Lucio Fontana

Rétrospective Lucio Fontana au musée d'art moderne de la ville de Paris (25/04/2014 - 24/08/2014)

Citation :

Le Musée d’Art moderne de la Ville de Paris présente l’une des plus importantes rétrospectives de Lucio Fontana (1899-1968). Considéré comme un des grands visionnaires du vingtième siècle, son œuvre a marqué plusieurs générations d’artistes, d’Yves Klein à aujourd’hui. Pour la première fois en France depuis 1987, plus de 200 sculptures, toiles, céramiques et environnements permettent d’offrir une vision globale de son parcours atypique et de ses changements de styles.

Le parcours chronologique de l'exposition couvre l'ensemble de sa production, de la fin des années 1920 à sa mort en 1968, à travers tous ses grands cycles : sculptures primitives et abstraites, dessins, céramiques polychromes, œuvres spatialistes, toiles perforées, œuvres informelles, environnements, Tagli (Fentes), Nature, Fine di Dio, Venezie, Metalli, Teatrini, etc, oscillant entre geste conceptuel épuré et profusion de matières et de couleurs jouant avec le décoratif.

L’exposition, réalisée avec la collaboration de la Fondazione Lucio Fontana, met en valeur la diversité de sa création, entre abstraction et figuration, quête métaphysique et incarnation, utopie et kitsch, fascination technologique et matières informes. Ses toiles fendues, devenues des icônes de l’art moderne, sont mises en regard œuvres moins connues, notamment ses sculptures des années trente et ses céramiques, la plupart présentées pour la première fois en France.

LUCIO FONTANA
Né en 1899 à Rosario en Argentine de père italien, sculpteur de formation, il passera la majeure partie de sa vie à Milan. Exploitant toutes les possibilités de la sculpture polychrome (terre cuite, céramique, mosaïque) et collaborant avec des architectes, il est un des premiers artistes abstraits italiens dans les années 1930. Il passe la Seconde Guerre Mondiale en Argentine. De retour à Milan en 1947, il devient la figure de proue du mouvement spatialiste qu’il définit dans divers manifestes. Ce mouvement part de l’espace et de la lumière pour concevoir des œuvres en relation avec le monde environnant et la conquête spatiale. Il s’incarne dans ses sculptures en céramique, ses toiles trouées et ses environnements. En 1949, il réalise ses premiers Concetti spaziali (Concepts spatiaux), toiles perforées sur lesquelles il intervient avec divers matériaux et couleurs vives. Après une rétrospective à la Biennale de Venise en 1958, il commence sa série de toiles fendues, les Tagli et devient une figure de référence pour les artistes des années 1960.

                 mam.paris.fr

Sur la partie théorique je ne pourrai pas vous en dire beaucoup plus. On notera donc la proportion non négligeable de sculptures dans les œuvres présentées, la multiplicité des supports et matières, ainsi que la présence (précoce ?) de néons. Sans oublier la théorisation du geste. Ni la présence du figuratif à côté de l'abstraction.

Pour les impressions, bientôt une semaine après... Ce n'est pas l'exposition qui m'a fait passer par le musée mais pourquoi ne pas en profiter ? D'abord dérouté par la quantité de sculptures, luisantes, de couleurs vives, l'air mélangées, difformes parfois, qui doivent (rétrospectivement) contraster avec les toiles très unies voire uniformes, et les murs lisses des salles. Les sculptures sont d'entrées une partie du jeu du "sait faire aussi" pour des commandes ou non.

Sans accrocher à l'ensemble, il faut avouer des angles plus gracieux et des axes plus sensibles. Pour les toiles abstraites, trouées, fendues ou usant de formes géométriques, les "concepts spatiaux", les surfaces (plus mates) se font plus séduisantes, voire apaisantes. Ça a l'air de peu et ça ne ressemble pas à grand chose (avec ou sans schémas sur un carnet de notes à côté) mais sur les murs ça peut avoir son effet et le relief particulier de la perforation avec les toiles qui ont l'air tendues au dessus de l'épaisseur de leur cadre.

L'impression parfois contradictoire perdure devant la répétition et la symbolique peut s'user (la fente évocatrice en tapis de grosses sculptures...). Sur un panneau ou une légende il est question de dandysme, possible.

A la sortie rien de renversant, cependant ce passage dans une histoire de l'art moderne (30-40-50-60's) n'est dénué ni d'intérêt ni de sensations. Au moins peut on envisager l'interrogation de la forme de façon concrète, interrogation confrontée à la méfiance habituelle suscitée par la simplicité des apparences.


Échantillons :

- - - -

- - - -

animal a écrit:

Au moins peut on envisager l'interrogation de la forme de façon concrète, interrogation confrontée à la méfiance habituelle suscitée par la simplicité des apparences.

C'est clair qu'un monochrome lacéré de quelques coups de cutter...

Citation :

«Mes entailles, dit l’artiste (dans une interview accordée à la revue Vanità, en 1962), sont par-dessus tout une expression philosophique, un acte de foi dans l’infini, une affirmation de spiritualité. Quand je m’assois devant l’un de mes tagli, [...] je me sens un homme libéré de l’esclavage de la matière, un homme qui appartient à la grandeur du présent et du futur.»

(source : http://www.auction.fr/_fr/lot/lucio-fontana-1899-1968-concetto-spaziale-attese-6290569#.U_4_zSgfjDV ).
Grosse, très grosse perplexité, comme si l'art était dans le commentaire plus que dans l'oeuvre (comme dans une partie importante de l'art dit contemporain (qui commence à dater).

(et j'en profite pour tourner correctement la première image de la deuxième ligne).

3 coups de cutter.

à côté de ça les coupes ou formes par trois, ça le tient depuis le début on dirait. et puis on tente d'imaginer ces années là, 62 par exemple, futur, matérialisme forcené teinté d'espoirs ?

ou l'utilisation de l'art comme moyen d'un discours, finalement dans le cinéma c'est parfois pareil, Kubrick why not par exemple ?

mais c'est sûr que devant, il peut manquer quelque chose. et puis sur l'ensemble du weekend avec Martial Raysse le surlendemain ça ajoute des éléments. disons que la curiosité informative compense une réceptivité souvent problématique. ou plus difficile à situer. les photos que j'ai prises correspondent à des trucs qui m'ont plu (ou par rapport au reste), sur le mur du musée les lacérations en rose ou en blanc, côte à côte, ce n'est pas fondamentalement moche (textures lumières plus ou moins mal rendues), un mélange de "ça va" et de peu de sens perçu.

plus que le discours prenant le pas sur l'œuvre, c'est l'impression de fond de commerce qui peut aller avec qui est gênante (et qui si on associe succès et répétition est assez inévitable ?).

animal a écrit:

ou l'utilisation de l'art comme moyen d'un discours, finalement dans le cinéma c'est parfois pareil, Kubrick why not par exemple ?

Disons que réaliser 2001 l'Odyssée de l'espace (notamment), c'est au-dessus de mes capacités.

Par contre, donner des coups de cutter dans un monochrome, ça je sais faire. Déchirer des affiches, aussi.
Tiens, à propos de coups de cutter, il y a déjà eu des Barnett Newman qui avaient été vandalisés, à Amsterdam, par des déséquilibrés qui avaient donné un coup de cutter sur un quasi-monochrome. Là, c'était une dégradation. Par contre, si c'est Fontana qui donne un coup de cutter similaire sur un monochrome à lui, c'est de l'art... J'ai toujours du mal à comprendre ces paradoxes. Il doit y avoir un transfert de génie dedans : un génie qui donne un coup de cutter, c'est génial. Si ce n'est pas un génie, c'est une dégradation. C'est un peu la différence entre le bon chasseur et le mauvais chasseur (cf le sketch des Inconnus, bien sûr.

et tu intitules ton tableau "L'éveil de la galinette cendrée" ?

ah, anecdote ou petite histoire du coup. il y a dans l'expo des photos d'une coupe ou coup de cutter (je n'ai pas recherché le nom du photographe) :



et bien c'est un faux ! ce n'est pas la réalisation d'une toile/tableau. c'est une reconstitution de.

génie ou loi d'un marché ? (on peut négocier une petite part d'intention du geste à l'origine ? après sa portée... )

animal a écrit:

et bien c'est un faux ! ce n'est pas la réalisation d'une toile/tableau. c'est une reconstitution de.

génie ou loi d'un marché ? (on peut négocier une petite part d'intention du geste à l'origine ? après sa portée... )

Ah oui, c'est évident ! J'ai tout de suite vu que le coup de cutter n'avait pas le génie de Fontana ! Un faux é-vi-dent !
Il a une marque de fabrique, on reconnaît que c'est un Fontana, ça se vend... Le marché, oui...

(reconstitution oui, mais avec l'artiste dans son propre rôle).

bonus :

il a signé au moins 1 500 de ces tableaux en une décennie, qu’il accompagnait au dos d’une phrase sur le temps qu’il fait ou un rendez-vous avec le critique d’art Michel Tapié.Sur le même sujet
arts

Il est resté de Lucio Fontana (1899-1968) cette image d’un dandy des sixties exploitant un système, occupé à vendre au meilleur prix, soignant le contrôle de son marché… «J’ai atteint les limites de mon possible», a-t-il même dit un jour.

Sur ses toiles fendues, l’artiste assombrit les lèvres qu’il durcit d’un trait de colle (2). Il consacre une attention soutenue à la technique, pour éviter les craquelures sur les toiles malmenées ou encore pour retrouver le fuschia de la robe de Jackie Kennedy photographiée par Jacques Lowe.

article de Libération : clic

1 500 tableaux en une décennie !  
J'espère qu'en plus, il critiquait la société de consommation ! Enfin, il aurait eu tort de se gêner.

Et puis, il était attachée à la qualité de la prestation, de sorte que le client ait une oeuvre bien propre, là, c'est tout à son honneur, au moins !

Merci pour le lien, je vais lire les articles (il y a le sous-lien sur le fascisme dans l'art plastique).

oui, au moins l'auteur de l'article a l'air d'avoir bien visité l'expo et lu le catalogue, il y a des informations beaucoup plus discrètes (absentes) ou qui m'ont échappé sur le moment.

animal a écrit:

ce n'est pas fondamentalement moche

Tu me donnes carrément envie d'y aller, d'autant que comme eXPie a été emballé et y retournera sans doute volontiers, on pourrait y aller ensemble!

elle est finie l'expo (et eXPie n'y est pas allé je pense).

(Martial Raysse par contre ce n'est pas fini je crois).

Non c'est jusqu'au 31, dépêchez-vous !