Abdelatif Kechiche

animal a écrit:

mais de rien.  

ah, tant qu'on y est, le rapport à la peinture (ou à l'art en général ?) dans le film vous en diriez quoi ?

Qu'à mon avis personne ne peut acheter sincèrement les peintures d'Emma !

Maryvonne a écrit:

animal a écrit:

mais de rien.  

ah, tant qu'on y est, le rapport à la peinture (ou à l'art en général ?) dans le film vous en diriez quoi ?

Qu'à mon avis personne ne peut acheter sincèrement les peintures d'Emma !

Qu'elle ne veut pas suivre la tendance.
Moi je lui trouve de la fraîcheur.

animal a écrit:

mais de rien.  

ah, tant qu'on y est, le rapport à la peinture (ou à l'art en général ?) dans le film vous en diriez quoi ?

Difficile de le dire. Alors que cela devrait être un des sujets tout de même important du film. Ce qui en soit est peut être déjà révélateur des partis pris...La seule chose qu'il évoque réellement, c'est l'aspect social (clivé) de faire de l'art. Cela donne un statut, fait qu'on appartient à un monde, que l'on a un certain type de mode de vie, un certain type de rapports sociaux....Un prestige. A part cela, tout ce qui concerne la création, la nécessité, l'expression est inexistant. Comme si être artiste était le comble de l'inauthentique (pour reprendre uniquement un fait de culture, et cela avec une connotation négative).

Je ne vois rien d'autre. Je vais réfléchir.

Entièrement d'accord avec Arabella sur le sujet. Le thème de la création est à peine effleuré.
Emma est rendue encore plus antipathique avec ses airs supérieurs: voir les conversations téléphoniques avec le galieriste, le vernissage bien sûr qui est l'apothéose et même les premiers instants avec Adèle qui avoue ne rien connaître à la peinture. (en fait, Emma s'en moque complètement à ce moment là).
Je persiste dans mon idée que seule Adèle avait de l'importance pour le réalisateur et qu'il a bâclé les sujets annexes.
J'ai bien aimé la façon dont il a filmé la "petite". C'est ce qui m'a plu dans le film. Après tout c'était annoncé dans le titre: la vie d'Adèle (le reste peu importe).

(honte sur moi : je n'ai pas lu tout vos posts ou alors rapidement)

La vie d'Adèle

J'ai adoré. Le film m'a énormément fait penser à Faces de Cassavetes, même manière de filmer les visages, les silences, les expressions, même manière de mettre en danger les actrices, même violence, là où Cassavetes interrogeait la liberté sexuelle offerte aux femmes, Kechiche interroge l'orientation sexuelle (les questions évoluent et j'ai trouvé intéressante la posture du réalisateur face à ces toutes jeunes femmes, prédatrices et proies tout à la fois).
Bref, un film très riche, qui prend son temps (comme ça fait du bien de poser ses valises pour un moment dans une histoire bien construite), avec une belle signature.
Bon, il y a bien sur quelques défauts, des longueurs inutiles (pléonasme ?) mais c'est un très beau film, superbement filmé.
Et puis, j'ai eu l'impression que la caméra de Kechiche était à l'aise partout (au lycée, dans les bars, l'école maternelle, le vernissage, l'anniversaire...), pas de faux pas, une implication juste.

 
Je vais lire vos posts maintenant...

Arabella a écrit:

animal a écrit:

mais de rien.  

ah, tant qu'on y est, le rapport à la peinture (ou à l'art en général ?) dans le film vous en diriez quoi ?

Difficile de le dire. Alors que cela devrait être un des sujets tout de même important du film. Ce qui en soit est peut être déjà révélateur des partis pris...La seule chose qu'il évoque réellement, c'est l'aspect social (clivé) de faire de l'art. Cela donne un statut, fait qu'on appartient à un monde, que l'on a un certain type de mode de vie, un certain type de rapports sociaux....Un prestige. A part cela, tout ce qui concerne la création, la nécessité, l'expression est inexistant. Comme si être artiste était le comble de l'inauthentique (pour reprendre uniquement un fait de culture, et cela avec une connotation négative).

Je ne vois rien d'autre. Je vais réfléchir.

j'ai une autre explication : Kechiche a 'adapté' la bédé de Julie Maroh, adapté certes mais tout de même malgré les différences, le film tire vraiment sa source de la bédé, or dans celle-ci il n'est pratiquement jamais fait mention des peintures d'Emma (elle ne peint pas d'ailleurs mais fait du graphisme dans mon souvenir), et pas une seule fois on ne voit ses toiles ou ses travaux graphiques. En revanche, les peintures du film ressemblent assez au dessin de Julie Maroh... comme une sorte de reconnaissance (malgré tout) envers la conceptrice de la bédé.


le fil de Julie Maroh est ici

A propos des milieux sociaux, je viens de voir la dentellière de Goretta, et certains passages sont vraiment proches de ce qu'on peut avoir dans la vie d'Adèle (que j'ai, de ce fait eu envie de revoir; mais on attendra la version encore plus longue).
C'est vraiment très bien.

Super film !

Oui, j'ai encore les yeux humides comme une grosse merde.
Et c'est rare de voir Huppert soumise.

Et c'est aussi un peu le même thème (mais en mieux) que le film récent de Lucas Belvaux "Pas son genre".

Marko a écrit:

Vénus Noire est un film essentiel, extrêmement dérangeant, et d’une très grande puissance. Une descente aux enfers éprouvante et implacable, magistralement filmée et dirigée, qui ne nous épargne rien comme rien n’a été épargné à cette femme confrontée à l’ignorance, au racisme, et à la cruauté des hommes, partagés entre répulsion et fascination malsaine. Plus proche du Salo de Pasolini que de la stylisation d’Elephant Man de Lynch, Abdelatif Kechiche nous plonge dans la mêlée dans une succession de scènes de groupes sidérantes de réalisme et de violence morale. On a vraiment le sentiment de traverser les cercles de l’Enfer, des attractions foraines des quartiers populaires aux salons de l’aristocratie en Angleterre puis en France, des soirées libertines décadentes aux maisons closes, d’une cour de justice (où s’en mêlent aussi ceux qui veulent sont bien malgré elle) au musée d’histoire naturelle.



L’hystérie collective la plus triviale précède la froideur clinique des observations des scientifiques qui ne se soucient jamais de la dignité et de l’identité de cette femme. Il y a heureusement quelques exceptions comme cet artiste qui fait son portrait et le lui offre, qui intervient aussi pour la protéger de ses confrères qui voudraient la peindre entièrement nue. Car l’objet de convoitise ultime est bien ce sexe qu’elle dérobe sans cesse avec pudeur jusqu’à ce qu’il ne lui appartienne même plus.



Il y a des moments de grâce lorsqu’elle se met à chanter ou à jouer d’un petit instrument traditionnel africain à cordes, qu’elle évoque la perte de son enfant à un journaliste indiscret et plus soucieux de son tirage que de la vérité, les scènes de danse et de transe…

C’est d’une force qui nous terrasse mais qui rend surtout hommage de manière somptueuse à cette femme autant qu’elle met à jour les différents fondements du racisme, du plus atavique au plus « civilisé » sous couvert de recherches scientifiques.

Et le film prend une ampleur encore plus bouleversante quand surgissent du silence mortuaire du générique final des images d’archives montrant la décision de l’Assemblée nationale française de rendre le corps de  Saartjie Baartman à son pays puis la liesse collective qui l’accompagne lorsqu’elle trouve enfin une sépulture dans laquelle elle pourra reposer dans toute son intégrité (elle y a été  enterrée avec tous ses organes prélevés par les scientifiques, son squelette, ses portraits, son propre moulage…).

Contrairement à Traversay je ne trouve pas les images « complaisantes » même s’il va très loin dans la crudité et le sadisme de ce qui est montré et souvent répété. C’est qu’à mon sens la seule façon de vraiment rendre hommage à cette femme est de nous faire éprouver son chemin de croix. On souffre avec elle, on est écoeuré jusqu’à la nausée, on étouffe et on ne peut pas s’échapper (à moins de quitter la salle c’est toujours plus facile). J’aime cette radicalité et cette absence de concession. Je trouve que c'est un très grand metteur en scène et qu'il fallait bien un grand coup de poing comme celui-ci pour exprimer toute la violence et l'horreur du racisme en même temps que les souffrances endurées de tous temps. Car c'est le portrait d'une femme bien réelle mais en même temps une parabole horrifique universelle qui nous explose à la figure.

Longtemps après.. j'ai enfin vu le film. Sur petit écran, et en 2 fois, parce que pour le coup ça ma remuée.
C'était il y a 2 jours je suis encore dedans.
Je suis totalement d'accord avec Marko (mais j'aurais été incapable de l'écrire !).

A côté des scènes très dures, il y a parfois des petits moments de bonheurs fugaces, comme ce duo violon/sokou ou d'un seul coup, elle quitte sa position et inverse les positions, et cette amitié avec Jeanne, passage extrêmement émouvant, ou on aimerait croire qu'un changement serait possible.

Le plus difficile pour moi reste la position des scientifiques, et le fait de réaliser que le corps n'aura été restitué qu'il y a si peu de temps… une façon de nous rappeler qu'on est pas si loin de cette époque… qui fait curieusement écho avec les dernières bananes lancées, sur des personnes jugées un peu trop bronzées.

Bon, du mal à en dire plus. Mais ça a fait couler pas mal de salive autour de moi.

L'actrice principale n'a plus rien fait ensuite ?

Maryvonne a écrit:

L'actrice principale n'a plus rien fait ensuite ?

Apparemment non. Choix personnel ou oubli des réalisateurs... Pourtant elle était sacrément courageuse et impressionnante. Un rôle tellement radical que personne ne l'a imaginée dans un autre rôle ? Je ne sais pas mais c'est dommage.

Tiens je l'ai vu il n'y a pas longtemps. Beaucoup aimé. Je crois que le moment le plus bouleversant pour moi est le moment où le collège de scientifiques répertorient ses soi-disant spécificités. Une vraie fontaine. Cette femme a du se sentir attaquée dans sa féminité (entre autre) et ça nous ramène à la nôtre. Là aussi on se dit, pourvu que le petit peintre la prenne sous son aile et la protège. Il y a aussi ces deux hommes qui abusent d’elle. On ne sait pas lequel est le pire. Mais le deuxième est absolument répugnant. Olivier Gourmet a bien joué son rôle. Avec son profil de renard...

La vie d'Adèle - Scandale !