La Femme de Seisaku (
Seisaku no tsuma, 1918). Traduction de Hiroto-Kano et Ana Lazarée. Stalker Editeur. 62 pages.
- Citation :
- "Dans le village de N., où même la mort d'un petit chat faisait naître une clameur, le mariage de Seisaku et d'Okané se lisait sur toutes les bouches ; des champs jusqu'aux chaumières, en passant par les débarcadères. Les jeunes filles avaient le sentiment qu'Okané, revenue tout à coup de son périple, s'emparait du meilleur homme du village, les vieilles grognèrent : cette parvenue sans ascendance, négligée et têtue, leur volait le garçon le plus travailleur." (page 5).
Le père d'Okané, très pauvre était parti avec sa famille pour travailler sur un chantier naval à Nagasaki, et sa fille Okané, à quatorze ans, avait été mise en "apprentissage" pendant deux ans, à la suite de quoi elle était devenue la maîtresse d'un riche marchand.
- Citation :
- "Son amant, vieux, gros, gras, paraissait encore plus délabré que son propre père." (page 7).
Puis, l'amant meurt, et Okané hérite de la fortune.
Elle revient alors au village avec, forcément, une mauvaise réputation.
- Citation :
- "Seisaku, lui, venait de revenir de son service militaire. [...] Du même âge qu'elle, il était cependant d'une étonnante puérilité, et Okané, tout en étant reconnaissante de sa gentillesse, s'amusait parfois de son comportement timide et gauche." (page 11).
Seisaku change, pour les améliorer, les méthodes de travail du village. Il motive les gens, donne l'exemple (il aurait fait un bon héros soviétique, finalement).
La famille de Seisaku n'est pas très enthousiaste à l'idée du mariage qui va survenir, d'autant que les bons partis ne manquent pas pour Seisaku, jeune et travailleur.
Mais les deux jeunes gens s'aiment.
Toutefois, bientôt se profile à l'horizon l'ombre de la guerre russo-japonaise...
Une nouvelle un peu tordue, vraiment pas mal du tout. On sent bien l'hostilité des villageois vis-à-vis d'Okané, et en même temps la convoitise, la jalousie... La violence, physique ou morale, risque d'éclater à tout moment.
Et les descriptions de la nature sont bienvenues.
On comprend que Masumura Yasûzo (le fameux réalisateur de
la Bête aveugle,
Tatouage,
l'Ange rouge...), l'ait porté à l'écran en 1965 (et il semble que Kaneto Shindô ait travaillé au scénario), même si la quatrième de couverture d'Ana Lazarée, qui en fait quand même un peu trop ('"
Tout le monde peut lire La Femme de Seisaku, de Genjiro Yoshida, peu sauront en saisir l'essence") dit que "
Pour entrevoir l'âme même de ce conte, il s'agira d'abord de se défaire momentanément du sang, du tragique et de l'éclat « masumurien »". Il est vrai que l'on n'est pas chez Edogawa Ranpo, mais quand même.
Ce qui est amusant, c'est que le goût très marqué du retour à la ligne que l'on note sur la quatrième de couverture se retrouve dans le texte.
Goût personnel de la traductrice ?
Peut-être.
La Femme de Seisaku avait semble-t-il déjà été adaptée par un certain Murata Minoru en 1934 (source : Le Cinéma Japonais, par Donald Richie, Editions du Rocher, page 96).
On notera pour finir plusieurs petites fautes de traits d'union, d'accents ou de virgules (se nettoyer de "ses tâches" - au lieu de
taches, ou alors je n'ai pas compris -, , page 28 ; "après midi", page 52, etc) dans le texte, mais sans que ce soit vraiment gênant.