Lola Lafon

Ouah! Ca fait plaisir! Te voilà prête pour les autres (je suis lourde mais tu vas retrouver tout cela en plus poignant encore - et plus abouti, je trouve - : elle ne parle plus de la Petite Communiste, mais d'elle-même).

J'adore ton opiniâtreté, topocl, qui n'est pas de la lourdeur mais une jolie forme de passion.
Je vais d'abord digérer ce premier opus, qui m'a vraiment apporté beaucoup de fortes sensations, à la fois pour sa dimension 'féminine' mais aussi son déploiement historique, et puis voir ensuite ce que je peux trouver...
Tu soulignes que l'écriture de Lola Lafon n'est pas des plus simples à appréhender, moi, elle m'a littéralement percutée.

Voici un commentaire plus serein mais qui dit très bien la belle substance du livre, avec ses ambiguïtés et cette volonté de laisser le lecteur libre de prendre l'histoire comme il l'entend, en lui proposant des pistes mais non des affirmations péremptoires.

J'ai été très marquée par les images du procès des Ceaușescu à l'époque de leur diffusion quasiment en direct. Alors que la chute du mur de Berlin s'était faite dans la liesse, la Roumanie gagnait sa liberté dans le sang. Je me souviens des masses de personnes défilant dans les rues et attendant devant l'immeuble des télécommunications qu'on lui dise ce qui leur arrivait. C'était un moment très fort pour l'ado que j'étais. En revanche, je n'avais aucune image en tête de la petite fée Nadia... Et je suis ravie d'avoir pu la rencontrer dans ce roman qui dit bien la force de son caractère, son ambivalence et les difficultés à vivre une vie d'icône dans un double système d'exploitation d'Est en Ouest.

Si tu étais ado pour Ceausescu, pour Nadia, tu devais être petiote (et peut-être déjà allergique au sport à la télé)

Shanidar je suis sure que je vais l'aimer ce livre car je l' emprunterai prochainement, mais j'aime ton commentaire parce que je pense que si j'avais ta facilité ce serait certainement ce que j'aurais dit, si si, même si cela vous parait étrange que je dise cela avant la lecture, mais je suis instruite par plusieurs lectures d'ex-communiste lues d'ailleurs en LC !

mais je reviendrai poser ici quelques ressentis !

à bientôt donc et le premier commentaire, celui d'Aériale m'avait déjà incité à la lecture mais à cause des prix obtenus le livre était réservé sur la durée donc j'espère qu'il sera libre quand je passerai à la médiathèque.

J'avais lu Et de ça je me console qui était plus personnel mais je m'embarquerai bien aussi pour celui-là.

"J'ai été très marquée par les images du procès des Ceaușescu à l'époque de leur diffusion quasiment en direct. Alors que la chute du mur de Berlin s'était faite dans la liesse, la Roumanie gagnait sa liberté dans le sang. Je me souviens des masses de personnes défilant dans les rues et attendant devant l'immeuble des télécommunications qu'on lui dise ce qui leur arrivait. C'était un moment très fort pour l'ado que j'étais. En revanche, je n'avais aucune image en tête de la petite fée Nadia... Et je suis ravie d'avoir pu la rencontrer dans ce roman qui dit bien la force de son caractère, son ambivalence et les difficultés à vivre une vie d'icône dans un double système d'exploitation d'Est en Ouest."

En fait, Shanidar, j' ai suivi comme toi les évènements en direct avec un certain enthousisasme,
et malgré ce "procès" qui ne pouvait que mettre mal l' aise.
Mais les Roumains ne gagnérent grand chose et pas la liberté. Ils furent manipulés de A à Z par un soi disant comité révolutionnaire, formé de cadres du parti communiste et de l' armée. 
Depuis des mois, ils se réunissaient clandestinement en vue du coup d' état qu' ils préparaient.

Ils  enflammérent les roumains et surtout la population de Bucarest en renversant Céaucescu et
en montant un procès expéditif destiné  à remplacer Céaucescu et sa famille. Le procés télévisé
médiatisé et les manifestations orchestrées par les putschistes firent illusion un moment avant
d' apparaitre comme une supercherie.
En apprentis sorciers qu' ils étaient, ils inventèrent des massacres imaginaires  à Timisoara et dréssèrent la population contre la police politique, l' instrument politique de Céaucescu.

Il avaient bien choisi leur moment, car un mouvement de réforme se desssinait alors en Russie soviétique sous la direction de Gorbatchev. Un mouvement qui fit rever toutes les populations
des pays communistes. Et c' est au nom de la glassnost et de la pereztroika que les comploteurs.
prétendirent agir.
Le  mégalomanie de Ceaucescu tournait à la folie furieuse et les roumains étaient prets à tout pour
le renverser. Les projets déments qu' il envisageait contre la paysannerie s' ajoutaient à tous les autres méfaits du régime.

Il y a un certain nombre de livres  sur la question, meme si certains points restent encore obscurs.
du régime.

Mais bon, juste une parenthèse. Revenons à Lola Lafon !

Non, non, bix, tu es pratiquement en plein dedans, même si les évènements ne sont pas exposés aussi précisément, il est question pendant tout le livre de cette fameuse Securitate (la police d'Etat) qui comme en RDA faisait surveiller les parents par leurs enfants, les enfants par leurs instituteurs, les instits par les parents, etc. Il y est également question du statut de la paysannerie que Ceaușescu voulait purement et simplement éliminer.

Je mets la suite en spoiler pour ceux qui ne voudraient pas tout savoir sur le régime roumain, mais en effet, Bédou, toi qui as lu pas mal de livres sur le sujet tu risques d'en apprendre encore un peu plus d'assez sidérant.

Spoiler:

Bref, c'est aussi un livre politique et d'importance.

j'ai aussi le livre, mais j'attendais d'avoir les 3 tomes pour me lancer donc je ne lis pas ce que vous dites

Les trois tomes? Mais ce sont tous des livres indépendants les uns des autres!

je me croyais sur le fil Pajak !

Punition = lire tous les Lola Lafon!!!

pour revenir à Lola Lafon et au livre, j'ai bien sur suivi les évènements de Roumanie en direct et je connaissait bien la gymnaste à l'époque de ses exploits.

La petite communiste qui ne souriait jamais

Tous d’abord c’est le titre qui interpelle  parce qu’ elle savait sourire Nadia,  mais c’était une façon  pour les USA, notamment, de caricaturer la petit Roumaine, car d’après eux là-bas dans l’Est les petites filles devaient être tristes.

L’auteure a choisi une composition très vivante en organisant ce récit sous forme de dialogue entre elle et la supposée Nadia. C’est très habile et elle fait ainsi passer ses sentiments vis-à-vis de ce pays où elle a passé une partie de son enfance et peut  en connaissance critiquer l’attitude des pays de l’ouest où elle vit aussi. Personnellement je trouve les oppositions Est/Ouest éclairent la situation.

Il me semble qu'il  faut oublier notre regard d'occidental de l'ouest sur la Roumanie, nos à priori pour comprendre le personnage de Nadia et l'époque.

Lola Lafon use de mots très durs dans les dialogues  : pornographie, rideaux d’une chambre close, vous avez contribué à la fabrication de votre image, vos supposées démocraties libérales etc……….. pour provoquer le personnage de Nadia.

La gymnastique est bien le choix de l'enfant, c'est elle qui s'impose des défis, elle obtient ce qu'elle souhaite et ses exécutions sont l'objet de descriptions intenses que se soient la légèreté du corps ou les meurtrissures, par l'auteur.

Tous ceux qui s’engagent dans une carrière « physique » doivent  respecter un rythme de vie sain (entrainement, alimentation, sorties), la réussite demande des sacrifices et ils sont acceptés, voire devancés. C’est ce que l’auteure nous dit à travers la parole de Nadia.

Béla l’entraineur de Nadia et  de l’équipe a été honoré ou critiqué, tour à tour par le « Camarade » suscitant les interventions dans son foyer de la sécuritat. (ceci me parait très réaliste) Cette sécuritat dont tous se méfiaient  ou se servaient.

Le chapitre concernant Véra Caslovska  et son implication dans la politique de son pays s’oppose à l’ attitude inconstante et incertaine de Nadia, l’auteure nous dit son admiration pour celle qui agit.

Sur le plan politique le Conducator est  représenté comme le dictateur qu’il est,  avec « ses arrangements au marxisme » mais   ce qui m’a le plus  heurtée,  sa main mise sur le corps des femmes : l’interdiction de l’avortement et les  auscultations (j’emploierai moi :  la violation), par le médecin de la police des menstruations !

C’est par des anecdotes que l’auteure nous fait mesurer  la dangerosité,  « la folie » ? du couple suprême et l’imprévisible rapidité de l' exécution des Ceausescu. Quant à la révolution : qui l’a déclenchée, qui l’a faite ?  ou  coup d’état préparé ? comme à l’époque en direct à la télévision, c’est la confusion. Toutefois l’auteure fait mention des ouvriers de Timisoara qui eux manifestaient.

Quant à la fuite de Nadia, là aussi chacun a sa vérité, mais  quels que soient ses choix reste pour toujours « la petite fée » Roumaine qui a enchanté le monde  avec son pied menu lancé vers la lune.

Une excellente lecture qui m’oblige à lire un autre livre de cette auteure .

(de toute façon Topocl dit que c'est ma punition )

oui Shanidar j'en ai encore appris comme la nouvelle catégorie de personnes "sans antécédent" à surveiller !

Bédoulène a écrit:

(de toute façon Topocl dit que c'est ma punition )

Je me demande, si elle n'est pas un peu douce, cette punition !

pas vraiment étonnée que ça t'ait plu. Les autres romans, on un côté plus intime, elle parle d'elle même et non de la petite communiste, elle est toujours la narratrice mais n'a pas besoin d'un Personnage. Au delà de  cet aspect autobiographique on retrouve la réflexion politique et sur notre société, ses diktats de consommation, sa façon de traiter les gens et plus particulièrement les femmes. (c'est à dire cette manière que nous avons de nous traiter nous -même, car la responsabilité de chacun joue là-dedans)