E9-422
Un inuit, de la toundra à la guerre de Corée de
Eddy WeetaltukMary Weetaltuk est Inuk (un Inuk, des Inuits), elle suit son époux de campements en campements au rythme des saisons. En 1932 (le 19 mars pour Mary, le 19 avril pour son mari), Eddy Weetaltuk naît et vient compléter la fratrie des douze enfants.
Sous le prétexte du recensement, le gouvernement canadien renomme les autochtones et leur fait porter une plaque d’identité : Eddy devient E9-422. E pour esquimau, 9 pour sa communauté, 422 pour le classement d’Eddy. L’identifiant des indiens commence par I.
Les Weetaltuk s’installent finalement à Poste de la Baleine (Kuijjuarapile pour les esquimaux, Whapmagoostui pour les indiens). Les deux communautés indiennes et esquimaudes s’entendent et sont juste séparées par une piste d’atterrissage. Les autochtones sont consignés à leur territoire et habitent les premières maisons proposées par le gouvernement et surnommées les « Match box », celles-ci sont étroites et inadaptées au climat.
D’anecdotes en anecdotes, Eddy nous raconte son évolution, conscient d’avoir le pouvoir de diriger sa vie. On comprend que les conditions de vie sont très difficiles. Toutefois, il n’y a ni pathos, ni misérabilisme dans le récit d’Eddy. Le seul moyen d’influer sur son destin est de quitter le territoire alloué aux autochtones. Afin d’y parvenir, Eddy change d’identité, il se fait passer pour allochtone et parvient à se faire engager dans l’armée. Il part donc en Corée sous le drapeau canadien. Sa ressemblance physique avec les coréens lui évite bien des écueils.
J’ai pensé en lisant ce texte qu’Eddy bénéficiait d’une sacrée chance sous-jacente malgré tout !
Vingt ans plus tard, après avoir voyagé grâce à l’armée plusieurs fois en Europe, en Asie, au Canada, Eddy reprend son identité première afin de s’investir socialement et politiquement auprès des Inuits. Le message est clair et se veut optimiste: chacun peut, si il le désire, prendre en main son destin.
Eddy est décédé le 02 mars 2005 en terre inuit.
L’appareil critique est dirigé par Thibault Martin, l’ethnologue qui a permis à Eddy de voir son projet se réaliser : écrire un livre pour la jeunesse inuit. Il y rétablit les quelques inexactitudes historiques, décrit l’histoire de ce peuple et dresse un bilan de la situation inuit.
J’ai aimé lire ce texte car je me suis attachée à Eddy, il a beaucoup d’humour, reste lucide et porte un regard tout en finesse sur sa vie et sur les hommes. Les explications de fin de livre sont intéressantes et m’ont donné envie de découvrir d’un peu plus près la culture Inuit.
Curieuse rencontre entre ce texte et moi, mais vous savez comment sont les livres lorsqu’ils vous appellent…
Extrait :
« J’espère que mon histoire aidera les jeunes à trouver l’inspiration et la force de conserver leur culture, c’est la seule façon de ne pas perdre son âme. »