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Parfum de livres… parfum d’ailleurs
Littérature, forum littéraire : passion, imaginaire, partage et liberté. Ce forum livre l’émotion littéraire. Parlez d’écrivains, du plaisir livres, de littérature : romans, poèmes…ou d’arts…
Sujet: Re: Christian Gailly Mer 3 Fév 2010 - 10:48
Cet auteur a ses fans, j'ai tenté mais pas convaincue du tout. Même oublié de vous parler d'Unsoir au club tiens, lu il y a quelques mois. Je peux comprendre que cette lecture puisse séduire les fous de jazz, ceux sensibles aux moindres vibrations d'une impro, et du plaisir qui en résulte. Mais pour les autres ça ne marche pas forcément
J'ai trouvé le style trop détaché, le narrateur est seulement témoin, et on n'a pas le temps d'en savoir plus, on est juste de passage dans ce club. Alors oui, pour l'idée elle est pas mal, ce type qui se réveille à la vie aux sons d'une impro, mais pour le reste c'est le calme plat, l'auteur ne m'a pas embarquée.
Et pourtant j'aime ces ambiances, la musique, son côté envoûtant qui peut nous faire décoller dans une autre dimension en oubliant le quotidien, comme ici Simon, mais là rien. A moins d'avoir déjà vécu celà, je me demande comment on peut décoller avec lui...
kenavo Zen Littéraire
Messages : 63288 Inscription le : 08/11/2007
Sujet: Re: Christian Gailly Mer 3 Fév 2010 - 10:52
aïe.. oui, si tu n'as pas accroché avec celui que je considère comme son meilleur, ce n'est vraiment pas un auteur pour toi
qui t'as donné accès à ce fil
Aeriale Léoparde domestiquée
Messages : 18120 Inscription le : 01/02/2007
Sujet: Re: Christian Gailly Mer 3 Fév 2010 - 10:55
C'est juste l'exception pour faire rebondir les mordus. Ma libraire qui en parlait avec des étoiles dans les yeux me disait qu'il fallait presque le lire à haute voix, histoire d'en saisir le rythme. Moui. Je vais essayer dans la salle d'attente du labo tout à l'heure.
kenavo Zen Littéraire
Messages : 63288 Inscription le : 08/11/2007
Sujet: Re: Christian Gailly Mer 3 Fév 2010 - 11:00
aériale a écrit:
Moui. Je vais essayer dans la salle d'attente du labo tout à l'heure.
tu me passe l'adresse de ce labo.. je veux voir et entendre cela
mais c'est vrai, il fait plutôt de la musique avec les mots.. et si on ne la ressent pas, ce n'est pas tout à fait ça
Sujet: Re: Christian Gailly Ven 2 Avr 2010 - 21:51
LES OUBLIES
Ne parlons pas de l' histoire, d' autres l' ont déjà fait. Il est comme ça Gailly. Petites phrases hachées, syncopées. Parfois sans verbe. Une respiration. Un rythme. Jazzy, oui. Plutot Bop que rag time. Question de gout. Et de génération. Comme ça aussi Oster ou Toussaint. Leur maison d' édition : Minuit. Leur maison à eux.
J' écris pour m' occuper l' esprit, pour échapper à la solitude et au vide... Il faut accepter l' idée d' écrire comme ça, pour rien. D' écrire alors meme que bientot ça n' interessera plus personne.
Voilà à peu près ce qu' il écrit Gailly dans une interview. Avec chagrin, mélancolie mais aussi de l' ironie et depuis peu un certain équililbre plus ou moins stable. J' aime beaucoup Gailly, son style. Oui son style. On peut aimer nimporte quel style à partir du moment où il existe. Qu' il existe pour soi. C' est cela le travail personnel du lecteur... Il imagine ou pas.
kenavo Zen Littéraire
Messages : 63288 Inscription le : 08/11/2007
Sujet: Re: Christian Gailly Mer 18 Avr 2012 - 22:11
La Roue et autres nouvelles
Citation :
Présentation de l’éditeur ’Réparer une roue. Penser à un cadeau d’anniversaire. Confectionner un gâteau, etc. Bref, toujours aimer une femme. Ne pas rompre immédiatement. Tenter de la retrouver avant qu’il ne soit trop tard.
Pour la première fois, Gailly sort un recueil avec des nouvelles. Neuf bouts d’histoires qui ont tous un point commun : en quelque sorte ce sont des histoires « d’amour », mais bien à la façon de Christian Gailly, qui ne fait pas dans la sucrerie. Ses héros ne sont pas joyeux, pas contents, et le plus souvent, pas amoureux. La plupart du temps les histoires parlent de la perte de l’amour.
Le plus important pour cet auteur est de créer une atmosphère.. et puis la faire apparaître sur papier avec les mots. Tout cela fonctionne pour moi à merveille dans ses romans, en ce qui concerne les nouvelles.. plus d’une m’a laissé un peu perplexe. Je veux bien croire à un ‘open end’.. mais lire entre les lignes et puis encore s’imaginer la suite.. un peu trop de travail demandé au lecteur
Mais il se peut aussi que je suis tout simplement passé un peu à côté, comme on peut voir si on lit les commentaires plus que jubilatoires à propos de ce livre ici
Mais ce qui est marrant, dans une des nouvelles il laisse écouter son protagoniste « Dutilleux » et en cherchant sur YouTube, je trouve ceci.. belle découverte.. au moins ça.. et l’envie de continuer quand même avec cet auteur.. je l’adore tout simpelement!!
Queenie ...
Messages : 22891 Inscription le : 02/02/2007 Age : 44 Localisation : Un peu plus loin.
Sujet: Re: Christian Gailly Lun 7 Oct 2013 - 12:02
Décès de Christian Gally le vendredi 4 octobre 2013, d'une infection pulmonaire à l'âge de 70 ans.
kenavo Zen Littéraire
Messages : 63288 Inscription le : 08/11/2007
Sujet: Re: Christian Gailly Lun 7 Oct 2013 - 17:15
triste nouvelle...
monilet Sage de la littérature
Messages : 2658 Inscription le : 11/02/2007 Age : 75 Localisation : Essonne- France
Sujet: Re: Christian Gailly Lun 7 Oct 2013 - 18:28
Oui, c'est la disparition d'un auteur de qualité et (presque) jeune encore.
kenavo Zen Littéraire
Messages : 63288 Inscription le : 08/11/2007
Sujet: Re: Christian Gailly Mar 8 Oct 2013 - 7:03
Mort de Christian Gailly, "l'écrivain de jazz"
Il était né à Paris en 1943, il avait été psychanalyste, et on lui devait une quinzaine de romans, publiés entre 1987 et 2012 sous l'élégantissime couverture blanche des Editions de Minuit. Parmi eux, «l'Incident» avait été adapté au cinéma par Alain Resnais en 2009 («les Herbes folles»). Mais il y était surtout souvent question de jazz, jusque dans les titres de livres comme «Be-Bop» ou «Un soir au club», qui lui avait valu de décrocher le Prix du Livre Inter en 2002.
Christian Gailly, qui est mort ce vendredi 4 octobre d'une infection pulmonaire, savait un peu de quoi il parlait. Il avait lui-même été saxophoniste et disciple de John Coltrane, qui pour les amateurs de vraie musique a les mêmes initiales que Jésus-Christ.
A l'occasion de la sortie de «Dernier amour», son douzième roman paru en 2004, un requiem grave et désenchanté pour un homme qui parvient par hasard à transformer sa lente agonie en aventure amoureuse, cet écrivain rare et discret avait raconté sa grande passion et dévoilé ses secrets à Gilles Anquetil, dans «le Nouvel Observateur» :
«J'aime les détails. J'ai besoin dans mes récits de m'appuyer sur des détails très concrets. Dans "Dernier Amour", cela peut être la couleur d'un hortensia ou d'un peignoir de bain. Les détails font partie de la vie mentale. Dans le cas de Paul, mon personnage qui est en état d'agonie, ils peuvent prendre une importance envahissante. Son envie soudaine de croquer un croissant, c'est une gourmandise exacerbée par l'agonie. L'obsession et l'angoisse de la mort m'habitent depuis quelque temps. "Dernier Amour", en ce sens, tient de l'autoportrait et de la conjuration. Aurai-je la dignité de Paul devant la mort qui s'annonce? J'ose l'espérer. J'ai traîné deux ans ce livre. Il a fallu que j'accepte d'écrire avec cette obsession de la mort. Auparavant, je m'y refusais.
Après le fiasco d'un de ses concerts, Paul dit à ses musiciens: "Il n'y a pas de peine perdue. Vous allez utiliser la force de cette émotion, ce chagrin, cette colère, cette déception. Toute cette force." J'y crois très fortement. Les musiciens de jazz savent utiliser leur souffrance pour la transformer en force de création. J'ai longtemps été saxophoniste de jazz. Mon drame de jazzman, c'est que j'ai trouvé ma voix très tôt. Avant même de savoir que c'était la mienne. Très influencé dans les années 1960 par John Coltrane, j'ai pris le train du jazz en marche sans me soucier d'avoir des garde-fous techniques ou académiques. J'étais envoûté par la sonorité et le flux de Coltrane, par son phrasé inimitable. Je me suis embarqué dans des recherches de sonorité qui m'ont conduit très loin. J'ai joué au bord du précipice, du vide. Cela m'a fait très peur. C'est pourquoi j'ai finalement abandonné le jazz. Au fond, en jouant je prenais tous les risques. Je cherchais une explosion, ou plutôt une implosion, d'émotions. Je sortais de mes concerts anéanti.
Il m'a fallu du temps pour comprendre que si je ne puise pas dans ma réserve d'émotions, ça ne marche pas. Où les trouver? Dans ce que j'ai vécu, bonheurs et malheurs confondus. C'est ainsi que je me suis mis à raconter des histoires. Saxophoniste coltranien, en tant qu'écrivain je suis devenu inconsciemment un disciple de Sonny Rollins. Mon style d'écriture est fait d'avancées, de reculs, de digressions, de prises de risque narratif, de citations. Quand j'écris: "Et sachant que bientôt ils ne seraient plus seuls. Il ne cessa plus. Il tourna la tête et ne cessa plus de la regarder." Ce "il ne cessa plus" est directement issu du jazz. C'est une respiration rythmique de musicien, une attaque de saxophoniste. C'est une langue maternelle. Les plus grands chorus sont construits comme ça. Dexter Gordon et Sonny Rollins sont passés maîtres dans cette façon de ponctuer et d'interrompre la phrase. C'est aussi une façon de créer une respiration différente. Cela oblige l'auditeur ou le lecteur à marquer des temps d'arrêt qui lui font entendre ou lire autrement.
En écrivant je cherche à jouer juste. La justesse est une affaire de tonalité. Tant que je n'ai pas trouvé le ton juste, ça ne marche pas. C'est très mystérieux. Il me faut sans cesse éviter la mauvaise note, mais de justesse. Dans mon premier roman, "Dit-il", je cherchais la catastrophe, la désirais. Maintenant tout le plaisir est d'y échapper de justesse, de flirter avec elle. D'où l'utilité de l'ironie qui permet de se tenir en équilibre sur le fil. Et protège de la chute. L'intensité d'un récit peut aussi venir de sa fragilité. J'en suis conscient. En permanence quand j'écris je sais que tout peut s'effondrer.
J'ai besoin de parsemer mes récits d'indices, d'éléments, d'objets, de détails qui prennent petit à petit une grande importance. La difficulté consiste à imposer à mes personnages, parfois aux forceps, un prétexte de rencontre, un déclencheur d'histoire qui peut être totalement arbitraire. Dans "Dernier Amour", c'est un peignoir de bain gris laissé sur un rocher au bord d'une plage. Il me faut m'arranger avec le plus de naturel possible pour que toute rencontre paraisse évidente. Je cherche la rencontre entre un arbitraire total et la banalité pour que ces deux éléments s'accordent sans se contredire.
Le cinéma est très présent dans mon style d'écriture. Très jeune, j'ai été marqué par un grand nombre de films. Il n'y avait pas de livres à la maison. Mes romans sont conçus comme des mises en scène. J'écris avec ce que j'ai, avec ce qui s'offre à ma disposition. Je ne suis pas un grand inventeur d'histoires. Alors quand je tiens un chauffeur de taxi, je n'ai pas envie de le lâcher trop vite. Cela m'a pris beaucoup de temps, mais j'ai appris à ne plus mépriser le peu que j'ai sous la main, à respecter la rareté, voire la banalité, de ce qu'on possède. Les choses ne sont pas forcément abondantes, mais elles sont uniques. Après il faut travailler avec ça. Faire et écrire avec.»