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| Luigi Meneghello [Italie] | |
| | Auteur | Message |
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animal Tête de Peluche
Messages : 31548 Inscription le : 12/05/2007 Age : 43 Localisation : Tours
| Sujet: Luigi Meneghello [Italie] Sam 23 Avr 2011 - 20:57 | |
| - l'éditeur a écrit:
- Luigi Meneghello est une figure à part de la littérature italienne. Tellement à part que son œuvre n’a fait l’objet que de rares traductions, alors qu’elle est considérée en Italie comme « classique », à l’égal d’un Pavese, d’un Gadda ou d’un Fenoglio. Né à Malo dans la province de Vicence en 1922 ; Meneghello a émigré en Angleterre à partir de 1948, où il a enseigné la littérature italienne à l’université de Reading jusqu’en 1980. Puis il a partagé son temps et sa région natale et la Grande-Bretagne, jusqu’à sa disparition en juin 2007.
un peu plus de détail www.wikipedia.org Libera nos a malo (Editions de l’éclat, traduction de Christophe Mileschi) - quatrième de couverture a écrit:
- Libera nos a malo (« Délivrez-nous du mal ») (1963) est le roman du pays de Malo (Vénétie), des années 1920 jusqu’à l’après-guerre. Mosaïque de récits drolatiques d’une enfance italienne sous le fascisme, bribes de fictions et d’épopées autobiographiques, digressions philologiques et burlesques sur la religion, les courses de bicyclettes, l’amitié, les petites amoureuses ou la mort, le livre nous révèle une Italie disparue dont le héros est la langue. Cette langue minuscule de Malo, dont l’extraordinaire richesse vient télescoper l’italien officiel des instances de pouvoir et dire l’universalité des récits de l’enfance et du souvenir.
Une lecture qui m'aura occupé presque tout le mois, pas que ce soit trop dense ou trop compliqué mais on ne choisit pas toujours son rythme ou le moment choisit par le sommeil pour se mélanger aux pages. C'est donc par petits morceaux de cinq à dix pages que j'ai lu ce livre qui avait fait l'objet d'une soirée/rencontre organisée par la librairie Le Livre (si vous passez dans le coin, il faut y aller). C'est toujours un peu autrement de rester avec un livre sur plusieurs semaines. Courtes lectures et souvenirs dissolus d'une enfance et d'une jeunesse dans un pays. Je ne savais pas trop à quoi m'attendre mis à part l'importance et la présence de la langue différente... pas vraiment de grand choc ou de grande révélation, mais comment alors expliquer ce plaisir et cette présence assurée sur la longueur ? je ne peux pas le dire. Je pourrai seulement dire que les chroniques anecdotiques et nombreuses ne manquent ni de charme ni d'intérêt socio-historique. On revient quand même à deux choses, la seconde à travers la première. Le regard de l'auteur, le regard de l'adulte qui a traversé des années riches en événements et en mutations, en confrontations sur son pays (avec le sens du local connu), sa langue, dialecte, les lieux, les personnes, les usages, l'histoire, tout ce qui l'a construit lui et qui semble se dissoudre et qu'il observe avec un mélange de mélancolie et de détachement. Ensuite bien que ce soit une traduction a priori compliquée : - Citation :
- En dépit de l’importance majeure de l’œuvre de Luigi Meneghello dans le panorama littéraire italien, son roman le plus célèbre et le plus célébré, Libera nos a malo, paru pour la première fois chez Feltrinelli, en 1963, n’avait encore jamais été traduit en français.
Ce n’est nullement l’effet d’un oubli ou d’une distraction des éditeurs et des traducteurs : le texte pose des problèmes de transposition en français qui ont eu largement de quoi dissuader les uns et les autres. Dans cette évocation de son enfance et de sa jeunesse des années 20 aux années 60, dans le village de Malo, province de Vicense, Meneghello ne se contente pas d’avoir recours ça et là au(x) dialecte(s) de sa région, ce qui engendre déjà de belles difficultés. Bien plus : le dialecte devient un des enjeux décisifs du récit, en quelque sorte le personnage central. Il ne s’agit plus seulement de « rendre » en français des mots, expressions et tournures insolites pour un italien ne connaissant pas le dialecte de Malo ; il faut encore rendre compte de la tension entre « la langue » (l’italien), langue des livres, des idées et des hymnes, et le parler du quotidien (dialecte), langue des choses, des jeux d’enfant et de la vie que cette tension comporte. Et l'éditeur expliquait, en l'absence de celui-ci, que le traducteur s'était jeté en s'appuyant pour la cohérence sur des dialectes de chez nous avec un choix tout de même relativement réfléchi. Difficile de dire si les impressions peuvent être les mêmes qu'en langue originale. Le livre est lisible bien que parfois confus, mais c'est aussi la manière qu'à une histoire ou une idée d'en amener une autre pour mieux laisser l'autre dans un suspend sans réponse, et on sent aussi dans le développement des idées de l'auteur, ce qu'il ne manque pas de faire très explicitement, l'attachement à cette langue. L'identité, le fait que ces mots sont ceux de son monde et n'en sont pas d'autres. Avec distance, avec amour plutôt que dans le rejet du reste, un amour avec ses regrets dus au temps qui passe mais un véritable amour, complexe, en souvenirs et en nuances pour ce pays qui apparait heureux mais rude. Pour faire trop moderne on dirait que c'est un de ces livres qui interroge l'identité mais ça serait un peu vulgaire pour décrire sa saveur, sa générosité un peu triste. Je crois que c'est une fois refermé qu'on se rend compte de ce qui s'y trouve. Un beau témoignage, à la fois grand et simple (en un sens) et pesé et réfléchi. Il y a beaucoup de curés, de filles et de moteurs, mais c'est d'un monde et d'un rapport au monde qu'il s'agit. Et il est beau et même émouvant, avec en fait un rapport de cause à effet qui n'est pas sans faire remonter et remuer des souvenirs. Une table des morts les plus remarquables et quelques annexes clôturent le livre, dont décidément le fait de le terminer révèle sans twist aucun la mesure. pour conclure un mot sur la soirée et la présentation sur laquelle je n'étais revenu juste après. L'éditeur était seul pour cause d'empêchement du traducteur. Une bonne partie de la présentation a donc été consacrée à la maison d'éditions, Les éditions de l'éclat. Avec un intérêt marqué pour les philosophies et cultures méditerranéennes. Un intérêt pour le sens qui va jusqu'à rendre disponible le best-seller de la maison en lecture complète sur son site. Plus une démarche et une confiance ou un principe qu'une bravade dirai-je comme ça sur une simple impression. Tout n'a pas l'air rose pour les petits éditeurs mais c'est fascinant de les écouter et il n'est pas négligeable de rendre compte de leur engagement. C'est malheureusement un peu loin maintenant. Je crois que les copier/coller des présentations et peut-être un peu mes impressions donneront une idée du livre lui-même. Je ne pensais pas au cours de ma lecture la terminer sur cette force qui n'est pas abrupte.
Dernière édition par animal le Dim 24 Avr 2011 - 12:12, édité 1 fois | |
| | | animal Tête de Peluche
Messages : 31548 Inscription le : 12/05/2007 Age : 43 Localisation : Tours
| Sujet: Re: Luigi Meneghello [Italie] Dim 24 Avr 2011 - 12:11 | |
| extrait (p115) : - Citation :
Il y a avait en outre les vouïottes, ou chemins vicinaux, qui ne débouchent pas dans un village, mais vont pour ainsi dire rendre visite aux hameaux et aux familles des paysans ("chez les" chose ou "chez les" untel), ou finissent tout simplement au milieu de la luzerne et du tarfeuille, aux marges d'une lande illimitée de champs, fossés et cultures. Alors on reste là, sa bicyclette appuyée contre un meûrier, et l'on entend soudain les voix de millions et de millions de bestioles : le printemps tardif devient un lieu, cesse d'être une forme du temps, et depuis le centre de cet espace, si immense et si dense, le village auquel ramène cette vouïotte paraît lointain et sans importance et, pendant un moment, on ne sait plus quoi penser. | |
| | | domreader Zen littéraire
Messages : 3409 Inscription le : 19/06/2007 Localisation : Ile de France
| Sujet: Re: Luigi Meneghello [Italie] Dim 24 Avr 2011 - 13:00 | |
| Cela donne bien envie, animal, il me semble bien en avoir entendu parler par ailleurs, mais je ne me souviens plus où, peut-être bien dans 'Un Jour Un Livre'. Je note bien sûr. | |
| | | animal Tête de Peluche
Messages : 31548 Inscription le : 12/05/2007 Age : 43 Localisation : Tours
| Sujet: Re: Luigi Meneghello [Italie] Dim 24 Avr 2011 - 13:23 | |
| le livre a du avoir droit à un petit tour de presse, au moins pour son état de première traduction d'un texte tordu.
explications du traducteur et extrait sur le site de l'éditeur : www.lyber-eclat.net
forcément, pour ma génération (et celles qui ne sont pas loin), on pense aux histoires de famille, pas tant les "légendes" que ce qui fait imaginer la vie quotidienne des parents enfants, des grand-parents et de ceux dont on a entendu parler et pour lesquels on a ressenti la possibilité ou l'espoir de la proximité. C'est le rapport et le décalage voire le faussé, une part importante de ce monde.
l'extrait au dessus représente de façon flagrante l'attention et la réserve que l'auteur garde vis à vis de lui même, c'est aussi un très beau témoignage de promeneur et c'est un peu pour ça que je l'ai choisi. L'extrait n'est pas tout à fait révélateur mais les qualités sont partagées avec le reste de ce texte qui se fait plus ou moins labyrinthique à plaisir.
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| | | bix229 Parfum livresque
Messages : 24639 Inscription le : 24/11/2007 Localisation : Lauragais (France)
| Sujet: Re: Luigi Meneghello [Italie] Dim 24 Avr 2011 - 15:40 | |
| La littérature italienne, c' est un peu mon jardin. Mais Luigi Meneghello est peu traduit. J' ai lu Colin Maillard et Les Petits maitres. Je lirai Libera nos a malo...
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| | | eXPie Abeille bibliophile
Messages : 15620 Inscription le : 22/11/2007 Localisation : Paris
| Sujet: Re: Luigi Meneghello [Italie] Dim 24 Avr 2011 - 17:09 | |
| Je note aussi qu'il est comparé à Fenoglio... que je ne connaissais pas (j'ai une bonne excuse : il n'a pas de fil). | |
| | | bix229 Parfum livresque
Messages : 24639 Inscription le : 24/11/2007 Localisation : Lauragais (France)
| Sujet: Re: Luigi Meneghello [Italie] Dim 24 Avr 2011 - 21:26 | |
| - eXPie a écrit:
- Je note aussi qu'il est comparé à Fenoglio... que je ne connaissais pas (j'ai une bonne excuse : il n'a pas de fil).
Fenoglio, oui, un très bon écrivain, originaire du Piémont, comme Pavese, mais de la région de collines des Langhe. Il a participé à la Résistance, mais on ne peut le rattacher aux écrivains de cette époque... un solitaire et qui n' a pas soulevé l' enthousiasme des foules... Bien que soutenu par Calvino et que La Guerre sur les collines et Les Vingt-trois jours de la ville d' Albe soient des oeuvres singulières. Fenoglio, Landolfi... j' y pense.
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| | | Arabella Sphinge incisive
Messages : 19316 Inscription le : 02/12/2007 Localisation : Paris
| Sujet: Re: Luigi Meneghello [Italie] Mar 21 Fév 2012 - 19:49 | |
| Libera nos a malo Chroniques d’une enfance tout d’abord, dans un pays minuscule en Vénétie, dont la singularité, et l’existence même s’appuie tout d’abord sur la langue, qui n’est pas l’italien, mais une langue qui n’est parlé qu’à cet endroit et par ses habitants. Une enfance faite de jeux, de compétitions, de bagarres, de foot, de messes obligatoires. Sans télé, sans électricité, sans salles de bains. L’auteur multiplie les anecdotes, les personnages. Les souvenirs semblent affluer en vrac. Au bout d’un moment il pourrait y avoir satiété. Mais c’est là, qu’il change d’une certaine façon son fusil d’épaule, et aborde son récit d’une autre façon, y introduit le temps, qui semblait immobile et comme absent dans les souvenirs d’enfants. D’abord le temps des générations précédentes, des parents, tantes, oncles, et de l’histoire, des guerres entre autres. Et puis à partir des parents, nous entre percevons aussi le temps après l’enfance, qui non seulement change les enfants en adultes, mais qui change aussi le pays de Malo d’une manière profonde et irrémédiable. Le confort et l’abondance s’introduisent, les gens travaillent moins, les structures sociales se modifient. Les petits patrons comme le père de l’auteur n’ont plus forcement leur place dans cet univers, qui change de taille et s’uniformise, les gens quittent le pays, ceux qui restent changent d’usages. Et surtout, ce qui faisait sa spécificité, l’identité, la raison d’être de Malo, sa langue, disparaît petit à petit, emportée, effacée progressivement de la mémoire des gens, au point que ce sont les émigrés d’au-delà de l’océan, qui en deviennent presque les plus sûrs dépositaires, et les derniers fragiles et lointains remparts. Malo est rentré dans l’histoire, et l’histoire le fait disparaître subrepticement, sans crier gare. Et le pays de l’enfance disparaît donc doublement. Livre singulier par sa structure et par sa langue et son écriture, Libera nos a malo est un ouvrage à déguster à petites doses, et qui rend immortel et permanent un monde qui n’existe plus d’une façon magistrale. | |
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