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Messages : 723 Inscription le : 04/07/2014 Localisation : Vitrolles
Sujet: Re: Martin Heidegger Sam 6 Déc 2014 - 17:14
A ceci près que peu d'oeuvres de la philosophie heideggerienne s'occupent de politique... Dès lors son engagement politique conditionne peu sa métaphysique, contrairement à un Carl Shmitt, nazi qui lui ne fait que de la philo politique. C'est pour cela qu'il n'est pas mis au ban.
Le souci avec la philosophie serait de la restreindre selon un prisme moral or elle ne doit pas être morale elle doit être. Sinon on ne peut cautionner Platon (prônant la tyrannie et l'exclusion des artistes), on ne peut lire Kant qui si on le suit jusqu'au bout justifiera la peine de mort ou la défense du droit jusque dans sa contradiction et justifiant ainsi des horreurs possibles, on ne peut lire Bergson anti germaniste primaire pendant la première guerre, ni même Sartre avec sa défense de l'URSS et j'en passe.
La philosophie doit comme le dit Dewey "expliquer, réexpliquer jusqu'à être comprise, elle doit rendre compte de l'horreur comme de la beauté grâce à son outil le plus précieux : la raison. Par ce procédé, seule la philosophie peut expliquer ce qui est intolérable avec une neutralité qui renforcera l'intolérabilité de l'objet étudié, seule la philosophie peut renforcer la beauté de ce qui nous fascine en trouvant l cause de notre ressenti."
C'est emphatique mais valide. Tenir compte mais dans la juste mesure de la vie du philosophe. Hannah Arendt continua de respecter son mentor Heidegger malgré ses idées. Ceci dit elle avait des idées sur la seconde guerre et le nazisme peu partagées par sa communauté.
colimasson Abeille bibliophile
Messages : 16258 Inscription le : 28/06/2010 Age : 33 Localisation : Thonon
Sujet: Re: Martin Heidegger Dim 7 Déc 2014 - 20:12
Merci Hanta, je te vénère ! tu as parfaitement exprimé ma position sur le sujet.
Je conseille aussi (encore) vivement d'écouter cette émission :
Elle est longue mais vous pouvez morceler l'écoute, et ça vaut mieux d'ailleurs. On y parle de l'engagement politique de Heidegger en termes aussi mesurés et sages que vient de le faire Hanta. On y parle aussi de son amour de la poésie avec Holderlin. Et là, Sullien, je ne peux que m'incliner devant ce que tu écris :
Sullien a écrit:
Je ne suis pas d'accord, sans doute parce que je n'ai pas la même vision de la poésie. N'as-tu jamais eu l'impression, au détour d'un vers, de voir pour la première fois une chose ou une autre grâce à la plume du poète ? Pour moi, la métaphore est "vive" pour reprendre le mot de Ricoeur, et la poésie (ou le langage poétique) a une forte valeur heuristique (je suis très sensible à Bergson, c'est vrai, pardon ).
C'est vrai que la poésie peut susciter une énorme surprise. Mais dans ce cas, ce n'est plus dans l'usage classique de la poésie et des mots, mais dans le décalage. Le mot sert dans un processus implicite et dissimulé.
Une apparition heideggerienne ?
« Ap-parition [Erscheinung] en tant qu’ap-parition « de quelque chose » ne veut donc justement pas dire : se montrer soi-même, mais au contraire que quelque chose, qui ne se montre pas, s’annonce à travers quelque chose qui se montre. »
Citation :
Je ne comprends pas trop, faut dire que Heidegger, je l'ai un peu enterré. Pour moi "qu'est-ce que l'être" n'est une tautologie que si l'on estime que la seule réponse à cette question est "l'être est", ce qui est en fait un refus de répondre dans la mesure où la question porte sur le quoi, "est" n'étant rien d'autre qu'une particule copulative en l'occurrence. "L'être est", on en revient à l'Exode donc : אהיה אשר אהיה (Eyeh Asher Eyeh, "je suis qui je suis") ?
Je ne me suis pas assez intéressée à la question de l'être, pour tout te dire... et là, tu vas beaucoup trop loin pour moi. En fait, je ne suis pas sûre que la question m'intéresse vraiment n'est-ce pas un faux problème ?
Bédoulène a écrit:
"Mais quels mots justes peut-on trouver pour décrire une situation trop éphémère pour exister ?"
je vais surement poser une question idiote, tant pis pour moi : de quelle situation s'agit-il ? de l'Etre cristallisé ? (là il me paraîtrait plutôt fixé) du passage du temps passé/futur futur/passé ?
C'était une hypothèse de ma part... je croyais avoir compris que pour Heidegger, l'être ne peut être compris dans l'étendue du temps mais seulement ponctuellement à un temps T.
Bédoulène Abeille bibliophile
Messages : 17270 Inscription le : 06/07/2007 Age : 79 Localisation : Provence
Sujet: Re: Martin Heidegger Dim 7 Déc 2014 - 21:15
merci pour ta réponse, ça au moins je comprends
jack-hubert bukowski Zen littéraire
Messages : 5257 Inscription le : 24/02/2008 Age : 43
Sujet: Re: Martin Heidegger Lun 8 Déc 2014 - 11:59
C'est peut-être pas juste, mais il y a une édition d'Être et temps disponible sur Internet, traduite par Emmanuel Martineau. Pour ceux-celles qui seraient rebutés par l'opportunité d'acheter l'édition papier, en voilà une autre...
colimasson Abeille bibliophile
Messages : 16258 Inscription le : 28/06/2010 Age : 33 Localisation : Thonon
Sujet: Re: Martin Heidegger Dim 11 Jan 2015 - 20:22
Alors là, c'est obscur ...
Citation :
« Dans le Dasein, aussi longtemps qu’il est, quelque chose qu’il peut être et qu’il sera est à chaque fois encore en excédent. Or à cet excédent appartient la «fin » elle-même. La « fin » de l’être-au-monde est la mort. Cette fin appartenant au pouvoir-être, c’est-à-dire à l’existence, délimite et détermine la totalité à chaque fois possible du Dasein. Cependant, l’être-en-fin du Dasein dans la mort et, avec lui, l’être-tout de cet étant ne pourra être inclus de manière phénoménalement adéquate dans l’élucidation de son être-tout possible que si est conquis un concept ontologiquement suffisant, c’est-à-dire existential, de la mort. »
L'être-en-fin ? l'être-tout ? je ne suis plus...
jack-hubert bukowski Zen littéraire
Messages : 5257 Inscription le : 24/02/2008 Age : 43
Sujet: Re: Martin Heidegger Lun 12 Jan 2015 - 6:12
colimasson a écrit:
Alors là, c'est obscur ...
Citation :
« Dans le Dasein, aussi longtemps qu’il est, quelque chose qu’il peut être et qu’il sera est à chaque fois encore en excédent. Or à cet excédent appartient la «fin » elle-même. La « fin » de l’être-au-monde est la mort. Cette fin appartenant au pouvoir-être, c’est-à-dire à l’existence, délimite et détermine la totalité à chaque fois possible du Dasein. Cependant, l’être-en-fin du Dasein dans la mort et, avec lui, l’être-tout de cet étant ne pourra être inclus de manière phénoménalement adéquate dans l’élucidation de son être-tout possible que si est conquis un concept ontologiquement suffisant, c’est-à-dire existential, de la mort. »
L'être-en-fin ? l'être-tout ? je ne suis plus...
Colimasson, tu soulèves un bon point. Un professeur que j'ai côtoyé à l'université en philosophie mentionnait l'importance de la terminologie heideggerienne dans l'élucidation de ses modèles conceptuels. Pour ma part, j'y vois une référence indirecte à l'existentialisme, dont Sartre s'est fait le thuriféraire. Je n'ai pas encore tout à fait lu le modèle sartrien, alors je ne pourrais pas en juger de façon irrémédiable. Une autre référence possible est le nietzschéisme. N'oublions pas la phénoménologie au passage. Quoi qu'il en soit, Heidegger semble ici définir un état-limite, le genre d'expérience qui est transcendante et qui pourrait nous faire penser par exemple aux phénomènes de l'ordre du paranormal ou dans une notion plus terre-à-terre, l'expérience du suicide et du pouvoir politique absolutiste. Encore là, il est difficile de juger, puisque je n'ai pas encore fait l'expérience entière de la prose heideggerienne.
colimasson Abeille bibliophile
Messages : 16258 Inscription le : 28/06/2010 Age : 33 Localisation : Thonon
Sujet: Re: Martin Heidegger Lun 12 Jan 2015 - 21:12
Ah oui, un peu comme l'absurde ? le mot qui nous reste sur le bout-de-la-langue sans qu'on arrive à le cracher, à le matérialiser ?
Hanta Agilité postale
Messages : 723 Inscription le : 04/07/2014 Localisation : Vitrolles
Sujet: Re: Martin Heidegger Sam 28 Fév 2015 - 22:08
Pour en revenir sur Heidegger et le nazisme, point de vue intéressant de Steiner, éminent philosophe de confession juive sur Heidegger.
Sujet: Re: Martin Heidegger Jeu 17 Déc 2015 - 18:57
"Quand Heidegger dénonce dans les Cahiers noirs le «complot juif mondial» et développe des thèmes nazis, il dépasse l’engagement politique personnel pour compromettre la philosophie. Ouvertement crypté, son langage mêle des éléments de l'’ontologie classique et de l'’idiome national-socialiste, dont il radicalise et renouvelle la dimension prophétique. Comment alors le lire, sans égard pour les traditions lénifiantes ? En France notamment, les apologies redoublent, alors que les dénégations font place aux affirmations : on applaudit la radicalité de Heidegger, sa critique de la modernité, sa «grandeur» indispensable pour comprendre l’Extermination. La responsabilité de la pensée et la reconstruction de l’'éthique seront-elles alors éludées au profit des propagandes identitaires les plus agressives ?"
L' Editeur : P.U.F.
J' essaierai de lire ce livre, mais depuis la publication des derniers textes du philosophe, il semble évident que qu' ils relèvent de la criminologie. "Une philosophie qui appelle au meutre est-elle autre chose qu' une idéologie dangereuse ?" écrit F. Rastier. "Rastier montre comment Heidegger a longtemps crypté ses textes avec ce qu' il appelait lui-même des mots de couverture, "parce que les esprits n' étaient pas prets." Aujourd' hui, le philosophe donne des clés pour le lire vraiment. Le lire de près aurait l' avantage de permettre une critique raisonnée des nombreuses disciplines marquées plus ou moins funestement par ses idées. C' est aussi une quesion en prise directe avec l' actuelle banalisation politique de la haine."
Le dernier paragraphe entre guillemets est l' extrait d' un commentaire de Yann Diener, Charlie Hebdo, n° 1221, dans un article intitulé : Comment peut-on etre heideggerien aujourd' hui ?