Les bas-fonds de Maxime Gorki
Première au Berliner Ensemble, l’ancienne scène berlinoise de Bertolt Brecht. Le grand et vieux metteur en scène allemand Thomas Langhoff (fils de Wolfgang, frère de Matthias – plus connus en France et en Suisse) signe la mise en scène de « Les bas-fonds » de Gorki.
La scène montre un squat aménagé en asile de nuit pour sans-abris, des matelas sur 3 étages, les murs bâchés de plastique, la musique provenant d’une radio situe l’action en ce début de XXIe siècle et pas 100 ans auparavant quand Gorki a écrit sa pièce. Pas de changement de décor pendant la pièce seule la lumière indique le passage d’un acte au suivant. Les vêtements des acteurs montrent une certaine recherche dans la pauvreté sordide. Comme spectatrice au fond de la salle j’ai éprouvé un certain malaise de voyeurisme social envers le pittoresque de la société des rejetés d’aujourd’hui.
La pièce de Gorki montre des voleurs, des assassins, des squatteurs plus jeune, un ouvrier étranger, un acteur déchu, un serrurier et sa jeune femme tuberculeuse, tous des miséreux et pour beaucoup tombés dans l’alcoolisme, qui n’ont trouvé domicile que dans ce bouge tenu par une famille de petits hôteliers. Les conversations tournent autour de la vie, la mort, l’amour et une petite intrigue entre le voleur, amant de l’hôtelière, qui s’en détourne au profit de sa jeune sœur.
Comme chez Tchékhov, Gorki travaille par petit récits de cette vie endormie, agonisante dans la misère. Apparaît Luka, un vieux, se présentant comme pèlerin, mais un sans-papiers comme ses frères d’infortune. Ce n’est pas une figure qui exprime l’opinion de l’auteur mais ses dires possèdent une ambigüité qui permet au metteur de scène de l’interpréter. En mon opinion ce Luka (joué par un acteur connu en Allemagne, Christian Grashof) montre son humanité sur scène par sa simplicité de vieil homme, qui répète des vérités de vieux, des sagesses tout droit sorties de l’almanach du Messager boiteux et qui sait simplement s’exprimer un peu mieux que les alcoolos autour de lui. Il fait preuve de l’empathie qui manque aux autres, au moment de la mort d’Anna, la jeune tuberculeuse.
Mis à part deux ou trois autres exceptions (le cynique Satin – joué par Alexander Lang ; le vieil acteur alcoolique sans nom et pourtant très digne malgré sa mémoire perdue – joué par Roman Kaminski) le jeu des acteurs me semble dans l’ensemble encore loin d’être à la hauteur de leur savoir-faire habituel. Peut-être un défaut qui va se gommer avec le temps.
En résumé, une soirée de théâtre pas mauvaise dans son ensemble mais plutôt conventionnelle de réalisme naïf et un tantinet poussiéreux.