Celine Sciamma

Citation :

Née le 12 novembre 1980 à Pontoise, en région parisienne, Céline Sciamma a suivi sa formation de scénariste à la Fémis.

Suivant les conseils de Xavier Beauvois, membre de son jury de fin d'année, elle utilisera son scénario de fin d'étude pour réaliser son premier film en 2006, Naissance des pieuvres. Saluée par la critique, cette première œuvre a été présentée dans la section Un certain regard au Festival de Cannes 2007 et récompensée du Prix Louis-Delluc du premier long-métrage. Avec ce film, Céline Sciamma est également nominée pour le César du meilleur premier film lors des César du cinéma 2008.

La rélisatrice revient sur les écrans, en Avril, avec un nouveau film.
On quitte l'adolescence pour l'enfance ... directions questionnements sur le genre.

On y retrouve des maillots de bains pour ne pas être trop débousolés.



un article sur fluctuat.net

Interview et extraits sur le site d'Arte

J'ai trop hâte.

L'interview a déjà tout pour me convaincre, à suivre.

Maryvonne a écrit:

Je ne trouve plus le fil sur la naissance des pieuvres... serait-je trop pintée ?

Peut-être parce qu'il n'y avait pas de fil ? On en a parlé un peu je ne sais plus où, et en mp je crois, mais je ne me rappelle pas d'un fil. Je vais chercher !

Citation :

Laure a 10 ans. Laure est un garçon manqué. Arrivée dans un nouveau quartier, elle fait croire à Lisa et sa bande qu’elle est un garçon.

Après une Naissance des pieuvres riche de promesses, Tomboy c'est l'aisance d'une preuve, celle que Céline Sciamma est bien partie pour occuper une place de choix dans le cinéma français. L'idéal serait de ne rien savoir du sujet avant la projection, d'arriver vierge et de se laisser surprendre par LA révélation, au bout d'une quinzaine de minutes. Laure est une fille, pour ses parents et sa petite soeur, elle devient Michaël, un garçon, au sein de la bande qui l'a adopté(e), au coeur d'un été ensoleillé. La question a beau être celle de l'identité sexuelle, pour un enfant de 11 ans, elle n'est jamais traitée comme un traumatisme ou même une douleur. Le talent de la réalisatrice est de rendre limpide et naturelle des situations qui, chez d'autres, prendraient des allures de drame. Non que Laure/Michaël ne se pose pas de questions, mais s'il y a trouble, il est feutré et hors caméra, le plus souvent. Et commenter le film est un peu lui faire injure, car il a cette qualité de laisser le champ libre au spectateur, de ne pas lui imposer une vérité ou de lui infliger un message lourd de sens. On retient plutôt les jeux innocents de l'enfance, pour les extérieurs, et la tendre complicité de Laure/Michaël avec sa soeur cadette, qui nous valent les plus belles scènes, pour les intérieurs. Pas de clichés non plus dans les rapports entre les parents et leur garçon manqué. Il y a une telle simplicité de ton pour aborder une complexité de relations ! Tomboy est un film de vacances, finalement, avec de petits moments de grâce et des éclats de gravité. Un film libre, magnifique et baigné de lumière.

Tomboy

Vraiment un très beau film...je suis d'autant plus convaincu que Naissance des pieuvres ne m'avait pas franchement enthousiasmé (malgré un potentiel évident de mise en scène).
Tomboy est limpide dans sa brutalité et sa puissance d'évocation : j'ai été très sensible à la clarté de la lumière, dès cette séquence d'ouverture étrangement aérienne, et pourtant annonciatrice de tous les enjeux.
Le rythme dévoile à la fois une tension et une sérénité, une angoisse et la perspective d'une "libération" de soi-même, comme dans une parenthèse suspendue dans le temps.
Laure devient Michaël avec la spontanéité de l'évidence, la conviction d'une appropriation. Les enfants vivent leur rôle, chaque échange devant l'écho d'un questionnement, d'une vérité enfouie sous le masque des apparences. Au-delà de l'interrogation du genre, de l'identité sexuelle, du regard porté sur soi, sur son corps, sur l'autre...déjà remarquable dans son ambition, Céline Sciamma parvient, avec beaucoup d'aisance, à s'immerger dans la cruauté, la violence d'un âge où l'on est sorti de l'enfance sans avoir pu s'approprier les clefs affectives de l'adolescence.
Mais Tomboy ne cède en effet jamais à une gravité surchargée, et Sciamma délivre les promesses d'une ouverture, liée à la conscience d'une fragilité.

Ouaip; la richesse du film, c'est de ne pas tomber dans film à message choc. D'aborder le/les sujets avec délicatesse.
Chacun en tire ce qu'il veut.

Tomboy-



Quel joli film, on le croirait tourné presque à l'insu des acteurs tant tout nous apparait juste et naturel. Traversay et Avadoro parlent de limpidité, de grâce, c'est vrai il y a tout cela dans Tomboy. Un mélange de lumière et de gravité, comme dans le regard de Laure, qui vit ses émotions de l'instant, avec son petit coeur d'enfant, sans se perdre dans des questionnements d'adulte. Celine Sciamma a superbement su capter toutes ces nuances, sans surcharger son sujet, en laissant beaucoup de latitude à ses acteurs, comme si la caméra s'immisçait dans l' intimité de ces jeunes.

Un sujet délicat sur lequel il est facile de déraper, de sombrer dans la caricature. Mais la cinéaste a su préserver la candeur de cet age en se mettant à la hauteur de leur regard, en en oubliant celui de l'adulte, ce qui rend Tomboy si évident et pas du tout démonstratif. Un grand bravo à elle, et vous courez le voir!

En effet, elle se met à la hauteur de l'enfant avec beaucoup d'aisance...et en même temps, les parents sont esquissés avec justesse. Ils sont une frontière, mais apparaissent aussi avec leurs ambiguités, leurs absences et leurs maladresses.

Tomboy

Heureusement que je ne me suis pas écoutée, hésitant à aller voir ce film, ayant eu l'impression d'avoir déja tout vu dans la bande annonce.

Je trouve que Céline Sciamma a réussi un beau pari avec ce film et prouve qu'elle est une grande cinéaste.
J'ai lu tous vos commentaires et vous rejoins sur l'ensemble.

Dans la première partie du film, tout se passe dans un calme apparent, on participe au jeu de séduction et de charme de Mickael pour se faire accepter et même aimer par ses nouveaux camarades en n'hésitant pas à se mesurer dans les jeux archétypés masculins comme le foot et autres, on est même vaguement amusé, bref on est assez léger.
Mais on sent bien que ça turbine sec dans la tête de Mickael, son regard empli de gravité ne trompe pas, d'ailleurs son pauvre sourire est assez rare pour le souligner et ses éclats de rire quasi absents, sauf quand il joue comme un enfant de 10 ans qu'il est après tout.

La deuxième partie voit surgir l'angoisse de Mickael qu'il nous transmet peu à peu, on tremble avec lui, car une certaine forme de complicité avait fini par faire corps avec nous.

C'est un film qui s'éprouve et se ressent, véritablement un petit miracle.

Même enthousiasme pour ce film. Je suis d'accord avec l'ensemble de vos remarques. J'ajouterais juste 1 ou 2 choses...

Un ami m'a dit en sortant de la salle: "on dirait un reportage animalier". ça peut paraître un peu abrupt mais c'est assez juste. La manière dont la réalisatrice observe tous les rituels de jeux, de rivalité, et de séduction souvent cruels et primaires de ces enfants a une telle vérité et un tel naturel qu'on dirait effectivement un reportage sur les moeurs chez les petits d'hommes. Il y a quelque chose de tribal et de glaçant, surtout quand le mensonge est levé. Et cette dimension quasi documentaire est d'autant plus frappante quand on compare Tomboy à "Ma vie en rose" sur un sujet similaire (qui était traité sur le ton de la comédie dramatique et de la fantaisie). Le signe en tout cas d'une mise en scène et d'une direction d'acteurs remarquables (il n'y a qu'à voir la médiocrité de jeu des enfants dans la plupart des films français). Je n'avais pas vu une telle intensité depuis la stupéfiante scène d'introduction de "Sombre" de Philippe Grandrieu.

J'aime aussi la façon dont elle montre l'évidence de la singularité de cette petite fille qui vit ce qu'elle est avec un grand naturel avant que le regard social ne la mette en difficulté. Y compris les parents qui semblaient pourtant tellement en symbiose avec elle. Mais là aussi la réalisatrice ne bascule pas dans le psychodrame. La mère ne cherche pas à la "normaliser" mais seulement à restituer la vérité pour lui éviter des déconvenues. Autre façon de suggérer que cette différence n'est pas un problème en soi mais seulement à partir du moment où elle conduit au mensonge et à la dissimulation.

Par plein de petites nuances et un beau travail sur le cadre et la photographie, ce film en apparence tout simple est une très belle réussite.

P.S. La petite soeur est géniale!!

Je m'aperçois que je n'avais pas ajouté ma petite note sur Tomboy. Honte sur moi. Car ce film est vraiment très bien foutu. Comme vous l'avez tous dit précédemment d'ailleurs. Incroyable comme on croit que le sujet est éculé, vu et revu, traité toujours un peu de la même façon et finissait peut-être : oui, et après ?

Céline Sciamma arrive à montrer un nouveau regard, une nouvelle approche, avec beaucoup de douceur et de naturel (et je rejoins notamment Aériale et Marko qui souligne le côté "documentaire" du film). On n'a pas l'impression que c'est du chiqué... et pourtant ce n'est pas non plus un documentaire avec son lot de trucs trop "docu" justement (comprenne qui pourra). Là, c'est un vrai film de cinéma, et Avadoro a raison de parler de l'utilisation de la lumière : elle est sublime, avec un travail sur la photo vraiment à couper le souffle tant le quotidien semble toucher à l'art.

Les gamins acteurs sont également vraiment épatants. Ça commence à être de moins en moins rare les réalisateurs qui savent bien choisir leurs acteurs enfants, et à les diriger correctement (non mais la minuscule gamine qui joue la sœur est ahurissante et les scènes entre les deux sont tellement touchantes...).


Bref.
Un vrai beau film plein de tendresse, avec ce qu'il faut de tension, de réalisme pour nous tenir en haleine, avec assez de profondeur de scénario et de situations pour nous y faire croire, mais toujours avec cette petite touche de légèreté, de jeu, de regard neuf et d'innocence qui permet que ça ne tombe pas dans le plombant, le glauque, la chronique social mille fois vues.

Tomboy

Je rejoins vos enthousiasmes pour ce film tout en douceur grave (ou en gravité douce)...

Synopsis :

Citation :

L'été quand on a 15 ans. Rien à faire si ce n'est regarder le plafond. Elles sont trois : Marie, Anne, Floriane. Dans le secret des vestiaires leurs destins se croisent et le désir surgit. Si les premières fois sont inoubliables c'est parce qu'elles n'ont pas de lois.

Même si les difficultés adolescentes rencontrées par Marie, Anne et Floriane sont violentes, le film de Céline Sciamma en parle avec une douceur et une indifférence qui m’ont littéralement fait baigner avec elles dans l’eau de la piscine qui connaîtra leurs premiers émois.

Les jalousies, les querelles, les déceptions amoureuses, les humiliations sexuelles, la solitude n’ont rien de joyeux, mais tout ceci se déroule dans une apathie ouateuse à l’image de celle qui entoure les personnages. Pas très loquaces, ceux-ci subissent ce qui leur arrive, la plupart du temps sans rechigner. Ils s’en prennent plein la tête mais ça ne les empêche pas de continuer à vivre, parfois ni mieux ni moins bien qu’avant. J’ai trouvé cette indifférence très apaisante. On se laisse porter par des mésaventures réduites au strict minimum. Aucun signe du vécu familial ou scolaire de ces adolescentes. Ce qui est important se situe ailleurs, dans la découverte de nouveaux sentiments qu’il faudra arriver à surmonter ou à accepter. Marie, Anne et Floriane sont vouées à elles-mêmes et se battent sans cesse, à l’image des petits soldats de la natation synchronisées : toujours souriantes, elles ne doivent pas interrompre une seconde leurs efforts pour garder la tête à la surface de l’eau.

Même s’il n’en a jamais l’air, Naissance des pieuvres me semble être un film très difficile et qui n’accorde aucune concession à ses personnages. Sans prétendre à quoi que ce soit, il arrive à communiquer très clairement les tensions qui peuvent survenir à cet âge critique qu’est l’adolescence.

Je garde une impression de très grande justesse du regard de Sciamma sur le milieu adolescent, sur les désirs, les troubles, les obsessions, et toutes les fissures. Avec Tomboy, on peut dire qu'elle sait de quoi elle parle, et comment en parler, car comme le dit Colimasson, elle ne fait pas de concession, n'est pas dans le racolage.

Ah, Tomboy, tu fais bien de me le rappeler Queenie !