Biographie de l'auteurSusana Fortes est née en 1959 à Pontevedra. À Barcelone, elle étudie l'histoire et la géographie. En 1994, elle publie un premier roman et obtient le prix Nuevos Narradores. Des tendres et des traîtres est son premier roman traduit en français.
source:EditeurFortes SusanaEn attendant Robert CapaMagnifique écriture et traduction réussie pour cet excellent roman sur le photojournalisme !
Rappel des faits :
Gerda Pohotylle, juive polonaise, antifasciste, fuit l’antisémitisme allemand et s’exile avec sa meilleure amie Ruth à Paris en 1933. Gerda et son Leica sillonnent Paris. Elle rencontre André Friedmann, juif hongrois ayant également fui Berlin et ami de David Seymour (Chim) un autre réfugié.
L’amour de Gerda et d’André est sensuel, passionnel, fougueux.
Susana Fortes nous entraîne dans les évènements de 1933 à 1936, de Paris à l’Espagne et nous raconte le quotidien des deux photographes où nous croisons Man Ray, James Joyce et bien d’autres intellectuels et artistes…
Devant le manque de commandes, Gerda et André inventent un célèbre photographe américain : Robert Capa.
Robert Capa entraîne la reprise du travail et André peut donc incarner au grand jour le personnage fictif alors que Gerda prend le pseudonyme de Gerda Taro en hommage à la superbe actrice.
En 1936, tous deux couvrent la guerre d’Espagne. Moi qui aime les personnages incarnés, je suis dans la ligne de mire des tirs, je respire la poussière des explosions, je mange la terre des combats tandis que Robert et Gerda captent la vie comme la mort.
Susana Fortes, très inspirée, nous dépeint la passion de Gerda au mépris de sa vie pour l’acte photographique !
Un gros coup de cœur pour moi !
Extrait :
P27 : Le Capoulade, c’était un sous-sol confiné au numéro 63 de boulevard Saint-Michel. Depuis des mois s’y retrouvaient des militants de gauche de toute l’Europe, dont beaucoup d’Allemands, certains du groupe de Leipzig, comme Willi Chardack. Tard dans la soirée, l’endroit était plongé dans la pénombre, dans une ambiance de catacombes. Ils étaient tous là : les impatients, les sévères, les durs, les partisans de l’action directe, les confiants. Les regards enflammés, le visage crispé, la voix en sourdine pour dire qu’André Breton avait décidé d’entrer au Parti communiste ou pour citer un éditorial de la Pravda, enchaînant les cigarettes, tels de jeunes corsaires, certains citant Marx, d’autres Trotski, dans une étrange dialectiques de concepts et d’adjurations, de théories et de controverses. Gerda ne participait pas au débat idéologique. Elle restait à l’écart, concentrée en elle-même. Elle n’y comprenait pas grand-chose de toute façon. Elle était là parce qu’elle était juive, antifasciste, et peut-être aussi par une sorte d’orgueil qui cadrait mal avec ce langage tout en axiomes, citations, anathèmes et dialectique du matérialisme historique.