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| | Francis Jammes | |
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Auteur | Message |
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anagramme Agilité postale
Messages : 909 Inscription le : 29/08/2008
| Sujet: Re: Francis Jammes Jeu 27 Mar 2014 - 18:49 | |
| merci, Sigismond. | |
| | | Sigismond Agilité postale
Messages : 875 Inscription le : 25/03/2013
| Sujet: Re: Francis Jammes Lun 15 Déc 2014 - 0:15 | |
| Clairières dans le Ciel (paru en 1906) Clairières dans le Ciel est une compilation un rien hétéroclite. Aujourd'hui on la trouve à dans la collection NRF-Gallimard "Poésie" en recueil reprenant la parution initiale, qui elle-même avait été réfléchie par Jammes pour ne pas tenir compte de l'ordre d'écriture des poèmes. Mais entretemps, dans la publication des ses Oeuvres de son vivant par son éditeur (Le Mercure de France), Jammes avait soustrait le corpus de Clairières dans le Ciel proprement dit - ainsi que Le deuil des primevères, pour une parution à part. Quoi qu'il en soit, cet ouvrage "tient" mon chevet depuis quelques semaines, je l'ai parcouru, arpenté en tout sens, et je ne me décide pas à le ranger. Je ne vous en livre pas une présentation générale, c'est toujours délicat je trouve pour un recueil de poésie (est-ce seulement possible, au demeurant ?). Peut-être, sans le savoir, connaissez-vous quelques vers de Clairières dans le Ciel, en effet Georges Brassens a fait passer à la postérité quelques strophes extraites de Rosaire (qui clot l'ouvrage), sous le titre La Prière. - La Prière, Georges Brassens:
Par le petit garçon qui meurt près de sa mère Tandis que des enfants s'amusent au parterre Et par l'oiseau blessé qui ne sait pas comment Son aile tout à coup s'ensanglante et descend Par la soif et la faim et le délire ardent Je vous salue, Marie.
Par les gosses battus par l'ivrogne qui rentre Par l'âne qui reçoit des coups de pied au ventre Et par l'humiliation de l'innocent châtié Par la vierge vendue qu'on a déshabillée Par le fils dont la mère a été insultée Je vous salue, Marie.
Par la vieille qui, trébuchant sous trop de poids S'écrie: " Mon Dieu ! " par le malheureux dont les bras Ne purent s'appuyer sur une amour humaine Comme la Croix du Fils sur Simon de Cyrène Par le cheval tombé sous le chariot qu'il traîne Je vous salue, Marie.
Par les quatre horizons qui crucifient le monde Par tous ceux dont la chair se déchire ou succombe Par ceux qui sont sans pieds, par ceux qui sont sans mains Par le malade que l'on opère et qui geint Et par le juste mis au rang des assassins Je vous salue, Marie.
Par la mère apprenant que son fils est guéri Par l'oiseau rappelant l'oiseau tombé du nid Par l'herbe qui a soif et recueille l'ondée Par le baiser perdu par l'amour redonné Et par le mendiant retrouvant sa monnaie Je vous salue, Marie.
Et Darius Milhaud, qui transcrira et mettra en musique en 1923 Une brebis égarée de Jammes pour l'opéra-comique, signe aussi une adaptation musicale de "Tristesses", "Tristesses" étant contenu dans Clairières dans le Ciel. Voilà je crois que c'est à peu près tout pour les artistes notoires inspirés par Clairières dans le Ciel. Mais après tout, Georges Brassens et Darius Milhaud, ce n'est déjà pas si mal ! Mais, le peu d'écho de ce recueil de Jammes, alors et sans doute encore plus de nos jours, ne doit pas masquer la très grande modernité de certaines de ses poésies, pas seulement parce qu'elles sont fort épurées, mais aussi par la force des images (le symbolisme est lu, approuvé, digéré), l'usage du vers libre... Voici quelques courts poèmes sans titres: Dans le chemin toujours trempé, tant y est épais le feuillage visqueux de l’aulne amertumé, nous nous promènerons. Mais comme elle est plus grande que moi, c’est elle qui écartera les branches et elle encore qui mettra sur mon épaule sa joue et ses yeux bleus qui fixeront le sol. Je la désire dans cette ombreuse lumière qui tombe avec midi sur la dormante treille, quand la poule a pondu son œuf dans la poussière. Par-dessus les liens où la lessive sèche, je la verrai surgir, et sa figure claire. Elle dira : je sens des pavots dans mes yeux. Et sa chambre sera prête pour son sommeil, et elle y entrera comme fait une abeille dans la cellule nue que blanchit la chaleur. Rappelons qu'on n'est qu'aux premières années du XXème, peut-être 1902 ou 1903, pour les deux poèmes ci-dessus et celui ci-dessous ! Elle est gravement gaie. Par moments son regard se levait comme pour surprendre ma pensée. Elle était douce alors comme quand il est tard le velours jaune et bleu d’une allée de pensées. | |
| | | animal Tête de Peluche
Messages : 31548 Inscription le : 12/05/2007 Age : 43 Localisation : Tours
| Sujet: Re: Francis Jammes Mar 23 Déc 2014 - 21:58 | |
| Monsieur le Curé d'Ozeron (1918)
(dans une belle édition neuve de 1948 avec le papier qui a bruni et l'encre qui a légèrement imprégné les pages d'en face, tout doux à découper).
Drôle de lecture. Déconcertante.
Déconcertante d'abord par l'illumination perpétuelle. Mis à part par moments des considérations démodées ou gênantes (les ouvriers de l'usine, un certain "chacun à sa place", ...) et passé un temps d'adaptation car la "vision" est partout, de même que la pratique de ce curé d'Ozeron dont on nous conte l'histoire est permanent, on arrive vraiment dans un "drôle de texte".
Un bizarre sens du suspens pour une histoire liée au curé d'Abrecave et d'une duchesse, histoire dans laquelle il ne se passe pas grand chose pourtant et dans laquelle la grandeur ou même la gravité ne l'emportent pas sur un patient et serein train train quotidien.
Tout ne va pas à la perfection dans cette campagne au pied des Pyrénées mais tout va selon et le curé d'Ozeron comme avant lui celui d'Abrecave, inlassablement (la question ne se pose même pas) "fait son job". Il apporte le réconfort, l'espoir, le soutien nécessaire, révèle le bien, surtout vit le bien. Et c'est comme qui dirait quelque chose qui se partage, quelque chose de contagieux.
Tranquillement lumineux, inaltérable dans l'épreuve, d'une gratitude élémentaire, stupéfiant est l'effet du texte.
Et au loin il s'en passe des choses, Paris, Cannes, l'Argentine, ... discrètement les dates et les durées qui nous rappellent que le monde n'est pas si tranquille. Et la conclusion qui affirme cette lucidité.
Stupéfiant, pas abruti ou nunuche. Le temps, les générations, la transmission, le retour, la simplicité, la sourde oreille aux apparences, la conscience, tout un travail en renaissance douce, obstinée, heureuse.
Sans oublier une part de marginalité, l'étrangeté de la perméabilité des vies intérieurs des personnages, leur place parfois marginale, une forme de déclassement, peut-être bien une petite part de secret.
Presque trop, presque seulement parce que c'est tellement agréable (aussi) !!!
Et si c'est léger (relativement) il va quand même falloir décanter... | |
| | | Sigismond Agilité postale
Messages : 875 Inscription le : 25/03/2013
| Sujet: Re: Francis Jammes Dim 28 Juin 2015 - 2:13 | |
| Un nouveau site dédié à Francis Jammes, nettement plus fourni, agréable, beau, en somme, que celui que j'indiquais dans le message de présentation de l'auteur. Il fait bon s'y attarder, l'iconographie est riche et on y trouve aussi pas mal de poésies de Jammes, quelques auteurs "périphériques" font l'objet d'articles, de présentations (je pense à André Lafon par exemple, dont la notoriété n'a pas dû franchir la Gironde, et encore, en Gironde, je dirais que seules quelques bouches et quelques oreilles ont dû colporter ladite notoriété). Tant qu'à faire, postons une strophe qu'on ne trouve pas sur ce site, tirée du poème Elégie seconde, parue dans le recueil Le Deuil des primevèresPourquoi suis-je si jeune, pourquoi dans mon cœur frais y a-t-il comme un frisson de soir aux noisetiers ? Je suis fou. Je te veux sur le bleu des pelouses, vers sept heures, lorsque la lune au haut du ciel pleut sa lumière humide au front des vaches rousses dont la corne porte encore un morceau de soleil. En tortillant un peu, on arrive poussivement à des vers de douze pieds ou à peu près, réminiscence (ou canevas) classique. Mais voilà, c'est tout: pas de rimes, pas d'allitérations, des césures sans ordre ni rappels. Comme je l'indiquais à propos des strophes de "Clairières dans le ciel" que je citais deux messages plus haut, il faut bien accepter Jammes comme un poète bien plus novateur qu'il n'y parait à première vue. La strophe ci-dessus est d'un primitif apaisé. Sa musique est champêtre, l'air de rien une ou deux touches étonnantes de modernité (ou de pré-modernité façon art naïf ?) comme ce frisson de soir aux noisetiers (voire même ce bleu des pelouses) ne seraient pas désavouées par des plumes plus prestigieuses et postérieures à la sienne (cette Elégie seconde est datée de septembre 1898). Ces quelques vers sont comme prosaïquement désarticulés ou mieux, pour un jeu de mots, articulés en prose. Jammes vivait, comme nous dit une correspondance citée sur le site, en éprouvant l' "impression d'un enracinement éphémère reflété dans un courant éternel". Un humble papyrus au bord d'un fleuve dont dépend la civilisation, s'y mirant... Et merci pour la corne [qui] porte encore un morceau de soleil... - ça me fera sans problème la soirée, avec pronostic favorable sur le début des beaux rêves... | |
| | | anagramme Agilité postale
Messages : 909 Inscription le : 29/08/2008
| Sujet: Re: Francis Jammes Dim 28 Juin 2015 - 18:59 | |
| Merci, Sigismond, le site est vraiment très intéressant. Il y a même une video de lui, incroyable! | |
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| Sujet: Re: Francis Jammes | |
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| | | | Francis Jammes | |
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