Atom Egoyan

Adoration d'Atom Egoyan


Un jeune homme qui a perdu ses parents dans un accident leur invente une histoire fictive, inspirée par un fait divers évoqué en classe de français, concernant une affaire de terrorisme. Ce mensonge est diffusé sur internet et affecte la vie de ceux avec lesquels il entre virtuellement en contact. Mais ce mensonge est aussi une tentative de reconstruction fictionnelle d'un drame familial que le film nous permettra peu à peu de découvrir...

La bonne nouvelle: Atom Egoyan est enfin revenu comme au bon vieux temps, en tout cas sur le plan formel. Sa mise en scène est magnifique, aérienne, obsédante. C'est le roi de la transe. Sa caméra se fait sinueuse comme un serpent, enveloppante. Son fidèle compère pour la musique, Mychael Danna, nous a concoté une des ses plus belles bandes sons , sorte de mélodie contemporaine incantatoire qui utilise le fameux violon dont il est question dans le film. On retrouve les images dans l'image, une caméra qui en filme une autre, des écrans multiples (d'ordinateur, de téléphone portable...). Et enfin cette fois c'est incarné et les acteurs parfaitement dirigés. Exit la froideur d'Ararat, on est plus près de The Adjuster ou d'Exotica. Le bonheur n'est pas loin... Mais:

La mauvaise nouvelle: La construction labyrinthique, fascinante pendant une heure, laisse peu à peu la place à un noeud dramatique familial qui se révèle très décevant. Intéressant par certains aspects (c'est dur d'en parler sans rien révéler) mais finalement presque anecdotique. On se dit "tout ça pour ça". Il y a cependant un double fil conducteur et celui qui concerne Arsinée Khanjian (l'épouse d'Egoyan à la ville et présente dans tous ses films) se révèle presque le plus captivant et le plus émouvant à la fin.

J'y ai pris un vrai plaisir pour la mise en scène et j'attends qu'Egoyan adapte à nouveau un texte fort (comme De beaux lendemains de Russel Banks) pour qu'on puisse enfin décoller et le reconnaitre comme le grand réalisateur qu'il est manifestement.

aériale a écrit:

J'aime trop Atom Egoyan pour le voir se gâcher dans des productions un peu foireuses mais ce que tu en dis me réconforte un peu
Ce sera mon prochain film ...

Tu devrais être contente de le retrouver même si l'histoire est un peu faible sans être pour autant sans intérêt. Après tout Exotica reposait aussi sur un secret finalement assez simple et prétexte à developper des thèmes qu'il affectionne comme la vérité enfouie et le mensonge des images, le métissage, les obsessions du traumatisme... Franchement Adoration est à nouveau du beau cinéma. Je suis encore partagé sur les symboles un peu appuyés du final mais qui dégagent malgré tout une certaine force. Quand à L'"adoration" du titre elle fait référence à la Bible puisqu'il est question d'intolérance religieuse (et de fête familiale).

Chloé d'Atom Egoyan



Bon ben Egoyan nous a fait un remake du Nathalie d'Anne Fontaine! Même drame bourgeois teinté d'érotisme et de saphisme. Même manipulation oratoire pour créer une tension érotique entre les 2 femmes à travers le langage. Exit les dispositifs complexes, les circonvolutions envoûtantes, le mystère et les abîmes existentiels. On est dans un thriller formaté, linéaire, et entièrement prévisible. C'est très propre, très bien joué. Julianne Moore est comme toujours sublimement belle et émouvante, Liam Neeson excellent, les 2 jeunes, dont la fameuse "Chloé" en vamp borderline, très convaiquants... La musique de Mychael Danna, seul vestige des années magiques d'Egoyan, offre un beau crescendo émotionnel. Mais le résultat est quand même bien creux et finalement très sage, presque conservateur dans les valeurs qu'il préserve avec ce final plutôt rassurant. On est loin des questionnements et de la complexité d'un Eyes Wide Shut sur un sujet approchant (l'adultère est-il dans les actes ou dans les fantasmes? Qu'est-ce que le couple? Quelle place pour la fidélité, les fantasmes, le désir? ...). Reste que je ne me suis pas ennuyé et qu'il y a quelques plans saisissants comme cette image hallucinante du regard de Chloé sortant du cabinet de gynécologue de Julianne Moore après avoir été repoussée. Et leur maison est très chouette.



Bon allez je le recommande quand même.

Marko a écrit:

Chloe d'Atom Egoyan

Fut un temps où Atom Egoyan tournait des films très personnels, jusqu'à Ararat, qui même à moitié réussi, était passionnant. Dans Chloe, il ne reste que quelques atomes d'Egoyan, quand il parvient à créer une atmosphère oppressante dans ce porno chic, bien trop sophistiqué pour être honnête. Quelle idée d'ailleurs de faire un remake du Nathalie d'Anne Fontaine dans la prude Amérique, et pour parler de sexe, le petit doigt en l"air. D'ailleurs, Egoyan filme un peu les corps mais surtout les regards, ceux de Julianne Moore et de la somptueuse Amanda Seyfried (qui a une belle ligne). Le dérapage vers le thriller, dans la seconde partie du film, est une très mauvaise idée, exploitée façon Hollywood moralisateur et là, c'est le drame puisque plus rien ne fonctionne. Sur un thème très voisin, un certain Petri Kotwica, cinéaste finlandais, a réalisé en 2007 Musta jää (Black Ice), un véritable bijou de film noir, qui pousse les thèmes abordés dans Chloe jusque dans ses retranchements. Un temps programmé dans les salles françaises, sa sortie semble hélas repoussée aux calendes grecques.


Un Copier/Chloe pour mieux faire la Moore.

Plus de trois ans plus tard, je finis par déterrer le fil. Il peut bien ne pas avoir le défaut de l'exhaustivité et manquer une bibliographie. Je retiens plusieurs titres chez Egoyan qui est un cinéaste canadien anglais assez réputé. D'ascendance arménienne, il nous a laissé une oeuvre assez particulière.

Je suis là pour vous parler De beaux lendemains. Egoyan y a livré une de ses meilleures prestations comme réalisateur. Comme nous l'avons dit dans le cas du livre de Russell Banks, ce n'était peut-être pas le livre le mieux écrit. Au moins, il aura donné cette bonne adaptation cinématographique. Excellente... je n'irais pas jusqu'à le dire, mais le film n'est pas piqué des vers...

J'avais l'impression de me retrouver dans ce film... entre les influences américaines, canadiennes-anglaises et européennes, je retrouvais un peu une parenté thématique.

Egoyan a bien rendu la justesse et la maîtrise qu'il a pu obtenir des acteurs. Nous nageons en plein imbroglio quand un avocat d'origine étrangère arrive comme un cheveu sur la soupe dans un village montaignier. Les habitants habitent dans un espace de silence. Ce silence témoigne d'une tension à l'oeuvre. Nous avons bien senti cette critique envers la mentalité américaine de chercher un motif de poursuite juridique pour tout prétexte.

Après un accident d'autobus, une fille devient handicapée des jambes. Elle s'était déjà prise d'affection pour plusieurs habitants. Elle s'était notamment liée avec un simple d'esprit qui périt dans l'accident. Le quotidien des habitants fut donc bouleversé comme vous pouvez l'imaginer. La chauffeuse qui vivait elle-même avec un mari handicapé était tenaillée par la culpabilité. Nous avons ressenti ce sentiment chez bon nombre de personnages.

L'avocat se décompose sous nos yeux... les protagonistes du film opposent un refus énergique... nous vivons plusieurs témoignages de tendresse au cours du film... toute part de vérité et de dissimulation prend pleinement importance...

Avant de vous laisser mijoter sur tout ceci, Egoyan a relevé la référence au joueur de flûte de Hamelin, une référence littéraire originant d'un conte allemand et reprise par Robert Browning dans ses vers... nous retenons donc une ambiance de fable dans le récit des péripéties.

L'inceste selon Egoyan à la façon d'un conte de fée horrifique:

J'ai zappé son dernier film au cinéma. J'attendrai la sortie video. Sinon OCS city passe mardi prochain Les 3 crimes de West Memphis ( Deviĺ´s knot) qui n'est pas sorti en salle. Ça semble pas mal. Il y a Colin Firth et c'est inspiré d'un fait divers (3 enfants assassinés en Arkansas). Ils le comparent un peu à De beaux lendemains.

Je viens de regarder Captives et c'est vraiment pas bon. Un thriller correct et plutôt distrayant mais sans aucun style. Il a juste déconstruit le récit mais les personnages sont sans aucune subtilité et bien des situations sont grossières. Le vrai mystère c'est sa sélection à Cannes en compétition officielle l'an dernier... Mais pourquoi Egoyan s'égare-t-il dans ces produits de consommation sans âme? Quel gâchis! Dans le genre Prisoners de Denis Villeneuve est nettement meilleur.

Ça fait maintenant des années que je n'attend plus rien de lui...