Elio Petri

Elio Petri (1929 - 1982)

Citation :

Elio Petri est l'assistant de Guiseppe de Santis depuis Onze heures sonnait (1952) et durant toutes les années 50. Après deux courts-métrages (Nasce un campione, 1954 et I sette contadini, 1959), Petri fait ses débuts dans la mise en scène en 1961 avec L'assassin, film qui révèle d'emblée un grand talent dans l'approche des personnages aliénés et dans la description d'un univers policier kafkaïen. I giorni contani (1962) marque l'enracinement définitif de Petri dans un cinéma indirectement politique où dominent les thèmes de l'exclusion et de la division de l'être.

A chacun son dû marque les débuts de sa collaboration avec le scénariste Ugo Pirro qui durera jusqu'en 1973. Le film développe le thème de l'incapacité pour l'intellectuel de comprendre la réalité. Après Un coin tranquille à la campagne qui aborde le thème de la solitude et de l'angoisse de l'artiste romantique, Petri réalise quatre films qui en font l'un des analystes les plus lucides et les plus désespérés de la schizophrénie contemporaine, composant une sorte de portrait de la société italienne dans ce qu'elle a de multiples et de contradictoire : Enquête sur un citoyen au-dessus de tout soupçon (1970) sur la police, La classe ouvrière va au paradis (1971) sur la condition ouvrière, La propriété n'est plus un vol (1973) sur le rôle de l'argent et sur la destruction de l'être par l'avoir, Todo modo (1977) sur la structure mentale de la démocratie chrétienne.

source : cineclubdecaen.com

et de la lecture aussi sur : eliopetri.net





L'assassin

Alfredo Martelli, un antiquaire romain, est arrêté à son domicile et emmené au commissariat. En attendant d’être interrogé, il se demande ce que lui veut la police et se souvient, par épisodes, de son attitude peu scrupuleuse à divers moments de sa vie. Enfin reçu par le commissaire, Martelli apprend que son ancienne maîtresse a été retrouvée morte. Les autorités sont persuadées qu’il est l’assassin. Accablé par les preuves, l’antiquaire sent peser sur lui le poids de la culpabilité…

et une petite description du film chez carlotta (a propos)

Malheureusement je me suis assoupi pendant une partie du film. N'empêche c'est très très bien ficelé et Marcello Mastroianni est remarquable en antiquaire douteux à plusieurs dimensions. Histoire de compromis, de paranoia et de politique, beaucoup de choses s'arrangent dans les flous et se contraignent à la lumière. Tension de la justice et d'une marge, décalage d'avec la loi, l'image de la loi... énormément de signes à l'écran avec des images de réussite et d'argent et de strates plus populaires. Perméabilité des mondes et rupture d'intimité, dans son noir et blanc impeccable et son ambiance millimétré le film est lourd et précis et suscite beaucoup de malaise et d'anxieuse réflexion sous l'ombre de la culpabilité (et les interférences voulues ou entretenues ou non entre la "personnelle" et "l'officielle"). Un poil bavard mais grosse claque ce film au héros si antipathique !








Les jours comptés

Un homme, la cinquantaine se retrouve face à la mort, dans un tram, d'un homme, la cinquantaine. Ce plombier besogneux et sans histoire décide d'arrêter de travailler pour profiter du temps qu'il lui reste...

Le film n'oublie ses accents de comédie et Salvo Randone est mieux que parfait entre l'incertitude et son caractère forcé d'oiseau désabusée de la mauvaise augure. D'errances en tentatives au milieu d'une Italie mutante le voyage n'est d'ailleurs pas complètement reluisant et montre beaucoup d'impasses, beaucoup de pressions sociales (la fille de la proprio qui se prostitue, les paysans du village étranglés par les grossistes, et d'autres beaucoup plus simples qui apparaissent aussi). La tournure très début années 60 brasse les contrastes de lumière (les potes qui peignent des passages piétons la nuit devant des édifices illuminés) et de lieux (immeubles d'habitations, quartiers et maisons à l'ancienne) avec une facilité sidérante et une beauté plastique qui devient surréaliste tellement tout est si facile avec de si beaux mouvements en plus des cadrages parfaits. Et l'observation des personnages est hors pair.

Très observateur, humain, social aussi et l'engagement est sensible dans la manière et le sujet. Sans forcer la leçon, faussement bonhomme. Juste une merveille de cinéma où l'image est à la fois évidente, parfaite et extrêmement riche de détails. Et fluidité, rythme, acteurs... ahurissant. Et un humour (noir ou grinçant) très efficace (avec des vrais rires dans la salle). Je ne m'en remets pas, ça passe comme un rêve et j'ai simplement du mal à réaliser que c'est possible.

J'ai au moins quatre ou cinq posts concernant des films de Petri qui traînent, il faudra que je les rapatrie.
Excellent cinéaste, en tous cas, très engagé, à l'image d'un Francesco Rosi.

j'attends avec impatience le rapatriement. je n'en reviens pas on sent les intentions, la fabrique et pourtant ça se passe avec tellement de grâce, une nonchalance sublimée. va me falloir un temps pour digérer. et j'espère que Carlotta en a d'autres à ressortir !

J'insiste sur Francesco Rosi, aussi. C'est un cinéaste pour toi. Jette un oeil sur son fil, principalement alimenté par bellonzo.

Oui m'sieur. Je verrai ce que je croise dans les bacs à l'occasion (sinon j'irai voir les bacs virtuels).

À chacun son dû / A ciascuno il suo (1967)

Cette adaptation d'un roman de Leonardo Sciascia nous emmène dans une petite ville de Sicile auprès d'un groupe d'amis qui entoure l'un des leurs, un pharmacien qui reçoit des lettre anonymes le menaçant de mort. Avec l'un d'entre eux il est abattu lors d'une partie de chasse. Le professeur Laurana (Gian Maria Volontè) décide de mener l'enquête, ce qui le rapproche de la belle veuve du Dr. Roscio (Irene Papas).

La constante atmosphère de suspicion et de danger (le titre anglais est tout de même We Still Kill the Old Way) mélange les angles d'approche. On pense mafia plutôt que vengeances familiales ou de maris trompés, on retrouve les très italiennes tensions politiques, les jeux de pouvoirs s'affichent sans complexes... dans le fond les textures, les murs, les lieux rendent palpable une histoire plus longue, plus profonde. Notre professeur mal à l'aise mais déterminé, Gian Maria Volontè colle tout à fait encore une fois, incarne étrangement le point de rencontre de toutes ces tensions en même temps qu'un discret point de rupture possible.

Le suspens en mille-feuille doublé de l'intrigue amoureuse viennent se délier autrement, pas vraiment comme un suspens. La tonalité du film, sa noirceur résignée gagnent en présence.

Drôle d'affaire. Pas très flashy mais complexe et apte à laisser sa marque dans l'esprit du spectateur. (Et c'est de la Sicile en dur !)

Animal, comment as-tu vu A chacun son dû, est-ce qu'il y aurait un DVD ?

J'aime beaucoup les films d'Elio Petri, en particulier L'assassin, Les jours comptés et Enquête sur un citoyen au dessus de tout soupçon.
Je ne connais que la bande annonce de A chacun son dû, ce qui est tout de même un peu frustrant ! en plus j'ai vu que Salvo Randone jouait dans le film.

il y a des versions anglaises/américaine.

Merci Animal, je vais regarder de plus près.