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| Imre Kertész [Hongrie] | |
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Auteur | Message |
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bertrand-môgendre Sage de la littérature
Messages : 1299 Inscription le : 03/02/2007 Age : 69 Localisation : ici et là
| Sujet: Imre Kertész [Hongrie] Sam 28 Avr 2007 - 12:10 | |
| - Citation :
Imre Kertész , né le 9 novembre 1929 à Budapest et mort le 31 mars 2016 dans la même ville1, est un écrivain hongrois, survivant des camps de concentration et lauréat du prix Nobel de littérature en 2002.
Biographie
Né dans une famille juive modeste, d'un père marchand de bois et d'une mère petite employée, Imre Kertész est déporté, à l'âge de 15 ans, à Auschwitz en 1944, puis transféré à Buchenwald. Cette expérience douloureuse nourrit toute son œuvre, intimement liée à l'exorcisation de ce traumatisme. L'édification d'une patrie littéraire constitue le refuge d'un être qui constate l'absurdité du monde car on lui a un jour « refusé le statut d'être humain ». Ses ouvrages ouvrent une réflexion sur les conséquences dévastatrices du totalitarisme et la solitude de l'individu, condamné à la soumission et la souffrance silencieuse. Revenu à Budapest en Hongrie, en 1945, il se retrouve seul, son père est mort et sa belle-mère s'est remariée. Il adhère au Parti communiste, dont il voit vite la dimension oppressive sur les consciences. En 1948, il commence à travailler comme journaliste. Mais le journal dans lequel il travaille devient l'organe officiel du Parti communiste en 1951, et Kertész est licencié. Il travaille alors quelque temps dans une usine, puis au service de presse du Ministère de l'Industrie. Congédié à nouveau en 1953, il se consacre dès lors à l'écriture et à la traduction. La découverte de L'Étranger d'Albert Camus lui révèle, à 25 ans, sa vocation. La philosophie de l'absurde devient un modèle fondateur pour son œuvre. À partir de la fin des années 1950 et tout au long des années 1960, il écrit des comédies musicales pour gagner sa vie. Il traduit de nombreux auteurs de langue allemande comme Friedrich Nietzsche, Hugo von Hofmannsthal, Arthur Schnitzler, Sigmund Freud, Joseph Roth, Ludwig Wittgenstein et Elias Canetti qui ont une influence sur sa création littéraire. Dans les années 1960, il commence à écrire Être sans destin, récit d'inspiration autobiographique qu'il conçoit comme un « roman de formation à l'envers »4. Ce roman sobre, distancié et parfois ironique sur la vie d'un jeune déporté hongrois, constitue le premier opus d'une trilogie sur la survie en camp de concentration. Il évoque notamment le point de vue de la victime dans l'histoire et son conditionnement occasionnel, voire banal, à l'entreprise de déshumanisation menée par l'Allemagne nazie. Cette acceptation passive et ordinaire de l'univers concentrationnaire peut être distinguée du témoignage de Primo Levi dans Si c'est un homme. L'ouvrage ne peut paraître qu'en 1975, pour un accueil assez modeste. Une critique littéraire, Eva Haldimann, du journal suisse allemand Neue Zürcher Zeitung remarque cependant le récit et une critique paraît le 19 mars 19775, ce qui va contribuer à le faire connaître en Europe de l'Ouest. Imre Kertesz découvre par hasard la critique dans un journal abandonné dans une piscine de Budapest. Il s'ensuit une correspondance entre la critique littéraire et l'auteur entre 1977 et 2002 qui sera publiée, en 2009, sous le titre :Briefe an Eva Haldimann6. C'est seulement après la réédition, en 1985, d'Être sans destin qu'il connaît le succès dans son pays. Tenu à l'écart par le régime communiste, Imre Kertész n'est reconnu comme un grand écrivain qu'à la fin des années 1980. Il obtient en 2002 le prix Nobel de littérature, « pour une œuvre qui dresse l'expérience fragile de l'individu contre l'arbitraire barbare de l'histoire ». En 2003, il est élu membre de l'Académie des arts de Berlin et reçoit en 2004 la croix de grand officier de l'Ordre du Mérite de la République fédérale d'Allemagne (Großen Bundesverdienstkreuz mit Stern). En 2011, il publie Sauvegarde, autoportrait d'un homme à l'hiver de sa vie, affrontant la maladie de Parkinson et le cancer de son épouse. Kertész y circonscrit réflexions littéraires, notes, souvenirs et anecdotes sur son parcours, notamment sa fuite vers l'Allemagne et l'antisémitisme dont il a à nouveau fait l'objet en Hongrie après son retour des camps. Le refus de Imre Kertész Poche: 350 pages Editeur : Actes Sud (29 août 2006) Collection : Babel ISBN-10: 274276285X ISBN-13: 978-2742762859 Présentation de l'éditeurAutobiographie romanesque à la troisième personne, Le Refus est la pièce centrale d'un triptyque de "l'absence de destin" également composé d'Etre sans destin et de Kaddish pour l'enfant qui ne naîtra pas. Le Refus est d'abord celui des éditeurs de la période stalinienne en Hongrie qui rejettent le roman Etre sans destin. Empêché de rendre publique son approche littéraire de l'expérience concentrationnaire, Kertész entre dans une sorte de douloureuse paralysie. Le Refus est ensuite celui de l'écrivain qui n'abandonne pas et reprend la plume. La deuxième partie du roman raconte l'histoire d'un personnage étrange qui revient dans sa ville après une longue absence et se confronte aux nouveaux maîtres du pays... Souffrance, lucidité, ironie, refus de tout totalitarisme : tels sont les éléments essentiels de l'œuvre d'Imre Kertész. Et telle est la valeur universelle de son art. Mon commentaire : l’auteur (l’être (face à lui-même (donc seul) (sans arrière-pensée))) écrit vrai.Ecriture : par une profusion de parenthèses, tirets et autres répétitions de texte compulsif, l’auteur annonce très clairement qu’il nous présente : -soit un ouvrage inachevé, les parenthèses révèlent alors les brouillons des idées à développer ; -soit un cri chuchoté, face à l’adversité d’un pouvoir en place, le taiseux bien ordonné petit soldat de plomb (les fans d’Abdel Malick aprècieront), à plus de chance de survie que le révolté. La cachette, seule refuge dans le secret duquel il peut murmurer par écrit ses ressentiments envers les représentants de l’ordre, charger entre autre de détruire le mâle pensant (je n’emploierai pas le mot Kärcher, pour éviter les poursuites). Signer ainsi son écriture avec autant de non-dit, de mots tus, de pensées étouffées dénote la puissance du pouvoir totalitaire hongrois. -soit qu’il signifie, la constance du romancier de vouloir en permanence trouver le mot juste. Des précisions méticuleuses gageures d’un esprit en effervescence. En Hongrie, s’exprimer, même par écrit, relève du parjure, tout comme la franchise se paye le luxe d’une abnégation dévote, rutilante. Une manière de rentrer dans les circonvolutions passives d’un auteur à la recherche d’espace libre. Avant de camper un personnage, avant de construire son décor, l’écrivain hésite, se rassure, revient sur une idée, la complète ou l’abandonne, la repêche jusqu’à ce que, peu à peu se métamorphose la logique de sa recherche, la certitude de sa quête d’absolu. Dépouillé jusqu’à la complexité des empilement asymétriques, l’architecture assimile les défauts des matériaux pour en extraire l’ultime huile essentielle nécessaire au ravissement de sa prose féconde. Du langage écrit comme pensées multicouches sans ligne de conduite prioritaire C’est une caserne. C’est une prison. C’est une cellule à porte blindée ouverte, avec du bleu noirci, du vert grisé ou du rouge limé. Ces affres de lumières éponymes de clartés, s’embouchonnent l’échappatoire côté sud par un feu tricolore au rouge ultra vif, en un sens interdit tentant. Qui tire en soi les fins fils d’espoir incongru ? L’avenir, au ciel constellé de miettes de pain pré-maché passe t'il à travers les murs ? Imré je te sens, je te vis, tu m’en vis sourdine collusion de notre rencontre peu probable, laquelle est choc et choppe ta bière contre mon verre pas encore délétère. Récit des espoirs, habillé de petites mains fécondes, d’où colère et envies ont quitté la crasse de sous tes ongles Chaque centimètres carrés s’arroge le droit d’existence, qu’il soit meuble auvent, ils sollicitent l’un des ordres, l’autre comme des nids de l’ignorance, le suivant comme la peur de l’absence. Une fois retrouvés, il faut sans cesse contrôler la présence des proches pour s’assurer d’eux si vivant, d’eux seuls, si vrais.(bertrand-môgendre) | |
| | | jack-hubert bukowski Zen littéraire
Messages : 5257 Inscription le : 24/02/2008 Age : 43
| Sujet: Re: Imre Kertész [Hongrie] Dim 24 Fév 2008 - 15:59 | |
| Pour dépoussiérer, je dépoussière... Mais les écrivains hongrois ont attiré mon attention, surtout Kertesz.
À date, j'ai lu le livre Kaddish pour l'enfant qui ne naîtra pas. De plus, j'ai vu le film Être sans destin. Sa philosophie d'un certain univers concentrationnaire, en même temps que lumineuse... a de quoi faire voir la vie autrement.
À mon sens, Être sans destin est ce qui approche le plus de ma vision de l'Option Sourde. | |
| | | Bibi Espoir postal
Messages : 16 Inscription le : 18/04/2008 Localisation : Rhone-Alpes
| Sujet: Imre Kertesz et le Cortège de Hérons blancs Ven 18 Avr 2008 - 0:36 | |
| Il y a quelques années, je ne me souviens plus, j’étais tombé sur “Kaddish pour l’enfant qui ne naîtra pas” et j’avais poursuivi avec “Etre sans destin“, deux livres qui m’avaient bouleversé. A cette époque, je cherchais – sans trouver - d’autres choses de l’écrivain hongrois, Imre Kertész. Aujourd’hui, je viens de finir « Dossier K. » (chez Actes-Sud), un livre d’entretiens avec un de ses amis. Imre Kertesz, rescapé d’Auschwitz et de Buchenwald, rapporte ce mot allemand « Weltvertrauen » qu’il a emprunté à Jean Améry, autre survivant. Ce mot, on pourrait le traduire par « la confiance accordée au monde », confiance basique, indestructible. Malheur à qui la perd : il est perdu. « Il est difficile de vivre sans cette confiance. Une fois qu’on l’a perdue, on est condamné à vivre éternellement seul parmi les hommes. On ne voit plus jamais en autrui son prochain, mais son ennemi. » Mais ce qui m’a frappé et pris à la gorge, c’est la façon dont Imre Kertesz règle, dans l’entretien, la formule de son interviewer qui lui demande ses « gouts littéraires ». Là, on sent poindre l’agacement, la colère rentrée d’ Imre Kertesz. Rappelons que les deux auteurs qui ont changé sa vie furent Thomas Mann ( avec la nouvelle : « Les Enfants de Wotan » et le roman « Mort à Venise » ) et Albert Camus ( avec « L’Etranger » traduit en hongrois en 1957). Imre Kertesz remet alors - respectueusement mais fermement - les choses à leur juste place : « Cette expression de goûts littéraires recèle quelque chose d’arbitraire qui ne correspond pas à la réalité. On dirait que je feuillette avec suffisance un très gros livre de « littérature », puis que je pose le doigt sur ces deux auteurs : voici mes goûts littéraires. En réalité, ça ne s’est pas passé ainsi. Ces deux auteurs ont fait irruption dans ma vie comme une catastrophe, au sens de bouleversement radical. Il est vrai que je les avais choisis, ces auteurs, mais je n’aurais pas pu ne pas les choisir ». Là, une révélation décisive par la rencontre fortuite de ces deux écrivains. Ailleurs encore, d’autres bascules, d’autres humains qui connaissent ces bouleversements, ces points-pivots qui vous changent une vie entière. Rama Krishna par exemple. C’est Hugo Von Hofmansthal qui rapporte ce qui fut décisif dans la vie du sage hindou, cette expérience qui le singularisa entre les hommes et fit de lui un Saint. « Il se passa simplement ceci : il allait par la campagne, au milieu des champs, jeune garçon de seize ans, quand il leva son regard vers le ciel et vit un cortège de hérons blancs traverser le ciel à une grande altitude et rien d’autre, rien que la blancheur des créatures vivantes ramant sur le ciel bleu, rien que ces deux couleurs l’une contre l’autre, cet ineffable sentiment de l’éternité, pénétra à l’instant dans son âme et détacha ce qui était lié , lia ce qui était détaché, au point qu’il tomba comme mort ; et lorsqu’il se releva, ce n’était plus le même qui s’était effondré ». La Vie : toujours plus grande, plus riche, plus incroyable que ce qu’on croit. BiBi ( Tu peux mettre le lien vers ton blog dans ton profil mais pas dans les posts – il apparaîtra à la fin de chaque message sous le bouton WWW. Portouverte ) | |
| | | Chatperlipopette Zen littéraire
Messages : 7679 Inscription le : 24/02/2007 Age : 59 Localisation : Bretagne
| Sujet: Re: Imre Kertész [Hongrie] Ven 18 Avr 2008 - 9:22 | |
| Bonjour bibi Ce serait bien que tu écrives un petit mot de présentation afin de que nous te connaissions un peu plus C'est ICI | |
| | | coline Parfum livresque
Messages : 29369 Inscription le : 01/02/2007 Localisation : Moulins- Nord Auvergne
| Sujet: Re: Imre Kertész [Hongrie] Ven 18 Avr 2008 - 10:35 | |
| Imre Kertesz ...un auteur que je dois découvrir... | |
| | | Wittgen Envolée postale
Messages : 117 Inscription le : 28/08/2009 Age : 37
| Sujet: Re: Imre Kertész [Hongrie] Mar 13 Oct 2009 - 12:15 | |
| - Bibi a écrit:
-
"Cette expression de goûts littéraires recèle quelque chose d’arbitraire qui ne correspond pas à la réalité. On dirait que je feuillette avec suffisance un très gros livre de « littérature », puis que je pose le doigt sur ces deux auteurs : voici mes goûts littéraires. En réalité, ça ne s’est pas passé ainsi. Ces deux auteurs ont fait irruption dans ma vie comme une catastrophe, au sens de bouleversement radical. Il est vrai que je les avais choisis, ces auteurs, mais je n’aurais pas pu ne pas les choisir ».
[/color]) Beaux mots. Je suis étonné que le fil n'ait pas eu plus de succès. Même si, plus encore que Müller peut-être, Kertész était un Nobel surprise peut-être déjà un peu oublié. Je voulais lire ce fil car j'ai entendu le début d'une rediffusion d'entretien avec lui à France Culture cette nuit (minuit et demie) mais je me suis rapidement endormi et l'émission n'est pas réécoutable sur le site. | |
| | | Eve Lyne Sage de la littérature
Messages : 1936 Inscription le : 08/08/2008
| Sujet: Re: Imre Kertész [Hongrie] Mar 13 Oct 2009 - 23:41 | |
| J'ai lu Etre sans destin qui m'a aussi impressionnée que le fameux témoignage de Primo Lévi.
J'ai également lu Liquidation qui parle des séquelles de la guerre chez un adulte né dans un camp de concentration, sans avoir cette chance de connaître sa mère. | |
| | | tina Sage de la littérature
Messages : 2058 Inscription le : 12/11/2011 Localisation : Au milieu du volcan
| Sujet: Re: Imre Kertész [Hongrie] Jeu 12 Sep 2013 - 16:24 | |
| LE REFUS
Un destin d'homme hors du commun, celui de l'écrivain lui-même ayant subi le nazisme et le communisme. Dans sa chair, dans son esprit.
Une vocation d'écrivain comme un accouchement d'enfant : écartelante, laborieuse et pourtant vitale.
Un livre qui casse tous les codes par une narration en deux temps. Un même homme d'abord photographié ruminant et figé dans un présent stérile puis filmé dans son passé de survivant revenant des camps nazis, dans son pays natal, ruiné, dévasté et sous contrôle totalitaire (la Hongrie).
Sysiphe est timidement suggéré en début de livre, avec une allusion lithique récurrente que le lecteur débutant ne comprend pas. Il clôt aussi le témoignage et éclaire alors tout le parcours du héros, cet être ballotté par des destins qui lui sont étrangers.
La grâce, la culpabilité (une tirade extraordinaire écrite par un bourreau), l'impersonnalité du monde extérieur, la pression de la volonté, le REFUS d'être un jouet de l'existence, le roman, l'art d'écrire sont autant de thèmes abordés dans ce BIJOU de livre à recommander vivement, surtout quand on a lu ETRE SANS DESTIN. | |
| | | shanidar Abeille bibliophile
Messages : 10518 Inscription le : 31/03/2010
| Sujet: Re: Imre Kertész [Hongrie] Sam 14 Sep 2013 - 14:08 | |
| C'est noté, tina. Comme coline, Kertesz est un auteur que je veux découvrir... | |
| | | shanidar Abeille bibliophile
Messages : 10518 Inscription le : 31/03/2010
| Sujet: Re: Imre Kertész [Hongrie] Ven 1 Avr 2016 - 10:04 | |
| 09-11-29 / 31-03-16
Après avoir relu Semprún, je voulais lire Etre sans destin... | |
| | | églantine Zen littéraire
Messages : 6498 Inscription le : 15/01/2013 Age : 59 Localisation : Peu importe
| Sujet: Re: Imre Kertész [Hongrie] Jeu 5 Mai 2016 - 19:07 | |
| Terminé " Etre sans destin" d' Imre kertesz : Un regard différent sur la vie concentrationnaire racontée avec une distanciation surprenante mais qui témoigne autrement de ce que nous sommes habitués à lire , entendre sur cette partie de notre histoire que nous avons encore du mal à aborder sans culpabilité , honte et douleur . Dérangeant pour certains probablement , ce témoignage offre une part d'humanité extraordinaire exprimée de façon inhabituelle . Une oeuvre que je considère comme incontournable ....une fois la dernière page refermée , seule face à ma propre humanité . - Citation :
- A Buchenwald, il n'y a pas d'appel pour les occupants du zeltlager et les lavabos sont en plein air (...) l'eau coule, gicle ou au moins suinte à longueur de journée, et depuis mon passage à la briqueterie, c'est seulement ici que c'est produit pour la première fois le miracle consistant à pouvoir boire quand on a soif (...) il y a aussi un crématoire, naturellement, mais un seul en tout et pour tout, ce n'est pas le but du camp, sa nature, son âme ou sa raison - si j'ose dire - mais on n'y brûle que ceux qui meurent dans les conditions normales de la vie du camp, pour ainsi dire (...). Somme toute, je n'ai eu aucun mal à comprendre l'expression des visages d'Auschwitz : je peux le dire, j'ai eu moi aussi très rapidement de l'affection pour Buchenwald.
- Citation :
- Et malgré la réflexion, la raison, le discernement, le bon sens, je ne pouvais pas méconnaître la voix d’une espèce de désir sourd, qui s’était faufilée en moi, comme honteuse d’être si insensée, et pourtant de plus en plus obstinée : je voulais vivre encore un peu dans ce beau camp de concentration.
- Citation :
- Le temps de passer une étape, de l'avoir derrière soi, et déjà arrive la suivante. Ensuite, le temps de tout apprendre, on a déjà tout compris. Et pendant qu'on comprend tout, on ne reste pas inactif : on effectue déjà sa nouvelle tâche, on agit, on bouge, on réalise les nouvelles exigences de chaque nouvelle étape. Si les choses ne se passaient pas dans cet ordre, si toute la connaissance nous tombait immédiatement dessus, sur place, il est possible qu'alors ni notre tête ni notre coeur ne pourraient le supporter.
- Citation :
- Ma mère m'attend et elle sera heureuse de me revoir , la pauvre .Je me rappelle, ele voulait autrefois que je devienne ingénieur , médecin ou quelque chose dans le genre .De toute manière , tout sera certainement comme elle a prévu ; il n'ya aucune absurdité qu'on ne puisse vivre naturellement , et sur ma route , je le sais déjà , me guette , comme un piège incontournable , le bonheur .Puisque là-bas aussi ,parmi les cheminées , dans les intervalles de la souffrance , il y avait quelque chose qui ressemblait au bonheur .Tout le monde me pose des questions à propos des vicissitudes , des "horreurs " : pourtant , en ce qui me concerne , c'est peut-être ce sentiment là qui restera le plus mémorable .Oui , c'est de cela , du bonheur des camps de concentration, que je devrais parler la prochaine fois , quand on me posera des questions .
Si jamais on m'en pose . Et si je ne l'ai pas moi-même oublié . | |
| | | shanidar Abeille bibliophile
Messages : 10518 Inscription le : 31/03/2010
| Sujet: Re: Imre Kertész [Hongrie] Ven 6 Mai 2016 - 9:52 | |
| Merci pour le rappel, églantine ! | |
| | | églantine Zen littéraire
Messages : 6498 Inscription le : 15/01/2013 Age : 59 Localisation : Peu importe
| Sujet: Re: Imre Kertész [Hongrie] Mar 17 Mai 2016 - 9:40 | |
| Le refus . Il serait difficile de conseiller cette lecture pour qui n'a pas lu au préalable l'oeuvre qui constitue probablement la pièce centrale de toute l'oeuvre d' Imre Kertesz "Etre sans destin" . Ce refus , ce fut bien celui qu'il essuyât lorsqu'il proposa Etre sans destin aux éditeurs . Il est bien évident qu'au sein d'un régime totalitaire , remuer les entrailles du passé, surtoutlorsqu'il s'agit des plus grands crimes de l'humanité , c'est audacieux .Plus encore si l'accent que revêt le témoignage prend une forme subversive et carrément dérangeante . Qu'à cela ne tienne , Imre Kertesz continuera , envers et contre tout à écrire . Qu'a-ton à perdre quand finalement on est déjà mort quelque part ? Alors il y va gaillardement notre fantôme , car dès lors qu'on a cotoyé la monstruosité de la vie concentrationnaire , tout est permis dans l'écriture . Même le plus indicible . Provocation de la part de Kertesz lorsqu'il se penche sur les écrits de Jorge Semprun dénonçant des fait aussi atroces que celui de la confection d'un abat-jour avec une peau humaine , en essayant de réfléchir sur la position de ces êtres qui commirent ces actes qui selon lui "découlent de l'essence même de ce monde ". Insulte face à la mémoire collective que d'affirmer que le tortionnaire était "dans son rôle " ? Alors oui , Imre Kertesz ne nous facilite pas la tâche pour avancer dans le chemin du devoir de mémoire et de la réconcilation avec notre propre humanité . On aura bien compris que notre homme farouchement misanthrope cherche uniquement des percées à travers le peu qui lui reste depuis son retour des camps pour accepter l'inacceptable , l'absurde . D'ailleurs dans les multiples clés de ce récit le lecteur y rencontrera une petite pierre , allusion à Sysiphe . En deuxième partie du récit , il mettra en image toutes ces convictions sur le non-sens et l'incommunicabilité avec le monde extérieur ,la notion de culpabilité et de grâce , la privation de liberté dans des régimes totalitaires à travers une histoire Kafkaïenne aussi déroutante qu'hypnotisante . Une lecture complexe , à l'image de l'écrivain . Pour lecteurs avertis ( ça peut violenter ) . Mais passionnante . | |
| | | topocl Abeille bibliophile
Messages : 11706 Inscription le : 12/02/2011
| Sujet: Re: Imre Kertész [Hongrie] Mar 17 Mai 2016 - 12:41 | |
| Donc, Kertesz joue à fond la différence ? | |
| | | églantine Zen littéraire
Messages : 6498 Inscription le : 15/01/2013 Age : 59 Localisation : Peu importe
| Sujet: Re: Imre Kertész [Hongrie] Mar 17 Mai 2016 - 13:09 | |
| En fait , malgré que je m'en défende , je dois bien m'avouer que depuis ma lecture d'Etre sans destin cette personnalité complexe me hante un peu . C'est un peu comme si Kertesz soulevait un couvercle et qu'il ne puisse pas faire autre chose que de constater froidement le beurk en dessous . Et même plus encore , comme si l'horreur vécue dans les camps lui procure une sorte de plaisir malsain à y réfléchir . Et pourtant comme si ce plaisir là était sa seule façon de survivre. Mais j'avoue ne pas être à l'aise en écrivant cela ....Je me trompe peut-être . Et bizarrement (ou pas car l'être humain est un peu tordu et pervers ) , il me fascine quelque part . Je vais continuer à explorer son oeuvre pour tenter de mieux cerner cet homme . | |
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