Iouri KazakovIouri Pavlovitch Kazakov est un écrivain et nouvelliste soviétique né le 8 août 1927 à Moscou et décédé le29 novembre 1982 à Moscou.
Iouri Kazakov, fils d'Oustinia Andreïevna et de Pavel Gavrilovitch, naît dans un milieu ouvrier originaire des environs de Smolensk, où ses grands-parents étaient paysans. À partir de 3 ans, et jusqu'en 1964 il habitera à Moscou1. Alors qu'il a six ans, en pleine période de terreur stalinienne, son père, qui avait omis de dénoncer un homme qui, au cours d'une conversation, décrivait les horreurs de la collectivisation, est arrêté et déporté dans un camp du Goulag. Il ne sera réhabilité qu'en 1956. Dès lors sa famille vivra chichement, mais cela n'empêche pas Iouri de continuer ses études dans une école professionnelle d'élite, d'où il sort diplômé en génie civil en 1946.
Pendant la Bataille de Moscou (novembre 1941-décembre 1942), lors des bombardements, alors qu'il luttait contre les bombes incendiaires sur le toit de sa maison, il est contusionné et traumatisé par l'explosion d'une bombe. Il devient bègue. Il évoquera cette terrible période dans un ouvrage posthume paru en 1986 : Deux nuits ou La séparation de l'âme. Une situation familiale difficile, la guerre, les études ne l'empêchent pas de commencer à écrire dès 1940 de la poésie en prose ou en vers, des pièces de théâtre qui ne seront pas retenues par les éditeurs. Il collabore aussi au journal Le sport soviétique.
En 1944, il se met à étudier la musique, puis en 1946, entre à l'Académie russe de musique Gnessine où il apprend à jouer de la musique classique au violoncelle et à la contrebasse. Avant de sortir diplômé de cette école en 1951, il retourne en 1947 visiter son village natal, là où ses grands-parents, son père, sa mère avaient vécu. Par les histoires que sa mère lui avait racontées il était imprégné de tendresse pour cette terre qu'ils avaient quittée : il n'y trouve plus que des ruines, des fosses communes et la végétation qui a repris le dessus.
À la sortie de ses études de musique, il est embauché immédiatement dans l'orchestre du Théâtre d'art de Moscou. Il devient professeur au conservatoire, enseigne dans des écoles de musique, joue dans différents orchestres symphoniques (dont celui du Bolchoï) ou de jazz, musique pratiquement inconnue en URSS à cette époque, travaille au noir comme instrumentiste dans des groupes qui animent des pistes de danse. Il lui faut bien vivre, ne trouvant pas, en tant que fils d'un condamné, de travail à temps complet dans le génie civil.
En 1952, il abandonne la musique pour se consacrer à l'écriture. En 1953, il entre à l'Institut littéraire Maxime Gorki où il est conseillé par Nikolaï Zamochkine. En 1956, il rend visite à son père en exil : celui-ci, après sa réhabilitation, choisit de rester sur place pour travailler dans une scierie, mais aussi pour pratiquer son loisir favori : la chasse. D'ailleurs il l'accompagne car lui aussi aime ce sport ; n'a-t-il pas déjà économisé pour s'acheter un fusil de chasse ? On retrouve ce thème dans sa nouvelle À la chasse.
Son travail est apprécié par des écrivains chevronnés qui le lui témoignent par écrit, comme Victor Chklovski, Ilya Ehrenbourg, Vera Panova, Efim Dorosh, Evgueni Evtouchenko, Mikhaïl Svetlov, Victor Konetski, et Constantin Paoustovski qui publie à son sujet, dans la Literatournaïa gazeta, un article élogieux.
En 1958, l'année de sa sortie de l'Institut, présenté par Zamochkine, il est admis à l'Union des Écrivains. Mais certains, et notamment les autorités, désavouent son pessimisme qui ne respecte pas la ligne idéologique en vogue ; on lui reproche son pessimisme et la veulerie de ses personnages (personnages et non héros). On cessera de le publier dans son pays à partir de 1959 ; mais en 1960 il est publié en Italie, et en 1963 en Allemagne. Il est également publié au Royaume-Uni et au Kazakhstan.
En 1967, il est publié en France ; la même année, invité par le syndicat des écrivains français, il vient à Paris où il rencontre Boris Zaitsev et les émigrés russes qui lui en apprennent beaucoup sur la Russie traditionnelle. Pendant ce voyage, il sait éviter les pièges qui étaient d'apparaître comme un propagandiste du régime soviétique d'une part, de se laisser séduire par les flatteries des écrivains occidentaux d'autre part.
En 1968, il signe en faveur des participants à la manifestation du 25 août sur la place Rouge à Moscou contre l'intervention soviétique en Tchécoslovaquie. Il s'en tire avec un avertissement3.
Il poursuit après 1968 la rédaction du Journal du Nord, choses vues constitué de 10 ans d'ajouts de nouveaux chapitres. Le dernier sera consacré à l'artiste d'origine nénètse Tyko Vylka, qui l'inspira pour écrire Le garçon de la fosse à neige et le script du film Le grand samoyède.
Marié à Tamara Mikhaïlovna Kazakova, il en a eu un fils, héros principal avec lui-même de sa nouvelle autobiographique En rêvant, vous avez pleuré. Il était aussi très attaché à son chien, un épagneul appelé « Chife » qui l'a accompagné pendant douze ans. Les cinq dernières années de sa vie, déprimé, il ne publie presque plus rien et se met à boire4. Il quitte sa maison de Moscou en 1964 pour habiter sa datcha d'Abramtsevo.
Iouri Kazakov a aussi écrit des essais sur Mikhaïl Lermontov et sur Constantin Aksakov.