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| Jean de La Fontaine | |
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+6Max Onuphrius Anne swallow sousmarin Marie 10 participants | Auteur | Message |
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Marie Zen littéraire
Messages : 9564 Inscription le : 26/02/2007 Localisation : Moorea
| Sujet: Jean de La Fontaine Ven 15 Juin 2007 - 9:19 | |
| Les Animaux malades de la pesteUn mal qui répand la terreur, Mal que le Ciel en sa fureur Inventa pour punir les crimes de la terre, La Peste (puisqu'il faut l'appeler par son nom) Capable d'enrichir en un jour l'Achéron, Faisait aux animaux la guerre. Ils ne mouraient pas tous, mais tous étaient frappés : On n'en voyait point d'occupés A chercher le soutien d'une mourante vie ; Nul mets n'excitait leur envie ; Ni Loups ni Renards n'épiaient La douce et l'innocente proie. Les Tourterelles se fuyaient : Plus d'amour, partant plus de joie. Le Lion tint conseil, et dit : Mes chers amis, Je crois que le Ciel a permis Pour nos péchés cette infortune ; Que le plus coupable de nous Se sacrifie aux traits du céleste courroux, Peut-être il obtiendra la guérison commune. L'histoire nous apprend qu'en de tels accidents On fait de pareils dévouements : Ne nous flattons donc point ; voyons sans indulgence L'état de notre conscience. Pour moi, satisfaisant mes appétits gloutons J'ai dévoré force moutons. Que m'avaient-ils fait ? Nulle offense : Même il m'est arrivé quelquefois de manger Le Berger. Je me dévouerai donc, s'il le faut ; mais je pense Qu'il est bon que chacun s'accuse ainsi que moi : Car on doit souhaiter selon toute justice Que le plus coupable périsse. - Sire, dit le Renard, vous êtes trop bon Roi ; Vos scrupules font voir trop de délicatesse ; Et bien, manger moutons, canaille, sotte espèce, Est-ce un péché ? Non, non. Vous leur fîtes Seigneur En les croquant beaucoup d'honneur. Et quant au Berger l'on peut dire Qu'il était digne de tous maux, Etant de ces gens-là qui sur les animaux Se font un chimérique empire. Ainsi dit le Renard, et flatteurs d'applaudir. On n'osa trop approfondir Du Tigre, ni de l'Ours, ni des autres puissances, Les moins pardonnables offenses. Tous les gens querelleurs, jusqu'aux simples mâtins, Au dire de chacun, étaient de petits saints. L'Ane vint à son tour et dit : J'ai souvenance Qu'en un pré de Moines passant, La faim, l'occasion, l'herbe tendre, et je pense Quelque diable aussi me poussant, Je tondis de ce pré la largeur de ma langue. Je n'en avais nul droit, puisqu'il faut parler net. A ces mots on cria haro sur le baudet. Un Loup quelque peu clerc prouva par sa harangue Qu'il fallait dévouer ce maudit animal, Ce pelé, ce galeux, d'où venait tout leur mal. Sa peccadille fut jugée un cas pendable. Manger l'herbe d'autrui ! quel crime abominable ! Rien que la mort n'était capable D'expier son forfait : on le lui fit bien voir. Selon que vous serez puissant ou misérable, Les jugements de cour vous rendront blanc ou noir. | |
| | | sousmarin Zen littéraire
Messages : 3021 Inscription le : 31/01/2007 Localisation : Sarthe
| Sujet: Re: Jean de La Fontaine Lun 18 Juin 2007 - 12:15 | |
| LE LOUP ET LE CHIEN (*)
Un loup n'avait que les os et la peau, Tant les chiens faisaient bonne garde. Ce loup rencontre un dogue aussi puissant que beau, Gras, poli (1), qui s'était fourvoyé par mégarde. L'attaquer, le mettre en quartiers, Sire loup l'eût fait volontiers. Mais il fallait livrer bataille, Et le mâtin était de taille A se défendre hardiment. Le loup donc l'aborde humblement, Entre en propos, et lui fait compliment Sur son embonpoint, qu'il admire. Il ne tiendra qu'à vous, beau sire, D'être aussi gras que moi, lui repartit le chien. Quittez les bois, vous ferez bien: Vos pareils y sont misérables, Cancres(2), haires (3), et pauvres diables, Dont la condition est de mourir de faim. Car quoi ? rien d'assuré, point de franche lippée (4). Tout à la pointe de l'épée. Suivez-moi ; vous aurez un bien meilleur destin. Le loup reprit : Que me faudra-t-il faire ? Presque rien, dit le chien : donner la chasse aux gens Portants bâtons, et mendiants (5); Flatter ceux du logis, à son maître complaire ; Moyennant quoi votre salaire Sera force reliefs de toutes les façons (6) : Os de poulets, os de pigeons, Sans parler de mainte caresse." Le loup déjà se forge une félicité Qui le fait pleurer de tendresse. Chemin faisant, il vit le col du chien pelé : Qu'est-ce là ? lui dit-il. Rien. Quoi ? rien ? Peu de chose. Mais encor ? Le collier dont je suis attaché De ce que vous voyez est peut-être la cause. Attaché? dit le loup : vous ne courez donc pas Où vous voulez ? Pas toujours, mais qu'importe ? Il importe si bien, que de tous vos repas Je ne veux en aucune sorte, Et ne voudrais pas même à ce prix un trésor." Cela dit, maître loup s'enfuit, et court encor.
(*) Les sources de la fable sont Phèdre (III,7) (traduction Sacy) qui s'inspirait lui-même d'Esope (Névelet)
(1) le poil luisant (2) se dit proverbialement d'un homme pauvre qui n'est capable de faire ni bien ni mal (Furetière) (3) homme qui est sans bien ou sans crédit (Furetière) (4) signifie au propre autant de viande qu'on en peut emporter avec la lippe, ou les lèvres (Furetière) (5) portants et mendiants prennent un "s", pourtant, ce sont des participes présents; ce n'est qu'à partir de 1679 que l'Académie déclarera qu'ils doivent rester invariables. (6) restes Belle illustration de la liberté dit-on, moi j’y vois plutôt une ode à l’intégrité…quand on n'y pense l’intégrité c’est la liberté de l’âme…corollaire essentielle à la liberté tout court… La grande qualité de ce texte, et de La Fontaine en général, c’est que, les sens y étant multiples, chaque lecteur en trouve toujours un qui le touche (y compris les puissants de l’époque)…serait-ce là la marque d’un grand poète ? | |
| | | swallow Sage de la littérature
Messages : 1366 Inscription le : 06/02/2007 Localisation : Tolède. Espagne.
| Sujet: Re: Jean de La Fontaine Jeu 27 Aoû 2009 - 10:37 | |
| BIX, tu parlais ce matin de Pontalis, sur un autre fil du Forum, tu citais son dernier ouvrage ("Le songe du Monomotapa"). Profitons-en une fois de plus pour ne pas perdre les bonnes habitudes, et remontons en amont de tout. Pourrait-il y avoir une amitié plus totale, empressée que celle dont parle La Fontaine? Lisons "Les deux amis":
Deux vrais amis vivaient au Monomotapa : L'un ne possédait rien qui n'appartînt à l'autre : Les amis de ce pays-là Valent bien dit-on ceux du nôtre. Une nuit que chacun s'occupait au sommeil, Et mettait à profit l'absence du Soleil, Un de nos deux Amis sort du lit en alarme : Il court chez son intime, éveille les valets : Morphée avait touché le seuil de ce palais. L'Ami couché s'étonne, il prend sa bourse, il s'arme ; Vient trouver l'autre, et dit : Il vous arrive peu De courir quand on dort ; vous me paraissiez homme À mieux user du temps destiné pour le somme : N'auriez-vous point perdu tout votre argent au jeu ? En voici. S'il vous est venu quelque querelle, J'ai mon épée, allons. Vous ennuyez-vous point De coucher toujours seul ? Une esclave assez belle Était à mes côtés : voulez-vous qu'on l'appelle ? — Non, dit l'ami, ce n'est ni l'un ni l'autre point : Je vous rends grâce de ce zèle. Vous m'êtes en dormant un peu triste apparu ; J'ai craint qu'il ne fût vrai, je suis vite accouru. Ce maudit songe en est la cause. Qui d'eux aimait le mieux, que t'en semble, Lecteur ? Cette difficulté vaut bien qu'on la propose. Qu'un ami véritable est une douce chose. Il cherche vos besoins au fond de votre cœur ; Il vous épargne la pudeur De les lui découvrir vous-même. Un songe, un rien, tout lui fait peur Quand il s'agit de ce qu'il aime.
Fables Second recueil (1678), fable 11 .
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| | | Anne Envolée postale
Messages : 139 Inscription le : 04/01/2008 Age : 41
| Sujet: Re: Jean de La Fontaine Dim 27 Sep 2009 - 15:16 | |
| Juste un petit mot pour souligner la grande modernité du propos de La Fontaine, parce que malheureusement, les hommes n'ont pas changé! | |
| | | Onuphrius Main aguerrie
Messages : 551 Inscription le : 29/10/2010 Age : 35 Localisation : Seine-Maritime
| Sujet: Re: Jean de La Fontaine Mar 13 Déc 2011 - 20:52 | |
| Le Songe de Vaux, 1671.
Commençons par le commencement : entre 1658 et 1661, Nicolas Fouquet, surintendant des finances, fait construire le château de Vaux. Le jardin est dessiné par Le Nôtre, son ornement par Poussin, les peintures intérieures sont de Le Brun... Fouquet, protecteur des arts et des lettres, donne avec Vaux l'image de l'union parfaite des arts et exprime son goût du faste. Le 17 août 1661, Fouquet donne la célèbre de "fête de Vaux", qui par sa grandeur et sa somptuosité fait trop d'ombre à Louis XIV. Le roi devait faire de Fouquet son premier ministre, mais Louis XIV veut diriger seul : le 5 septembre 1661, Fouquet est arrêté à Nantes, le roi se passera de premier ministre et Colbert est nomme surintendant des finances. La Fontaine, très proche de Fouquet, ne cesse de prendre position pour lui, ce qui l'antipathie du roi à son égard. Dix ans après Vaux, La Fontaine publie Le Songe de Vaux sous une forme fragmentaire à laquelle il ne retouchera plus. On peut néanmoins voir ici que La Fontaine est un homme de convictions et fidèle dans son amitié pour Oronte (surnom de Fouquet).
Il ressort du recueil l'impression de tendresse, de beauté, de simplicité... que l'on trouve dans ses autres œuvres. On se rend compte aussi des valeurs artistiques défendues par le Parnasse réuni autour de Fouquet, et pour lequel La Fontaine ne cessera jamais d'exprimer sa mélancolie, sa nostalgie. Je vous renvoie à la magnifique biographie de Marc Fumaroli, Le Poète et le Roi.
Le fragment qui m'a le plus marqué est le débat entre les quatre fées qui défendent chacune leur art : l'architecture, la peinture, l'horticulture et la poésie. Et en dehors de ce passage, on constate que La Fontaine savait donner à sa prose la même saveur qu'à sa poésie, même si on le sent plus à l'aise dans la seconde. | |
| | | Max Main aguerrie
Messages : 381 Inscription le : 21/03/2014 Localisation : Toulouse
| Sujet: Re: Jean de La Fontaine Mar 25 Mar 2014 - 18:08 | |
| Je les lorgnais depuis un moment. 70 contes licencieux répartis en sept recueils : 1665, 1669, 1671, 1674, 1682, 1685 et 1696 (posthume). La plupart sont des réécritures grivoises de l’Arioste, Boccace, Machiavel, des Cent nouvelles nouvelles. Il y a des adaptations de Rabelais aussi... Au début, j’ai trouvé ça absolument pimpant. Un pur délice, une vraie délectation de la chute rimée qui tombe à point. En plus, le vers libre permet de déguster pleinement la substance poétique des contes, tout en dévorant à grande vitesse des récits hauts en couleurs, franchement lestes et drôles. Ca défile. Bref, on lit de l’or et en plus c’est divertissant. Le problème, c’est qu’il finit par tourner un peu en rond, le père La Fontaine. Si le charme évident de ses grivoiseries m’a franchement plu et délassé, à force ça finit par devenir lassant et, je m’étonne de devoir le dire mais tant pis, un peu malsain. Oh bien sûr, rien ne me choque. J’en ai lu et plus qu’au-delà... Voyez mon avatar... Mais je ne sais pas, à force, la façon qu’il a d’exposer en long et en large des plans tous plus vicieux les uns que les autres (qui en soi ne me choquent pas mais au contraire me font marrer), de mettre en avant son obsession systématique de la nonne déflorée, du Marinette-me-touche-la-braguette-au-fond-des-bois, des "Or çà, quelle trompette ! Mais qui l’en joue ?" etc., non seulement ça finit par devenir lassant, mais en plus je serais tenté de dire qu’on finit presque par être gêné pour lui... Si encore il y avait un lyrisme constant qui emportait tout et mettait tout le monde d'accord. Mais bien souvent, sur la fin surtout, j'ai ressenti surtout un plaisir de provoquer, pas toujours à propos ni utile. C'est mon avis. Au bout du 56ème conte, il finit d’ailleurs par en faire l’aveu : J’avais juré de laisser là les nonnes : Car que toujours on voie en mes écrits Même sujet, et semblables personnes, Cela pourrait fatiguer les esprits.Heureusement, j’ai intercalé d’autres lectures entre chaque recueil afin de pouvoir y revenir avec plaisir. Et j’ai bien fait car il y a de vraies merveilles. M’enfin je dois avouer qu’il me tardait d’en finir. Il paraît qu’il a dû renier publiquement ses contes pour pouvoir être reçu à l’Académie. Il a tout de même continué d’en écrire par la suite, mais ponctués souvent d’une étonnante et inattendue moralité. | |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Jean de La Fontaine Sam 12 Nov 2016 - 12:24 | |
| Une lecture croisée LA FONTAINE (XVIIeme) / ESOPE (vIIe – vIe siècle av. J.-C.)
La Fontaine Le Lion et le Rat
Il faut, autant qu'on peut, obliger tout le monde : On a souvent besoin d'un plus petit que soi. De cette vérité deux Fables feront foi, Tant la chose en preuves abonde.
Entre les pattes d'un Lion Un Rat sortit de terre assez à l'étourdie. Le Roi des animaux, en cette occasion, Montra ce qu'il était, et lui donna la vie. Ce bienfait ne fut pas perdu. Quelqu'un aurait-il jamais cru Qu'un Lion d'un Rat eût affaire ? Cependant il advint qu'au sortir des forêts Ce Lion fut pris dans des rets, Dont ses rugissements ne le purent défaire. Sire Rat accourut, et fit tant par ses dents Qu'une maille rongée emporta tout l'ouvrage. Patience et longueur de temps Font plus que force ni que rage.
Esope
Un Lion fatigué de la chaleur, et abattu de lassitude, dormait à l’ombre d’un arbre.
Une troupe de Rats passa par le lieu où le Lion reposait ; ils lui montèrent sur le corps pour se divertir. Le Lion se réveilla, étendit la patte, et se saisit d’un Rat, qui se voyant pris sans espérance d’échapper, se mit à demander pardon au Lion de son incivilité et de son audace, lui représentant qu’il n’était pas digne de sa colère. Le Lion touché de cette humble remontrance, lâcha son prisonnier, croyant que c’eût été une action indigne de son courage de tuer un animal si méprisable et si peu en état de se défendre. Il arriva que le Lion courant par la forêt, tomba dans les filets des chasseurs ; il se mit à rugir de toute sa force, mais il lui fut impossible de se débarrasser. Le Rat reconnut aux rugissements du Lion qu’il était pris. Il accourut pour le secourir, en reconnaissance de ce qu’il lui avait sauvé la vie. En effet, il se mit à ronger les filets, et donna moyen au Lion de se développer et de se sauver.
Et pour ceux qui peuvent (dont je ne fais partie) :
Λέων καὶ μῦς ἀντευεργέτης. Λέοντος κοιμωμένου μῦς τῷ σώματι ἐπέδραμεν. Ὁ δὲ ἐξαναστὰς καὶ συλλαβὼν αὐτὸν οἷός τε ἦν καταθοινήσασθαι. Τοῦ δὲ δεηθέντος μεθεῖναι αὐτὸν καὶ λέγοντος ὅτι σωθεὶς χάριτας αὐτῷ ἀποδώσει, γελάσας ἀπέλυσεν αὐτόν. Συνέβη δὲ αὐτὸν μετ' οὐ πολὺ τῇ τοῦ μυὸς χάριτι περισωθῆναι· ἐπειδὴ γὰρ συλληφθεὶς ὑπό τινων κυνηγετῶν κάλῳ ἐδέθη τινὶ δένδρῳ, τὸ τηνικαῦτα ἀκούσας ὁ μῦς αὐτοῦ στένοντος ἐλθὼν τὸν κάλων περιέτρωγε καὶ λύσας αὐτὸν ἔφη· "Σὺ μὲν οὕτω μου τότε κατεγέλασας ὡς μὴ προσδεχόμενος παρ' ἐμοῦ ἀμοιβὴν κομιεῖσθαι· νῦν δὲ εὖ ἴσθι ὅτι ἐστὶ καὶ παρὰ μυσὶ χάρις." Ὁ λόγος δηλοῖ ὅτι καιρῶν μεταβολαῖς οἱ σφόδρα δυνατοὶ τῶν ἀσθενεστέρων ἐνδεεῖς γίνονται. |
| | | shanidar Abeille bibliophile
Messages : 10518 Inscription le : 31/03/2010
| Sujet: Re: Jean de La Fontaine Sam 12 Nov 2016 - 12:27 | |
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| | | bix229 Parfum livresque
Messages : 24639 Inscription le : 24/11/2007 Localisation : Lauragais (France)
| Sujet: Re: Jean de La Fontaine Sam 12 Nov 2016 - 15:46 | |
| Les fables, c' est comme les contes populaires, on les retrouve partout. Et La Fontaine s' y montre brillant et malicieux. | |
| | | Bédoulène Abeille bibliophile
Messages : 17270 Inscription le : 06/07/2007 Age : 79 Localisation : Provence
| Sujet: Re: Jean de La Fontaine Sam 12 Nov 2016 - 17:59 | |
| LA BESACE (*) Jupiter dit un jour : Que tout ce qui respire S'en vienne comparaître aux pieds de ma grandeur. Si dans son composé quelqu'un trouve à redire, Il peut le déclarer sans peur : Je mettrai remède à la chose. Venez, Singe ; parlez le premier, et pour cause. Voyez ces animaux, faites comparaison De leurs beautés avec les vôtres : Êtes-vous satisfait ? Moi ? dit-il, pourquoi non ? N'ai-je pas quatre pieds aussi bien que les autres ? Mon portrait jusqu'ici ne m'a rien reproché ; Mais pour mon frère l'Ours, on ne l'a qu'ébauché : Jamais, s'il me veut croire, il ne se fera peindre. L'Ours venant là-dessus, on crut qu'il s'allait plaindre. Tant s'en faut : de sa forme il se loua très fort ; Glosa (1) sur l' Éléphant, dit qu'on pourrait encor Ajouter à sa queue, ôter à ses oreilles ; Que c'était une masse informe et sans beauté. L' Éléphant étant écouté, Tout sage qu'il était, dit des choses pareilles : Il jugea qu'à son appétit (2) Dame Baleine était trop grosse. Dame Fourmi trouva le Ciron (3) trop petit, Se croyant, pour elle, un colosse. Jupin (4) les renvoya s'étant censurés tous, Du reste , contents d'eux ; mais parmi les plus fous Notre espèce excella ; car tout ce que (5) nous sommes, Lynx (6) envers nos pareils, et taupes (7) envers nous, Nous nous pardonnons tout, et rien aux autres hommes : On se voit d'un autre œil qu'on ne voit son prochain. Le Fabricateur souverain Nous créa Besaciers ( tous de même manière, Tant ceux du temps passé que du temps d'aujourd'hui : Il fit pour nos défauts la poche de derrière, Et celle de devant pour les défauts d'autrui. | |
| | | ArturoBandini Sage de la littérature
Messages : 2748 Inscription le : 05/03/2015 Age : 38 Localisation : Aix-en-Provence
| Sujet: Re: Jean de La Fontaine Dim 13 Nov 2016 - 14:36 | |
| Faut dire que La Fontaine a beaucoup pompé justement chez Esope, Mais je l'adore quand même ! | |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Jean de La Fontaine Dim 13 Nov 2016 - 15:27 | |
| Oui, je ne suis pas certaine qu'il s'en soit caché, à l'époque. Mais quelle élégance, oui ! Bédou, ton partage est super, un méconnu ! miam |
| | | Contenu sponsorisé
| Sujet: Re: Jean de La Fontaine | |
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| | | | Jean de La Fontaine | |
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