Lecture en commun - Sofi Oksanen : Purge

traversay a écrit:

Bonne Purge à tous !

Lu une petite centaine de pages. Je vais attendre avec le commentaire, le temps de laisser décanter, jusqu'à demain. Mais pour le moment, je ne suis pas emballée...

Arabella a écrit:

Lu une petite centaine de pages. Je vais attendre avec le commentaire, le temps de laisser décanter, jusqu'à demain. Mais pour le moment, je ne suis pas emballée...

Au contraire de moi qui suis à fond dedans.
Une lecture qui promet de rester dans les coups de coeur 2010.


(je viens d'achever la première partie)

Arabella a écrit:

Lu une petite centaine de pages. Je vais attendre avec le commentaire, le temps de laisser décanter, jusqu'à demain. Mais pour le moment, je ne suis pas emballée...

Arabella, tu m'étonnes qu'à moitié

De mon côté je commence tout juste la seconde partie, comme Harelde. Ca se complique quelque peu. On apprend des choses-

Spoiler:

mais tout reste assez flou.

J'ai lu cette partie hier soir et je vais peut-être y revenir - les idées sont plus claires au réveil- mais en gros on pense à une histoire de jalousie entre deux soeurs, un bel Hans qui écrit son journal en cachette, et dépendant de Liide. bref ça s'étoffe mais s'épaissit aussi comme dans les bons thrillers (s ou pas Nezumi?) Je suis vraiment dedans!

J'en ai lu une soixantaine de pages, pour le moment ça me plaît.

Première Partie

Pour débuter une demie page écrite en 1949 par un paysan estonien, Hans, qui semble se cacher, et qui attend la venue d'Américains ou d'Anglais. Ce n'est pas clair, mais le sera plus sans doute par la suite.
Nous voilà en 1992, l'Estonie est de nouveau indépendante, et nous sommes avec une vieille femme, Aliide, qui vaque à des tâches domestiques, chasse une mouche. Et aperçoit quelque chose d'étrange par la fenêtre. Qui s'avère être une jeune femme, visiblement battues, dans un état lamentable. Alliide s'interroge, envisage qu'elle fasse parti d'une bande voulant la voler. Mais la fait rentrer chez elle, la nourrit, la lave et la fait dormir chez elle. Les deux femmes s'observent, chacune a des choses à cacher. Ce récit se met à alterner avec le récit de la jeune femme, Zara, son passé à Vladivostok, son départ en Allemagne, l'enfer de la prostitution. Et puis nous découvrons aussi des choses sur Aliide, son passé communiste, le fait qu'elle soit maintenant en butte à l'hostilité des gens du village. Et en fin de cette partie, nous avons la confirmation des liens qui unissent Aliide et Zara.

Impression mitigée pour moi. C'est relativement efficace, les courts chapitres font qu'il y a un rythme, et que l'on ne s'ennuie pas, même si la façon de Sofi Oksanen est plutôt répétitive. Donc on peut aussi passer sur des détails, sur les imperfections, et faire cette lecture en y trouvant de l'intérêt. Mais je trouve quand même pas mal de facilités, voire d'invraisemblances à l'ensemble. Aliide est visiblement une dure à cuire, que les autres n'émeuvent pas beaucoup. Et Zara lui apparaît d'emblée comme une source d'ennuies potentiels. Pourquoi la fait elle rentrer chez elle ? Par solitude, par gentillesse caché derrière sa carapace, ou d'autres raisons ? En fait, rien n'est vraiment suggéré, on peut certes faire des hypothèses, mais j'ai surtout eu la sensation, que la seule raison était que c'était indispensable pour que le roman continue. De même que Zara se fasse embarquer de cette façon, laisse supposer une naïveté tellement abyssale, voire une stupidité telle, que cela rend le personnage finalement pas trop attachant. Et sa façon de mentir de façon tellement énorme à Aliide, de façon répétitive m'a lassé. Et la révélation de leurs liens n'en ai vraiment pas une, puisque presque tout de suite, l'auteur nous dévoile que Zara cherche Aliide. Donc nous attendons qu'elle finisse pas le lui dire, ce qu'elle fait d'une façon relativement peu crédible avec la photo. Et là je m'attends à en savoir plus sur Aliide et sa soeur, j'imagine que probablement elle a très mal agi envers cette dernière, qu'elle doit être pour quelque chose dans son emprisonnement. Et donc une sorte de catharsis est à prévoir. Mais encore une fois, cela se lit sans trop de peine, donc je vais continuer, mais en espérant que Sofi Oksanen saura me surprendre et me convaincre d'avantage par la suite.

80 pages environ, et j'aime aussi

Arabella a écrit:

que Zara se fasse embarquer de cette façon, laisse supposer une naïveté tellement abyssale, voire une stupidité telle, que cela rend le personnage finalement pas trop attachant.

Combien de jeunes femmes de l'Est ont encore la naïveté, la candeur et aussi bien peu d'autre choix pour espérer s'en sortir que de se laisser embarquer comme elle?...
Stupidité?...Non, pas forcément...Le désespoir continue à faire rêver d'un impossible eldorado...

coline a écrit:

Arabella a écrit:

que Zara se fasse embarquer de cette façon, laisse supposer une naïveté tellement abyssale, voire une stupidité telle, que cela rend le personnage finalement pas trop attachant.

Combien de jeunes femmes de l'Est ont encore la naïveté, la candeur et aussi bien peu d'autre choix pour espérer s'en sortir que de se laisser embarquer comme elle?...
Stupidité?...Non, pas forcément...Le désespoir continue à faire rêver d'un impossible eldorado...

Alors je ne sais pas comment dire ça, mais quelque chose m'a vraiment gêné dans la façon de Sofi Oksanen d'évoquer cette situation. Peut être que parce que l'on ne sait rien de Zara, et on la voit tout de suite faire preuve de cette naïveté, alors que l'auteur place bien visible devant le lecteur tous les éléments pour qu'il voit bien ce que se passe (la Volga noire, les deux "gardes du corps", l'invraisemblable de ce que raconte Oksanka..) et en même temps Zara elle ne voit rien. Et comme par ailleurs on ne sait pas grand chose d'elle, qui pourrait nous faire vraiment comprendre pourquoi et comment elle se laisse embarquer, oui on peut imaginer le désespoir, le manque de perspective, tout ce que l'on veut, mais ce n'est pas Sofi Oksanen qui nous donne quoi que ce soit, on doit imaginer les choses par nous nous mêmes, et rester sur les représentations que l'on a déjà. Et comme ce genre de faits de société ont déjà donné lieu à des images médiatiques, on en reste finalement à ça, chaque lecteur est renvoyé aux images médiatiques plus ou moins schématiques qu'il possède sur la question, et l'auteur touche à un sujet grave et important, mais en ne nous donnant finalement aucune clé pour mieux le comprendre, pour l'appréhender. Je trouve cela frustrant, et cela m'agace qu'on utilise ce genre de situations, tragiques, de cette façon, sans une vraie réflexion sur la question. C'est limite un peu racoleur, on donne un peu d'émotion au lecteur à bon compte, parce qu'encore une fois, rien de vraiment construit sur cette question. Et du coup j'ai refusé de me laisser émouvoir de cette façon manipulatrice, et j'ai peut être été un peu dure dans ma façon de percevoir Zara.

Arabella a écrit:

C'est limite un peu racoleur, on donne un peu d'émotion au lecteur à bon compte, parce qu'encore une fois, rien de vraiment construit sur cette question. Et du coup j'ai refusé de me laisser émouvoir de cette façon manipulatrice, et j'ai peut être été un peu dure dans ma façon de percevoir Zara.

Ah ! des commentaires comme on aimerait en lire plus souvent !
Merci Arabella !
Je m'y attendais à moitié, quand même.

aeriale a écrit:

Arabella, tu m'étonnes qu'à moitié

eXPie a écrit:

Je m'y attendais à moitié, quand même.

Je deviens vraiment trop prévisible décidément

C'est curieux Arabella parce que tout ce qui te dérange dans cette "première partie" est quand même sensé s'expliciter et donner de l'ampleur à l'ensemble à l'arrivée... Donc tes réticences devraient peut-être attendre d'avoir une vision d'ensemble, non? Elle a construit son récit comme une pièce de théâtre dont les motivations des protagonistes nous seraient en partie suggérées dès le début pour mieux découvrir d'autres facettes ensuite. Bien sûr qu'on pressent où elle veut en venir et qu'on se doute qu'il y aura un climax cathartique à la fin, la manipulation existe et elle n'est pas si épaisse que ça. Mais l'intérêt réside surtout dans la manière dont elle nous y conduit à cette rédemption (cette "purge" dans un des ses multiples sens). C'est le propre de beaucoup de romans d'ailleurs et même parmi les meilleurs que de raconter une histoire simple, parfois prévisible ou même un peu stéréotypée , mais c'est l'humanité des personnages, leur densité et l'univers décrit qui compte (je pense récemment à "Des Souris et des hommes" de Steinbeck dont on peut presque anticiper le déroulement et surtout la fin. Mais quelle force dans ce petit livre!) Evoquer l'histoire traumatique d'un pays à travers un drame individuel est intéressant et je trouve que la manière dont elle décrit le quotidien de ces femmes l'éloigne d'un récit calibré qui tomberait dans une imagerie convenue. Et il y a du rythme, une construction de plus en plus intense. C'est mieux que du mélo tire larme (ou qu'un produit bien formaté plutôt).

Oui, évidemment, là ce n'est que la première partie, j'attends la suite pour me faire une opinion définitive. Mais même s'il y a des qualités dans cette première partie, je suis un peu déçue, à mon sens les personnages manquent de profondeur, et donc d'humanité. Et puis le côté prévisible de ce qu'annonce cette première partie me gêne un peu. Mais comme je l'ai écrit, j'espère que l'auteur me surprendra positivement par la suite.

Arabella a écrit:

Oui, évidemment, là ce n'est que la première partie, j'attends la suite pour me faire une opinion définitive. Mais même s'il y a des qualités dans cette première partie, je suis un peu déçue, à mon sens les personnages manquent de profondeur, et donc d'humanité. Et puis le côté prévisible de ce qu'annonce cette première partie me gêne un peu. Mais comme je l'ai écrit, j'espère que l'auteur me surprendra positivement par la suite.

Le suspens est terrible!!

Marko a écrit:

Le suspens est terrible!!

J'ai lu la deuxième partie, mais j'en parlerai demain. Pour faire durer le suspens

Et pour laisser le temps aux autres Parfumés qui participent à cette lecture commune de laisser leurs impressions sur le début....