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| | Rina Lasnier | |
| | Auteur | Message |
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jack-hubert bukowski Zen littéraire
Messages : 5257 Inscription le : 24/02/2008 Age : 42
| Sujet: Rina Lasnier Mer 27 Fév 2013 - 10:54 | |
| Rina Lasnier est une autre poétesse québécoise que je vous présente. Née en 1910 et décédée en 1997, elle a produit une oeuvre de grande ampleur à ce qu'il semble selon Wikipedia : - Citation :
- Féerie indienne, 1939
Images et proses, 1941 Le Jeu de la voyagère, 1941 La Modestie chrétienne, 1942 La Mère de nos mères, 1943 Le Chant de la montée, 1947 Escales, 1950 Le Jeu de la voyagère, 1950 Présence de l'absence, 1956 La Grande dame des pauvres, sur Marguerite d'Youville, 1956 Mémoire sans jours, 1960 Miroirs, 1960 Les Gisants, 1963 Rina Lasnier, 1964 L'Arbre blanc, 1966 Ces visages qui ont un pays, 1968 La part du feu, 1970 L'Invisible, 1971 La salle des rêves, 1971 Poèmes, 1972 Le rêve du quart jour, 1973 Amour, 1975 L'échelle des anges, 1975 Les signes, 1976 Femme plurielle, 1979 Le Soleil noir, 1981 Voir la nuit, 1981 Entendre l'ombre : poèmes, 1981 Le Choix de Rina Lasnier dans l'œuvre de Rina Lasnier, 1981 Chant perdu, 1983 Études et rencontres, 1984 Le Soleil noir, 1987 L'Ombre jetée, 1987 Le langage des sources, 1988 Présence de l'absence, 1992 Mémoire sans jours, 1995 Nous la reconnaissons souvent comme l'un des précurseurs de la modernité poétique québécoise. Née autour de la même époque (avant-première guerre mondiale) qu' Hector de Saint-Denys Garneau, elle s'inspire de la Bible pour écrire certains recueils poétiques. Peu à peu, elle développe une vision et un registre qui lui sont propres. J'ai en ma possession le recueil L'épanouissement de l'ombre. Poèmes choisis publié chez Noroît en 2011. Dans ce même recueil, il y a des poèmes choisis dans 14 recueils. Il serait intéressant d'explorer l'étendue de son oeuvre assez imposante. Pour le moment, je vous convie au poème «Présence de l'absence» tiré du recueil du même nom : - Citation :
- «Présence de l'absence»
Tu es né mêlé à moi comme l'archaïque lumière les eaux sans pesanteur,
Tu es né loin de moi comme au bout du soleil les terres noyautées de feu,
Tu nais sans cesse de moi comme les mille bras des vagues courant sur la mer toujours étrangère;
C'est moi ce charroi d'ondes pour mûrir ton destin comme midi au sommet d'une cloche;
Cette gorgée d'eau qui te livre la cime du glacier, c'est mon silence en toi,
Et c'est le sillage de mon défi cette odeur qui t'assujettit à la rose;
Cette pourpre dont tu fais l'honneur de ton manteau, c'est le deuil violent de mon départ;
C'est moi l'amour sans la longue, la triste paix possessive...
Moi, je suis en toi ce néant d'écume, cette levure pour la mie de ton pain;
Toi, tu es en moi cette chaude aimantation et je ne dévie point de toi;
C'est moi qui fais lever ce bleu de ton regard et tu couvres les plaies du monde.
C'est moi ce remuement de larmes et tout chemin ravagé entre les dieux et toi.
C'est moi l'envers insaisissable du sceau de ton nom.
Si ton propre souffle te quittait, je recueillerais pour toi celui des morts dérisoires;
Si quelque ange te frustrait d'un désir, ce serait moi la fraude cachée dans la malédiction.
Toi, tu nais sans cesse de moi comme d'une jeune morte, sans souillure de sang;
De ma fuite sont tes ailes, de ma fuite la puissance de ton planement;
De moi, non point l'hérédité du lait, mais cette lèvre jamais sauvé du gémissement.
Je suis l'embrassement amoureux de l'absence sans la poix de la glutineuse présence. | |
| | | jack-hubert bukowski Zen littéraire
Messages : 5257 Inscription le : 24/02/2008 Age : 42
| Sujet: Re: Rina Lasnier Ven 1 Mar 2013 - 11:38 | |
| Toujours dans La présence de l'absence, nous pouvons lire «Naissance obscure du poème» : - Citation :
- «Naissance obscure du poème»
Comme l'amante endormie dans l'ardente captivité - immobile dans la pourpre muette de l'amant,
fluente et nocturne à la base du désir- obscurcie de sommeil et travestie d'innocence,
ses cheveux ouverts à la confidence - telles les algues du songe dans la mer écoutante,
la femme omniprésente dans la fabulation de la chair - la femme fugitive dans la fabulation de la mort,
et l'amant pris au sillage étroit du souffle - loin de l'usage viril des astres courant sur des ruines de feu,
elle dort près de l'arbre polypier des mots médusés - par l'étreinte de l'homme à la cassure du dieu en lui,
par cette lame dure et droite de la conscience - voici l'homme dédoublé de douleur, voici la seule intimité de la blessure - l'impasse blonde de la chair sans parité;
//p. 93
voici l'évocatrice de ta nuit fondamentale, malemer - la nuit vivante et soustraite aux essaims de signes,
malemer, mer réciproque à ton équivoque profondeur - mer inchangée entre les herbes amères de tes pâques closes,
toute l'argile des mots est vénitienne et mariée au limon vert - tout poème est obscur au limon de la mémoire;
malemer, lent conseil d'ombre - efface les images, ô grande nuit iconoclaste!
***
Malemer, aveugle-née du mal de la lumière - comment sais-tu ta nuit sinon par l'oeil circulaire et sans repos de paupière?
pierrerie myriadaire de l'oeil jamais clos - malemer, tu es une tapisserie de regards qui te crucifiant sur ton mal;
comment saurais-tu ta lumière noire et sans intimité - sinon par le poème hermétique de tes tribus poissonneuses?
//p. 94
ô rime puérile des étages du son - voici l'assonance sinueuse et la parité vivante,
voici l'opacité ocellée par l'oeil et l'écaille - voici la nuit veillée par l'insomnie et l'étincelle;
entre les deux mers, voici le vivier sans servitude - et le sillage effilé du poème phosphorescent,
mime fantômatique du poème inactuel - encore à distance de rose ou de reine,
toute la race du sang devenue plancton de mots - et la plus haute mémoire devenue cécité vague;
pierre à musique de la face des morts - frayère frémissante du songe et de la souvenance;
malemer, quel schisme du silence a creusé ta babel d'eau - négation à quels éloges prophétiques?
assises du silence sur le basalte et le granit - et sur les sinaïs noirs de tes montagnes sans révélation, le vent n'a point de sifflement dans ton herbage - la pluie est sur toi suaire de silence
//p. 95
veille la parole séquestrée dans l'éclair - faussaire de tes silences catégoriques,
tu l'entendras draguer tes étoiles gisantes, tes soleils tous démaillés - la haute mer lui portera ferveur,
pleureuse de la peine anonyme - la nuit lui est remise à large brassée amère,
chanteuse encore mal assurée - et c'est toi socle et cothurne inspiré,
fermentation de la parole en bulles vives - roses hauturières et blanches pour une reine aveugle.
//p. 96 | |
| | | jack-hubert bukowski Zen littéraire
Messages : 5257 Inscription le : 24/02/2008 Age : 42
| Sujet: Re: Rina Lasnier Sam 2 Mar 2013 - 11:42 | |
| Deux autres poèmes de L'homme rapaillé : - Citation :
- «La pauvreté anthropos»
Ma pauvre poésie en images de pauvres avec tes efforts les yeux sortis de l'histoire avec tes efforts de collier au cou des délires ma pauvre poésie dans tes nippes de famille de quel front tu harangues tes frères humiliés de quel droit tu vocifères ton sort avec eux et ces charges de dynamite dans le cerveau et ces charges de bison vers la lumière lumière dans la gangue d'ignorance lumière emmaillotée de crépuscule c'est-ce pas de l'inusable espoir des pauvres ma pauvre poésie avec du coeur à revendre de perce-neige malgré les malheurs de chacun de perce-confusion de perce-aberration ma pauvre poésie dont les armes rouillent dans le haut-côté de la mémoire ma pauvre poésie toujours si près de t'évanouir dans le gargouillement de ta parole désespérée mais non pas résignée obstinée dans ta compassion et le salut collectif malgré les malheurs avec tous et entre nous qu'ainsi à l'exemple des pauvres tu as ton orgueil et comme des pauvres ensemble un jour tu seras dans une conscience ensemble sans honte et retrouvant une nouvelle dignité - Citation :
- «En une seule phrase nombreuse»
Je demande pardon aux poètes que j'ai pillés poètes de tous pays, de toutes époques, je n'avais pas d'autres mots, d'autres écritures que les vôtres, mais d'une façon, frères, c'est un bien grand hommage à vous car aujourd'hui, ici, entre nous, il y a d'un homme à l'autre des mots qui sont le propre fil conducteur de l'homme, merci. Nous voyons des influences certes, mais je puis dire ici que Garneau a influencé Miron d'une certaine manière. | |
| | | jack-hubert bukowski Zen littéraire
Messages : 5257 Inscription le : 24/02/2008 Age : 42
| Sujet: Re: Rina Lasnier Sam 2 Mar 2013 - 12:22 | |
| Dans Mémoire, il y a un passage fort évocateur qui transmet bien la plume braultienne : - Citation :
- Trois fois accomplie c'est l'eau solitaire
de tes yeux le même souvenir qui tierce s'écoule une rêverie où l'horreur est lente et tranquille un même souvenir d'autrefois une horreur de petite fille née trop tôt trop tard et mourante encore de naître | |
| | | jack-hubert bukowski Zen littéraire
Messages : 5257 Inscription le : 24/02/2008 Age : 42
| Sujet: Rina Lasnier Dim 3 Mar 2013 - 10:00 | |
| Rina Lasnier a écrit plusieurs recueils. J'ai longtemps accroché après La présence de l'absence. Peut-être était ce le style d'écriture... je reprends donc la lecture de Lasnier dans un tout nouveau registre : - Citation :
- «Trop de regards»
Trop de regards aux yeux, trop de reluis dissuade; plein amour et plein soleil sont or oculaire de cécité.
Avers épais des paupières, songe de lui dépeuplé de regards balise l'amante de visions, inverse en elle l'inépuisable... C'était dans Matin d'oiseaux. | |
| | | jack-hubert bukowski Zen littéraire
Messages : 5257 Inscription le : 24/02/2008 Age : 42
| Sujet: xxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxx Lun 8 Juil 2013 - 10:27 | |
| Dans L'épanouissement de l'ombre, recueil de poèmes choisis dans plusieurs recueils, j'ai pu repêcher un poème de Rina Lasnier dans L'arbre blanc, soit «ON N'ENTERRE PAS LE SANG...» : - Rina Lasnier, L'épanouissement de l'ombre. Poèmes choisis, 2011, Noroît, p. 120. a écrit:
- «ON N'ENTERRE PAS LE SANG...»
On n'enterre pas le sang décharné de la servitude ni le sang désarmé de l'amour inutilisé; on ne retire pas le cri de la bouche comme une clef, on ne suture pas la pierre fissurée d'une soif. La chaux vive du sang qui n'a point dormi, tu l'entendras liquéfier la dalle des morts, traverser ses étapes de neige étouffée et siffler en remarchant tout son hiver. On n'enterre pas le talon poudreux de la foudre ni la fureur tendre du fruit piétiné; le sang retourné sur sa racine comme un décombre s'est armé tout droit d'une moisson fruste de couteaux... La page qui suit, nous pouvons lire deux poèmes en anglais. Voilà pour le paradoxe illustré. | |
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| | | | Rina Lasnier | |
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