Parfum de livres… parfum d’ailleurs
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 Barbey d'Aurevilly

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MessageSujet: Re: Barbey d'Aurevilly    Barbey d'Aurevilly  - Page 2 EmptyLun 13 Sep 2010 - 20:44

Et oui, le meilleur est devant toi oui
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MessageSujet: Re: Barbey d'Aurevilly    Barbey d'Aurevilly  - Page 2 EmptyVen 17 Sep 2010 - 5:50

Au sujet de " Chevalier Des Touches ":
J'ignorais tout de cet auteur jusqu'à il y a peu. Bien décidé à entreprendre l'oeuvre, le hasard m'a mis dans les mains ce livre. Dès les premières pages j'ai bien senti que j'abordais quelque chose qui allait m'emmener plus loin qu'un simple plaisir de lecture. Barbey d'Aurevilly a cet indéniable talent de pouvoir en quelques mots bien choisis et placés de planter un décor, une ambiance, un fait d'arme. Comment ne pas tomber sous le charme de ces descriptions de cette ville de Normandie pluvieuse et ténébreuse. Le conciliabule, au coin du feu de ces vieillards, qui fait la trame du roman vaut à lui seul la lecture. Les descriptions des visages, des tempèraments pénétrent le lecteur et impriment une ambiance qui enveloppe le récit d'un charme envoûtant. J'ai eu le sentiment d'être au carrefour de la littérature. Est-ce Jules qui emprunte ou tous les autres qui se sont inspirés de lui ? Je l'ignore, mais il est certain que cet auteur trop peu connu, à mon sens, mérite toute notre attention. On peut lire ce livre de plusieurs manières, roman historique, roman d'aventures, roman de résitance. Car on sent bien dès le début que ces vieillards vont nous enseigner qu'ils sont les témoins d'un passé héroique mais révolu. Que l'histoire en marche a écrasé ces résistants qui ont lutté pour des idées qui n'ont pas triomphé. Roman sur la fidélité d'un groupe à un homme, d'un peuple à son histoire, fidélite au son roi jusqu'à la mort. Oui décidément un beau livre, une belle leçon de courage et d'amour.
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MessageSujet: Re: Barbey d'Aurevilly    Barbey d'Aurevilly  - Page 2 EmptyMer 18 Juil 2012 - 9:48

J'ai lu Le Rideau cramoisi hier soir.

J'ai découvert la plume de l'auteur avec une réelle gourmandise. Une belle profondeur, un beau talent de conteur, par exemple lorsqu'il évoque les impressions du voyageur (je m'y suis retrouvée). Une note de lecture cite Les Fenêtres, de Baudelaire :

Citation :
Celui qui regarde du dehors à travers une fenêtre ouverte, ne voit jamais autant de choses que celui qui regarde une fenêtre fermée. Il n'est pas d'objet plus profond, plus mystérieux, plus fécond, plus ténébreux, plus éblouissant qu'une fenêtre éclairée d'une chandelle. Ce qu'on peut voir au soleil est toujours moins intéressant que ce qui se passe derrière une vitre. Dans ce trou noir ou lumineux vit la vit, rêve la vie, souffre la vie.
Par delà des vagues de toits, j'aperçois une femme mûre, ridée déjà, pauvre, toujours penchée sur quelque chose, et qui ne sort jamais. Avec son visage, avec son vêtement, avec presque rien, j'ai refait l'histoire de cette femme, ou plutôt sa légende, et quelquefois je me la raconte à moi-même en pleurant.
Si c'eût été un pauvre vieux homme, j'aurais refait la sienne tout aussi aisément.
Et je me couche, fier d'avoir vécu et souffert dans d'autres que moi-même.
Peut-être me direz-vous : « Es-tu sûr que cette légende soit la vraie ? » Qu'importe ce que peut être la réalité placée hors de moi, si elle m'a aidé à vivre, à sentir que je suis et ce que suis ?

Beaucoup de malice dans sa façon de conter, mais aussi dans les dialogues, la manière qu'a le narrateur de tirer, l'air de rien mais très lucidement, les vers du nez de son interlocuteur.

En revanche, je n'y vois pas la misogynie qu'on lui prête parfois. Au contraire, ici, la femme est "masculinisée" (par rapport à l'époque), allant même jusqu'à avoir les "cheveux coupés à la Titus", un empereur romain (rien de moins) dont elle a aussi toute l'audace. Et c'est plutôt l'homme qui en prend pour son grade, pauvre créature craintive et désemparée sous ses airs "plastronnants".

Je m'interroge sur la référence au tableau de Velasquez, L'Infante à l'épagneul, pour décrire Albertine. Faut-il y voir une des nombreuses évocations de l'inceste ?
Barbey d'Aurevilly  - Page 2 Velasq10

J'aime bien, aussi, ces lectures grâce auxquelles j'apprends plein de choses : Joseph et Potiphar, le busc, le gril de St-Laurent...

J'ai pensé à Laclos et à Mirbeau. D'Aurevilly le dandy en profite aussi pour égratigner les Romantiques.

Enfin, j'ai relevé une bien jolie phrase :

Citation :
La veille d'un être humain - ne fût-ce qu'une sentinelle -, quand tous les autres êtres sont plongés dans cet assoupissement qui est l'assoupissement de l'animalité fatiguée, a toujours quelque chose d'imposant.
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MessageSujet: Re: Barbey d'Aurevilly    Barbey d'Aurevilly  - Page 2 EmptyMer 25 Juil 2012 - 10:54

Le bonheur dans le crime

Là encore, Barbey d'Aurevilly nous offre un beau portrait de femme à qui il distribue de nombreux attributs masculins pour l'époque : intelligence supérieure, adresse physique, indépendance, fierté, audace, liberté. Là encore, la femme est plus libre, plus généreuse, plus forte que l'homme. C'est elle qui ose, qui prend des risques, qui assument ses désirs alors que l'homme les subit.

Même si l'auteur peste après ce genre de femme : « elles font bien tout ce qu'elles veulent de leurs satanés corps, ces couleuvres de femelles, quand elles ont le plus petit intérêt à cela » (je me suis interrogée sur le pluriel accordé à « leurs satanés corps »), on sent bien tout du long l'admiration qu'il leur porte : « Il fallait, certes, qu'elle l'aimât (...) pour avoir tout planté là d'une existence exceptionnelle, qui pouvait flatter sa vanité (...) Lui , l'aimant, jouait certainement moins gros jeu qu'elle. » Aussi, je reste sceptique sur la réputation de misogynie de Barbey d'Aurevilly.

La société en prend aussi pour son grade, plus scandalisée par un mariage hors norme que par un crime. Jusqu'à la femme trompée, dame du monde, qui est habitée par la jalousie et la colère mais qui va souhaiter protéger « les gens comme il faut du pays ».

Cette fois, j'ai trouvé un peu lassants les stratagèmes du conteur qui visent à retarder l'intrigue et à différer les rebondissements. En revanche, les nombreux éléments qui restent non explicités ne me gênent pas, je trouve même cela d'une grande modernité.
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MessageSujet: Re: Barbey d'Aurevilly    Barbey d'Aurevilly  - Page 2 EmptyVen 14 Fév 2014 - 15:54

Le Chevalier des Touches

Hexagone a écrit:
Au sujet de " Chevalier Des Touches ":
J'ignorais tout de cet auteur jusqu'à il y a peu. Bien décidé à entreprendre l'oeuvre, le hasard m'a mis dans les mains ce livre. Dès les premières pages j'ai bien senti que j'abordais quelque chose qui allait m'emmener plus loin qu'un simple plaisir de lecture. Barbey d'Aurevilly a cet indéniable talent de pouvoir en quelques mots bien choisis et placés de planter un décor, une ambiance, un fait d'arme. Comment ne pas tomber sous le charme de ces descriptions de cette ville de Normandie pluvieuse et ténébreuse. Le conciliabule, au coin du feu de ces vieillards, qui fait la trame du roman vaut à lui seul la lecture. Les descriptions des visages, des tempèraments pénétrent le lecteur et impriment une ambiance qui enveloppe le récit d'un charme envoûtant. J'ai eu le sentiment d'être au carrefour de la littérature. Est-ce Jules qui emprunte ou tous les autres qui se sont inspirés de lui ? Je l'ignore, mais il est certain que cet auteur trop peu connu, à mon sens, mérite toute notre attention. On peut lire ce livre de plusieurs manières, roman historique, roman d'aventures, roman de résitance. Car on sent bien dès le début que ces vieillards vont nous enseigner qu'ils sont les témoins d'un passé héroique mais révolu. Que l'histoire en marche a écrasé ces résistants qui ont lutté pour des idées qui n'ont pas triomphé. Roman sur la fidélité d'un groupe à un homme, d'un peuple à son histoire, fidélite au son roi jusqu'à la mort. Oui décidément un beau livre, une belle leçon de courage et d'amour.

J'avais une prévention, ancienne et durable, à l'encontre de Barbey d'Aurevilly, je ne me rappelle plus au juste pourquoi, ou qui me l'a ancrée dans le crâne. Toujours est-il que Barbey d'Aurevilly c'était barbant révolu, classement définitif.

Quelle erreur !
Mais aussi quel bonheur inattendu que cette lecture du Chevalier des Touches !
Vous aimez les charpentes solides, manufacturées et estampillées roman français du XIXème ?
Vous aimez le genre réaliste, allons jusqu'à réaliste balzacien ?
Vous aimez les confins de l'historicité, du romanesque, de l'épique, et l'action, le rythme ?
Ce roman est fait pour vous !

Barbey d'Aurevilly a mis la bagatelle de douze années pour le rédiger: c'est calibré, poli, réfléchi, fini au sens "finitions soignées".
Et, le fait est qu'en dépit d'une introduction que d'aucuns peuvent -ou pourraient- trouver longuette, au petit jeu de retirer dix pages de l'ouvrage (sur la double centaine environ que compte le livre), je sèche, je n'en retranche pas une. Plume de haute qualité que celle dudit "Connétable des Lettres" (sic).

Le corps tout entier du roman est constitué par un récit, avec un narrateur parmi les personnages, qui sont donc l'auditoire, à l'exception d'Aimée de Spens, atteinte de surdité, présente donc tout en étant écartée, mais qui est elle même un des personnages principaux de la narration de la récitante.

(Et son rôle est loin d'être décoratif, accessoire: c'est en fait tout le contrepoint romanesque, "noble", à l'épopée soldatesque; au passage magnifique trouvaille de Barbey, en matière de technique littéraire - de procédé d'équilibrage.)

Extrait, subtil et chargé jusque-ce-qu'il faut, ne ratez pas les descriptions des éclairages (blanchissait-sombre, le clair, l'obscur, "le dernier rayon vacillant" - le blanc des chouans sur le bleu de la république figuré par la couleur de la houppelande de la sentinelle, ainsi que les sens (dévaler-monter, etc...), voyez les virgules dans la phrase descriptive de la sentinelle qui rendent compte de son va-et-vient, et tout ce qui souligne à merveille l'action:
Chapitre La seconde expédition a écrit:
   "Nous descendîmes, comme des gens qui dévalent à l'abîme, cette rue qui va de la prison à la place de l'échafaud, et qu'on appelle dans toute la ville la rue Monte-à-regret, cette rue qu'il fallait à tout prix empêcher des Touches de monter le lendemain ! La prison blanchissait au bout de cette espèce de boyau sombre, sur une autre place. Nous nous arrêtâmes...le temps de respirer".
  Elle contait comme quelqu'un qui a vécu de la vie de son conte. L'abbé et le baron, eux, ne respiraient plus.
  "Ah ! c'était le moment -fit-elle -, - le moment terrible où on va casser et où l'on serait perdu si, en la brisant, une seule vitre allait faire du bruit !... La sentinelle, dans sa houppelande bleue, se promenait nonchalamment, son fusil penché dans l'angle de son bras, de l'un à l'autre côté du porche, comme un chapier d'église à vêpres. Le dernier rayon vacillant de cette lune, qui devait ressembler une heure après à un chaudron de bouillie froide et qui nous rendit ce dernier service, tombait à plein dans la figure du soldat en faction et l'empêchait de distinguer nos ombres mobiles dans l'ombre arrêtée des maisons."

C'est dénué de la moindre importance, mais...:
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MessageSujet: Re: Barbey d'Aurevilly    Barbey d'Aurevilly  - Page 2 EmptyLun 17 Mar 2014 - 14:23

L'Ensorcelée (1851)

Difficile d'ajouter sans redites à la lecture commune (voir lien de Queenie)  sourire  !

Queenie a écrit:
Je met un petit lien ici pour rappeler à ceux que ça intéresse qu'il y a un fil spécial autour d'une lecture commune de L'ensorcelée : cliquez ici

L'entame du roman est prégnante, l'atmosphère, disons Mc Bethienne, a une réelle envergure, bien envoyée autour du narrateur et de Maître Tainnebouy. Puis le charme continue à opérer au fur et à mesure de l'entrée en scène des personnages principaux (le pâtre-sorcier, Jeanne de Feuardent/Maîtresse le Hardouey, l'abbé de la Croix-Jugan, Maître le Hardouey) et secondaires (les commères, Clotilde/La Clotte, etc...).
L'édification reste forte, mais déjà je me surprends à m'interroger (oh là là...mais comment va-t'il pouvoir terminer tout ça  Surprised  ?) tant l'édifice projeté paraît incommensurable sur une telle envergure de fondations.

De plus, sa prose est certes surannée, encore qu'on peut en discuter, toutefois elle a de réelles splendeurs, surtout -à mon goût- lors des phases écrites staccato (par exemple l'évocation de la jeunesse de Louisine, ou encore la peinture de La Clotte lors des funérailles de Jeanne, etc...), et elle reste toujours très alerte, même à nos yeux de lecteurs du XXIème siècle.

Les caractères -depuis les portraits descriptifs jusqu'aux tréfonds psychologiques attribués- indiquent une réelle maestria, qui classent Barbey-Le Connétable des Lettres parmi les tout grands du (pourtant fourni et haut-niveau) roman français du XIXème.

Sur les caractères, juste un ajout en sus de ce qui a été posté sur la lecture commune: l'abbé de la Croix-Jugan ne vous évoque-t'il pas l'un des Cavaliers de la Révélation de Jean (plus connue en France sous le terme "Apocalypse selon Saint-Jean")
Spoiler:
Barbey d'Aurevilly  - Page 2 Ob_2ee1f1eaab7947c3bfc9fa35c0fd768d_4horseman
La couleur de la robe du cheval telle que Barbey l'a choisie indique le troisième cavalier (cheval noir), cependant l'abbé de la Croix-Jugan fait plutôt penser au cavalier qui chevauche le cheval roux...

La plupart des scènes sont exceptionnelles, et constituent, pour l'amateur que je suis, un grand moment de lecture (la lande de Lessay (chapitre I & II), Marie Hecquet, le chouan blessé et les Bleus (chapitre III), les messes (vêpres Chapitre IV, la messe de Pâques de l'abbé de la Croix-Jugan Chapitre XIV, les funérailles de Jeanne et l'extrême-onction à Clotilde par l'abbé de la Croix-Jugan Chapitre XIII, etc...).

Mais, il y a un mais...
Bien que l'écriture soit flamboyante et culmine parfois au chef-d'oeuvre, l'ouvrage pâtit -à mon sens- par non-évacuation des questions en suspens, de sorte que le soufflé retombe un peu mal à propos à la fin (je rejoins, en cela, ce qui a été dit en lecture commune):
Ainsi:
* La peine de justice subie par Augé pour le crime de Clotilde/La Clotte semble bien faible, ou carrément irréaliste, compte tenu de la justice de l'époque.
beaucoup plus important:
* Barbey "dégage" Jeanne hors du roman, par le procédé classique du décès brutal et mystérieux, mais ne désigne pas de coupable, même par sous-entendu.
Bon, OK. Toutefois, histoire de faire les questions et les réponses, alors admettons:
on arguera peut-être que le pâtre-sorcier découvrant le corps, léchant son couteau, puis lapant l'eau constitue une désignation qui se suffit, littérairement, à elle-même.
* La mort de l'abbé de la Croix-Jugan est annoncée beaucoup trop tôt dans le Chapitre XIV, qui pourtant -j'allais écrire en dépit de cet handicap rédhibitoire- est à mon avis le meilleur de tout le roman, ce qui n'est pas peu dire: curieux de la part d'un conteur de l'envergure de Barbey d'Aurevilly !
* Le final, rapiécé tant bien que mal avec l'univers fantastique et ensorcelé que laissait entrevoir l'entame, est décevant; Barbey a fait preuve d'une toute autre maîtrise de construction, et d'effets, dans, par exemple, le Chevalier des Touches !

Tout de même, je ne reste pas sur ce "mais..." dépréciatif, de peu de poids comparé à l'ensemble: ce sont, mettons, de petits regrets, rien de plus, cette Ensorcelée reste bien sûr une lecture à recommander !
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MessageSujet: Re: Barbey d'Aurevilly    Barbey d'Aurevilly  - Page 2 EmptyVen 5 Juin 2015 - 15:20

Le bonheur est dans le crime, et La vengeance d'une femme, deux nouvelles extraites du recueil Les Diaboliques.

Il va falloir que je me procure le recueil intégral, car j'ai vraiment aimé ces deux nouvelles. L'auteur a une patte géniale, ça se lit vraiment bien au vu de l'époque, et les réflexions sont osées si on les replace dans leur contexte. Ce qui est finalement drôle, c'est qu'il se couvrait avec le catholicisme, déclamant qu'en énonçant des idées scandaleuses, il le faisait pour la vertu catholique avant tout (de ce que j'ai pu en lire rire ).

Dans la première nouvelle, il nous conte comment un couple peut s'épanouir après un crime commis sans remord, et dans la seconde une femme prête à tout pour venger le meurtre de son amant. Le style est brillant, et les mots sont assemblés avec brio. D'habitude je suis vraiment insensible aux histoires de nobles, mais là il a su me faire accrocher par sa plume incroyable.
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MessageSujet: Re: Barbey d'Aurevilly    Barbey d'Aurevilly  - Page 2 EmptyVen 5 Juin 2015 - 19:03

La première nouvelle va bien plus loin qu'un crime commis sans remord. Barbey D'aurevilly suggère que le risque qu'entraîne le lent l'empoisonnement la comtesse de Savigy, ainsi que la souffrance et la mort infligées à cette occasion, provoquent chez le couple au centre de l'histoire, de l'excitation au sens propre du terme, et que cela cimente leur couple, et forme la base de ce fameux bonheur. Cela met en évidence l'aspect amoral de Barbey, car il raconte l'histoire sans se positionner du point de vue moral, et son narrateur éprouve incontestablement une sorte de fascination pour les deux amoureux, surtout pour Mlle Hauteclaire.
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MessageSujet: Re: Barbey d'Aurevilly    Barbey d'Aurevilly  - Page 2 EmptyVen 5 Juin 2015 - 19:20

Oui tu as tout à fait raison là-dessus, c'est même l'extase apparemment, le bliss rire (j'ai été très succinct dans ma description). respect
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MessageSujet: Re: Barbey d'Aurevilly    Barbey d'Aurevilly  - Page 2 EmptyDim 2 Aoû 2015 - 22:13

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Le Chevalier des Touches

C'est une drôle de cuisine qui nous fait passer d'une assez laborieuse réunion de salon à des coups de mains héroïques façon commando. S'y mêle un sens consommé et amusé de l'exagération avec un savoir faire évident d'en l'art de faire patauger la tambouille pour faire monter la sauce. Étonnamment quand l'action prend le dessus dans ce récit indirect des événements si c'est par moments assez enlevé et relevé on reste souvent comme un coup en dessous et un rien agacé par la clinquante gloriole affichée.

Dit comme ça, ça ne fait pas forcément envie. Avec le reste des ingrédients je ne sais pas trop ce qu'il en est car je n'ai pas démesurément accroché à ma lecture mais ce sont des ingrédients qu'on ne peut pas passez sous silence.

La narratrice d'abord, laideron autoproclamé et "homme" parmi les Douze (les libérateurs du chevalier des Touches), le fait que nos "vieux" qui profitent de cette histoire ne soient dans l'ensemble pas très glamour est une chose, que nos héros : des Touches et l'énigmatique tombeur de ces dames soient décrits sous des traits volontiers féminins et qu'ils soient aussi frais que des morceaux de banquise en est une autre.

On se demande parfois tout ce qui se fait à l'envers dans cette fichue histoire dans laquelle on garde la tête toujours un peu ailleurs du côté de la sourde Aimée de Spens qui entretient un suspens plus efficace que celui de l'action. Et pour autant à la fin on ne jette pas tout, l'idéalisme n'a pas l'air de celui resservi jusqu'à plus soif... mais on ne sait pas forcément ce qui est sérieux et ce qui l'est moins.

Les notes du Folio aident à ne pas passer trop à côté des bizarreries de l'ouvrage et éclairent un peu sur sa conception et la part autobiographique du contexte de l'histoire entendue et du rapport à l'histoire, la chouannerie et certains des personnages du récit.

Drôle de truc...
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MessageSujet: Re: Barbey d'Aurevilly    Barbey d'Aurevilly  - Page 2 EmptyLun 3 Aoû 2015 - 9:05

Drôle do commentaire auquel je ne suis pas sûre d'avoir compris grand chose. rire

Barbey d'Aurevilly est un drôle de personnage, né dans une période historique complexe et dont l'oeuvre se comprend mieux, en ayant connaissance du contexte, ce livre tout particulièrement. Donc les notes peuvent être utiles. Je ne suis pas sûre qu'il soit pour toi, dans sa démesure, son baroque flamboyant associé à quelque chose de glacé et coupant. Ecrivain de la démesure et des contradictions.
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MessageSujet: Re: Barbey d'Aurevilly    Barbey d'Aurevilly  - Page 2 EmptyLun 3 Aoû 2015 - 12:46

J'avais bien aimé la lecture commune (l'ensorcelée ?).

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MessageSujet: Re: Barbey d'Aurevilly    Barbey d'Aurevilly  - Page 2 EmptyLun 3 Aoû 2015 - 18:44

Il y avait eu en effet une lecture commune de l'Ensorcelée.

Je ne sais plus pourquoi, Le chevalier des Touches m'avait tellement déçu, qu'a-t-il de différents des autres livres de l'auteur. Et ce n'est pas très motivant de faire une relecture pour voir pourquoi on n'aime pas un livre. dentsblanches

Je ne peux que te conseiller d'essayer d'en lire d'autres, Une vieille maîtresse, Un prêtre marié, Les diaboliques....Même si L'Ensorcelée reste mon préféré, mais je crois que c'était le premier que je lisais.
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MessageSujet: Re: Barbey d'Aurevilly    Barbey d'Aurevilly  - Page 2 EmptyLun 3 Aoû 2015 - 21:24

J'y reviendrai de toute façon. cat
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MessageSujet: Re: Barbey d'Aurevilly    Barbey d'Aurevilly  - Page 2 EmptyMar 4 Aoû 2015 - 17:47

Une vieille maîtresse
Roman, publié en 1846 (deux parties), 400 pages environ.
Barbey d'Aurevilly  - Page 2 Page9-308px-Barbey_d%27Aurevilly_-_Une_vieille_maitresse%2C_tome_1.djvu
édition de 1851.

D'abord, mentionnons ce riche site, sur lequel vous trouverez d'ailleurs un lien vers Une vieille maîtresse, pour web-lecteurs (cliquez sur "textes intégraux"). Mais je vous conseille particulièrement les "textes sur Barbey", de haute volée, toujours dans la rubrique "textes intégraux". Leur inconvénient est qu'ils intimident au moment de laisser un petit commentaire ici !

Il faut bien dire que ce roman passa relativement inaperçu à sa sortie, et même plus tard, bien que Barbey eût eu soin d'allumer une bien ancienne, éprouvée et inoxydable mèche, qui fonctionne, toujours aujourd'hui: le choc, le potentiel de scandale, d'atteinte à la bien-pensance (et/ou bienséance).

En effet, le Connétable des Lettres est un pauvre, et un pauvre roturier provincial. Ceux qui se réclamèrent de lui (Léon Bloy et consorts) le portèrent à la lumière, en chef d'école, alors qu'il atteignait 80 ans et était sur le point de trépasser...
Barbey n'a pas connu une traversée du désert, non, il n'a vécu qu'au désert.

A chaque fois quelque chose cloche. Romantique lors que c'était passé de mode, dandy sans le sou (ce qui ne fonctionne pas, pour un cas similaire voir Baudelaire), catholique tardif, royaliste en république, indécrottable et constant exégète du brummelisme et du byronisme, bien après qu'ils aient cessé d'être considérés, à l'heure où plus personne n'en faisait cas...  

Barbey ? Original amuse-gogos pour passants parisiens, tout au long du XIXème, par sa mise, avec sa face ravinée pour ne pas dire ravagée, son port altier, son allure cavalière désuète, sa voix assurée et martiale de polémiste aguerri, son chapeau à rebords à velours cramoisi que nul depuis le temps des mousquetaires n'arborait plus, cravate de dentelle façon dernière distinction de noble embastillé, redingote début XIXème à jupe bouffante, pantalon-collant XVIIIème à galon doré...    

Arrivé à Paris, le Paris de la Monarchie de Juillet (bourgeois, voltairien, constitutionnel), Barbey a, certainement, bâti son allure, sa réputation, ses prises de position par rejet. En politique, la tradition familiale est un royalisme discret, bien sûr déjà suranné, et surtout mêlant discrétion et goût du pacifisme, version bonheur caché: Avant tout, éviter ce qui fâche en général, et les problèmes en particulier.  

Le sujet: Ryno de Marigny, homme du monde, trentenaire, obtient la main d'Helmangarde , qu'il aime vraiment fortement, Helmangarde est une convoitée, riche et spirituelle beauté du temps, de haute noblesse de surcroît...
Ryno s'ouvre auprès de la grand-mère d'Helmangarde, la marquise de Flers, de sa vie passée auprès de Vellini, maîtresse avec laquelle il a, pour l'heure, rompu. Le mécanisme d'une sorte de servitude subjuguée, dépassant la volonté du brillant Ryno envers cette maîtresse vieillie, enlaidie, appauvrie, qu'il a, au fond, en horreur constitue le corpus le plus fascinant de cet ouvrage.

Autant Barbey excelle (je le pense vraiment !) dans toutes les scènes se déroulant à Paris et en Normandie, autant son évocation de l'Espagne, de l'Andalousie (nécessaire au personnage de Vellini) est fausse, ratée.

L'horripilant toréador mis pour torero (mais commun au XIXème en France, voir "Carmen", de Bizet), l'"église" de Malaga quand il s'agit d'une cathédrale, le père toreadorro maure au lieu de, au plus probable, gitan, un emprunt à l'italien sur une locution censée être espagnole, et les traits caractéristiques de Vellini qui sont -vogue orientalisante de l'époque oblige- largement plus empruntés à l'autre côté de la méditerranée qu'à l'Andalousie, tout cela fait un peu beaucoup à une époque de roman sinon tout à fait naturaliste, du moins réaliste et censé être particulièrement solide sur ses sources et la crédibilité des personnages.  

Le pseudonyme de Vellini lui-même n'est pas ibérique pour deux sous, mais là, il y a une explication, c'est du vécu, un renvoi à un amour de Barbey présentant de grandes similarités; en effet, la préface (de Philippe Berthier) nous indique que, dans la Correspondance Générale de Barbey d'Aurevilly, on trouve cet extrait de lettre à son ami Trébutien:
Citation :
Vous avez bien deviné pour Vellini; c'était même Vellini qu'elle s'appelait. Je n'ai presque rien inventé du tout...seulement cela s'est brisé. Cela a été long, mais cela s'est brisé, comme les sucriers qu'elle me jetait à la tête. Le Roman n'a pas de fin, mais la réalité en a eu. Et, depuis, sur les débris, sur la lave, sur la cendre de tout cela, l'éternel volcan s'est mis à bouillonner de plus belle, et je crois que les années, les expériences de la vie, tout ce qui éteint les âmes communes, augmentent la rage de ses feux!"  

Dans une autre lettre de sa Correspondance Générale on trouve ce passage, repris en quatrième de couverture de l'édition Flammarion GF 1996 (conseillée, très annotée et c'est nécessaire, surtout du point de vue des références, pas ordinaires et parfois succulentes):

Citation :
J'ai aimé trois ans une femme horrible [...] Elle était taillée pour le crime (elle en avait commis) et quand je la tenais sous moi, il me semblait que je tenais la Métempsychose de Lucrèce Borgia [...]; le Diable, qui est un fier crocheteur, m'avait cadenassé et bouclé à ce monstre, de la plus pure et de la plus calme Beauté. J'en étais assoiffé. Mon amour ressemblait à de l'ivrognerie.

Si les caractères de Ryno de Marigny et d'Hermangarde peuvent être assez conventionnels, je raffole des trois vieillards rescapés du XVIIIème (dont l'un est un personnage central au roman). On sent toute la joie éprouvée par Barbey de les prétexter pour faire revivre un peu de la langue, un peu de l'attitude, un peu de l'esprit de nobles de Cour XVIIIème, tout un monde si subitement et brutalement révolu.

Les personnages d'arrière-plan (villageois normands, paysans, marins, mendiant, etc...) sont magnifiques à déguster aussi.

In fine, c'est paradoxal, mais c'est presque quand il en fait un peu trop, qu'il est vraiment pompeux, précieux, meringué que j'apprécie sa distinction. Comme dans le passage ci-dessous:

Chapitre II I promessi sposi a écrit:
En effet, les plus transparentes ladies que l’Angleterre présente à l’admiration du monde comme les plus purs échantillons d’une aristocratie bien conservée, n’eussent pas approché de cette femme chez qui les lignes et les couleurs avaient une légèreté, un fondu, un flottant de lueurs qu’on ne saurait rendre que par un mot intraduisible, le mot Anglais ethereal. Quand on suivait, comme un fil de la Vierge dans l’air rose du matin, l’espèce de nitescence qui courait au profil de ses cheveux d’ambre pâle jusqu’à la nacre de ses épaules, on aurait cru à une fantaisie de Raphaël, tracée avec quelque merveilleux fusain d’argent sur du papier de soie couleur de chair. Ses yeux — elle était un peu myope — étaient de ce tendre bleu de la turquoise, qui n’a pas de rayons et qui semble dormir, et ils avaient l’expression singulière et vague de ces sortes d’yeux qui n’étreignent pas le contour des choses. Ils paraissaient mats de rêverie. Ainsi Dieu ne l’avait faite qu’avec des nuances. Mélange unique de clartés sans fulgurances et d’ombres lactées, elle berçait le regard en l’attirant et très certainement elle eût produit l’engourdissement magnétique des choses vues en rêve, sans l’ardeur sanguine de ses lèvres, qui réveillait tout à coup le regard, énervé par tant de mollesses, et montrait, par une forte brusquerie de contraste, que le cœur de feu de la femme brûlait dans le corps vaporeusement opalisé du séraphin. Mme de Mendoze avait la lèvre roulée que la maison de Bourgogne apporta en dot, comme une grappe de rubis, à la maison d’Autriche. Issue d’une antique famille du Beaujolais dans laquelle un des nombreux bâtards de Philippe-le-Bon était entré, on reconnaissait au liquide cinabre de sa bouche les ramifications lointaines de ce sang flamand qui moula pour la volupté la lèvre impérieuse de la lymphatique race allemande, et qui depuis coula sur la palette de Rubens. Ce bouillonnement d’un sang qui arrosait si mystérieusement ce corps flave, et qui trahissait tout à coup sa rutilance sous le tissu pénétré des lèvres ; ce trait héréditaire et dépaysé dans ce suave et calme visage, était le sceau de pourpre d’une destinée.
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