| Parfum de livres… parfum d’ailleurs Littérature, forum littéraire : passion, imaginaire, partage et liberté. Ce forum livre l’émotion littéraire. Parlez d’écrivains, du plaisir livres, de littérature : romans, poèmes…ou d’arts… |
|
| Roberto Calasso [Italie] | |
| | Auteur | Message |
---|
shanidar Abeille bibliophile
Messages : 10518 Inscription le : 31/03/2010
| Sujet: Roberto Calasso [Italie] Lun 24 Oct 2011 - 11:29 | |
| Roberto Calasso est né en 1941 à Florence dans une grande famille d'érudits. Son père, professeur de droit est condamné à mort par les nazis et il sera miraculeusement sauvé (ainsi que deux autres profs). Lorsque Roberto a 12 ans, toute la famille part s'installer à Rome, où il fait ses études, jusqu'à la faculté (il passe plus de temps dans les bibliothèques anglaises qu'au cours et rédige une thèse sur les emblèmes dans l'oeuvre de Thomas Browne). Il a 21 ans quand il rencontre celui qui va changer sa vie : Roberto Balzen, grand érudit également, qui détruira pratiquemment l'intégralité de ses oeuvres avant de mourir. Balzen est un théoricien et un critique littéraire qui propose à Calasso de le rejoindre (ainsi que Luciano Foà) pour créer une maison d'éditions. Elle s'appelera Adelphi et se consacrera aux littératures du centre de l'Europe. La première publication d'Adelphi sera les oeuvres complètes de Nietzsche en collaboration avec Gallimard. Suivront de grans noms : Joseph Roth, Franz Kafka, Robert Walser, Franck Wedekind et bien d'autres... Pour faire connaitre cette littérature, Calasso devient critique et essayiste. Il publie d'abord : Les quarante-neuf degrés qui sont donc une compilation de ses essais littéraires. Le Fou impur , premier roman datant de 1974, inclassable, construit autour de la figure du Président Schreber, personnage célèbre pour avoir permis à Sigmund Freud d'élaborer sa théorie de la paranoïa La Ruine de KashLes Noces de Cadmos et Harmonie , une mythographie grecque Ka , une mythographie indienne La littérature et les dieuxK. ; un livre sur l'oeuvre de Kafka dont Calasso dit : j'ai essayé de comprendre de quoi il parle dans ses livres ; essayé d'illuminer les choses par leur propre lumière, comme disait Karl Kraus.Le Rose TiepoloLa Folie BaudelaireTous ces livres sont traduits en France et publiés par Gallimard. Calasso parle de son oeuvre comme d'un arbre dont chaque branche serait un livre et dont le tronc central serait La Ruine de Kash, dans lequel se trouvent en germe tous les sujets dont Calasso s'inquiète au fil de ses écrits. Il est de ces écrivains qui n'hésitent pas à mêler histoires et essai, poésie et réflexion philosophique, mythographie et invitation esthétique. source : Le Matricule des anges n°104 | |
| | | shanidar Abeille bibliophile
Messages : 10518 Inscription le : 31/03/2010
| Sujet: Re: Roberto Calasso [Italie] Lun 24 Oct 2011 - 11:53 | |
| Publié en 1996, Calasso dit que ce livre est celui qui lui a pris le plus de temps (sept ans de réflexion). Il s'agit d'une mythographie, c'est-à-dire la réécriture de mythes (ici ceux foisonnant de l'Inde). Tout commence avec Prajapati, le 'Géniteur', il n'est ni tout à fait un dieu ni tout à fait un homme, pas vraiment céleste mais pas plus terrien pour autant, et déjà commence pour le lecteur novice la découverte de cet entre-deux qui définit toute la philosophie indienne. Déjà les notions se téléscopent, s'imbriquent pour former l'improbable : le Monde. Comment Prajapati crée le monde (des dieux, des hommes, des bêtes...) ? Grâce à l'Ardeur qui brule en lui, et commence une autre découverte, celle de l' atman, notion impossible à décrire pour un occidental, pour la comprendre il faudrait ne plus réfléchir en termes de dualité, d'opposition mais en terme de lien, de connexion, de souffle ; l' atman est le Soi, la conscience de soi dans le monde. Et ainsi de suite... Nous découvrons les aventures de Shiva, les amours des uns , les malheurs des autres, les quêtes, les femmes, les animaux. Nous découvrons les mystères d'une religion saisissante, les sacrifices, la Parole des Védas, les rites qui créent les fonctions... On peut lire ce livre de mille manières : recueils de légendes indiennes, toutes plus belles les unes que les autres, narrées dans un style poétique et flamboyant, démesuré et incantatoire ; on peut le lire comme un essai philosophique et tenter de comprendre quelques unes des notions qui inventent la pensée indienne ; on peut le lire comme s'il s'agissait d'un miroir qui nous renvoie à nos propres mythes, ceux de l'enfance et ceux, troublants de l'âge adulte (l'érotisme n'est jamais loin de cette écriture fluctuante et précise) ; on peut le lire comme un Livre sacré distillant les paroles d'une religion sacrificielle et inquiétante. En tout cas, Calasso parvient surtout à écrire un texte intelligent et interessant, qui ne tombe jamais dans la facilité mais pousse le lecteur à un vrai engagement, une possible réflexion, comme une invitation à entrer dans ce monde indien, déroutant, différent, impossible et pourtant qui par certains aspects rappelle l' Iliade d'Homère ou Les Métamorphoses d'Ovide. Si d'ailleurs, il y avait un seul compliment à faire sur ce livre audacieux, inventif et inégalable, se serait sans doute de s'arrêter sur sa remarquable simplicité, sur sa plaisante lisibilité. Un gros coup de coeur ! | |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Roberto Calasso [Italie] Lun 24 Oct 2011 - 19:15 | |
| Je note cet auteur Shanidar, curieuse de le découvrir ! |
| | | shanidar Abeille bibliophile
Messages : 10518 Inscription le : 31/03/2010
| Sujet: Re: Roberto Calasso [Italie] Ven 28 Oct 2011 - 11:03 | |
| extrait de la page 275 de Ka
Shiva se pencha sur le rivage de l'océan, tandis que la masse noire commençait à remuer sur ses pieds. Les Deva et les Asura le regardaient étonnés, comme s'il allait se faire submerger par ce liquide inconnu. "Ce poison est né du désir d'immortalité", dit une voix parmi eux. Puis ils se turent. Shiva plongea sa main gauche dans Kalakuta, puis il la porta à sa bouche avec l'expression de celui qui imagine un rafraichissement exquis. Il buvait, il avalait, il mêlait le poison à son corps, il le laissait l'imprégner et couler comme un fleuve secret. Les Deva et les Asura le regardaient de plus en plus étonnés. Une efflorescence se dessina sur le cou de Shiva, comme un tatouage d'un bleu profond et lumineux, qui rappelait le plumage du paon et le saphir. Shiva continuait à boire et la tache s'étalait sur son cou. Elle ne disparaitrait jamais plus. Ils l'appelèrent Nilakantha, Celui-qui-a-le-cou-bleu. Un jour, Parvati, en rougissant, lui avoua que, en le voyant pour la première fois, quand elle était encore une enfant austère et que Shiva s'était tourné vers elle en découvrant son cou, tout son désir s'était condensé sur la pointe de sa langue, qui aspirait à lécher cette tache bleue, quitte à se la fendre en deux, comme cela était arrivé à la langue des serpents. | |
| | | tina Sage de la littérature
Messages : 2058 Inscription le : 12/11/2011 Localisation : Au milieu du volcan
| Sujet: Re: Roberto Calasso [Italie] Dim 4 Mar 2012 - 14:36 | |
| Hier, j'ai pris à la bibliothèque Les noces de Cadmos et Harmonie. Sans rien connaître de cet auteur, qu'on dit être un autre Umberto Eco, aussi efficace que discret (par rapport à l'autre, j'entends). En vous lisant, je me dis que j'ai bien fait. | |
| | | Arabella Sphinge incisive
Messages : 19316 Inscription le : 02/12/2007 Localisation : Paris
| Sujet: Re: Roberto Calasso [Italie] Ven 1 Fév 2013 - 20:59 | |
| La folie Baudelaire
Un ensemble de sept essais. Qui parlent de Baudelaire. Enfin pas que de Baudelaire. Qui est quand même toujours tapi quelque part dans un coin, lorsqu'il n'est pas au centre. Mais il est aussi question d'Ingres, de Rimbaud, de Berthe Morisot...Une époque. Des correspondances. Au-delà de l'érudition, Calasso veut transmettre des passions. Avec toute la subjectivité liée aux passions. Tous les partis pris. Malgré l'érudition. Dans un style flamboyant.
C'est très prenant, mais je dirais quand même pour les gens qui connaissent déjà les sujets abordés. Pour faire la part des choses, combler les non-dits. Et partager la passion, mais aussi éventuellement pour à certains moments avoir aussi la capacité de ne pas suivre en tout, malgré les flamboyances et le brio. Pouvoir avoir d'autres parti-pris.
Mais l'érudition et la passion sont devenues si rares que c'est à recommencer. | |
| | | Contenu sponsorisé
| Sujet: Re: Roberto Calasso [Italie] | |
| |
| | | | Roberto Calasso [Italie] | |
|
| Permission de ce forum: | Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
| |
| |
| |
|