Paul Klee [peintre]

Paul Klee (1879-1940)

Citation :

Né près de Berne dans une famille de musiciens, Paul Klee est initié très jeune à l’art et à la musique. Il étudie l’art à l’Académie des Beaux-Arts de Munich, puis, après un voyage en Italie, rencontre Vassili Kandinsky, Franz Marc et s’associe au Blaue Reiter.

En 1914, lors d’un voyage en Tunisie, Klee est très impressionné par la qualité de la lumière et des couleurs, et restera marqué par cette vision. Il utilise alors de nombreux types de médiums, huile, aquarelle, encre, qu’il combine souvent dans ses œuvres.

Souvent associé à l’expressionnisme, au cubisme ou au surréalisme, l’œuvre de Klee est en réalité difficile à classifier. On leur reconnaît généralement une certaine qualité fragile et enfantine, et une allusion à la poésie, à la musique et aux rêves. La géométrisation des sujets, la recherche de perfection dans la matière et la couleur sont sublimées par le souci de préserver l’intuition. Les œuvres plus tardives se caractérisent par de rapides symboles hiéroglyphiques.

Après la Première Guerre mondiale, Klee enseigne, aux côtés de Kandinsky, au Bauhaus, puis, à partir de 1931 à l’Académie de Düsseldorf, avant d’être renvoyé en 1933 par le parti nazi pour son art jugé «dégénéré». L’artiste retourne alors en Suisse, et, très atteint moralement, souffre de sclérodermie et meurt à Muralto en 1940, à l’âge de 61 ans.

Le Musée de L'Orangerie à Paris expose jusqu'au 19 juillet 2010 la collection Paul Klee de la Fondation Beyeler de Bâle. Décédé récemment, Ernst Beyeler était un galeriste et collectionneur d'art qui a co-fondé la foire Art Basel en 1971. Il a transformé une librairie de livres anciens en galerie d'art et a peu à peu constitué une des plus importantes collections d'art moderne du monde. On peut visiter sa fondation à Bâle en Suisse.



Beyeler a donc voué à Paul Klee une véritable passion et a constitué cette belle collection que le musée de l'Orangerie nous propose de voir. Elle couvre toute la vie du peintre jusqu'à son ultime oeuvre sur jute inachevée. Peinture émouvante puisqu'elle est comme le portrait du peintre bientôt disparu anticipant en même temps les horreurs de la guerre de 39/45:


Sans titre (1940) puis nommée Captif ou En deça-au-delà par Beyeler qui le décrit comme une anticipation dramatique de l'avenir, un "purgatoire blanc". "Derrière les barreaux d'une prison ouverte, un oeil est déjà dans la tombe alors que l'autre interroge avec angoisse le spectateur"...

Petit tour d'horizon de quelques oeuvres présentées sur les 26 de la collection:


Paysage du passé (1918), "une forêt germanique originelle"


Brûle encore (1939)


Sorcières de la forêt (1938) , figures fragmentées de deux sorcières de conte pour "retrouver le caractère magique et la faculté de voir des enfants, des fous et des primitifs".


La chapelle (1917), "des pics montagneux comme d'impurs cristaux pour évoquer la vie cachée de l'ermite dans la montagne comme dans les poèmes taoïstes chinois qu'il affectionnait"


Poisson-cloporte-boueux (1940), "lambeaux d'écorce arrachés à sa propre angoisse, les barres noires qui balafrent les animaux d'âme de Klee agissent à la façon d'exorcismes primitifs". Klee souffrait de sclérodermie qui desséchait progressivement ses muqueuses, il s'identifiait au poisson en manque d'eau. Les yeux du poisson sont "rouges de stupéfaction". Il y a un jeu de mot entre "cloporte" (qu'on voit au-dessous avec ses 7 paires de pattes) et "boueux" puisque Schlamm-Assel signifie "désastre" en yiddish. Il évoque ainsi l'antisémitisme qu'il vivait douloureusement (la presse nazie le traitait de "Juif de Galicie).


Avant l'éclair (1923), "ses images à bandes décomposent l'effet du clair-obscur. Tandis que les gradations chromatiques traduisent ici la menace de l'orage en s'illuminant progressivement, les flêches opposées figurent un mouvement et un contre-mouvement, dont la violence rappelle l'histoire géologique de la Terre".

Je n'ai pas trouvé d'images d'autres tableaux aux couleurs splendides, presque phophorescentes, comme Après l'inondation (1936), Une étoile se lève (1931) ou Oh! les rumeurs! (1939). Il y a aussi un magnifique Lever de la lune (1925) où la lumière surgit dans des ténèbres quadrangulaires, comme autant de multiples petits carrés scintillants.


Autant dire que même si cette exposition est de petite dimension par le nombre d'oeuvres présentées, il ne faut pas la manquer. En en profitant pour faire un tour dans la collection permanente de l'Orangerie:



Sans oublier Les Nymphéas de Monet évidemment qui sont idéalement exposés dans leurs salles étirées d'une couleur blanche immaculée:

Quelques vidéos pour voir ses oeuvres et une biographie en musique (la voix qui commente est un peu monocorde mais tant pis...):

Et je recommande vivement la lecture de cet ouvrage de Pierre Boulez qui est un passionné de Paul Klee et qui a trouvé des correspondances importantes et surtout des "solutions" pour nourrir sa propre créativité musicale. En tout cas une clé importante pour approcher l'univers de couleurs et de sons de Paul Klee...

Citation :

Paul Klee, bien souvent, est perçu comme l'artiste qui a tenté une transposition plastique de la musique. S'il ne fait pas de doute que sa formation musicale était des plus solides, que toute sa vie il a été passionné de musique, est-ce cet aspect de son œuvre qui peut intéresser un musicien ? Le passage de l'une à l'autre technique est-il un leurre ? Voilà à quoi répond le livre de Pierre Boulez. II découvre Klee en 1947, pendant le premier festival d'Avignon, alors qu'il a lui-même composé plusieurs œuvres. Les toiles accrochées dans l'exposition organisée par Christian Zervos l'ont tout de suite impressionné. Ce n'est pas tant les correspondances musicales qui le frappent que les problèmes posés par le peintre et les solutions qu'il y apporte. Quelques années plus tard, lisant les cours du Bauhaus, la particulière intelligence de Klee lui deviendra encore plus évidente. Sans être inspiré le moins du monde par lui, il rencontrera chez Klee une réflexion sur le phénomène de la création qui rejoint ses propres préoccupations.
Pierre Boulez ne pense pas qu'une quelconque traduction des formes musicales, surtout celles qui sont régies par les règles les plus strictes, puissent avoir une traduction picturale. Mais il est persuadé que tel type d'approche, telle manière de résoudre une difficulté dans les dimensions d'un tableau peuvent à profit se retrouver dans une autre discipline. Plus que tout, il admire le pouvoir de déduction du peintre, il souligne combien la réflexion à laquelle par là il a été lui-même conduit a, plus d'une fois, été une très efficace leçon de composition.

Merci pour ce fil et cette sublime présentation
ayant la possibilité de rejoindre Bâle dans un peu plus de 3 heures et Bern dans un peu plus de 4 heures (là il y a le grand Centre Paul Klee: ici), je me dis depuis des années, que je pourrais bien faire une petite visite d'au moins un de ces musées

kenavo a écrit:

Merci pour ce fil et cette sublime présentation
ayant la possibilité de rejoindre Bâle dans un peu plus de 3 heures et Bern dans un peu plus de 4 heures (là il y a le grand Centre Paul Klee: ici), je me dis depuis des années, que je pourrais bien faire une petite visite d'au moins un de ces musées

Voilà des destinations qui me tentent bien!!

Marko a écrit:

Voilà des destinations qui me tentent bien!!

oui.. surtout lors de l'ouverture du grand musée à Bern, j'avais vu pas mal de reportages à la télé et je m'avais promis de le visiter - aussi à cause de l'architecture

Surtout qu'ils ont besoin de visiteurs pour leur musée Klee, ils l'ont planté en plaine campagne (c'est vrai que c'est joli ) mais loins de la ville et maintenant ça pleure du peu de monde qui se déplace.
Une petite présentation du musée
vidéo Klée musée

rivela a écrit:

Surtout qu'ils ont besoin de visiteurs pour leur musée Klee, ils l'ont planté en plaine campagne (c'est vrai que c'est joli ) mais loins de la ville et maintenant ça pleure du peu de monde qui se déplace.

Plus personne ne veut faire d'effort, c'est triste! ça promet pour Le Louvre II à Lens!

Walter Benjamin voyait dans cette œuvre un ange repoussant « cette tempête que nous appelons le progrès ».

Plus je découvre ce peintre plus je trouve son univers merveilleux.

né un 18 décembre...

Il es beau ! C'est le signe du poisson qu'il a entre les deux yeux ?

je ne le pense pas...

Alors, c'est un Archéoptéryx !