métaphore de l' Amérique et de ces hommes
providentiels, precheurs, éveques, chefs de secte, qui à l' image
d' un Billy Graham se taillèrent un succès phénoménal dans les
médias et à la télévision.
Une bonne image aussi du show médiatico politique auquel nous
sommes habitués désormais.

Elia Kazan adapta la nouvelle et ce fut aussi un de ses premiers films.

Je viens de dévorer en trois jours les 430 pages de "Qu'est-ce qui fait courir Sammy ?", nouvelle traduction publiée par "Encre de nuit Américaine" en 2003.

Ce roman porte sur les pratiques professionnelles du tout Hollywood.

Al Mannheim, un journaliste New-Yorkais qui partira ensuite pour Hollywood, décrit l'ascension jusqu'à la tête d'un studio de production Hollywoodien de Sammy, un homme sans scrupules.

Ce narrateur offre au lecteur l'exposition des faits, des conversations, mais aussi et surtout des analyses de ce qu'il voit et entend et c'est ce qui est le plus intéressant.

Très drôle au début quand les entourloupes de Sammy n'ont que peu de conséquences, le roman se fait de plus en plus sérieux...

À tout moment, l'histoire est parfaitement crédible...

Et ce qui étonne le plus, au fur et à mesure que progresse la lecture, c'est que l'on ne se rend compte que ce livre a été publié en 1941 qu'à de très rares occasions (quelques paragraphes sur plus de 400 pages).






Le personnage de Sammy Glick nous montre les ravages que peuvent causer l'ambition et les effets produits par le plus hypocrite des bagouts, la peur qui motive le tout et la réussite sociale qui en résulte.

Le personnage du narrateur Al Mannheim révèle les conséquences du comportement opposé : droiture, scrupules, courage et leur sanction : l'absence de réussite sociale.

Ce que j'ai le plus aimé :
- L'opposition entre ces deux personnages
Le fait que Mannheim, en tant que narrateur-observateur-analyste du comportement de Glick aide vraiment le lecteur à décrypter les paroles de l'arriviste.
- Le style jamais ennuyeux
- Les description des lieux très bien rédigées

En conclusion, un très bon livre que je conseille à tous.

En 1938, il partage le bureau d'un écrivain qu'il croyait mort : Francis Scott Fitzgerald. « Il incarnait le génie, mais aussi la destruction morale. Toute mon oeuvre parle du succès qui tue, le mal des Etats-Unis. »De cette cohabitation Schulberg tirera en 1950 un époustouflant roman du déclin, « Le désenchanté », qui fait pendant à « Sammy ».

À la suite de la publication de « Qu'est-ce qui fait courir Sammy ? », en 1941, de grands patrons de studio, qui se sont reconnus dans Sammy, ce grouillot arriviste se propulsant producteur avec la délicatesse de l'ouragan, l'accusent de cracher dans la soupe.

Persona non grata, il s'engage en 1941 dans la Navy, où il est récupéré par l'ami John Ford pour son unité documentaire. En 1944, il débarque en France, où ses talents de scénariste sont mis au service de l'OSS (l'ancêtre de la CIA) : « J'inventais des vies fictives à nos agents. »En mai 1945, il est envoyé à Berlin pour prouver les crimes nazis. « Les SS avaient leur département de cinéma. On a mis la main sur leurs monteurs qui m'ont emmené dans de petits villages où les films étaient cachés. »L'ensemble débouche sur « The Nazi Plan », projeté au procès de Nuremberg.

En 1947, il a consacré "Plus dure sera la chute" au milieu de la boxe, ce sera le dernier film de Bogart. Schulberg y cogne sur la corruption dans les milieux pugilistes.

En 1954, il a obtenu un oscar au meilleur scénario pour le film d'Elia Kazan "Sur les quais" avec Marlon Brando et Eva Marie Saint (la blonde de "La mort aux trousses" d'Hitchcock).

En 1957, dans "Un homme dans la foule", il dénonce la manipulation de l'opinion publique par les médias.

Dans « Sanctuary V », il met en scène un héros pacifiste, qui, au nom de la révolution, se mue en oppresseur tyrannique. L'histoire de Castro.

Donc, en résumé :
1941 :« Qu'est-ce qui fait courir Sammy ? »
1945 : travaille sur « The Nazi Plan », projeté à Nuremberg
1947 :« Plus dure sera la chute »
1950 :« Le désenchanté »
1954 :« Sur les quais », pour lequel il obtient l'oscar du meilleur scénario
1957 :« Un homme dans la foule » (scénario)
1958 :« La forêt interdite », de Nicholas Ray (scénario)
1969 :« Sanctuary V »
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