Pierre Goldman

Pierre Goldman



Pierre Goldman (Lyon, 22 juin 1944 - Paris, 20 septembre 1979) est un intellectuel engagé d'extrême gauche ayant glissé dans le banditisme, demi-frère aîné du chanteur Jean-Jacques Goldman. Il meurt assassiné dans le 13e arrondissement de Paris. L'acte, revendiqué par un mystérieux groupe clandestin d'extrême droite, Honneur de la Police, n'a jamais été complètement élucidé.



article wikipedia complet ici

Souvenirs obscurs d'un juif polonais né en France

J'ai pris envie de lire ce livre en lisant Lola Lafon, qui le cite abondamment, puis en trouvant ceci :

Citation :

La bibliothèque idéale de Lola Lafon

Le livre lu et relu
Souvenirs obscurs d’un juif polonais né en France de Pierre Goldman (ed Points). C’est une œuvre extraordinaire. Un texte écrit en prison et qui embrasse tout à la fois : la philosophie, le droit, une réflexion sur l’innocence, sur le fait d’être juif. Un livre indispensable.

Si la catégorie Cris jetés à la face du monde existait,j'y aurais mis le livre de Pierre Goldman plutôt que dans la catégorie Témoignage.

Pierre Goldman est le fils de Juifs actifs dans la résistance, écorché vif, étranger en tout lieu . C'est un gauchiste déterminé, partisan de la lutte armée, auteur d'un projet de guérilla urbaine. Fin 1969, ayant besoin d'argent, pour ses plaisirs personnels ou pour aider des amis, il a perpétré trois vols à main armée à Paris. À la même époque, dans le même quartier, un hold-up Boulevard Richard-Lenoir se termine par un double meurtre qui lui est imputé alors qu'il n'a jamais cessé de clamer son innocence.

Ce livre, écrit en prison après sa condamnation, est une mélange d'explications, d'argumentations, de réflexions générées par cette affaire.

Citation :

Je lui dis écoutez monsieur Braunschweig peu m'importe la réclusion à vie je n'aime pas la vie j'ai grandi dans l'évocation d'Auschwitz pour moi Fresne c'est un internat un peu rigoureux au Venezuela si j'avais été arrêté on m'aurai tué ou torturé et je serais actuellement en prison pour je ne sais combien d'année la prison j'ai toujours su que je risquais d'y séjourner longtemps ce que je ne supporte pas c'est l'infamie de cette accusation de cette condamnation je suis innocent.

Après avoir présenté des extraits de l'acte d'accusation concernant les affaires dont il se reconnaît coupable et celle dont il se dit innocent, Pierre Goldman écrit une première partie sous le titre de "curriculum vitae", où il décrit son parcours, ses agissements, les trois hold-ups, ainsi que son alibi et les raisons qui font qu'il ne peut pas être coupable du quatrième. S'opposant au « curriculum vitae » établi par les policiers, sur la foi de commentaires subjectifs de son entourage, il s'en tient aux faits. Pas d'explications, pas d 'affects. Pierre Goldman s'attache à rendre cette partie sèche, distante, sans fioritures : j'ai fait ceci. J'ai fait cela. Il s'est passé ceci…C'est l'histoire d'un jeune homme de son siècle déterminé par ses origines, s’exprimant dans une révolte folle furieuse par rapport à une société bourgeoise qui n'est plus admissible.

Ensuite, il décortique obsessionnellement l'instruction pour en faire ressortir les contradictions, les faiblesses, les incohérences. C'est un Douze homme en colère obsessionnel et pointilleux, et donc plutôt fastidieux même s'il est primordial il faut une bonne dose d'obstination pour en venir à bout.

La troisième partie, par contre est assez prenante, par sa description du procès, des personnalités. Goldman est tout aussi capable de mépriser un de ses anciens amis que d'admirer l'avocat général. Et cet homme qui a passé une licence de philo en prison, dissèque les modalités du système juridique, à qui il reproche son racisme, son positionnement politique voire idéologique. Il l'accuse, arguments à l'appui, de préjuger de sa culpabilité sur la seule image atypique qu'il présente, de vouloir piéger le gauchiste plus qu'assurer une vraie justice : « juger l'homme dans son ensemble, et pas seulement son crime ». C'est assez poignant.

Citation :

À l'absence de preuves déterminante, matérielles, on a remédié en établissant une relation complètement arbitraire entre ce que j'étais (pour l'accusation, pour certains) et l'acte qu'on me reprochait. Je n'ai pas été jugé parce que j'ai été préjugé, parce que le verdict a seulement consisté à faire découler de mon être supposé (de ma personnalité, etc.) un acte criminel et homicide qui - selon l'accusation - en était l'effet quasiment naturel, et, en tout cas, plausible.il fallait à l'accusation que je puisse être la cause d'un tel acte.

C'est donc une lecture pas toujours passionnante au fil des pages, mais qui ouvre sur un homme des moins ordinaires et pose des questions indispensables.

j'ai lu sur wiki car je ne connaissais par l'affaire (mais à l'époque où se situait son assassinat, la participation du SAC de la région Marseillaise n' a rien pour m'étonner)

donc c'est à lire malgré le décortiquement du procès. merci

je venais d'arriver à Paris lors du meurtre des deux pharmaciennes en 1969, à l'époque la capitale n'était pas sortie du tourbillon de Mai 68, l'épopée gaullienne était sur le déclin, les gens en avaient ras le bol de ce règne qui n'en finissait pas de finir. De gaulle mourra près d'un an plus tard remplacé par Pompidou, ce fut un grand ouf. La Police avait été épurée de façon incomplete, d'autant que je m'en souvienne, son comportement lors de la Liberation de Paris ayant aidé à effacer certains aspects sombres. Sur cela s'ajoutait la periode de la guerre d'Algerie, l'OAS,les évènements de Paris...Sale époque...Le Front national était pratiquement inexistant, c'était Occident et Tixier Vignancourt...Droite et gauche était à couteaux tirés, le PC était encore fort, et Mitterand montait en flèche dans l'opinion profitant du ras le bol...
Le meurtre des deux pharmaciennes avait révulsé l'opinion publique, tant est si bien que six ans plus tard lorsque j'ai travaillé dans le 11° les gens en parlaient encore. Que Goldman soit innocent ou coupable je n'en sais rien, qui furent ses meurtriers non plus, on parlait en effet de "Honneur de la Police" mais qui étaient ils..? Bien fort qui pourrait le dire. Le SAC faisait parler de lui, Pasqua surfera sur sa notoriété jusqu'à la tuerie d'Auriol des années plus tard...Beaucoup de meurtres inexpliqués, de suicides d'hommes politiques suivront jusqu'au décès de Mitterand. Si l'on compare ces periodes à la notre actuelle, cette dernière est bien gentillette, je parle de la politique interieure bien sur...

Merci Chamaco pour ton vécu de l'affaire Goldman.
Pour ma part, j'ai eu comme une impression de déjà-vu en retrouvant sur internet la double page de Paris Match. Curieux comme les choses impriment notre mémoire et s'y cachent pour ressortir à l'occasion.

topocl a écrit:

Merci Chamaco pour ton vécu de l'affaire Goldman.
Pour ma part, j'ai eu comme une impression de déjà-vu en retrouvant sur internet la double page de Paris Match. Curieux comme les choses impriment notre mémoire et s'y cachent pour ressortir à l'occasion.

Il ne faut pas oublier les interconnections entre les mouvements révolutionnaires de l'époque, en 1970 apparaîtront les Brigades Rouges,les mouvements extreme-orientaux etc...Il existe un bouquin qui vaut ce qu'il vaut, critiqué sur certains points, contreversé par certains pour ses méthodes historiques, mais qui peut donner une petite idée de l'époque sans entrer dans l'inévitable polémique (vu la proximité des faits, le manque de recul, difficile de trouver un ouvrage impartial, bien documenté, qui cite ses sources...):
Ultras-gauches. Autonomes, émeutiers et insurrectionnels, 1968-2013 de Jacques Leclercq

Ce livre écrit par un situationniste italien m' a appris bien des choses, aprsè coup, meme si comme
le dit Chamaco, il est parfois difficile de comprendre quoi que ce soit.
Parce qu' on manque de recul et d' infos véritables. Et qu' on est nouyé par des écrans de fumée.

Mais depuis que le monde existe et que des mouvements révolutionnaires tentent de changer l' ordre du monde, -la plupart du temps à leur profit exclusif-, il y a des services secrets émant directement de l' état qui, dans un premier temps, infiltrent les mouvemements dits révolutionnaires.
Non seulement ils les infiltrent mais ils les manipulent.

Et à partir de là il faut comprendre, toujours après coup, qui a manipulé qui, qui a été manipulé...
Au profit de qui et de quoi...
Si vous lisez ce livre, vous vous rendrez compte comment ce qui se passe au grand jour : manifs,
attentats,  violence, répression-  cache les grandes manoeuvres de l' Etat, de la Police -secrète ou non-, des néo facistes,de la Loge P2, de la CIA, de la mafia... et j' en passe...

Comment les attentats les plus meurtriers ont été commis par les facistes pour faire monter la tension,
et désigner les gauchistes.
Le temps de prendre le pouvoir. Cela n' arriva pas, mais le scénario ne manquait pas de force.

Les gauchsistes eux-mems  étaient loin d' etre innocents, mais entrainés -au moins au départ- par une dynamique authentique, dirigée contre les gouvernements successifs italiens particulièment corrompus etnotamment la Démocratie chrétienne.
L' italie des Années 70 a été  un vértable laboratoire d' expérimentation, dont on a pris conscience
-et encore partiellement- quand toute l' écume de cette agitation incroyable finit par se dissipar.

Un schéma à peu près identique s' est produit en France avec comme protagoniste, le groupe Action directe  et les sevices secrets français.
Et en Allamagne où Baader/Meinhoff et leurs groupes ont commencé par se révolter contre les pères qui avaient soutenu Hitler et le capitalisme allemand et qui, s' étaient réintégrés sans gros problèmes dans une société qu' ils avaient contribué à criminaliser et à détruire.
Baader et les siens se sont laissés emporter par la logique de la violence. Commençant par éliminer
des anciens nazis et des patrons, des juges pour finir par etre écrasés par la violence qu' ils avaient
provovoquée eux memes.

Je suis vraiment contente que ce fil réagisse!!!
Déclencheur pour moi Lola Lafon (dans la colonne : les auteurs qui ont changé quelque chose dans votre vie - ou peut-être plus exactement dans votre pensée, en tout cas pour le moment).
J'ai assez envie de continuer des lectures qui vont dans ce sens,sans savoir si cela ira au delà des simples envies.
A suivre...pour ceux que cela intéresse!

topocl a écrit:

Je suis vraiment contente que ce fil réagisse!!!
Déclencheur pour moi Lola Lafon (dans la colonne : les auteurs qui ont changé quelque chose dans votre vie - ou peut-être plus exactement dans votre pensée, en tout cas pour le moment).

ça ne peut qu'interpeller ce que tu écris là ....mais je l'avais déjà notée suite à tes coms sur le fil de Lola Lola : pourtant au départ je n'ai pas forcément envie de la lire .
Là tu enfonces le clou Miss Topocl !

Si, si, lis-la! (si tu n'accroches pas, je prends l'engagement de lire n'importe quoi que tu auras le droit de m'imposer!)

topocl a écrit:

Si, si, lis-la! (si tu n'accroches pas, je prends l'engagement de lire n'importe quoi que tu auras le droit de m'imposer!)

Ce n'est pas tombé dans l'oreille d'une sourde ou plutôt ce n'est pas tombé sur l'oeil d'une aveugle ! Je note !
A suivre !