Ernst Lubitsch

La dame au manteau d'hermine (That lady in Ermine, 1948).
Lubitsch décède en cours de tournage et Preminger termine le tournage. Pas vu.

Et pour terminer :

Lors des funérailles du cinéaste, Billy Wilder aurait déploré : 'Plus de Lubitsch', à quoi William Wyler aurait répondu : 'Pire que ça... plus de films de Lubitsch.' (Cité dans Conversations avec Billy Wilder).

A lire :

Madame du Barry (1919)

Grand spécialiste des fresques historiques, à l'époque du muet, Lubitsch réalise ici un film allègre, rythmé, ironique (très), autour de l'ascension et de la chute de la favorite de Louis XV. Le réquisitoire contre l'arbitraire et la frivolité de la monarchie française est sans concessions, admirablement écrit, avec une Pola Negri parfaite en du Barry. Ne pas y chercher une vérité maniaque de la réalité historique, évidemment. La fin du film, consacrée à la Révolution française, est très "image d'Epinal".

Le prince étudiant (The Student Prince in old Heidelberg, 1927).
L'un des 2 ou 3 films muets les plus célébrés de Lubitsch. A juste titre, l'élégance du trait, la fluidité de la narration, le romantisme exacerbé teinté de mélancolie y sont prégnants. L'histoire est pourtant des plus simples qui soient, celle d'un prince qui, devenu roi, devra laisser derrière lui son premier amour. Brillant dans les scènes de foule, délicat dans l'humour, chaleureux dans les scènes de liesse (où la bière coule à flots), Lubitsch n'était pas un cinéaste, c'était un prince.



Ramon Novarro et Norma Shearer.

L'éventail de Lady Windermere (Lady Windermere's Fan, 1925)
Lubitsch chez Wilde. Très fidèle, brillant, un soupçon empesé. On aurait pu attendre un peu plus de fantaisie de cette adaptation trop sage. De façon surprenante, Preminger, à sa façon un fameux "son of a Lubitsch", livra en 1949 une version ironico-caustique de la pièce, avec une Jeanne Crain superbe. Plus Wilder que Wilde, et tout à fait réjouissante.

La dame au manteau d'hermine (That lady in ermine, 1948)
Le dernier Lubitsch, terminé par Preminger après son décès en cours de tournage. Un conte de fées aristocratique, assez proche de ses premiers films parlants, moitié comédie musicale, moitié comédie romantique, avec un soupçon d'humour pour lier le tout. L'histoire est mince mais enlevée comme une valse viennoise. En guise de testament, Lubitsch signe pas sérieux du tout. Ce n'est pas indigne de sa belle carrière.

Les filles de Kohlhiesel (Kohlhiesels Töchter, 1920)
Aux dires mêmes de Lubitsch : « La Mégère apprivoisée transférée dans les montagnes bavaroises. » Et la plus populaire des comédies qu'il a réalisé en Allemagne. Normal, le film n'a pas le côté grosse farce que l'on trouve dans La chatte des montagnes ou Je n'aurais pas voulu être un garçon, par exemple. Au contraire, il y a déjà un certain degré de sophistication dans les dialogues (enfin, les cartons qui en tiennent lieu) et un comique de situation qui préfigurent sa fameuse "touch". Enorme performance de Henny Porten qui joue les deux soeurs, l'une revêche, l'autre sentimentale.

sousmarin a écrit:

La 8ème femme de barbe bleu (1938)

Ce film, presque aussi connu que To be or not to be, a comme symbole la fameuse scène du pyjama...où un milliardaire américain dans un grand magasin en France, joué par Gary Cooper, n’entend acheter que la veste puisqu’il n’utilise pas le reste ; il se voit traiter de communiste et rencontre à cette occasion celle qui sera sa 8ème épouse, une aristocrate désargentée…

Hilarante comédie où Lubitsch joue avec le code Hays de l’époque, puritain et moralisateur, en nous détaillant toutes les positions amoureuses (attirance, passion, ennui, haine…). L’utilisation de l’espace suit les intermittences du couple et nous entraîne dans cette débauche de sentiments… L’incarnation de l’âge d’or de la comédie américaine.

Oho !

Mais quel régal ce film ! Étonnée de lire que Traversay signale que la huitième femme de Barbe bleue est considéré comme un des moins bon de Lubitsch !

Non mais la scène, dès le départ, qui fait une polémique d'enfer sur le bas de pyjama : c'est cultissimement hilarant !

Et puis, ça continue et ça fonctionne très bien, avec la baignoire Louis XIV à savoir si c'est une bassine ou une baignoire.


Sans parler de la classe inébranlable de Michael Brandon/Gary Cooper : le gars, toujours en costard bien taillé, jusque sur la plage. Il donne deux-trois ordres à un gars qu'il croise (après s'être aperçu qu'il était l'un des employés d'une banque qu'il possède), afin de s'en débarrasser pour pouvoir draguer tranquillement Nicole de Loiselle/Claudette Colbert. Seulement celle-ci en profite pour partir à la nage tranquillement jusqu'à un ponton...
Mais Brandon ne se laissera pas semer pour si peu : il fonce sur un pédalo, toujours classe de costume, accoste au ponton, l'attache comme il le ferait d'un hors bord, et taille la bavette au milieu de la méditerranée avec Nicole.

Et ça continue comme ça.

Nicole qui le fait tourner en bourrique, le manipule, tout en le trouvant séduisant mais agaçant (côté riche, tout pouvoir). Et puis elle a besoin d'argent.

C'est drôle drôle drôle. Et touchant aussi, parce qu'ils en souffrent à force, de ne plus savoir sur quel pied danser.

J'avais découvert Ernst Lubitsch à la bonne vieille époque du Cinéma de minuit, quel enchantement ! Regarder ses films me faisait l'effet de déguster une délicieuse flûte de champagne - seule exception : L'homme que j'ai tué, très triste.

Les surprises de la TSF (So this is Paris, 1926)
Sexe, mensonges et radio. Une farce amoureuse, bulledesavonesque. C'est léger, c'est primesautier, c'est un hymne à Paris "une ville où l'on ne s'ennuie jamais." Un peu coquine, jamais égrillarde, cette adaptation d'une pièce française a un charme fou. Un film muet spirituel, élégant et sophistiqué ? Du Lubitsch, bien sûr. Who else ?

La femme du pharaon (Das Weib des Pharao, 1922)
Fantastique reconstitution d'un film longtemps considéré comme perdu. Certes, il manque des fragments, mais des cartons explicatifs et des photos de tournage donnent l'impression de rien manquer. Une oeuvre épique et monumentale, l'avant-dernier film allemand de Lubitsch, qui n'est pas l'un de ses meilleurs, sa grandiloquence et son outrance à peine atténués par la satire du pouvoir, une constante dans la carrière du maître. De belles scènes de foule et de batailles, malgré tout.

"Si j'avais un million"

Bien sûr, c'est un film à sketchs et il n'a dû en réaliser qu'un (lequel d'ailleurs ?). Il était pourtant dans le coffret "Ernst LUBITSCH" qui traînait chez moi depuis des années.
Une faune huppée attend d'un air faussement contrit la mort imminente de l'ancêtre, richissime, à l'étage. Mais le vieux, furax, ne veut pas trépasser avant d'avoir dilapidé tout l'argent pour que les hyènes d'en bas n'aient plus rien à ronger. Il choisit des noms, au hasard, dans l'annuaire. Chacun d'eux aura un million.

S'ensuit une suite de courts récits sur les réactions des destinataires et des sketchs plus ou moins hilarants allant du burlesque à l'humour noir. Le plus court et le plus drôle : la réaction d'un employé perdu dans la jungle d'un immense bureau et le bruit des machines à écrire et des coups de tampons. En une minute, tout est dit et pas un mot n'a été prononcé !
Le plus noir, un condamné reçoit le montant lorsque le bourreau vient le chercher. Il espère, en vain, à un nouveau procès, à la possibilité de s'offrir un meilleur avocat... Sa petite amie vient le visiter une dernière fois et trouve un homme presque heureux alors qu'il va passer sur le grill sous peu.
Ou ce couple : "ma colombe", "mon grand fou", achetant une douzaine de voitures d'occasion et s'offrant les chauffeurs qui vont avec pour apprendre aux chauffards à mieux conduire, ou l'auto-tamponneuse version grandeur nature et pour le bonheur des amoureux transis.

Une bonne comédie qui ne va peut-être pas bien loin, mais qui fait vraiment rire.