Annie Ernaux

Eve Lyne a écrit:

Les annnées.

Un livre qui se lit vite, mais surtout, pour les personnes qui ont déjà des décennies de vie derrière elles, [...]
Une fine analyse de la société. Un tour d'horizon du XXème siècle et ça fait un bien fou aux nostalgiques.

Bien que j'ai l'impression que j'ai déjà vécus des décennies et je sais aussi que je suis dans la première rangée quand il s'agit des nostalgiques - ce livre n'était pas pour moi.. en tout cas pas au moment que j'avais choisi pour le lire..
Je l'ai mis de côté - et après tous vos beaux commentaires - je sais que je veux le lire.. mais je crois se sera pour un autre jour

kenavo a écrit:

Bien que j'ai l'impression que j'ai déjà vécus des décennies et je sais aussi que je suis dans la première rangée quand il s'agit des nostalgiques - ce livre n'était pas pour moi.. en tout cas pas au moment que j'avais choisi pour le lire..
Je l'ai mis de côté - et après tous vos beaux commentaires - je sais que je veux le lire.. mais je crois se sera pour un autre jour

Ce livre m'a fait penser à Cafés de la mémoire de Chantal Thomas- Mais j'ai préféré ce dernier, je ne sais pas s'il est "meilleur", en tout cas infiniment plus personnel -

Livre que tu as laissé un peu de côté, et ce pour les mêmes raisons Kena.
Quand tu seras plus vieille peut-être...

aériale a écrit:

Quand tu seras plus vieille peut-être...

je me trouve assez vieille pour de telles expériences littéraires
mais je sais que c'était tout simplement pas le bon moment..
automne/hiver est plutôt la saison pour moi de me sentir nostalgique.. je vais garder cette lecture pour ces mois

Eve Lyne a écrit:

L'un des intérêts majeurs de cet essai reste la chronique rapide du XXème siècle. Ce n'est certainement pas le meilleur roman d'A. Ernaux.

Il m'a plu pour cela aussi. Revivre à travers ces flashs une patie de notre passé commun. Et je l'ai trouvé très bien écrit.
Mais avec le recul, il ne m'en reste plus grand chose!

Je ne suis pas sûre de retenter Annie Ernaux car d'après ce que j'ai lu sur elle, elle est toujours dans la distance, non?

aériale a écrit:

Je ne suis pas sûre de retenter Annie Ernaux car d'après ce que j'ai lu sur elle, elle est toujours dans la distance, non?

Là on revient sur la discussion des aspects personnels lors de la lecture.. et les moments d'un livre qui nous touchent parce qu'on se croit concerné.
J'ai lu d'autres livres de Annie Ernaux - surtout ceux où elle parle de ses aventures amoureuses - mais je ne sais pas si je me retrouvais encore aujourd'hui dans ces livres..

J'ai lu plusieurs livres d'Annie Ernaux mais celui qui restera dans ma mémoire est 'passion simple', peut être parce que j'y trouve une résonance personnelle. Les autres livres sont aussi très bien, surtout 'la place'.

Les années

Citation :

Ce sera un récit glissant, dans un imparfait continu, absolu, dévorant le présent au fur et à mesure jusqu'à la dernière image d'une vie. Une coulée suspendue, cependant, à intervalles réguliers par des photos et des séquences de films qui saisiront les formes corporelles et les positions sociales successives de son être - constituant des arrêts sur mémoire en même temps que des rapports sur l'évolution de son existence, ce qui l'a rendue singulière, non par la nature des éléments de sa vie externes (trajectoire sociale, métier) ou internes (pensée et aspirations, désir d'écrire), mais par leur combinaison, unique en chacun.
A cette "sans cesse autre" des photos correspondra, en miroir, le "elle" de l'écriture.
Aucun "je" dans ce qu'elle voit comme une sorte d'autobiographie impersonnelle - mais "on" et "nous" comme si, à son tour, elle faisait le récit des jours d'avant.

Ces lignes, c'est Annie Ernaux qui nous les donne à la fin de son livre, comme précisant son projet. Un projet simple et ambitieux à la fois, terriblement ambitieux.... J'ai entendu un critique à la radio, volontairement provocateur, dire que ce livre était un "détail" dans l'oeuvre d'Annie Ernaux... Je ne sais pas, c'est le premier que je lis... Mais l'auteure m'a offert un vue saisissante du temps qui passe, fait de moments forts ou insignifiants..... Des temps serais-je tenté d'écrire tant ces évènements doivent trouver un écho différent selon le point de vue où on les observe et selon l'âge où on les a vécu.
Le début du roman me donne à lire des souvenirs qui se rattachent à l'histoire... mais aussi aux traditions familiales. Puis je me suis posé les questions d'Annie Ernaux sur le coeur des années 90, celles où j'ai acquis une conscience politique et sociale.... Et enfin, le regard se fait plus précis, le temps qui court est ahurissant - c'est si proche et si loin, déjà... Et j'ai trouvé le regard offert sans nostalgie ni complaisance.

Les photos qui rattachent ces années à une personne sont touchantes, justes et montrent le contre point de ce temps qui passe....

J'ai beaucoup aimé ce roman, "détail" peut-être, mais tellement fort.

j'en ai lu plusieurs de cet auteur et j'ai aimé sa façon d'écrire et de transmettre ses sentiments, c'est réel et on peut s'y retrouver !
La place, le femme gelée, les armoires vides, une femme.

Je ne suis pas sortie de ma nuit

Je viens de finir ce petit livre, condensé de petits bouts épars, rassemblés ici par l'auteure. Condensé incroyablement fort !

En préambule, l'auteure nous explique ce qui l'a poussé à écrire :

Citation :

C'est dans cette période où elle était encore chez moi que je me suis mise à noter sur des bouts de papier, sans date, des propos, des comportements de ma mère qui me remplissaient de terreur. Je ne pouvais supporter qu'une telle dégradation frappe ma mère. Un jour j'ai rêvé que je lui criais avec colère : "Arrête d'être folle !" Par la suite, quand je revenais de la voir à l'hôpital de Pontoise, il me fallait à toute force écrire sur elle, ses paroles, son corps qui m'était de plus en plus proche. J'écrivais très vite, dans la violence des sensations, sans réfléchir ni chercher d'ordre.

Cet ordre, elle l'a cherché, elle a finalement dû aller puiser dans sa mémoire pour mettre des dates. Je le regrette un peu, le roman aurait une force bien plus grande sans prise sur le temps. Mais je comprends que l'auteure en ait eu besoin, comme un devoir de mémoire.

Ce petit détail mis à part, j'ai retrouvé les mots simples d'Annie Ernaux, pleins d'émotions et de noblesses. Car même lorsqu'elle aborde les côtés les plus déplaisants de la maladie, la dégradation physique, l'absence de maîtrise de son corps, elle n'est pas dans l'impudeur.

La figure de sa mère telle qu'elle était s'impose constamment derrière les mots d'Annie Ernaux et souligne d'autant mieux la détresse de fille qu'elle peut ressentir. Sans larmoiements excessifs, l'auteur traduit la détèrioration de son état d'esprit, passant avec le temps qui se déroule, la maladie qui progresse, d'une tendresse rieuse devant les petits errements de sa mère à un désespoir impuissant et immense.

L'auteur sans faire un "témoignage objectif" nous rend bien ce "résidu d'une douleur". Résidu que ressentent tous les membres d'une famille lorsque quelqu'un de très proche est atteint par cette maladie.

J'ai aimé ce témoignage, cette douleur contenue et pourtant si présent derrière chaque mot.

Enfin, l'explication du titre "Je ne suis pas sortie de ma nuit est la dernière phrase que ma mère a écrite" m'a plongé tout de suite dans cette douleur, d'un temps où la conscience de la malade était encore assez forte pour avoir une terrible perception de son état !

Citation :

Elle est dans l'entrée et d'abord, je ne la reconnais pas. On lui a tiré les cheveux en queue de cheval, son visage est figé. [...] Constamment, je me demande comment elle perçoit le monde maintenant. Lorsque je pense à ce qu'elle a été, à ses robes rouges, sa flamboyance, je pleure. Le plus souvent, je ne pense à rien, je suis auprès d'elle, c'est tout. Il y a pour moi, toujours, sa voix. Tout est dans la voix. La mort, c'est l'absence de voix par-dessus tout.

Steven a écrit:

Je ne suis pas sortie de ma nuit
En préambule, l'auteure nous explique ce qui l'a poussé à écrire :

Citation :

C'est dans cette période où elle était encore chez moi que je me suis mise à noter sur des bouts de papier, sans date, des propos, des comportements de ma mère qui me remplissaient de terreur. Je ne pouvais supporter qu'une telle dégradation frappe ma mère. Un jour j'ai rêvé que je lui criais avec colère : "Arrête d'être folle !" Par la suite, quand je revenais de la voir à l'hôpital de Pontoise, il me fallait à toute force écrire sur elle, ses paroles, son corps qui m'était de plus en plus proche. J'écrivais très vite, dans la violence des sensations, sans réfléchir ni chercher d'ordre.

Citation :

L'auteur sans faire un "témoignage objectif" nous rend bien ce "résidu d'une douleur". Résidu que ressentent tous les membres d'une famille lorsque quelqu'un de très proche est atteint par cette maladie.

Bon résumé Steven

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