Parfum de livres… parfum d’ailleurs
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 Georges Duhamel

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Constance
Max
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domreader
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MessageSujet: Re: Georges Duhamel   Georges Duhamel - Page 2 EmptyJeu 3 Avr 2014 - 18:32

J'ai toujours Vie et Aventures de Salavin dans ma PAL. Mais je ne l'ai toujours pas entamé... Ton enthousiasme tombe bien Max !
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Max
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MessageSujet: Re: Georges Duhamel   Georges Duhamel - Page 2 EmptyVen 4 Avr 2014 - 13:47

domreader a écrit:
J'ai toujours Vie et Aventures de Salavin dans ma PAL. Mais je ne l'ai toujours pas entamé... Ton enthousiasme tombe bien Max !

Hé hé. Hâte de te lire !
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colimasson
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MessageSujet: Re: Georges Duhamel   Georges Duhamel - Page 2 EmptyDim 6 Avr 2014 - 13:53

Max, le passage de mon cours rapportant à Duhamel est très bref mais suffisant pour donner envie de s'y intéresser. Je te le copie/colle :

Cours bla-bla a écrit:
Le roman-journal que publie l’auteur en 1927, Journal de Salavin, relève donc moins d’une profession de réalisme subjectif que d’une intention scientifique. Le livre est le 4e volume d’un cycle qui en compte 6, Vie et aventures de Salavin (1920-1932), ayant pour personnage
principal un banal employé de bureau, type moderne de l’homme sans qualités : Duhamel veut démontrer qu’un héros de roman “ nous touche non par son caractère exceptionnel, mais par son inquiétante généralité ” (Préface du cycle). C’est parce qu’il veut appliquer les principes de l’observation psychiatrique qu’il s’attache à le faire voir alternativement du dedans et du dehors, afin de “ modifier sans cesse l’incidence de la lumière et du regard ”, pour parvenir à une image aussi complète que possible du sujet ” : Confession de minuit (1920) et ce journal sont deux volumes en 1ère personne, Nouvelle rencontre de Salavin (1923) et Les Deux Hommes des récits en 3e personne.

Et une citation de l'auteur critiquant la mode du journal intime dans les années 30 :

« Les “ journalistes intimes ” [...] se trouvent amenés à faire cas d’états d’âme extrêmement
ténus, mettons incertains, informes, mettons surtout inexistants, [...] Ce délire de confession donne l’accès de la conscience et, conséquemment, du journal, à des pensées qui n’auraient jamais vu le jour dans une vie morale spontanée, à des pensées qui perdent ainsi toute relation raisonnable avec le reste de l’âme, avec le monde. [...] le mystère en nous et autour de nous est assez grand pour qu’il ne soit jamais recommandable d’ajouter de l’ombre à l’abîme. »
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MessageSujet: Re: Georges Duhamel   Georges Duhamel - Page 2 EmptyLun 7 Avr 2014 - 11:24

Merci Colimasson !
Euh, perso, je trouve que ça ne donne pas très envie...  Embarassed Un peu trop dans la branlette qui n'amène à rien...

En revanche ça me permet de rappeler qu'il y a en effet six parties, si l'on tient compte de la nouvelle Nouvelle rencontre de Salavin. Mais je n'y ai pour ma part pas trouvé un grand intérêt. Il faut dire que la chute du récit m'était connue avant lecture. Le genre de truc qui fiche tout à l'eau. humeur
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colimasson
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MessageSujet: Re: Georges Duhamel   Georges Duhamel - Page 2 EmptyLun 14 Avr 2014 - 20:26

Max a écrit:
Merci Colimasson !
Euh, perso, je trouve que ça ne donne pas très envie...  Embarassed Un peu trop dans la branlette qui n'amène à rien...

Ouais, bien vu pour le côté branlette, mais c'était dans la tonalité générale de mon cours. Si tu n'en avais pas parlé plus personnellement et plus passionnément sur le forum, je ne serais peut-être pas revenu à Duhamel aussi rapidement.
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Constance
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MessageSujet: Re: Georges Duhamel   Georges Duhamel - Page 2 EmptySam 10 Mai 2014 - 11:10

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Georges Duhamel - Page 2 0_cvt_10


Georges Duhamel a écrit "Civilisation - 1914-1917" sous le pseudonyme de Denis Thévenin, afin que ne lui soit pas fait le reproche d'exploiter les horreurs de la guerre pour en faire de la littérature. Publié en avril 1918, en décembre de cette même année, "Civilisation" reçoit le prix Goncourt.
Durant la Seconde Guerre mondiale, dès 1940, ce roman figure parmi les 143 livres interdits par la liste Bernhard, car considérés comme contraires à l'idéologie nazie.

Engagé volontaire, à partir de 1914, Georges Duhamel occupe pendant quatre ans la fonction de chirurgien des armées. Les scènes vues et vécues de par cette fonction à l'arrière du front lui servent de matière pour rédiger les quinze courts récits narrés par différents témoins : brancardiers, simples soldats.

Le premier récit intitulé "Visage" instaure d'entrée la volonté de Duhamel de restituer leur humanité aux poilus idéalisés par les récits héroïques de leurs souffrances physiques, mais dont leur résistance à la douleur morale n'est pas encore évoquée, au moment où il écrit ces récits. "Large front au dessin presque gracieux, regard profond et puéril, menton à fossette, moustache orgueilleuse, allègre amertume de la bouche, je me souviendrai de vous, visage français, bien que je ne vous aie pu voir qu'une seule seconde, à la lueur bondissante d'une allumette"

D'ailleurs, dans les récits suivants, en des portraits bouleversants de vérité, par la lecture de leurs visages, reflet et symbole de leur âme, Georges Duhamel n'aura de cesse de rétablir le lien entre la spiritualité et l'apparence physique des poilus, afin de leur restituer leur pleine identité niée par l'infernale et monstrueuse logistique déployée pour l'exercice de la chirurgie industrielle de guerre. "Il faut que je vous explique ce que c'est qu'une A.C.A. Dans l'argot de la guerre, cela signifie une "autochir"; autrement dit, c'est ce qu'on a inventé de plus perfectionné comme ambulance. [...] C'est le premier grand atelier de réparation que l'homme blessé rencontre au sortir de l'atelier de trituration et de destruction qui fonctionne à l'extrême avant. On apporte là les pièces les plus endommagées de la machine militaire. Des ouvriers habiles se jettent dessus, les déboulonnent en vitesse et les examinent avec compétence, comme on ferait d'un frein hydropneumatique, d'une culasse ou d'un collimateur. Si la pièce est sérieusement avariée, on fait le nécessaire pour lui assurer une réforme convenable; mais si le "matériel humain" n'est pas absolument d'hors d'usage, on le rafistole avec soin pour le remettre en service à la première occasion, et cela s'appelle "la conservation des effectifs"

Cocasses ou tragiques, ces quinze récits mettent en scène la bêtise et le cynisme des gradés, l'obséquiosité de la hiérarchie intermédiaire, l'esprit bureaucratique des petits galonnés, -  si l'on ne peut identifier un cadavre "excédentaire", on lui attribue arbitrairement la nationalité allemande et l'enterrement se fait sans cercueil, car ceux-ci comptés - la veulerie et la servilité d'un aréopage de médecins militaires devant un médecin inspecteur général en tournée sur le front des hôpitaux, mais également leur insensibilité à la souffrance des mutilés, car la stoïcité patriotique coûte si peu, bien au chaud, loin des tranchées, des champs de bataille : " Les mutilés doivent encore quelque chose au pays : ils lui ont donné leur sang, qu'ils lui donnent maintenant des fils" " Chaque fois qu'en coupant une jambe je sauve un homme je pense d'abord à la race : ce gaillard-là reste un bon reproducteur". Ces récits mettent également en lumière l'humiliation des appelés traités comme du bétail par les "blouses blanches" en charge des visites médicales d'incorporation, et l'ignominie de l'état-major qui transforme les blessés en attractions touristiques pour le civil voyeuriste en quête de sensations nouvelles ... en cette incessante agitation dantesque, où jamais ne faillit le dévouement des infirmières confinées au rôle d'aides-soignantes, Georges Duhamel dresse le portrait admiratif de soldats, pour la plupart issus du petit peuple paysan ou ouvrier, qui subissent le martyr mais luttent avec une dignité résignée contre la douleur physique, la souffrance morale et l'épouvante de la mort.

De ces quinze histoires, rédigées en un style dépouillé, concis et toujours d'une extrême pudeur, empreintes d'une sincère compassion pour les blessés, perlent l'ironie, l'amertume de Georges Duhamel, et, dans le dernier témoignage intitulé "Civilisation" qui donne le titre à ce recueil, éclate enfin sa colère désespérée, celle d'un grand humaniste intimement éprouvé au plus profond recès de son âme par la souffrance des humbles.
Ce dernier récit se veut un violent réquisitoire contre ceux qui, loin des souffrances infligées par la guerre, les organisent en un effroyable "machinisme", une virulente dénonciation de la défaite de la morale et de l'intelligence humaine broyées par l'utilisation industrielle des progrès scientifiques en temps de guerre, menant à la négation de l'individu et à la destruction du genre humain.

Spoiler:


"L’auteur de Civilisation est un grand blessé de la guerre, au sens spirituel [...] un homme qui n’a jamais guéri de ce qu’il a vu pendant quatre années".
(François Mauriac, article "Notre ami Duhamel" paru dans le Figaro du 22/09/1935)


Extraits :


Citation :
De l'autre côté de la tente, le spectacle était tout différent : les blessés étaient tous couchés et grièvement atteints. Rangés côte a côte, sur le sol rugueux, ils formaient une mosaïque de souffrance teinte aux couleurs de la guerre, fange et sang, empuantie des odeurs de la guerre, sueur et pourriture, bruissante des cris, des lamentations, des hoquets qui sont la voix même et la musique de la guerre. (p.29)


Citation :
Tous ceux qui ont passé sur la Somme en 1916 conserveront le souvenir des mouches. Le
désordre du champ de bataille, sa richesse en charognes, l’accumulation anormale des animaux, des hommes, des mangeailles gâtées, toutes ces causes déterminèrent, cette année-là, une énorme éclosion des mouches.[...]
J’ai vu, à la cote 80, des plaies fourmillantes de larves, ce que l’on avait pu oublier depuis la bataille de la Marne. J’ai vu des mouches se précipiter sur le sang et le pus des blessures et s’en repaître si gloutonnement qu’on pouvait les saisir avec des pinces ou avec les doigts sans qu’elles consentissent à s’enfuir, à quitter leur festin. Elles propageaient toutes sortes d’infections et de gangrènes. (p.32-33)

Citation :
Je ne peux me rappeler sans une étrange émotion la tente sous laquelle agonisaient une douzaine de soldats atteints de gangrène gazeuse. Toute autour de ce lieu désespéré courait une maigre plate-bande, et un homme attentif s’efforçait avec placidité d’y faire s’épanouir la clochette rouge des salvias.
Parfois, la terre accablée par le mois d’août, se pâmait sous le brusque assouvissement d’un orage. Ces jours-là, les tentes claquaient de toutes leurs toiles et paraissaient, comme de grands oiseaux livides, se cramponner au sol pour mieux résister à l’autan.
Mais, ni les ruées de la pluie ni les galopades de la foudre, rien de ces fureurs naturelles ne parvenait à distraire les hommes de leur guerre. On continuait, sur la colline 80, à opérer et à panser les blessés, comme, sur les collines voisines, l'artillerie continuait à éventer le sol disputé. Souvent même il semblait que l’homme s’obstinât à parler plus haut que le ciel et une sorte d'enchère s'engageait entre les canons et le tonnerre. (p.34)

Citation :
Chaque jour amenait des visiteurs à la cote 80. Ils arrivaient d'Amiens dans de somptueuses automobiles; ils traversaient en causant le grand hall de toile, semblable à une exposition de concours agricole; [...] Il y avait des étrangers, des philanthropes, des hommes politiques, des comédiennes, des millionnaires, des romanciers et des folliculaires. Ceux qui recherchaient des sensations fortes étaient parfois admis à pénétrer sous une tente conique ou dans une salle d'opérations.[...]
Mais silence ! J'ai pronocé vos noms, Freyssinet, Touche, Calmel, et ils ne sauraient laisser à mon coeur qu'un souvenir trop noble pour être mêlé de fiel. (p.41-42)




Citation :

Je hais le XX e siècle, comme je hais l'Europe pourrie et le monde entier sur lequel cette malheureuse Europe s'est étalée, à la façon d'une tache de cambouis. (p.179)


Citation :
Croyez-le bien, monsieur, quand je parle avec pitié de la civilisation, je sais ce que je dis; et ce n'est pas la télégraphie sans fil qui me fera revenir sur mon opinion. C'est d'autant plus triste qu'il n'y a rien à faire : on ne remonte pas une pente comme celle sur laquelle roule désormais le monde. Et pourtant !
La civilisation, la vraie, j'y pense souvent. C'est dans mon esprit, comme un choeur de voix harmonieuses chantant un hymne, c'est une statue de marbre sur une colline desséchée, c'est un homme qui dirait : "Aimez-vous les uns les autres ! " ou "Rendez le bien pour le mal" Mais il y a près de deux mille ans qu'on ne fait plus que répéter ces choses-là, et les princes des prêtres ont bien trop d'intérêts dans le siècle pour concevoir d'autres choses semblables.
[...]
J'ai bien regardé l'autoclave monstrueux sur son trône. Je vous le dis en vérité, la civilisation n'est pas dans cet objet, pas plus que dans les pinces brillantes dont se servait le chirurgien. La civilisation n'est pas dans cette pacotille terrible; et, si elle n'est pas dans le coeur de l'homme, eh bien, elle n'est nulle part. (p188-189)
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GrandGousierGuerin
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MessageSujet: Re: Georges Duhamel   Georges Duhamel - Page 2 EmptySam 10 Mai 2014 - 11:59

Cela donne envie ...
Où as-tu trouvé ton exemplaire ?
Pas trouvé sur le site de l'Ecuyère monosein ....ou à des prix prohibitifs ...
Et content de te revoir ici  dentsblanches 
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MessageSujet: Re: Georges Duhamel   Georges Duhamel - Page 2 EmptySam 10 Mai 2014 - 12:07

GrandGousierGuerin a écrit:
Cela donne envie ...
Où as-tu trouvé ton exemplaire ?
Pas trouvé sur le site de l'Ecuyère monosein ....ou à des prix prohibitifs ...
Et content de te revoir ici  dentsblanches 


Je l'ai acheté d'occasion sur le Net, chez Amazon pour ne pas le nommer.  Very Happy 
Mais tu es également de retour, l'ami GGG ... youpi !  impatient content 
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MessageSujet: Re: Georges Duhamel   Georges Duhamel - Page 2 EmptyDim 11 Mai 2014 - 11:48

Merci Constance pour ce compte-rendu ! sourire 
J'espère pouvoir acheter le livre prochainement.
Je ne savais pas qu'il y avait plusieurs récits en fait. Et encore moins qu'il avait été écrit sous pseudonyme !
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MessageSujet: Re: Georges Duhamel   Georges Duhamel - Page 2 EmptyDim 11 Mai 2014 - 20:22

Max a écrit:
Merci Constance pour ce compte-rendu ! sourire 
J'espère pouvoir acheter le livre prochainement.
Je ne savais pas qu'il y avait plusieurs récits en fait. Et encore moins qu'il avait été écrit sous pseudonyme !


M'étant engagée à rédiger un commentaire, j'ai tenu parole.  sourire 

Dans l'avant-dernier récit, intitulé "Le cuirassier Cuvelier", le ton du narrateur préfigure l'arrivée de Salavin. oui 
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Max
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MessageSujet: Re: Georges Duhamel   Georges Duhamel - Page 2 EmptyDim 11 Mai 2014 - 21:49

Constance a écrit:
Dans l'avant-dernier récit, intitulé "Le cuirassier Cuvelier", le ton du narrateur préfigure l'arrivée de Salavin. oui 

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