Salomon de IzarraSalomon de Izarra est né en 1989. Il prépare une thèse sur l'enfermement à l'université de Tours.
Nous sommes tous mortsLa 4e de couverture évoquait un équipage perdu dans les glaces, promis à la damnation, au cannibalisme, à la folie. Un récit convoquant Stevenson et Lovecraft...
Le résultat m'a semblé très décevant. D'autant plus que le démarrage est séduisant. Ambiance entre The Thing de John Carpenter et Lovecraft effectivement. L'idée d'une sorte d'enfer de glaces, devenant à la fois une créature dévorante et une prison mentale, crée une atmosphère plutôt réussie et soutenue par une écriture sobre et efficace.
Le problème est que cet argument de nouvelle ne tient pas la distance des 130 pages du roman. On suit laborieusement l'escalade dans une horreur revendiquée sensée culminer dans une séquence de cannibalisme avec les enjeux moraux qu'on suppose. Le narrateur ne peut pas s'empêcher de surligner ce qui gagnerait à rester abstrait et à la libre interprétation de chacun. Salomon de Izarra ne fait pas assez confiance en son propre désir de parabole et évoque littéralement les diverses visions possibles. Cauchemar, folie, limbes, exploration des peurs archaïques de l'humain, science fiction...
Le mode de narration également ne fonctionne pas. C'est sensé être un journal de bord où le second du bateau décrit la folie qui le gagne mais ça ne prend jamais forme. Il se contente de mettre des têtes de chapitres dont les dates finiraient par devenir confuses puis disparaître pour suggérer un esprit progressivement gagné par la folie. Mais il peine à rendre cette dimension littéraire qui a d'illustres prédécesseurs plus talentueux.
On reste donc dans un exercice de style un peu appliqué et maladroit même s'il a quelques idées (des visions) plutôt prometteuses dans un genre déjà ancien et revisité mille fois de Jules Verne, Poe, Lovecraft à Dan Simmons ou Graham Masterton. On verra s'il arrive à aller encore plus loin et à trouver son propre univers.