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| Inoué Yasushi | |
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Auteur | Message |
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Scarabée Envolée postale
Messages : 231 Inscription le : 14/05/2008 Age : 40
| Sujet: Re: Inoué Yasushi Jeu 20 Nov 2008 - 17:58 | |
| Le sabre des TakedaJ'ai enfin terminé la lecture de ce roman sur le Japon féodal. Je dis enfin car sa lecture a été d'un pénible sans nom. Ca faisait longtemps que je ne m'étais pas autant ennuyé à lire un roman. Pourtant j'éprouve un grand intérêt pour le thème traité: celui des samouraïs. Je ne sais pas si c'est dû à une traduction déplorable mais j'ai eu l'impression pendant tout le livre de lire une succession d'événements tous plus pénibles les uns que les autres, avec des noms partout (personnages et lieux) que l'on ne retient pas... Bref, une horreur. Je n'étais déjà pas friand de Yasushi Inoué (Le fusil de chasse m'a superbement ennuyé. Le Maître de thé n'est pas si mal mais si je vous dis que la lecture de Le sabre des Takeda est encore plus indigeste, ça ne donnera pas envie...) Tout ça n'engage que moi bien sûr! ps: ah, j'oubliais le plus important peut-être. C'est l'histoire d'un samouraï nain, boiteux, borgne, laid et tout ce qu'on voudra qui fait preuve d'un génie militaire hors du commun pour épauler le clan des Takeda vers la domination d'un royaume morcelé en provinces qui guerroient sans cesse. Voilà, ça donne peut-être plus envie? | |
| | | Arabella Sphinge incisive
Messages : 19316 Inscription le : 02/12/2007 Localisation : Paris
| Sujet: Re: Inoué Yasushi Jeu 20 Nov 2008 - 18:02 | |
| Je partage complètement ton avis sur ce livre The Valuk, j'ai beaucoup souffert et y du mal à finir Le sabre des Takeda. | |
| | | coline Parfum livresque
Messages : 29369 Inscription le : 01/02/2007 Localisation : Moulins- Nord Auvergne
| Sujet: Re: Inoué Yasushi Jeu 20 Nov 2008 - 18:08 | |
| - The Valuk a écrit:
- Le sabre des Takeda
ps: ah, j'oubliais le plus important peut-être. C'est l'histoire d'un samouraï nain, boiteux, borgne, laid et tout ce qu'on voudra qui fait preuve d'un génie militaire hors du commun pour épauler le clan des Takeda vers la domination d'un royaume morcelé en provinces qui guerroient sans cesse. Voilà, ça donne peut-être plus envie? Euh...en ce qui meconcerne, pas vraiment ... Mais merci de ce commentaire... | |
| | | eXPie Abeille bibliophile
Messages : 15620 Inscription le : 22/11/2007 Localisation : Paris
| Sujet: Re: Inoué Yasushi Jeu 20 Nov 2008 - 19:59 | |
| Ah, c'est tentant (j'ajoute sur la liste des cadeaux à offrir aux gens que je n'aime pas... sauf que je ne leur offre rien, dommage).
Concernant Inoué, vu le nombre de bouquins déjà sorti, je suppose que les nouveautés tiennent plutôt du fond de tiroir, non ?
En tout cas, merci, The Valuk (et Arabella aussi, qui confirme), j'aime beaucoup les critiques négatives. Et je partage ton opinion sur Le Fusil de chasse (= hyper sur-estimé), que je relirai quand même, par acquit de conscience. Concernant les nains et l'armée, je vote Lagerkvist. Et concernant Inoué, Shirobamba est très sympathique. | |
| | | coline Parfum livresque
Messages : 29369 Inscription le : 01/02/2007 Localisation : Moulins- Nord Auvergne
| | | | sousmarin Zen littéraire
Messages : 3021 Inscription le : 31/01/2007 Localisation : Sarthe
| Sujet: Re: Inoué Yasushi Ven 21 Nov 2008 - 0:09 | |
| Oui, Le fusil de chasse est surestimé et la quasi totalité de ses oeuvres, dans un style un peu désuète, comporte de longs passages austères qui peuvent se révéler, pour certains, ennuyeux ; néanmoins, il existe un livre de cet auteur où il ne cherche pas cette précision historique un peu ampoulée mais l’émotion pure : Paroi de glace. D’ailleurs, ce dernier fait figure d’iconoclaste dans sa bibliographie et, en général, ceux qui apprécient cet auteur aime moins ce roman…qui mérite vraiment d’être ouvert. | |
| | | eXPie Abeille bibliophile
Messages : 15620 Inscription le : 22/11/2007 Localisation : Paris
| Sujet: Re: Inoué Yasushi Ven 21 Nov 2008 - 13:38 | |
| - sousmarin a écrit:
- Oui, Le fusil de chasse est surestimé et la quasi totalité de ses oeuvres, dans un style un peu désuète, comporte de longs passages austères qui peuvent se révéler, pour certains, ennuyeux ; néanmoins, il existe un livre de cet auteur où il ne cherche pas cette précision historique un peu ampoulée mais l’émotion pure : Paroi de glace.
Oui, enfin Inoué n'a pas écrit que des romans historiques. Il a écrit pas mal de romans non historiques, et encore de récits et des nouvelles : Histoire de ma mère, Combat de taureaux, Au bord du lac, Asunaro, Le Faussaire, Shirobamba, Kosaku... et on peut continuer ainsi. Je ne pense pas que ces textes comportent beaucoup de longs passages "austères". Ca ne fait vraiment pas la quasi totalité de ses oeuvres. Et puis, il a également écrit des poèmes (que je n'ai pas lus). Et je n'ai pas trouvé le style désuet. En fait, je ne sais pas exactement ce que c'est, un style désuet (une traduction qui a mal vieilli ?). Globalement, on pourrait plus qualifier d'"austère" l'oeuvre de Kawabata que celle d'Inoué, non ? Et puis, "Austère", pour moi ce n'est pas un défaut. Ce n'est pas forcément une qualité non plus, il faut juste voir ce que le texte donne, si cela s'harmonise avec le contenu. Pour le Maître de thé, cela va très bien. A noter, de plus, que les écrivains ont globalement tendance à épurer leur style avec l'âge (je ne veux évidemment pas généraliser), et que Inoué a écrit jusqu'au bout. Il est décédé à 84 ans. Enfin, tout ça, c'est très subjectif, puisque, à propos de Paroi de Glace, Nezumi écrivait : - Nezumi a écrit:
- J'ai trouvé les considérations sur l'honneur et la philosophie des "hommes de la montagne" assez stéréotypées et grandiloquentes, les passages sur la montagne bien trop rares (l'essentiel de l'histoire se déroule à Tôkyô), éclipsés par des descriptions techniques,ennuyeuses et répétitives, des mérites respectifs du nylon et du chanvre...
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| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Inoué Yasushi Ven 21 Nov 2008 - 15:36 | |
| Oui, c'était plutôt une lecture-pensum, Paroi de Glace. |
| | | sousmarin Zen littéraire
Messages : 3021 Inscription le : 31/01/2007 Localisation : Sarthe
| Sujet: Re: Inoué Yasushi Sam 22 Nov 2008 - 11:57 | |
| Il est certain que tout avis de lecteur est, par nature, subjectif. Ce que je voulais dire, surtout à ceux qui n’ont pas appréciés certains livres d’ Yasushi Inoué parmi les plus connus, que Paroi de glace est très différent du reste de sa bibliographie. L’avis négatif de Nezumi sur ce livre, alors qu’elle apprécie cet auteur en général, confirme mon impression. | |
| | | eXPie Abeille bibliophile
Messages : 15620 Inscription le : 22/11/2007 Localisation : Paris
| Sujet: Re: Inoué Yasushi Dim 30 Nov 2008 - 19:58 | |
| Nuages garance (127 pages, Philippe Picquier - traduit en 1997 par Aude Fieschi). "En 1973, dix-huit récits d'Inoue Yasushi furent regroupés et publiés en recueil sous le tire « Enfance. Nuages garance ». Les huits récits traduits ici, plus qu'une réflexion sur l'enfance, ont pour thème commun le regard que les enfants jettent sur le monde des adultes." (page 5). C'est même le regard qu'un adulte jette rétrospectivement sur lui, enfant, jettant un regard sur le monde des adultes. En effet, la quasi totalité de ces nouvelles se finissent sur un petit paragraphe de commentaire du narrateur adulte. Dommage, quand même, que la totalité du recueil japonais n'ait pas été publié en un volume en français. Là, on n'a que 127 pages...
La première nouvelle, La casquette, se situe à la suite des souvenirs d'enfance narrés dans Shirobamba et Kôsaku. Notre héros travaille d''arrache-pied pour un concours pour le secondaire. Venant de la campagne, il lui faut travailler d'autant plus, à cause de la différence de niveau. L'histoire tourne autour d'une anecdote, l'achat d'une casquette (et de chaussures), qui révèle la situation financière précaire de la famille.
Dans Branches nues, il est question de suicide d'amour (Shinju). C'est le soir. Dans un village, deux garçons jouent dehors. Ils entendent un bruit d'eau dans la rivière. Serait-ce un Shinju (suicide d'amour ?). "C'était l'heure de la marée et la rivière était assez haute, mais vue du point elle semblait lisse et opaque comme une grande planche noire." (page 25). On retrouve ce thème dans Le Chemin qui descend à la cascade, et un peu dans Mort d'une femme, sans doute la nouvelle la plus construite, qui ne se résume pas à une anecdote (comme Nuages garance, par exemple). La quasi-totalité de ces récits se déroulent dans de petits village de campagne. Des enfants jouent dehors, sortent du vilalge avec des bâtons (en cas d'attaque de bandes de gosses des hameaux avoisinants), espionnent les adultes, et notamment les étrangers qui séjournent dans des hôtels (viennent-ils pour se suicider ?). Ces enfants s'interrogent et devinent parfois confusément des situations ou des motivations qui les dépassent.
Des récits d'enfance souvent nostalgiques - plus des vignettes que des nouvelles - qui ne feront pas à eux seuls la gloire d'Inoué, mais qui ne sont pas à dédaigner. | |
| | | Babelle Zen littéraire
Messages : 5065 Inscription le : 14/02/2007 Localisation : FSB
| Sujet: Re: Inoué Yasushi Jeu 16 Juil 2009 - 11:03 | |
| « Elle avait dû commencer à effacer, exactement comme avec une gomme, la longue ligne de sa vie » Plongée tardive dans le monde de Yasushi Inoué avec un roman autobiographique : Histoire de ma mère. La beauté de ces pages vient capturer toute mon attention au point que je me demande quelle musique je pourrais ajouter en marge, quelles peintures je pourrais observer -vous aurez peut-être une idée ? C'est le fil d’une vie dans son achèvement qui éclate pourtant comme un printemps durant les nombreuses années qu’une femme âgée vivra sous l’œil attentif de ses enfants et petits-enfants. Ils l’observent, dans les moindre détails, perdre peu à peu une partie d’elle-même : sa mémoire. Et pour le sens commun perdre la mémoire c'est perdre aussi la raison. Ils croient donc la voir retomber en enfance, comme on dit. Elle répète la question précédente déjà posée, cent fois posée, mais dont elle oublie aussitôt la réponse; souriant et partageant les rires de ses petits enfants, ne sachant semble-t-il le pourquoi de ce rire-même; oubliant son sac à la porte d’entrée sous le petit mouchoir bien plié au-dessus de l’azalée; tentant de faire partager son obsession du moment… " J’ai aimé Shunma, j’ai eu une vie difficile, les bottes d’un médecin militaire c’est long à cirer, il me fallait préparer ses casse-croûte, il me fallait le rejoindre dans la neige…" ... occultant les meilleurs souvenirs et ne mettant en avant que ce petit carnet qui l'obsède et que ses enfants la voient ressortir comme une lubie sans comprendre (l’agenda funéraire * où « la main de mon père avait noté sur une colonne une liste de noms auxquels correspondait une série de somme d’argent. Sur la première page était inscrite la date de 1930. J’avais l’impression d’avoir découvert un objet inattendu dans un endroit inattendu et je dévisageais ma mère malgré moi ». Le récit prend un premier virage. Arrive à notre réflexion intérieure ce moment, tel une borne kilométrique sur une route où l’on pourrait cheminer aux côtés de la fragilité de l’autre. Le moment où l’on croit enfin saisir quelque chose au désordre de cet autre qui nous rend à notre propre questionnement. Un instant précis éclos un soir où ses enfants lui reprochent d’avoir oublié les cerisiers en fleurs d’Hirosaki, la garden-party dans le parc de l’hôpital militaire de Kanazawa, enfin, les joies de toutes ces années à elle, qu’elle semblait ici même avoir gommées. Ce revirement, il a lieu dans la réflexion du fils aîné qui se fait narrateur (on a du mal à ne pas imaginer ici Inoué lui-même), lorsqu’il pressent autre chose que ce retour à l’enfance et donne une résonance à ce dont elle se souvient, à ce dont elle ne se souvient pas : - Citation :
- « Dans sa jeunesse, elle ne souffrait certainement pas. Non, mais, étant donné son âge, ces choses avaient fini, comme une poussière accumulée au fil du temps, par peser sur ses épaules.
N’était-ce pas cela que sentait ma mère désormais, la pesanteur de toute cette poussière ? » *Le "carnet"> - Citation :
- "-Il est possible que l’échange de cadeaux funéraires constitue le rapport le plus fondamental de dette entre les hommes.
Toute sinistre qu’elle est, cette idée est assez admirable. En effet, un homme naît, se marie, fait des enfants et meurt : la vie ne se réduit-elle pas à cet enchaînement ? Cela n’a rien à voir avec sa régression à l’âge de trente ans ni avec son retour à l’enfance. Alors, qu’est-ce que c’est, tout cela ?" Un moment d’autant plus émouvant qu’il peut s’inscrire dans notre société contemporaine face au temps qu’il nous manque (du temps que nous ne prenons pas) pour trouver une réponse aux actes infimes des vieillards, à leurs troubles de la mémoire, à ce que l’on nomme parfois un caprice, une déraison ou une régression lorsque des morceaux de mémoire, des pans de vie sont gommés. Dans la solitude des institutions ou dans le silence des lieux familiaux aseptisés, la vieillesse est une sorte de sale affaire, un passage que l’on a pris l’habitude d'imaginer lourd et douloureux. Histoire de ma mère -わが母の記, Waga haha no ki, fut écrit en 1975 avant d'être traduit pour nous chez Stock en 1997. Certaines de ses œuvres auraient été adaptées au cinéma. Furin kazan, 1953 : Akira Kurosawa. Le Maître de thé, 1991 : Kei Kumai. | |
| | | bix229 Parfum livresque
Messages : 24639 Inscription le : 24/11/2007 Localisation : Lauragais (France)
| Sujet: Re: Inoué Yasushi Jeu 16 Juil 2009 - 15:39 | |
| Memes impressions de lecture pour ce livre autobiographque qui fait partie de mes préférés avec La Geste des Sanada. | |
| | | Ezechielle Sage de la littérature
Messages : 2025 Inscription le : 03/03/2009 Age : 35 Localisation : Bruxelles
| Sujet: Re: Inoué Yasushi Dim 1 Nov 2009 - 1:24 | |
| J'ai lu Le fusil de chasse il y a deux ans (je crois) et il m'avait laissé complètement de marbre. Les romans épistolaires, ce n'est pas trop mon genre, mais celui-là m'a semblé un peu insipide. En fait, je ne voyais pas du tout ce que j'étais sensé en retirer.
Bon, c'est un ouvrage minuscule, je le relirai probablement pour me faire une meilleure idée (car il se peut que je n'aie pas été attentif, tout simplement), toujours est-il que j'ai acheté Confucius et que j'espère ne pas être déçu cette fois-ci... (quelqu'un l'a lu?) | |
| | | Cachemire Sage de la littérature
Messages : 1998 Inscription le : 11/02/2008 Localisation : Francfort
| Sujet: Re: Inoué Yasushi Dim 1 Nov 2009 - 11:47 | |
| - Ezechielle a écrit:
Bon, c'est un ouvrage minuscule, je le relirai probablement pour me faire une meilleure idée (car il se peut que je n'aie pas été attentif, tout simplement), toujours est-il que j'ai acheté Confucius et que j'espère ne pas être déçu cette fois-ci... (quelqu'un l'a lu?) Oui, je l'ai lu il y a très longtemps (je crois quand j'avais ton âge) et j'avais bien aimé. Certains passages sont restés dans ma mémoire. - Citation :
- "Ne détournez pas votre regard de ce monde enfoncé dans le chaos. Quoiqu'il arrive, continuez à marcher dans le monde réel, dans le bruit et le fracas de la vie des hommes. N'est-ce pas ainsi ? Ou bien, doit-on plutôt renoncer à vivre de concert avec ceux qui porte ce nom d'hommes et se choisir d'autres compagnons de vie ? Vous ne pouvez tout de même pas vivre dans la compagnie des bêtes et des oiseaux" Je crois entendre la voix du Maître s'adressant à lui-même, une voix où perce comme une note de tristesse.
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| | | eXPie Abeille bibliophile
Messages : 15620 Inscription le : 22/11/2007 Localisation : Paris
| Sujet: Re: Inoué Yasushi Lun 27 Fév 2012 - 23:20 | |
| Combat de taureaux. Nouvelles traduites par Catherine Ancelot. 223 pages. Stock. - Citation :
- "Mes débuts de romancier remontent à 1949, année où j'ai publié Le Fusil de chasse. L'oeuvre qui a suivi, Combat de taureaux, m'a valu le prix Akutagawa, et je suis devenu dès lors un écrivain à part entière. Quand je relis ces textes, indépendamment de leurs qualités et défauts littéraires, je suis comme aveuglé par la fougue de débutant qui m'animait alors.
A la publication du Fusil de chasse et de Combat de taureaux, j'avais quarante-deux ans. Dans une vie d'homme, c'est déjà le seuil de la vieillesse, mais dans ma vie d'écrivain, cette période correspond sans doute à l'adolescence, et ces oeuvres sont le produit d'un tout jeune romancier.[...] De même que les hommes naissent sous une bonne ou une mauvaise étoile, les oeuvres ont elles aussi plus ou moins de chance. [...] Quelques-unes connaissent la célébrité, d'autres doivent rester dans l'ombre, condamnées, leur vie durant, à se faire toutes petites dans un coin. [...] Le destin littéraire est aussi arbitraire que celui des hommes. [...] Or l'attachement d'un auteur à ses textes n'est pas forcément proportionnel à leur succès. Au contraire, il ne peut se défendre du désir de pousser dans le monde celles de ses oeuvres qu"il n'a pas pu parfaire, celles qui sont restées incomplètes." (Préface - rédigée par Inoué en 1988 pour l'édition française - pages 6-9). Cela tombe bien : les cinq nouvelles de ce livre font partie de celles qu'Inoue lui-même avait rassemblées en un recueil car elles lui plaisaient particulièrement. 1/ Combat de taureaux ( Togyu, 1949). Prix Akutagawa 1949. 95 pages. Nous sommes en décembre 1946. Un petit organisateur de spectacles propose à un journaliste d'organiser un combat de taureaux, qui serait financé en partie par son journal. - Citation :
- "Dans un stade de base-ball, au beau milieu des ruines, plusieurs dizaines de milliers de spectateurs pariant sur les taureaux, oui, cela pouvait marcher. Le base-ball et le football commençaient à reprendre vie, mais il leur faudrait bien deux ou trois ans pour retrouver leur succès d'autrefois. Un combat de taureaux, c'était ce que réclamait l'époque. Organiser le premier combat de taureaux de la région présentait pour un journal une affaire loin d'être mauvaise. En fait, pour Le Nouveau Soir d'Osaka, on n'aurait pu rêver mieux." (page 21)
Difficulté d'organisation, problèmes financiers, risques divers, entourloupes, magouilles des uns et des autres... Le lecteur suit pas à pas la mise sur pied du combat. A cela s'ajoute l'attirance d'une femme pour le journaliste, mais ce dernier fait passer son travail bien avant les sentiments... il n'y a pas de bluette ici, la femme sait à quoi s'en tenir. Le cadre de la nouvelle - l'immédiat après-guerre - est intéressant, la nouvelle n'est pas mauvaise du tout, et même plutôt bonne, mais il semble manquer quelque chose... l'histoire est racontée de façon factuelle et il ne semble pas y avoir un autre niveau de lecture, quelque chose de plus profond que les simples faits (même si, bien sûr, on peut voir du bon gros symbole dans le combat de taureaux). 2/ Le Pic Kobandai ( Kobandai, 1961). 35 pages. - Citation :
- "Pour aller de Kitakata à Hibara, on avait l'habitude de compter six lieues de route. [...] Il est vrai qu'après le hameau d'Ôshio vous trouviez le col du même nom, et que, tant sur la montée que sur la descente, vous souffriez pendant plusieurs centaines de mètres à cause des roches qui, affleurant la surface, rendait la marche difficile. [...]
Dès le départ, mes collègues et moi partions pour cette mission avec une certaine nonchalance, comme s'il s'agissait de prendre des vacances. J'étais alors percepteur des impôts. Le mot vous évoquera sans doute un petit fonctionnaire méchant qui saigne les pauvres gens, mais mon travail était tout autre : aujourd'hui, on dirait que j'étais chargé de faire les relevés topographiques des champs et rizières." (pages 111-112). Sur le chemin, ils croisent une veille femme, sans doute une folle, qui leur barre le chemin et qui grommelle : "« Rebroussez chemin, retournez sur vos pas ! Il vaut mieux que vous n'alliez pas plus loin ! »" (page 115). Et voilà que le sol tremble... cela n'annonce rien de bon, d'autant qu'une "tragédie" est annoncée dès la sixième page de la nouvelle... Bonne nouvelle, notamment vers la fin... 3/ Chemins ( Michi, 1956). 23 pages. - Citation :
- "J'ai lu quelque part que, dans la montagne, les bêtes empruntent des chemins bien à elles, et cela me semble fort vraisemblable. Lorsque nos deux chiens se promènent ou courent entre les arbres, ils suivent toujours le même chemin. C'est mon fils qui me l'a fait remarquer. Comme son bureau est à l'étage, de la terrasse il peut embrasser du regard la plus grande partie du jardin." (page 149).
Le narrateur repense à son oncle qui, vers la fin de sa vie, faisait lui aussi une promenade en suivant un chemin bien particulier... "[...] pourquoi mon oncle l'avait-il choisi pour se promener tous les jours ?" (page 165). Peut-être y a-t-il des "bons" et des "mauvais" chemins... Pas mal du tout (il y a un certain mystère qui flotte), mais un petit peu long dans la première moitié. 4/ Les roseaux ( Ashi, 1956). 24 pages. Le narrateur lit une dans le journal que "[...] un père, dont le fils chéri avait été enlevé à l'âge de six ans et qui depuis avait remué ciel et terre pour le retrouver, avait appris qu'il y avait un temple situé dans une petite ville du département de Shiga un jeune garçon, vraisemblablement celui qu'il cherchait." (page 175) Mais le garçon n'ayant conservé que quelques fragments de souvenirs, le père ne pourra jamais savoir s'il est bien son fils (encore un début d'histoire qui tombe à l'eau avec les progrès de la science, un test de paternité, et le tour est joué). Et le narrateur d'embrayer sur les fragments de souvenirs qu'il garde de son enfance à lui, d'essayer de reconstituer une image à partir de quelques cartes. Pourquoi certains souvenirs lui restent-ils ? Une petite nouvelle. 5/ Les Gants de Monsieur Goodor (Gûdoru-shi no tébukuro, 1953). 23 pages. De manière fortuite, le narrateur voit une calligraphie d'un certain Matsumoto Jun, un médecin. Il en vient à repenser à son arrière-grand-père, qui avait été son élève, et à Konojo, la maîtresse de son arrière-grand-père... Dans cette nouvelle encore, il y a un travail du narrateur sur la mémoire, une tentative de reconstitution d'événements passés, des motivations des uns et des autres... Bonne petite nouvelle. Un recueil globalement intéressant. Bizarrement, c'est la nouvelle qui donne son titre au recueil qui ne semble pas à sa place, tellement elle est différente des autres (qui sont racontées à la première personne du singulier) : Combat de taureaux est factuel, un peu journalistique (le métier de son héros). Le prix Akutagawa récompense d'ailleurs un roman, pas une nouvelle. Combat de taureaux semble se situer entre les deux genres : trop long pour une nouvelle mais, pour un roman, manquant d'un petit quelque chose. Les quatre autres nouvelles, elles, sont toutes des reconstitutions, des enquêtes à travers le temps et la mémoire souvent familiale, et n'ont n'ont pas tout révélé une fois que l'on a fini de les lire. | |
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