Laurent Gaudé

Avec vos commentaires positif, je vais lire assurément " Ouragan"

OURAGAN

Traversay a écrit:

Quand les digues cèdent, la folie s'installe dans ce roman fiévreux et certains lecteurs reprocheront peut-être à l'auteur d'en faire trop dans la description éruptive de douleurs et de violences polyphoniques où chaque personnage aura rendez-vous avec son destin. C'est oublier qu'on n'arrête pas un fleuve en crue et que des volets fermés ne peuvent rien contre une tornade. Et c'est bien de cela qu'il s'agit, d'un livre qui vous agrippe dès ses premières lignes et ne vous lâche plus. Comme un ouragan.

Marko a écrit:

J'ai moi aussi été emporté par la tempête et j'ai aimé la façon dont il entrelace ces quelques destinées avec la bonne idée de faire parfois s'exprimer dans une même phrase plusieurs personnages successifs. C'est un procédé théâtral qu'il avait déjà utilisé dans "Cris" en donnant un côté incantatoire. ça fonctionne bien ici dans la tourmente.

Je rejoins Traversay dans son total enthousiasme pour ce roman…
Je n’y mets aucune réserve…Comme ceux qui se sont exprimés avant moi, Ouragan m’a littéralement emportée.
Il y avait longtemps que l’on n’avait pas eu un roman aussi abouti de la part de Laurent Gaudé (les derniers avaient un air d’inachevé, d’irrégulier, de pressé à sortir peut-être…Je dis cela à regret, Dieu sait que j’ai de l’admiration pour cet auteur).

Là c’est du pur Gaudé…Un récit mosaïque haletant, tenu jusqu’à la fin sans lourdeurs, dont un des personnages, la vieille « négresse », Josephine Linc. Steelson s’incarne par la force d’un langage somptueux et incantatoire, devenant une figure mythique qu’on ne risquera pas d’ oublier.
Autour d’elle, les autres personnages sont moins fortement campés mais on s’attache à leur histoire passée, à leur affrontement du drame et à leur devenir. Aucun ne laisse indifférent. Ce sont des »seconds rôles » parfaits, remarquablement écrits.

J’ai lu ce roman presque d’une traite, il est difficile de le lâcher lorsqu’on l’a commencé…
Bravo et merci Monsieur Gaudé !

Ouragan-

Oui, oui Ouragan est un beau roman, superbement écrit et les amateurs y trouveront tout ce qu'ils aiment chez Laurent Gaudé: la puissance, la fièvre, l'homme face au déferlement de la nature, les vérités qui émergent et les âmes qui se révèlent. Des thèmes chers à l'auteur, brillamment mis en scène dans ce roman choral où chaque destinée reflète la face cachée de l'homme, ses faiblesses, ses angoisses, son courage ou sa folie. La structure du roman, parfaite, laisse parler chacun des personnages tour à tour, mêlant parfois leurs voix dans une même plainte pour finir, portées par un crescendo haletant, sur celle très charismatique de cette vieille femme noire, fière et rebelle

Citation :

Car le ciel s’est ouvert et nous avons fait face à notre propre nudité, je porterai les enfants effrayés, ma voix les rassurera et lorsque je mourrai libre, sur ma terrasse, toujours négresse, à l’instant que j’aurais choisi, lorsque je mourrai souvenez vous de moi et gardez le regard droit.

Du travail d’orfèvre je dirais, on sent le dramaturge rompu à ces exercices, tout est à sa place dans ce à déchaînement de passion et la ville dévastée est vue elle aussi comme un corps à part entière

Citation :

On dirait une vieille dame saccagée par le vent, l’œil hagard, les montures de lunettes abîmées, la mise en plis de travers, une vieille dame qui vacille et boîte sur un talon cassé

Mais bizarrement je n’ai pas été emportée, émotionnellement en tout cas, par le souffle de cet ouragan. Chaque personnage m’est resté à distance, désincarné comme il peut l’être dans ces tragédies antiques, où les voix résonnent en écho mais presque détachées de leur corps. Je crois que ce texte est si dense qu’il nécessiterait une oralité, en tout cas une dimension extérieure, une scène par exemple –j’ai eu par contre plein d’images dans la tête- et que ces 180 pages lues en solitaire cadrent moins avec la grandiloquence du propos.

Pour résumer je rejoins un peu Marko qui lui trouve parfois trop de lyrisme (d’emphase, je dirais même) Personnellement ces répétitions « moi Josephine Linc. Steelson » si elles donnent du rythme au récit m’ont un peu lassée, et j’ai trouvé que l’on frisait le pathos plus d’une fois.
Ouragan est sans doute son roman le plus abouti depuis les derniers, mais dommage il ne m’a pas bouleversée comme vous. Même si je lui reconnais beaucoup de brillance, je regrette juste un manque de proximité...

coline a écrit:

traversay a écrit:

Ouragan
Quand les digues cèdent, la folie s'installe dans ce roman fiévreux et certains lecteurs reprocheront peut-être à l'auteur d'en faire trop dans la description éruptive de douleurs et de violences polyphoniques où chaque personnage aura rendez-vous avec son destin. C'est oublier qu'on n'arrête pas un fleuve en crue et que des volets fermés ne peuvent rien contre une tornade. Et c'est bien de cela qu'il s'agit, d'un livre qui vous agrippe dès ses premières lignes et ne vous lâche plus. Comme un ouragan.

C'est tentant...

J'ai été tentée et j'ai été complètement envahie par les différents personnages et l'Ouragan est un personnage aéussi dense que les autres

Le plus attachant est celui de la vieille négresse mais le petit Byron m'a aussi beaucoup marqué.

Ce roman est un vrai kaléidoscope, La coiffure de la femme en couverture est vraiment symbolique..

Ouragan.
En commençant ma lecture, je ne pensais pas trouver à ce livre un tel pouvoir de séduction malgré vos commentaires très élogieux. Plus je lisais et plus le plaisir que j’éprouvais me remplissait d’une pensée qui depuis assez longtemps ne m’avait plus traversé : « comme il est bon de lire… » et « oui, c’est pour trouver ce plaisir-là que je lis et que je lirai toujours… », parce que malgré tout ce qu’il y a à lire, un grand plaisir de lecture reste rare. L’apprécier pleinement est un devoir. Je voulais tout à la fois aller plus vite pour me plonger entièrement dans l’histoire et aussi ralentir pour me pas finir le livre, goûter lentement le texte : volonté contradictoire, exaspérante mais excitante aussi.
Que dire de l’histoire qui n’ait été déjà dit ? L’histoire n’est que prétexte aux tableaux des personnages, dont certaines personnalités saisissantes nous hantent durablement… D’un grand lyrisme !

In Gaudé, we trust !

Cachemire a écrit:

Ouragan.
En commençant ma lecture, je ne pensais pas trouver à ce livre un tel pouvoir de séduction malgré vos commentaires très élogieux. Plus je lisais et plus le plaisir que j’éprouvais me remplissait d’une pensée qui depuis assez longtemps ne m’avait plus traversé : « comme il est bon de lire… » et « oui, c’est pour trouver ce plaisir-là que je lis et que je lirai toujours… », parce que malgré tout ce qu’il y a à lire, un grand plaisir de lecture reste rare. L’apprécier pleinement est un devoir. Je voulais tout à la fois aller plus vite pour me plonger entièrement dans l’histoire et aussi ralentir pour me pas finir le livre, goûter lentement le texte : volonté contradictoire, exaspérante mais excitante aussi.
Que dire de l’histoire qui n’ait été déjà dit ? L’histoire n’est que prétexte aux tableaux des personnages, dont certaines personnalités saisissantes nous hantent durablement… D’un grand lyrisme !

J'attendais peut-être beaucoup de ce roman, les émissions de radio, les critiques dithyrambiques, le prix, etc. En fait, je l'ai lu avec une certaine distance, j'ai eu du mal à y entrer. Comme Aériale, la répétition "Moi Josephine Linc." etc m'a agacée. Trop de personnages, qui pour cette raison ne sont pas aussi fouillés qu'ils l'auraient mérité ? Le pasteur cinglé qui ressemble trop à un cliché ? Rose n'a pas l'air de savoir ce qu'elle veut et on met du temps avant de se douter du pourquoi ? Sauter d'un personnage à d'autres au cours de la même page, voire même carrément de la même phrase (et là, on relit pour voir si on ne s'est pas trompé quelque part, mais non !), c'est fastidieux à la longue.
Par contre, mais quel par contre, il y a Joséphine. Alors là, chapeau, voilà un personnage de roman absolument formidable. Elle est fière, elle est forte, digne, majestueuse, Joséphine, cette femme en colère, en guerre, est la raison pour laquelle je ne regrette pas d'avoir ouvert ce livre.
Une collègue à laquelle j'avais demandé son avis sur Ouragan m'a affirmé que c'était "le moins bon de Gaudé, il faut lire les autres !".

J'ai beaucoup aimé le soleil des Scorta et Ouragan; très différents dans l'écriture mais aussi passionant

IzaBzh a écrit:

Une collègue à laquelle j'avais demandé son avis sur Ouragan m'a affirmé que c'était "le moins bon de Gaudé, il faut lire les autres !".

C'est le sien...mais c'est un avis tout à fait discutable...
Les romans de Gaudé qui font le plus l'unanimité restent La mort du roi Tsongor et Le soleil des Scorta...
Tous les autres ont eu leurs amateurs et leurs détracteurs...

"Eldorado" reste un grand livre aussi.
Et pour ma part j'ai bien aimé " Cris" avec ses poilus défendant la France avec mérite.

J'ai terminé ce livre,hier soir. Je ne peux pas trop en parler parce qu'il y a parfois des livres qui résonnent plus que d'autres, en nous,quand nous les lisons ...
J'ai beaucoup aimé : ce récit mi réel, mi fantastique fait qu'on ne peut quitter le livre...J'ai découvert un écrivain que je ne connaissais pas et je suis tentée de continuer la lecture de ses livres, le suivant sera La mort du Roi Tsongor sur les conseils de Kenavo.

Citation :

Vous n'avez jamais l'impression que ces êtres-là vivent en nous?... Vraiment... Qu'ils ont déposé en vous quelque chose qui ne disparaîtra que lorsque vous mourrez vous-mêmes?... des gestes... Une façon de parler ou de penser... Une fidélité à certaines choses et à certains lieux... Croyez-moi. Les morts vivent. Ils nous font faire des choses. Ils influent sur nos décisions. Ils nous forcent. Nous façonnent.
...
En disparaissant,les morts emportent un peu de nous-mêmes. Chaque deuil nous tue.

Noémie a écrit:

J'ai découvert un écrivain que je ne connaissais pas et je suis tentée continuer la lecture de ses livres, le suivant sera La mort du Roi Tsongor sur les conseils de Kenavo.

contente de lire que tu as aimé ta lecture.. et je te souhaite bonne découverte avec d'autres livres de lui

Le soleil des Scortas

Montepuccio, un village des Pouilles.
Sentant la folie proche, la vieille Carmela se confie au curé du village.
Elle lui dévoile son histoire : l'histoire des Scorta, famille maudite, rejetée par les habitants.
Elle se raconte fille, soeur, femme. Elle explique son combat pour une vie meilleure, sa volonté de maintenir un équilibre familial malgré l'adversité. C'est une lutte contre la fatalité du destin.

Citation :

Devant la tombe de leur père, les trois enfants restaient serrés les uns contre les autres. Raffaele était là aussi, tenant la main de Carmela. Ils ne pleuraient pas. Aucun d'eux ne ressentait de réelle douleur pour la mort de leur père. Ce n'était pas le chagrin qui leur faisait serrer les mâchoires, c'était la haine. Ils comprenaient que tout leur avait été enlevé et que désormais, ils ne pourraient compter que sur leurs propres forces. Ils comprenaient qu'une volonté sauvage les condamnait à la misère et que cette volonté était celle de leur père. Domenico, Guiseppe et Carmela fixaient le trou dans la terre, à leurs pieds, et ils sentaient qu'ils enterraient leur vie toute entière. De quoi vivraient-ils demain ? Avec quel argent et où, puisque même la ferme avait été donnée ? De quelle force allait-il falloir être pour livrer les combats qui se préparaient ? Ils se tenaient serrés les uns contre les autres, pleins de haine pour les jours à venir. Ils l'avaient compris. Ils le sentaient déjà dans les regards qu'on leur lançait : ils étaient pauvres, désormais. Pauvres à en crever.

Encore un magnifique roman de Laurent Gaudé.
Une belle histoire de famille, d'amitié, d'amour et de lutte contre le destin. L'auteur nous montre l'importance des liens du sang mais aussi des amitiés solides. C'est profondément humain. Les personnages grandissent, se construisent en lien avec les Autres. Malgré les difficultés à affronter, ce sont leur respect, leur amour mutuel qui leur permettent de tenir.
Un roman m'a fait du bien et qui m'a permis de me recentrer sur les choses essentielles: ces petits bonheurs quotidiens qui sont de tout simplement être bien avec sa p'tite famille !
Et si le bonheur, c'était les Autres.

Citation :

Elle se le promettait, elle veillerait sur les siens avec plus d'attention que jamais. Elle aurait un geste pour chacun. Elle les entourerait de son affection. Tous ceux à qui elle avait pris du temps. Ses frères. Ses belles-soeurs. Tous ceux qui, pour que vive le tabac, avaient donné un peu de leur force.

Citation :

Elle les contempla et se dit que tous allaient pouvoir être heureux. Simplement heureux.
Elle fut tirée de ses pensées par la voix de Raffaele qui hurla : "A table ! A table !" Elle se leva alors et fit ce qu'elle s'était promis de faire. S'occuper des siens. Rire avec eux. Les embrasser. Les entourer. Etre pour chacun, tour à tour, avec élégance et bonheur.

Les Oliviers du Négus

Citation :

Présentation de l'éditeur
Un vieil homme croit entendre chevaucher Frédéric II dans le royaume des Enfers. Un centurion marche vers une Rome gangrénée dont il devance l'agonie. Un soldat des tranchées fuit le "golem" que la terre a façonné pour punir les hommes. Un juge anti-mafia tient le compte à rebours de sa propre exécution... Dans la proximité de la guerre ou de la mort surgissent ces quatre récits où les héros - certes vaincus, mais non déchus - prononcent d'ultimes paroles. Ils veulent témoigner, transmettre, ou sceller des adieux. Minuscules fantassins de la légende des siècles, ils affrontent une Histoire lancée dans sa course aveugle. Et ils profèrent la loi tragique - celle de la finitude - qui, au-delà de toute conviction, donne force et vérité à leur message. D'où la dimension orale de ces textes qui revisitent la scène de l'oeuvre romanesque et, de Cris à La Porte des Enfers, réorchestrent des thèmes chers à Laurent Gaudé, auxquels la forme brève donne une singulière puissance.

Comme le dit la 4e de couverture, le point commun de ces nouvelles est la confrontation de l'homme avec la mort.
Et je pense que c'est seulement cet auteur qui peut m'amener à apprécier de tels récits. Il a une voix singulière pour emener son lecteur dans un voyage à part.
L'italie et la mort, je peux comprendre qu'il soit fasciné par le pays.. mais par l'autre? En tout cas, quand il fait la combinaison des deux, comme dans la nouvelle qui donne le titre au livre, c'est tout à fait sublime.

Recueil de nouvelles beaucoup plus fort que le premier, Dans la nuit Mozambique