Parfum de livres… parfum d’ailleurs
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 Claude Regy

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Marko
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MessageSujet: Claude Regy   Claude Regy EmptyJeu 22 Avr 2010 - 0:38

Claude Régy
Claude Regy Regy10

Citation :
Claude Régy, né à Nîmes en 1923, est un metteur en scène de théâtre français qui a contribué au renouvellement du jeu de l'acteur et de l'esthétique du théâtre contemporain.
Longtemps assistant d'André Barsacq au Théâtre de l'Atelier, travaillant la plupart du temps en collaboration avec des dramaturges contemporains, il a amené sur scène des écritures aussi diverses que celles de Peter Handke, Marguerite Duras, Jon Fosse, Botho Strauss ou Leslie Kaplan ainsi que les traductions de la Bible par Henri Meschonnic. Il a travaillé avec plusieurs scénographes, notamment Jacques Le Marquet et Daniel Jeanneteau. Il continue à travailler avec de jeunes acteurs, notamment au sein de l'école du TNB.

Claude Régy est né en 1923 à Nîmes, dans une famille protestante et bourgeoise. Tout en reniant le puritanisme, il reste très attaché à la spiritualité de la Bible.
Il s'oriente d'abord vers des études de droit et de sciences politiques, mais très vite, il décide d’abandonner l’université afin de monter à Paris se former à l’art dramatique. Il suit les cours de Charles Dullin, Tania Balachova et Michel Vitold. Il devient assistant d'André Barsacq au Théâtre de l'Atelier, avant d’entamer ses propres mises en scène.
Très intéressé par la littérature contemporaine, il se lance dans l’adaptation des œuvres de grands auteurs modernes (Marguerite Duras, Nathalie Sarraute..). Claude Régy montre un réel intérêt pour le dialogue et l’échange avec les auteurs de son temps, qu'ils soient français, ou anglo-saxons. Ses spectacles, joués au Théâtre Antoine à Paris avec des comédiens prestigieux (Delphine Seyrig, Jean Rochefort, Michel Bouquet, Jean-Pierre Marielle ou Pierre Brasseur), connaissent un grand succès.
Claude Régy se tourne, dans les années soixante-dix, vers des auteurs non francophones tels que Peter Handke, Luigi Pirandello, ou Anton Tchekhov. Il découvre aussi de nouveaux auteurs, qu'il met en scène; par exemple, Gregory Motton.
Claude Régy s’est par ailleurs essayé à l’interprétation, notamment dans deux pièces de Jean-Paul Sartre : La Putain respectueuse dans une mise en scène de Julien Bertheau et Morts sans sépulture dans une mise en scène de Michel Vitold en 1946.
Sa conception du théâtre tranche avec tout ce qui se faisait avant lui. Il développe une esthétique minimaliste qui deviendra la marque de fabrique de ses spectacles.


Claude Régy accorde plus d’importance au jeu de l'acteur qu’à l’intrigue; il se place contre l’incarnation des personnages, et penche davantage vers l’appropriation du texte par le comédien. Visuellement, la présence ou l’absence de lumière prend le dessus sur le décor, les mots s’écoutent, les gestes s’observent, et tout cela se dilue dans des séquences volontairement longues et étirées.
L'esthétique du jeu d'acteur selon Claude Régy se caractérise par une diction hachée et monocorde, où les syllabes sont entre-coupées de silence, pour laisser place à notre imagination. La respiration est considérée comme l'essence du théâtre; chaque geste, chaque mot doit être nécessaire. Le metteur en scène mise sur la force du silence et la sensibilité des acteurs à ce qui les entoure. Claude Régy défend une création où l'on admet le doute, l'incertitude, l'incompréhension. Il s'exprime ainsi : "le désespoir est force de vie". Il invite le spectateur à se nourrir du vide, en proposant des spectacles à l'esthétique minimaliste, où gestes et voix sont mis en valeur par une épuration maximale. Il mise sur la lenteur, la solitude, et ce climat de vide crée une vibration qui entraine le spectateur dans un état d'hypnose.
Claude Régy dit que parler de son travail est une tricherie, qu'il faut que les choses restent mystérieuses et secrètes, il refuse de donner un mode d'emploi à la compréhension de ses spectacles. D'ailleurs les spectacles sont plus à s'approprier qu'à comprendre: "il faudrait toujours que le public se sente en état de création", affirme-t-il. Il donne à voir et à entendre un spectacle sans finitude, où le public a aussi son travail de création a faire.
Les spectacles se passent souvent dans l'obscurité pour exacerber notre perception. Le décor n'est ni réaliste, ni symbolique; il laisse un maximum d'espace à l'imaginaire du spectateur et privilégie avant tout l'acoustique. On voit peu l'acteur pour laisser place à l'imagination. Ces mises en scène explorent les limites de la perception; on ne sait pas si on voit, ni si on entend. Ils demandent une grande concentration dont on n'a pas l'habitude dans notre quotidien.
Ses spectacles ont vocation à atteindre un public au delà des spectateurs, par la circulation des impressions qui suit le spectacle. (Wikipedia)



Principales mises en scène

1952 : Doña Rosita de Federico Garcia Lorca, Théâtre des Noctambules
1953 : La vie que je t'ai donnée de Luigi Pirandello, Théâtre de l'Atelier, Théâtre des Noctambules, Théâtre des Mathurins
1953 : La Tragédie de la nuit de Thomas Otway, Festival de Châteaudun
1954 : Penthésilée d'Heinrich von Kleist, Théâtre Hébertot
1954 : Portrait de famille de Nino Frank et Paul Gilson, Théâtre des Mathurins
1955 : Gaspar Diaz de Dominique Vincent, Théâtre Hébertot
1957 : L'Autre Alexandre de Marguerite Liberaki, Théâtre de l'Alliance française
1962 : Frank V de Friedrich Dürrenmatt, mise en scène avec André Barsacq, Théâtre de l'Atelier
1963 : Les Viaducs de la Seine-et-Oise de Marguerite Duras, Poche Montparnasse
1964 : Bonheur, impair et passe de Françoise Sagan, Théâtre Édouard VII
1964 : Cet animal étrange de Gabriel Arout d’après Anton Tchekhov, Théâtre Hébertot
1965 : L'Accusateur public de Fritz Hochwälder, Théâtre des Mathurins
1965 : La Collection et L'Amant d'Harold Pinter, Théâtre Hébertot
1966 : La prochaine fois je vous le chanterai de James Saunders, Théâtre Antoine
1966 : Témoignage irrecevable de John Osborne, Théâtre des Mathurins
1966 : Le Retour d'Harold Pinter, Théâtre de Paris
1966 : Se trouver de Luigi Pirandello, Théâtre Antoine
1967 : L'Anniversaire d'Harold Pinter, Théâtre Antoine
1967 : Rosencrantz et Guildenstern sont morts de Tom Stoppard, Théâtre Antoine
1968 : Les Quatre Saisons d'Arnold Wesker, Théâtre Montparnasse
1968 : L'Amante anglaise de Marguerite Duras, TNP Théâtre de Chaillot
1969 : Le Jardin des délices de Fernando Arrabal, Théâtre Antoine
1969 : La Danse de mort d'August Strindberg, TNP Théâtre de Chaillot
1970 : La Mère de Stanisław Ignacy Witkiewicz, Théâtre Récamier
1971 : Les Prodiges de Jean Vauthier, TNP Théâtre de Chaillot
1971 : L'Amante anglaise de Marguerite Duras, Théâtre Récamier
1972 : Sauvés d'Edward Bond, TNP Théâtre de Chaillot
1972 : Home de David Storey, Espace Pierre Cardin
1973 : Isma de Nathalie Sarraute, Espace Pierre Cardin
1973 : Le Vaisseau fantôme de Richard Wagner, Théâtre musical d'Angers
1974 : La Chevauchée sur le lac de Constance de Peter Handke, Espace Pierre Cardin
1974 : Vermeil comme le sang de Claude Régy, TNP Théâtre de Chaillot
1975 : C'est beau de Nathalie Sarraute, Théâtre d'Orsay
1976 : Lulu de Frank Wedekind, Théâtre de l'Athénée-Louis-Jouvet
1976 : L'Amante anglaise de Marguerite Duras, Théâtre d'Orsay
1976 : Emma Santos, Nouveau Carré Silvia Monfort
1977 : L'Éden Cinéma de Marguerite Duras, Théâtre d'Orsay
1978 : Les gens déraisonnables sont en voie de disparition de Peter Handke, Théâtre des Amandiers, TNP Villeurbanne
1978 : Le Nom d'Œdipe d'après Le Chant du corps interdit d'Hélène Cixous, Cour d'Honneur du Palais des Papes Festival d'Avignon
1979 : Navire Night de Marguerite Duras, Théâtre Édouard VII
1979 : Le Mort de Georges Bataille, Théâtre Édouard VII
1979 : Wings d'Arthur Kopit, Théâtre d'Orsay
1980 : Elle est là de Nathalie Sarraute, Théâtre d'Orsay
1980 : Trilogie du revoir de Botho Strauss, Théâtre des Amandiers
1981 : Le Vaisseau fantôme de Richard Wagner, Grand Théâtre de Nancy
1981 : L'Amante anglaise de Marguerite Duras, Théâtre du Rond-Point : nouvelle version
1982 : Grand et petit de Botho Strauss, TNP Villeurbanne, Théâtre national de l'Odéon
1984 : Par les villages de Peter Handke, Théâtre national de Chaillot, TNP Villeurbanne
1984 : Ivanov d'Anton Tchekhov, Comédie-Française
1985 : Passaggio opéra de Luciano Berio, Théâtre du Châtelet
1985 : Les Soldats de Jakob Lenz, avec les élèves du Conservatoire national d'art dramatique, Théâtre de la Bastille
1985 : Intérieur de Maurice Maeterlinck, Théâtre Gérard Philipe Saint-Denis
1986 : Le Parc de Botho Strauss, Théâtre national de Chaillot
1988 : Trois voyageurs regardent un lever de soleil de Wallace Stevens, Théâtre de la Bastille
1988 : Le Criminel de Leslie Kaplan, Théâtre de la Bastille
1989 : L'Amante anglaise de Marguerite Duras, Théâtre Renaud-Barrault
1990 : Les Maîtres Chanteurs de Nuremberg de Richard Wagner, Théâtre du Châtelet
1990 : Huis clos de Jean-Paul Sartre, Comédie-Française
1990 : Le Cerceau de Viktor Slavkine, Théâtre Nanterre-Amandiers
1991 : Chutes de Gregory Motton, Théâtre Gérard Philipe
1992 : Jeanne d'Arc au bûcher de Paul Claudel et Arthur Honegger, Opéra Bastille
1994 : La Terrible Voix de Satan de Gregory Motton, Théâtre Gérard Philipe
1995 : Paroles du sage d'Henri Meschonnic, Théâtre National de Bretagne
1996 : La Mort de Tintagiles de Maurice Maeterlinck, Théâtre Gérard Philipe
1998 : Holocauste de Charles Reznikoff, Théâtre national de la Colline
1999 : Quelqu'un va venir de Jon Fosse, Théâtre Nanterre-Amandiers
2000 : Des couteaux dans les poules de David Harrower, Théâtre Nanterre-Amandiers
2001 : Melancholia de Jon Fosse, Théâtre national de la Colline, Théâtre National de Bretagne
2001 : Carnet d'un disparu de Leos Janacek, Festival international d'art lyrique d'Aix-en-Provence
2002 : 4.48 Psychose de Sarah Kane, avec Isabelle Huppert, Théâtre des Bouffes du Nord
2003 : Variations sur la mort de Jon Fosse, Théâtre national de la Colline
2005 : Comme un chant de David d'après les Psaumes traduits par Henri Meschonnic, Théâtre national de la Colline
2007 : Homme sans but d'Arne Lygre, Odéon-Théâtre de l'Europe, Ateliers Berthier
2009 : Ode maritime de Fernando Pessoa, avec Jean-Quentin Châtelain, Théâtre Vidy-Lausanne, Festival d'Avignon
2010 : Brume de Dieu d'après Tarjei Vesaas, avec Laurent Cazanave, Comédie de Valence, Ménagerie de verre
2012 : La Barque Le Soir d'après Tarjei Vesaas, avec Olivier Bonnefoy,Nichan Moumdjian,Yann Boudaud,CDN Orléans



Ode Maritime
Claude Regy Ode-ma10

Ce spectacle est un trip à la fois magnétique et éprouvant, une expérience de théâtre qui hypnotise et emmène loin dans la stratosphère ou terrasse d'ennui des spectateurs qui sortent au fur et à mesure. Il y a quelques rires nerveux dans la salle et surtout un long silence de concentration et de sidération. On est embarqué dans un voyage à la fois introspectif et sauvage, un long monologue statique de deux heures habité par un comédien stupéfiant, Jean-Quentin Châtelain, dont la diction très singulière en déroute plus d'un. Son intonation très artificielle, à la fois étrange, inquiétante, irritante, un peu grotesque et finalement émouvante est un jeu théâtral en soi.

Le dispositif scénique conçu par Claude Régy est très beau. Un ponton qui avance vers la salle dans un espace incurvé qui crée un espace irréel, à la fois aquatique et cosmique un peu comme chez Robert Wilson. Des éclairages très élaborés qui créent des tonalités changeantes de bleu, de rouge, d'or et de vert et se terminant par un blanc éblouissant. La scène semble parfois se dissoudre, devenir fantômatique, et le comédien apparait ainsi comme suspendu au milieu de nulle part. Il y est question de la mer, de l'horizon, mais on est aussi dans un espace mental, dans les limbes, on pénètre un monde onirique.

La bande sonore faite de nappes synthétiques renforce un sentiment de mystère ou de sacré. Elle contribue à l'hypnose et parfois nous secoue par des montées en puissance inattendues. A la fin lorsque la scène devient entièrement saturée de blanc elle devient assourdissante avant que tout retourne au néant.

Enfin, le texte de Pessoa est très complexe. Heureusement que je l'avais lu à l'époque du Festival d'Avignon. J'étais ainsi moins perdu dans ces boucles narratives qui favorisent les entrées/sorties du récit. Le langage est poétique et souvent énigmatique. Il évoque à la fois l'univers de la mer, des bateaux, des marins, mais aussi le monde morderne, les machines, la violence de la colonisation, la barbarie... Le narrateur oscille entre tristesse, amertume, exaltation, régression animale et folie. On a le sentiment d'assister à la naissance d'une cosmogonie et d'une exploration de l'infini. C'est grandiose et un peu hermétique.

Claude Regy F-932-10

Il y est question de Dieu aussi évidemment et Pessoa le définit comme suit:

Peut-être découvrira-t-on un jour que ce qu'on appelle Dieu, et qui se trouve de façon si évidente sur un autre plan que celui de la logique ou de la réalité spatiale et temporelle, est en fait un mode humain d'exister, une sensation de nous-mêmes dans une autre dimension de l'être.

Ce spectacle est un peu une représentation de ce concept. Du théâtre exigeant et difficile d'accès mais qui laisse en état second avec une trace indélébile.

Claude Regy Ode-ma11 Claude Regy Ode10
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MessageSujet: Re: Claude Regy   Claude Regy EmptyJeu 22 Avr 2010 - 10:19

Extrait d'Ode Maritime recopié sur Internet par flemmardise:

Tout seul, sur le quai désert, dans ce matin d’Eté,
Je regarde du côté de la barre, je regarde vers l’Indéfini,
Je regarde et il me satisfait de voir,
Petit, noir et clair, un paquebot qui entre.
Il vient là-bas très loin, bien net, classique à sa manière.
Dans l’air lointain il laisse derrière lui l’ourlet vain de sa fumée.
Il vient, il entre, et le matin avec lui, et sur le fleuve,
De-ci, de-là se réveille la vie maritime,
Se dressent les voiles, s’avancent les remorqueurs,
Surgissent de petits bateaux de derrière les navires qui sont dans le port.
Il fait une vague brise.
Mais mon âme à moi se tient avec ce que je vois le moins,
Avec le paquebot qui entre,
Car lui se tient avec la Distance, avec le Matin,
Avec le sens maritime de cette heure,
Avec la douceur douloureuse qui monte en, moi comme nausée,
Comme début de mal de mer, mais dans l’esprit.

Je regarde de loin le paquebot, dans une grande indépendance d’âme,
Et au fond de moi une roue comme à tourner, lentement.
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MessageSujet: Re: Claude Regy   Claude Regy EmptyJeu 22 Avr 2010 - 11:23

Le spectacle que je regretterai éternellement de ne pas avoir vu... Sad
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MessageSujet: Re: Claude Regy   Claude Regy EmptyJeu 22 Avr 2010 - 22:24

Une excellente critique de René Solis dans Libération au moment d'Avignon:

Citation :
L’homme monte une échelle, s’avance sur la passerelle et fait face aux spectateurs. Derrière lui, une vague grise, telle un grand repli suspendu dans la pénombre. C’est la première image d’effarante solitude d’Ode maritime, et ce sera la seule près de deux heures durant. La vague, parfois, se teintera de rouge, et le visage de l’homme, de bleu, couchers de soleil, fleuves de sang, océans, cadavres en putréfaction : comme dans ces textes sans adjectifs où la survenue d’un seul, aussi banal soit-il, irradie toute la page, la moindre variation lumineuse éveille les images.

Claude Régy met en scène Ode maritime, poème au long cours de Fernando Pessoa. A 86 ans, il avait toujours refusé de venir au Festival d’Avignon et a fini par céder. Il n’a rien à perdre. Claude Régy est depuis très longtemps habitué à ne pas faire de concessions. Le soir de la première, jeudi, un problème technique l’a contraint à annuler la représentation. Il n’y a vu aucun signe du destin, juste un contretemps fâcheux.

Pirate. Cela fait tellement longtemps aussi que Claude Régy arpente des territoires crépusculaires hantés par des revenants, qu’il serait vain de voir dans Ode maritime un spectacle testamentaire. Plutôt une méditation de bord de mer, où il est question de paix et de guerre.

L’homme à la passerelle n’est pas un fantôme mais un observateur : «Seul, sur le quai désert, en ce matin d’été, / Je regarde du côté de la barre, je regarde vers l’Indéfini, / Je regarde et j’ai plaisir à voir, / Petit, noir et clair, un paquebot qui entre». Lentement, son esprit divague, largue les amarres, au-delà du va-et- vient apaisant des bateaux entre mer et fleuve.

Le poème prend le large, le vent forcit, l’anonyme, le monsieur personne sur la jetée, sent monter l’ivresse : «S’accélère toujours plus le volant au fond de moi.» Le voilà hors de lui et de son temps : «Partir avec vous, me défaire de moi - Ah, fous le camp, fous le camp d’ici ! / De mon habit de civilisé, de mes façons doucereuses, / De ma peur innée des prisons, / De ma vie pacifique, / De ma vie assise, statique, réglée et corrigée !»

Le «civilisé» se fait pirate, violeur, assassin, bourreau, victime : «Striez de sang ma chair ! /Embrassez avec vos coutelas et vos fouets et votre rage / Ma joyeuse terreur charnelle de vous appartenir, / Mon désir masochiste de me donner à votre fureur, / D’être l’objet inerte et sensible de votre cruauté omnivore, […]».

Il rêve, il hurle, et finit par revenir à lui, au bord de l’eau, en enfance «dans la vieille maison calme au bord du fleuve», point de départ et ultime escale du voyage immobile. Avant de retourner vers «la grande ville maintenant pleine de lumière» il emporte une dernière image, «la rotation lente de la grue qui comme un compas qui tourne, / Trace un demi-cercle de je ne sais quelle émotion […]».

Comment faire du théâtre avec ça ? Au bout de la passerelle, Jean-Quentin Châtelain est la vigie qui trace le demi-cercle. Avec sa voix de sourd-muet menacée d’un bâillement, sa voix à contretemps, à contre-emploi, vieux disque ralenti de quelques tours, et qui pourtant rend limpide chaque syllabe parfaitement articulée. Jean-Quentin Châtelain qui jamais ne semble buter sur un mot, tout en les arrachant un à un au plus profond de lui-même.

Cris. L’effort demandé aux spectateurs est à la mesure de l’exigence de son travail. Il faut le suivre sans réticence, s’abandonner à lui, suivre sa voix dans l’obscurité. Accepter les outrances, l’incongruité de ses cris, le scandale du poète se mettant à hurler. Monter à bord avec lui, ou bien débarquer et sortir sur le côté. Ne pas en vouloir alors au metteur en scène qui croit encore et toujours que les spectateurs sont prêts à faire l’effort de la beauté. Jean-Quentin Châtelain, tel une figure de proue de tout le théâtre de Claude Régy, seul face à «l’immense immensité de la mer immense».
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MessageSujet: Re: Claude Regy   Claude Regy EmptyJeu 22 Avr 2010 - 22:51

coline a écrit:
Le spectacle que je regretterai éternellement de ne pas avoir vu... Claude Regy Icon_sad

Mes amis étaient accablés. Je crois qu'ils m'ont juste maudit un peu Claude Regy 642175
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MessageSujet: Re: Claude Regy   Claude Regy EmptyVen 23 Avr 2010 - 0:00

Marko a écrit:
coline a écrit:
Le spectacle que je regretterai éternellement de ne pas avoir vu... Claude Regy Icon_sad

Mes amis étaient accablés. Je crois qu'ils m'ont juste maudit un peu Claude Regy 642175

Marko a écrit:
un comédien stupéfiant, Jean-Quentin Châtelain, dont la diction très singulière en déroute plus d'un. Son intonation très artificielle, à la fois étrange, inquiétante, irritante, un peu grotesque et finalement émouvante est un jeu théâtral en soi.


Je l'avais vu à Avignon en Jason dans Médée, j'ai peiné à m'habituer...Je crois d'ailleurs que je ne me suis pas habituée...Je n'aime pas la diction de ce comédien...Beaucoup de spectateurs riaient...
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MessageSujet: Re: Claude Regy   Claude Regy EmptyVen 23 Avr 2010 - 10:29

Marko bien que dans ce domaine là je sois très néophyte, j'aime à lire tes impressions sur les pièces que tu voies.

Je trouve la définition de Pessoa sur la nature de Dieu très "réaliste", une possibilité compréhensible (si tu peux comprendre ce que j'essaie de dire)

et les extraits plein de poësie.

Par contre je comprends très bien Coline que tu aies eu du mal à apprécier un personnage lié à une voix que tu reçois désagréablement.

à tantôt
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MessageSujet: Re: Claude Regy   Claude Regy EmptyJeu 6 Déc 2012 - 17:01

Retour à Claude Régy ce week-end à Reims avec sa version de La barque le soir de Vesaas. Il me tarde d'y être même si la presse est très divisée... On lui reproche notamment d'imposer 10 minutes de silence avant que le spectacle démarre... ça me plait!
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MessageSujet: Re: Claude Regy   Claude Regy EmptyJeu 6 Déc 2012 - 17:05

Marko a écrit:
Retour à Claude Régy ce week-end à Reims avec sa version d'Une barque le soir de Vesaas. Il me tarde d'y être même si la presse est très divisée... On lui reproche notamment d'imposer 10 minutes de silence avant que le spectacle démarre... ça me plait!

J'ai hâte de savoir...
J'ai commandé La barque le soir de Tarjei Vesaas. Arrivée demain en principe.
Bon spectacle! content
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MessageSujet: Re: Claude Regy   Claude Regy EmptyJeu 6 Déc 2012 - 17:08

Merci! Ils me font galoper ces metteurs en scène rire Comme s'ils ne pouvaient pas venir à Lille... Claude Regy 937463
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MessageSujet: Re: Claude Regy   Claude Regy EmptyJeu 6 Déc 2012 - 17:11

Marko a écrit:
Merci! Ils me font galoper ces metteurs en scène rire Comme s'ils ne pouvaient pas venir à Lille... Claude Regy 937463

Tu n'as pas le droit de te plaindre! Tu exagères!...Fais des kilomètres et profite tant que tu peux! Very Happy
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MessageSujet: Re: Claude Regy   Claude Regy EmptyJeu 6 Déc 2012 - 17:29

coline a écrit:
Marko a écrit:
Merci! Ils me font galoper ces metteurs en scène rire Comme s'ils ne pouvaient pas venir à Lille... Claude Regy 937463

Tu n'as pas le droit de te plaindre! Tu exagères!...Fais des kilomètres et profite tant que tu peux! Very Happy
C'est bien mon intention Very Happy
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MessageSujet: Re: Claude Regy   Claude Regy EmptyJeu 6 Déc 2012 - 18:19

Echange très intéressant (forcément!) entre deux grands maîtres du théâtre: Claude Régy et Luc Bondy
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MessageSujet: Re: Claude Regy   Claude Regy EmptyLun 10 Déc 2012 - 13:46

La barque le soir de Vesaas
Claude Regy La-bar11

Ce spectacle de Claude Régy est adapté du 5e chapitre de "La Barque le soir" de Vesaas, son dernier "roman" en forme de rêverie autobiographique qui ressemble à une succession de nouvelles poétiques. Ce chapitre est intitulé Voguer parmi les miroirs et nous montre un homme plongeant dans les eaux sombres d'un fjord sur les rives d'une vallée. Il est attiré par son propre reflet, s'enfonce jusqu'au fond vaseux puis remonte à la surface, s'accroche à une bûche flottante puis replonge... Des corneilles se posent sur d'autres bûches et s'envolent, tournoient autour de lui. Un chien aboie et cet appel anime l'homme d'un cri primaire quasi animal qui lui répond en écho, amplifié par l'encaissement de la vallée. Un autre homme s'approche avec le chien et vient à sa rencontre en lui désignant une barque. Il passe ses bras autour de lui et le sort de l'eau. Récit qui évoque donc une sorte de noyade, de suicide ou de flottement onirique dans cet espace aquatique qui figure l'inconscient.

Claude Regy La_bar10

La mise en scène de Régy recherche une forme de déthéâtralisation qui permet de plonger le spectateur dans un état second par une immersion progressive dans l'espace scénique qui émerge de l'obscurité totale de la salle pour révéler peu à peu, dans une lumière bleutée, la silhouette de cet homme, son visage puis sa parole qui surgit comme accouchée par les eaux qui l'engloutissent. Une parole qui détache chaque syllabe comme un langage qui se (re)découvrirait à mesure. Cette diction si lente devient le reflet de cette conscience entre vie et mort, rêve et réalité. Vesaas est un symboliste et Régy par ce dispositif parvient à créer un tableau d'une intensité magnétique très puissante. La bande sonore électronique subtile agit comme le flux et le reflux de cette conscience agonisante qui s'éveille peu à peu à la vie au contact des éléments et des êtres vivants qui l'entourent. L'eau et ses scintillements, les racines auxquelles il se heurte, le bois de la bûche, une étrange morsure au fond de l'eau, les oiseaux, le chien, l'homme, la barque. Autant d'images familières des lecteurs des "Oiseaux" du même auteur.

Le comédien Yann Boudaud est extraordinaire. D'abord immobile et comme en transe, il libère progressivement la parole en donnant une densité fantastique au texte. Sa gestuelle traduit au ralenti cette chute du corps dans les ondes puis son ascension. La séquence de l'aboiement où il s'identifie au cri de l'animal comme signal de vie, et se l'approprie, est hallucinante. Ce sont ces présences animales qui deviennent des signaux qui le tirent du néant. On ressent son abandon, son égarement, puis son éveil et le retour à la conscience.

Il faut accepter cette lenteur nécessaire. Se laisser pénétrer par les mots qui finissent par prendre une dimension magique et incantatoire, archaïque. Régy a parfaitement saisi la force de la prose de Vesaas qui donne une importance à chaque mot sous son apparente simplicité. On entend ce texte, on le vit plutôt que de glisser à sa surface comme le ferait une mise en scène narrative classique. C'est une expérience extrêmement intense mais certaines personnes restent à la porte. On ronflait autour de moi, il y avait des soupirs, des toux, des sièges qui se referment et des couples qui sortaient de la salle quitte à rompre la magie de ce silence hypnotique. Une dame en sortant a dit "c'est atroce". Une autre "Je n'ai jamais vu une chose pareille". A prendre ou à laisser. Et pourtant je connais peu de spectacles d'une telle beauté et d'une telle pureté. Régy est un géant du théâtre et tous ses choix d'oeuvres pour ses spectacles sont autant de pistes de découverte des plus grands textes du XXe siècle. J'irai régulièrement piocher dans cette liste.


Claude Regy La-bar10


Citation :
Dans ce texte s’invente un univers vierge parce que se brouillent continûment les frontières : monter et descendre, toucher le fond parmi la vase, émerger à la surface – à peine un quart de visage, le nez seul peut-être.
Respiration – très peu d’air – asphyxie – lutte farouche pour l’interrompre.
Ce qu’on ressent, c’est le trouble constant de l’absence de démarcation.
« Pas une mort violente, mais une mort profonde, silencieuse. »
Une vie profonde, silencieuse. C’est l’écho qu’on entend au loin.
À demi cadavre, un homme dérive accroché, d’un bras, à un tronc d’arbre qui flotte à la surface d’un fleuve.
Il dérive vers le sud « comme une conscience blessée. »
Des choses qui viennent d’une autre existence – la sienne sans doute en un autre temps – se déchaînent sur lui.
À moins qu’il s’agisse des manifestations d’une existence extérieure à la sienne.
Il s’agit en tout cas d’un déchaînement de forces qui s’opposent à lui, contraint comme il est de s’abandonner au courant.
Vesaas laisse de grands espaces de liberté où peuvent jouer les clés secrètes de notre conscience.
Il écrit un pur poème et nous le ressentons illimité.
Pour l’homme qui navigue – étrange navigation – son reflet dans l’eau et sa propre place tout contre la mort peuvent dire – c’est un moment unique – ce que personne d’autre ne sait. Un cheminement lent au bord de l’inconnaissable.
L’ultime ne finit pas. C’est une ouverture – pour un temps prolongé – à une libre coexistence de la vie et de la mort. Une sorte de permanence est donnée au passage du seuil qui cesse, par là même, d’être fatal et émotionnel.
C’est une aventure du corps et de l’esprit, une expérience suscitée à l’extrême du vivant. Dans le moment dilaté de sa rupture.
La dilatation permet l’observation.


Claude Régy, mars 2012
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MessageSujet: Re: Claude Regy   Claude Regy EmptyLun 10 Déc 2012 - 14:50

Marko a écrit:
La barque le soir de Vesaas
Claude Regy La-bar11

Ce spectacle de Claude Régy est adapté du 5e chapitre de "La Barque le soir" de Vesaas, son dernier "roman" en forme de rêverie autobiographique qui ressemble à une succession de nouvelles poétiques. Ce chapitre est intitulé Voguer parmi les miroirs et nous montre un homme plongeant dans les eaux sombres d'un fjord sur les rives d'une vallée. Il est attiré par son propre reflet, s'enfonce jusqu'au fond vaseux puis remonte à la surface, s'accroche à une bûche flottante puis replonge... Des corneilles se posent sur d'autres bûches et s'envolent, tournoient autour de lui. Un chien aboie et cet appel anime l'homme d'un cri primaire quasi animal qui lui répond en écho, amplifié par l'encaissement de la vallée. Un autre homme s'approche avec le chien et vient à sa rencontre en lui désignant une barque. Il passe ses bras autour de lui et le sort de l'eau. Récit qui évoque donc une sorte de noyade, de suicide ou de flottement onirique dans cet espace aquatique qui figure l'inconscient.

[...]
Il faut accepter cette lenteur nécessaire. Se laisser pénétrer par les mots qui finissent par prendre une dimension magique et incantatoire, archaïque. Régy a parfaitement saisi la force de la prose de Vesaas qui donne une importance à chaque mot sous son apparente simplicité. On entend ce texte, on le vit plutôt que de glisser à sa surface comme le ferait une mise en scène narrative classique. C'est une expérience extrêmement intense mais certaines personnes restent à la porte.


Marko, j'attendais ce commentaire, après l'avoir eu directement à l'oral à ta sortie du spectacle...Je voulais pouvoir revenir à chacun de tes mots, qu'ils soient conservés par l'écrit avant que ma mémoire ne les emporte, me laissant seulement quelques impressions, quelques images..Merci donc!
Je suis actuellement dans la lecture, simple et grandiose à la fois, de ces nouvelles à dimension autobiographique de Tarjei Vesaas, regroupées dans le recueil: La barque le soir d'où est tiré le spectacle. Déjà, à travers la lecture, se vit une expérience...C'est dire si je forme des voeux pour que je puisse aussi avoir la chance d'aller voir le spectacle de Claude Régy.
Peut-être ici...Je croise les doigts pour que cela soit possible...

CDN Orléans (Salle Vitez)
(J'indique ces dates de la tournée car d'autres Parfumés seront peut-être tentés)

MER 06 FÉV 2013 20H30
JEU 07 FÉV 2013 19H30
VEN 08 FÉV 2013 20H30
SAM 09 FÉV 2013 19H30
DIM 10 FÉV 2013 18H00
MAR 12 FÉV 2013 20H30
MER 13 FÉV 2013 19H30
JEU 14 FÉV 2013 20H30
VEN 15 FÉV 2013 19H30

(durée estimée 1h40)

Il y a aussi ces dates à Lorient:
18 JAN—25 JAN 2013 —Théâtre de Lorient, CDN


Dernière édition par coline le Lun 10 Déc 2012 - 14:58, édité 1 fois
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