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| | [BD] Ludovic Debeurme | |
| | Auteur | Message |
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colimasson Abeille bibliophile
Messages : 16258 Inscription le : 28/06/2010 Age : 33 Localisation : Thonon
| Sujet: [BD] Ludovic Debeurme Jeu 31 Jan 2013 - 20:25 | |
| Ludovic Debeurme (1971) Biographie:Ludovic Debeurme est né en 1971. Il vit à Paris. Après des études en arts plastiques à la Sorbonne, ce fils d’artiste peintre qui l’initie à la peinture moderne expérimente les différents médiums de l’art contemporain (installations, multimédia, vidéo, peinture…). Il devient illustrateur pour la presse et l’édition jeunesse (Gargantua aux Éditions Milan, L’Étrange cas du Dr Jekyll et de M. Hyde aux Éditions Nathan…), peintre et guitariste de jazz manouche au sein du groupe Royal Paris Narvalo. En 2002, il publie son premier ouvrage de bande dessinée, Céfalus, aux Éditions Cornélius, suivi de Ludologie, toujours chez Cornélius. En 2006, il rejoint les Éditions Futuropolis avec Lucille un ouvrage de 544 pages, récit âpre, rigoureux et sans concession particulièrement remarqué. Le livre obtient le Prix Goscinny, le Prix de La Nouvelle République au festival de Blois, il est l’un des indispensable du festival d’Angoulême en 2007 et figure parmi les 20 incontournables du premier semestre 2006 pour l’Association des critiques de bande dessinée. Source Bibliographie : - Une histoire dans Comix 2000, L'Association, 1999 - Céfalus, Cornelius, coll. « Pierre », 2002 - Ludologie, Cornélius, coll. « Pierre », 2003 - Mes ailes d'homme, Éditions de l'An 2, 2003 - Deux pages dans L'Important, c'est de participer, Cornélius, coll. « Raoul », 2005 - Lucille, Futuropolis, 2006. Prix René Goscinny 2006, Essentiel du Festival d'Angoulême 2007. - Le grand autre, Cornélius, 2007. Nommé aux Essentiels du Festival d'Angoulême 2008. - Une histoire dans Les Bonnes Manières, Traité du savoir-vivre en certaines occasions choisies, Actes Sud-L'An 2, 2008 - Le lac aux vélies (avec des textes de Nosfell), Futuropolis, 2009. - Terra Maxima, Cornélius, 2010. - Renée, Futuropolis, 2011. | |
| | | colimasson Abeille bibliophile
Messages : 16258 Inscription le : 28/06/2010 Age : 33 Localisation : Thonon
| Sujet: Re: [BD] Ludovic Debeurme Jeu 31 Jan 2013 - 20:26 | |
| Lucille (2006) Le format atypique de cette bande dessinée -500 pages au compteur- annonce d’emblée le caractère pas moins étonnant de son contenu. Aucune crainte à avoir quant à la lisibilité de cet ouvrage : malgré un nombre de pages élevé, l’histoire s’égrène tranquillement, ménageant de longues plages de silence ou de contemplation. Pas plus de deux ou trois séquences par page (difficile de parler de « case » lorsqu’aucun cadre ne vient délimiter de contour précis) et un dessin épuré au possible. La sensation de se balader dans le vide n’est jamais loin. Sensation qui décrit parfaitement ce que ressentent les deux personnages de cette histoire, et qui permet au lecteur de se familiariser immédiatement avec leur quotidien. Lucille et Arthur flottent au milieu d’une existence vide dont ils espèrent bientôt voir l'issue –à moins qu’un miracle ne se produise. Chez les deux adolescents, la source du désespoir est familiale. Arthur a grandi sous la domination d’un père violent et alcoolique qui a fini par se suicider, comme son grand-père auparavant. A la mort du patriarche, le fils reçoit son prénom en guise d’offrande posthume, portant jusque dans sa dénomination la malédiction rodante du suicide… Quant à Lucille, elle grandit sous le joug étouffant d’une mère trop protectrice. Le dégoût de son corps, ses relations ambigües avec les hommes et une sexualité obsédante sont désignés comme symptômes tout trouvés de son anorexie. Pour donner un nouvel élan à leur existence mal foutue, à deux doigts de se terminer, fallait-il que les deux désespérés se rencontrent ? Peut-être pas forcément, mais en tout cas, leurs chemins se croisent lorsque Arthur vient livrer à Lucille des paquets entiers remplis de Nutrilor. Surprise dans sa faiblesse et dans sa nudité maladive, Lucille ne peut pas mentir à Arthur. C’est le point de départ d’une relation franche qui permettra à deux sensibilités éprouvées de se rapprocher. Les expériences vécues par chacun sont peut-être différentes mais elles se rejoignent dans l’émergence d’une émotion commune qui permettra à Lucille et Arthur de se sentir en phase. Si Lucille et Arthur sont incapables de se sauver eux-mêmes, en revanche, ils semblent entièrement dévoués à la cause de l’autre. Ils trouvent le courage de sortir de leur existence déplaisante et prennent la fuite vers la Toscane, où ils seront hébergés dans un grand domaine en échange de quelques services. On comprend alors quelle symbolique se dissimule derrière les représentations fréquentes de Lucille et d’Arthur en insectes : petites larves enveloppées dans un cocon trop étroit, elles ne vont pas tarder à révéler le fond exact de leur personnalité. En d’autres termes, le récit de leur escapade est également le récit d’une résilience commune. Le bonheur partagé avec l’autre semble pouvoir abolir le passé, et même s’il revient encore à travers quelques réminiscences et autres mécanismes bien accrochés, il a perdu de sa puissance. Mais le fait est que ce passé a rendu Lucille et Arthur définitivement vulnérables et qu’ils sont mal armés pour faire face aux affronts du quotidien. Un pas de travers, à la moindre difficulté qui surgit, leur bonheur difficilement acquis s’émiette et la malédiction réapparaît, aussi vive qu’auparavant. On le voit, l’histoire de Lucille et Arthur est très nuancée et ne s’inscrit ni dans la complaisance dans le malheur, ni dans l’enchantement halluciné du bonheur retrouvé. On pourra peut-être se montrer froissé de quelques raccourcis faciles empruntés par Ludovic Debeurme lorsqu’il s’agit d’évoquer le mal-être d’Arthur ou la maladie de Lucille –bien trop entachée par le complexe œdipien- mais on les lui pardonne sans trop de difficultés. Parce qu’il a voulu aborder l’histoire de ses deux personnages sans se montrer trop bavard, on comprend qu’il ait dû consentir à quelques facilités qui se montrent de toute façon bien loin des clichés grotesques que l’on peut parfois trouver dans d’autres récits du même genre. L’essentiel n’était sans doute pas de revenir sur les causes de la fragilité des personnages mais de partager avec eux leurs tentatives de s’arracher de leur passé dans le partage d’une existence commune. Lucille est un récit juste et touchant dont l’humilité permet de faire oublier ses quelques défauts. De nombreux détails font mouche... - Citation :
- Je compte… Je compte tout…les mouettes… les rafales de vent… mes pas, bien sûr… mes pas… les heures… les feuilles… les mots… Les mots dans les phrases…
Pourquoi je compte… Je n’en sais rien… Je ne peux pas m’en empêcher. Si je ne le fais pas, je crois que quelque chose de grave va arriver… Que quelqu’un va tomber malade… Que mon père… Que mon père va mourir… A cause de moi… Peut-être que j’voudrais bien qu’il crève, en fait. | |
| | | colimasson Abeille bibliophile
Messages : 16258 Inscription le : 28/06/2010 Age : 33 Localisation : Thonon
| Sujet: Re: [BD] Ludovic Debeurme Jeu 31 Jan 2013 - 20:30 | |
| Renée (2011) Lorsque Renée s’entaille le bras, ce ne sont pas des gouttes de sang qui s’échappent d’elle mais des répliques innombrables d’un petit enfant bossu au visage déformé par la terreur… Ce petit garçon fait écho aux évènements vécus par Renée ; il semblerait que pas un jour ne se passe sans que sa vision ne s’impose à elle. Pas que ça l’enchante mais sans lui, Renée serait seule… sa solitude la pousse d’ailleurs à s’accrocher au premier venu –au premier musicien venu. Si l’humanité lui semble laide, seuls ceux capables de produire un peu de beauté musicale la réconfortent. C’est ainsi que Renée se surprend à suivre un vieux musicien de jazz qu’elle invite chez elle pour une nuit avant de découvrir qu’il est marié. Les sentiments ne sont pas chose habile à manier : il s’y mêle dépendance et dégoût de l’autre, haine de soi-même, veulerie, lâcheté… Et lorsque le passé s’entasse par-dessus tout, on peut y rattacher des fantasmes parfois cruels qui essaient de combler le manque d’amour originel, cause de toute la tristesse des personnages créés par Ludovic Debeurme. A l’histoire de Renée viennent s’ajouter les histoires déjà évoquées dans le premier volume intitulé Lucille. On retrouve donc cette dernière, guérie de son anorexie par l’amour qu’elle partage avec Arthur. Malheureusement, celui-ci est mis au bagne et cohabite en cellule avec des détenus difficiles à cerner ; où la promiscuité imposée ressemble parfois à s’y méprendre à l’harmonie supposée de la vie conjugale…
« Certains fous, on ne devrait pas les associer… Aucune magie à la sortie de l’éprouvette. »
Et petit à petit, alors qu’il avait réussi à surmonter son passé et sa généalogie, Arthur redevient Vladimir, le flambeau de son père mort en mer. Il s’éloigne de la réalité, perd Lucille et finit par se perdre lui-même totalement. En variant les thèmes, en faisant intervenir de nouveaux personnages à la psychologie fouillée et aux caractères crédibles, Ludovic Debeurme fait intervenir dans Renée le même processus que celui mis en œuvre dans Lucille. Il prend ses personnages et les imbibe de désespoir. Il en ressort de petites figures sans consistance, molles, incapables de s’extraire elles-mêmes du bain morbide dans lequel elles se sont plongées. Ludovic Debeurme appuie le trait et n’a pas peur de jouer sur le pathétique. Et puis, peu à peu, il fait se croiser les bons personnages. Dans Lucille, la rencontre de la jeune fille avec Arthur leur fut salvatrice ; dans Renée, ce sera l’amitié liée entre les deux souffrantes qui leur permettra de s’élever un peu de leur réalité crasse et de surmonter les souvenirs lancinants des failles éprouvées. Avec Ludovic Debeurme, le bonheur n’est jamais total. Il ressemble plutôt à de la mélancolie et semble très fragile. Si le malheur est vécu concrètement par les personnages, la joie, elle, se symbolise par des rêveries incertaines et des visions hallucinées. Encore une fois, il s’agirait presque d’un échec, et on se demande si tout a vraiment été résolu à l’issue de la lecture de ces deux volumes. Un sentiment d’inachevé demeure encore… Tant de chemin parcouru pour une récompense aussi minuscule ? … - Citation :
- C’est tellement dur d’avoir à lutter contre soi. On y gagne si peu… Pour tout ce qu’on laisse en chemin.
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| | | colimasson Abeille bibliophile
Messages : 16258 Inscription le : 28/06/2010 Age : 33 Localisation : Thonon
| Sujet: Re: [BD] Ludovic Debeurme Sam 28 Déc 2013 - 14:07 | |
| Trois Fils, sorti en octobre : - Citation :
- Trois frères à l’allure étrange enchaînent leur père sur un îlot désert, et partent sans se retourner. Qui sont-ils? Que leur est-il arrivé? Pourquoi ont-ils pris la terrible décision d’abandonner leur géniteur à une mort certaine? Qui est ce vieillard au regard tantôt désespéré, tantôt mauvais comme la peste?
Après Renée, Ludovic Debeurme délaisse les décors réalistes et son noir et blanc épuré à l’extrême pour un conte cruel tout en couleurs directes, peintes. De grandes images, un texte réduit au minimum, mais toujours les obsessions graphiques chères à l’auteur : l’hybridation de l’homme avec la nature, les silhouettes hirsutes aux bras démesurés traînant au sol (vues notamment dans Le Lac aux Vélies), le rapport au père, ainsi qu’un goût certain pour le fantastique. Source | |
| | | Maryvonne Zen littéraire
Messages : 4259 Inscription le : 03/08/2009 Localisation : oui, merci.
| Sujet: Re: [BD] Ludovic Debeurme Dim 26 Jan 2014 - 13:24 | |
| Je suis passée a côté de ta critique de Lucille, que j'avais lue à sa sortie, suite à de très bonnes critiques dans la presse.
Pour le coup, ça ne m'avait pas du tout, du tout plu (j'ai même revendu le bouquin), et je me demande si je ne suis pas passée totalement à côté.
J'aime bien les graphismes (c'est dit) !
Je lui ferai à peut près les même reproches que ceux que l'on peut faire à certains bouquins Olivier Adam (ou des films de Larry Clarck !) : de ne ressentir aucune sympathie pour les personnages, de conserver une grande froideur qui m'avait mise mal à l'aise, et de s'acharner dessus. L'accumulation m'avait mise dans un état proche de la colère (sisi). Pourtant, c'est pas tant le type de lecture qui me rebute. Envie de dire à Debeurme de leur foutre la paix. Impression de voyeurisme de ma part aussi.
Au final, vu que ses bouquins sont chers et qu'ils ne sont pas à la médiathèque, je n'ai jamais osé retenter.
Il faudrait que je le relise, parce que j'en conserve une aversion étrange, que j'aimerai expliquer de façon plus construite. C'est étrange. | |
| | | colimasson Abeille bibliophile
Messages : 16258 Inscription le : 28/06/2010 Age : 33 Localisation : Thonon
| Sujet: Re: [BD] Ludovic Debeurme Mer 29 Jan 2014 - 17:07 | |
| Je pense que c'est compréhensible. Je me suis souvent demandée si Ludovic Debeurme ne prenait pas la pose du mec qui a morflé dans la vie sans avoir vraiment connu ce que ça veut dire. Il réussit à faire des tragédies avec tout et n'importe quoi. Il n'y a aucune échelle de valeur dans le dramatique des événements qu'il raconte. Mais j'aimerais bien que tu le relises et que tu t'en fasses une meilleure idée. | |
| | | Maryvonne Zen littéraire
Messages : 4259 Inscription le : 03/08/2009 Localisation : oui, merci.
| Sujet: Re: [BD] Ludovic Debeurme Jeu 30 Jan 2014 - 22:42 | |
| C'est pas tant la tragédie, plus de respect des personnages, qui perdent tout intimité. Et je me sens comme si j'avais fouiné dans le journal intime qui trainait. J'ai du mal à m'exprimer... Oui, je retente. Le même ou un autre ?
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| | | colimasson Abeille bibliophile
Messages : 16258 Inscription le : 28/06/2010 Age : 33 Localisation : Thonon
| Sujet: Re: [BD] Ludovic Debeurme Sam 1 Fév 2014 - 14:21 | |
| Ouais, totalement impudique... Tente un déjà lu et un pas-déjà lu ? si t'as le courage, bien sûr... | |
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| Sujet: Re: [BD] Ludovic Debeurme | |
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| | | | [BD] Ludovic Debeurme | |
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