Au fil de nos lectures

C'est vrai que ce n'est pas clair de savoir qui a fait quoi. Elle a surement réussi à traduire (mieux que lui peut-être) ce que Fulco a voulu dire dans ses eçrits sur son enfance?

Allez pour Bix. Peut-être qu'il a oublié ce passage et qu'il va pouvoir le redécouvrir.

Christian a une façon d'aimer qui désarme. Il aime les petites choses, les choses qui n'ont ni force, ni forme, ni poids, ni beauté. Il se penche sur elles et, sous mes yeux, je les vois bientôt rayonner du meilleur de l'homme. Il les fouille, les découvre. Il n'a qu'à les désigner du doigts ou les prendre dans sa main pour qu'aussitôt, sous l'effet de son amour, elles deviennent merveilleuses. Il rendrait un barreau de chaise irrésistible à un boa constrictor. Quand je suis seule et que je vois courir des arraignées sur l'eau du marais, ça ne me fait rien. Quand je suis avec Christian, les arraignées emplissent mes yeux comme autant de navires, elles s'allument pour que je les voie et j'ouvre mon regard pour les laisser entrer.

L'avalée des avalés de Réjean Ducharme

Merci Pia !
Oui, j' avais oublié... Mais pas les métaphores dont Ducharme est coutumier.

Deux premiers paragraphes du deuxième chapitre du Retour de Münchhausen de Sigismund Krzyzanowski

Citation :

Les marches courent d'abord sous les pieds d'Unding, puis l'asphalte du trottoir s'infiltre en humidité à travers ses semelles usées. L'auto du baron se met à vrombir dans son dos et, éclaboussant de boue le piéton, file, monstre jaune bi-oculaire, fendant le brumeux crépuscule printanier.
Le col de son manteau remonté, Unding franchit d'un pas martial une arche sonore, il passe sous les quatre parallèles de rails suspendus dans les airs, pour aborder ensuite la vaste ligne droite de l'ancienne rue Royale. A sa dextre se dessinent les cubes de pierre, les arcs et les avancées du palais. Sur le glaire vitreux de l'asphalte aplati par les pneus s'étire, fil de perles violettes, le reflet des réverbères ; des saillies, dans le crêpe de l'ombre crépusculaire enveloppant le palais, pendent, détrempés par la pluie, les drapeaux de la révolution. Ensuite, à droite et à gauche, défilent devant ses yeux les bancs de fonte d'Unter-den-Linden et, foulant l'air de ses sabots de bronze, le noir quadrige de la Porte de Brandebourg vient à sa rencontre.

Wahou ... Je vais noter l'auteur.

très bonne idée et enchanté que ce fil fasse son effet

Fabrizio Puccinelli, Le suppléant :

Citation :

Mal à l'aise, je vague par la ville comme si j'avais peur de rencontrer quelqu'un. Je suis sur mes gardes ; à l'approche d'une silhouette, je me détourne. Quand je rentre à la maison après ma promenade une horde de fantômes me talonne et, aussitôt que j'entre dans ma chambre, un autre moi entre et s'assied, comme un secret qui ne peut s'oublier. Je revois les montagnes et Villalta, l'existence que je mène là-haut et la neige, et il me semble qu'il est aussi difficile de se libérer de l'enfance que de l'oppression.

tiens une citation qui fait terriblement écho avec ma lecture de Bosco Un Rameau de la nuit, dans lequel le personnage principal, solitaire, se voit peu à peu envahit par un double, par une Ombre...

Voici l'une des raisons pourquoi j'imagine très bien errer de temps à autre au gré des flâneries :

Citation :

Alors que j'arrive à la périphérie du parc, il se produit soudain que, dans la rue, un ami pas revu d'au moins vingt-cinq ans traverse ce que les taoïstes appellent l'apparaître des apparences... Je le dis ainsi, parce que c'est bien de cela qu'il s'agit; et peut-être aussi parce que l'ami est photographe et qu'il aime déjouer la netteté par des floutés. Je sors en trombe du parc en criant le prénom de l'ami et bondis derrière lui... mais en fait ce n'est pas lui dans la rue. Je dis cependant qu'au plus profond de moi, c'était lui. Certains ne me croiront pas, tant pis! mais quelques jours plus tard, j'apprendrai son décès, survenu durant que j'étais en voyage, à la suite d'une longue maladie... il y a quatre ans aujourd'hui même. Il est des moments où ce qui n'est plus existe davantage que ce qui est.

André Carpentier, Moments de parcs, 2016, Montréal : Boréal, p. 44.

À mon sens, ceci peut être une des applications qu'on peut cataloguer parmi les synchronicités au sens jungien du terme.